Conjoncture épidémique… 2° partie
CONJONCTURE ÉPIDÉMIQUE, crise écologique, crise économique et communisation
(2° partie)
1 – Pour comprendre la crise déclenchée par la pandémie, il ne suffit pas de déterminer ce qu’est essentiellement le mode de production capitaliste (production et reproduction du rapport d’exploitation capital / prolétariat), il faut aussi et surtout déterminer ce qu’il est devenu historiquement, dans le cycle d’accumulation et de luttes qui maintenant s’achève. Il y a, d’une part, déconnexion (tendancielle) entre valorisation du capital et reproduction du prolétariat ; d’autre part, destruction (également tendancielle) de la base naturelle de l’exploitation, le milieu naturel vivant dont fait partie notre espèce. Mais dans la mesure même où le capital subsume réellement ce milieu naturel – que Marx concevait, en bon théoricien du programme prolétarien, comme le grand laboratoire des forces productives (càd des conditions objectives du travail, face à la subjectivité du travailleur collectif) – l’aspect destruction de la nature vivante est subsumé sous l’aspect déconnexion de la reproduction des deux classes du rapport d’exploitation.[1] C’est pourquoi cette nature dont l’humain reste partie apparaît comme simple environnement, dont la dégradation, même reconnue comme grave, n’engage pas directement la reproduction des classes en lutte. Pourtant, dans la crise en cours, le rapport capital / nature est impliqué.
2 – On ne peut pas comprendre la pandémie due au coronavirus en dehors de la dévastation continue de la nature terrestre par la production capitaliste. En effet, la crise écologique, pour être à la fois globale et permanente (dans les limites, bien sûr, de la reproduction élargie du capital) n’en est pas moins une production historique du développement capitaliste. Ainsi le problème qui se pose à nous, maintenant, ne pouvait pas être posé il y a un demi siècle, au début du cycle d’accumulation et de luttes en train de s’achever, en tout cas pas dans les termes de la théorie de la communisation. D’autre part, cette crise écologique a réellement bouleversé toutes les conditions dans lesquelles se produisent et propagent les virus dans l’écosystème terrestre, donc dans la population humaine : elle a notamment supprimé les vastes niches naturelles dans lesquelles les virus étaient autrefois plus ou moins contenus. Et les épidémies récentes jusqu’à l’actuelle pandémie covid-19, toutes liées à la destruction continue du milieu naturel vivant, ont prouvé empiriquement qu’il n’y a pas de barrière des espèces (1) (2), parce que l’espèce n’est pas une essence réelle, existant dans la nature, mais la formule statique de la différenciation dynamique du vivant, et parce que le passage d’un virus d’une population animale à une autre, puis à la population humaine, s’il ne peut pas se faire dans n’importe quelles conditions, est toujours a priori possible. On ne peut donc pas séparer la production du virus de sa diffusion : toutes deux sont également conditionnées par ce qu’est devenu le mode de production capitaliste.
3 – Avant d’examiner l’aspect « purement » économique de la conjoncture épidémique, il faut encore préciser les choses du côté du rapport capital / nature. Dans le discours écologiste, la notion d’environnement donne à croire, d’une part, que la société capitaliste s’étendrait à la surface du globe comme une vaste zone très différenciée de production et d’échanges, entourée de régions sauvages, d’autre part, que cette société, par l’ensemble des moyens matériels et intellectuels dont elle s’est équipée, serait désormais hors nature. Or la nature, comme milieu naturel vivant de l’humain, n’est pas du tout extérieure à la société, elle est partout subsumée sous le capital, non pas certes en position contradictoire au pôle subsumant – comme le prolétariat – mais aussi comme propriété de la classe capitaliste : càd comme réservoir de matières et d’énergie constituant la fraction constante du capital productif. D’autre part, les individus vivants qui constituent la population humaine sont eux-mêmes – bien que de façon très spéciale, par la médiation d’une activité pensée – nature, alors même que le rapport d’exploitation les dresse en bloc contre la nature dite extérieure : à tort, puisque sous le capital l’activité humaine et le rapport de l’espèce à la nature n’est rien d’autre que la production capitaliste. Cette nature n’est donc pas moins présente au cœur des mégalopoles, bétonné par la rente foncière et le capital fixe, que dans les régions, désertes ou non mais de toute façon pas sauvages, d’où sont extraites les matières et l’énergie nécessaires à la production. Elle n’est pas moins présente dans les individus vivants, hommes et femmes, qui font corps avec la force de travail exploitée : dans ce matériel humain dont le capital se soucie autant que du milieu naturel vivant, càd juste assez pour ne pas l’user totalement trop vite. Laissons donc l’environnement, la décroissance, et le développement durable aux réformateurs du capital.
4 – Dire que la lutte de classe du prolétariat est désormais surdéterminée par le fait que la reproduction élargie du capital menace à terme celle de l’humanité (3) n’est pas faire du prolétariat un avatar de l’être générique venant enfin communiser le monde à titre humain. (4) Ce n’est pas charger la classe révolutionnaire du mode de production capitaliste d’une autre « tâche » que celle de le détruire et, par là même, de communiser le monde – tâche qu’elle accomplit déjà, de toute façon, dans la mesure où elle tend à produire son existence de classe comme contrainte extériorisée dans la classe qui l’exploite. Dire que la poursuite de l’accumulation capitaliste met en jeu l’existence même de l’humanité, c’est seulement reconnaître la réalité de la crise écologique et le fait que les luttes du prolétariat, jusque dans la conjoncture épidémique, sont affectées ou modifiées par la destruction continue de la nature. Certes, le prolétariat se bat seulement pour lui-même, dans et contre les conditions d’existence toujours plus précaires qui lui sont faites ; mais la pollution généralisée, le détraquement du climat, et toutes les catastrophes induites (qu’elles soient dites naturelles ou industrielles) font partie de ces conditions. D’ailleurs, les différentes classes de la société capitaliste ne sont pas égales face à la dévastation de la nature ; et les prolétaires, du fait même qu’ils travaillent ou habitent dans les zones les plus dévastées ou à risque, en prennent plus que leur part. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que des pollutions répétées, des ouragans inondant toute une ville ou toute une région côtière, des usines chimiques voire des centrales nucléaires qui explosent puissent être à l’origine de luttes auxquelles participent des masses d’ouvriers. En Chine, un tiers des « incidents de masse » (impliquant mille personnes ou plus) enregistrés en 2018 sont imputés à des problèmes écologiques ; qu’en est-il dans d’autres pays et sur d’autres continents ? Quelle que soit la réponse – qui ne sera de toute façon pas donnée par les statistiques des États mais par la lutte des classes à l’échelle mondiale – les communistes auraient tort de confondre en bloc les luttes classées « écologiques » avec des luttes spécifiques à la classe moyenne salariée.
5 – Des Fondements au Capital, Marx développe l’idée que le capitaliste individuel ne prend d’ordinaire vaguement conscience de l’origine de son profit que dans le moment de la production pour l’oublier dans celui de la circulation et surtout dans celui de la reproduction élargie de tous les capitaux (si tant est qu’il s’en soucie). Dans le livre I du Capital, au chapitre 23, à propos des effets de la guerre civile américaine sur l’industrie cotonnière britannique, il observe pourtant que la compréhension du capitaliste s’améliore durant les crises. En effet, celui-ci en vient alors à revendiquer la propriété de la force de travail formée et disciplinée que représentent ses ouvriers jetés à la rue, par ex en s’opposant à leur éventuelle émigration. Une telle analyse peut nous aider à comprendre la restructuration qui s’organise aujourd’hui, en pleine pandémie, alors que les gouvernants font l’éloge de nos braves travailleurs et que les industriels rappellent qu’on va d’abord rouvrir les usines provisoirement fermées. Quelle que soit donc l’autonomisation des différentes fonctions du capital au-delà de la production immédiate de survaleur, la restructuration tentée par la classe capitaliste va remettre en première ligne le capital productif. Dans le monde entier, sur le mode fractal (càd en reproduisant à chaque niveau spatial les divisions fonctionnelles du travail social et notamment du travail productif de survaleur), la restructuration précédente, continuée au-delà de la suppression des « rigidités » fordistes, a tendu à déconnecter la valorisation du capital, s’échappant par le haut, de la reproduction du prolétariat, s’échappant par le bas. (5) C’est cette tendance à la déconnexion, devenue contre-productive, qui est déjà entrée en crise en 2007-2009, le défaut des prolétaires surchargés de crédit à la consommation devenant dettes non remboursables des grandes banques, renflouées par les États dominants qui, du coup, se mettaient eux-mêmes en péril en monétarisant massivement les dettes. Et la déconnexion participe encore à la crise en 2020, car depuis dix ans les différentes fractions de la classe capitaliste mondiale n’ont pas cherché à construire un compromis néo-fordiste ou néo-social-démocrate avec le prolétariat, comme le souhaitent les démocrates radicaux ! (6) Sous des formes différentes d’une zone à l’autre, elles ont plutôt poussé à l’extrême la segmentation et la précarisation de la classe tout en renforçant la division de genre et la racisation. (7)
6 – Ni la segmentation et la précarisation ni la division de genre et la racisation du prolétariat ne sont des stratégies manipulatoires de la classe capitaliste ; ce sont des processus inhérents à son activité comme classe dominante exploiteuse, qu’elle retravaille au coup par coup et pas seulement au niveau politique de l’État. Mais quand une pandémie vient salement perturber une reproduction élargie du capital qui n’était déjà pas très dynamique, une grande transformation s’impose. La restructuration capitaliste doit donc cette fois reconfigurer la mondialisation en combinant deux impératifs a priori peu conciliables. (8) D’une part, un approfondissement de toutes les fractures territoriales qui font des États des mosaïques juxtaposant des zones globalement performantes, des zones de production intermédiaire souvent en sous-traitance, et des zones réserves de sous-prolétaires. D’autre part, une relocalisation jointe de la valorisation du capital et de la reproduction de la force de travail selon de nouvelles modalités d’exploitation et dans des espaces non nationaux qui restent à construire. Donc, d’une part, une exploitation plus fluide et très aggravée, notamment pour les femmes et les racisé-e-s ; d’autre part, une intégration renforcée de la classe exploitée. D’une part, une accumulation se bouclant toujours sur un espace mondial, car pour eux la mondialisation est un acquis ; d’autre part, une autonomie relative des différentes bases nationales ou continentales d’accumulation. C’est en effet problématique, comme le dit TC, mais nous n’avons pas à penser une communisation par impossibilité du capital. Outre qu’une telle supposition est fausse, parce qu’elle se fonde sur une vision objectiviste du capital parvenant à une limite absolue, la classe capitaliste s’est jusqu’à présent montrée assez « créative » pour relancer l’accumulation. De toute façon, il n’y a pas de limite absolue au développement du capital : ni du côté du prolétariat (l’exploitation est virtuellement infinie) ni du côté de la nature (sa destruction n’est que tendancielle). Il n’y a pas non plus de divisions internes au capital qui puissent a priori empêcher l’une de ses fractions d’imposer aux autres la solution qu’elle a d’abord élaborée pour son propre compte. Enfin, le prolétariat n’est pas révolutionnaire par essence, comme dernière incarnation de l’être générique (càd universel, libre, et conscient) propre à tout communisme spéculatif : s’il se dégage des luttes interclasssistes avec la classe moyenne salariée, ce ne sera donc pas pour communiser le monde à titre humain. (9)
7 – Si l’on reconnait donc, d’une part, qu’il n’y a pas de stratégie contre-révolutionnaire toute prête du côté capitaliste, d’autre part, qu’il n’y aura pas plus de communisation à titre humain que par impossibilité du capital, il faut réintroduire dans le raisonnement tout ce dont on avait fait plus ou moins abstraction jusqu’ici, en se maintenant au niveau du schéma simple à deux classes de la Critique de l’économie politique. À savoir toutes les classes, les femmes, les racisé-e-s, plus tous les États dominants et toutes les idéologies politiquement actives. Quant au premier facteur, si le prolétariat peut supprimer toutes les classes en agissant strictement comme classe (même quand il produit enfin sa propre existence de classe comme contrainte extériorisée dans le capital), le « sujet » communisateur (10) ne peut pas être un prolétariat homogène, surtout pas réduit à son noyau dur productif de survaleur. Il ne peut être, autour des fractions communisatrices du prolétariat, qu’un regroupement de fractions radicalisées des autres classes d’en bas (sous-prolétariat des bidonvilles, petite paysannerie pauvre, couches moyennes prolétarisées). Quant au deuxième facteur, il y a des comptes à régler entre les femmes et les hommes – notamment à l’intérieur du prolétariat – et nulle proclamation d’unité a priori de tous les exploité-e-s n’empêchera que les mecs défendant la domination mâle et la virilité ouvrière soient attaqués pour ce qu’ils font, même s’ils sont eux-mêmes discriminés comme « pas clairs ». Et ce troisième facteur, la racisation, construction de segmentations raciales articulées aux deux contradictions constitutives de la dynamique du capital (bien que pas au niveau des classes et des genres), conduit à une première reformulation de la question de la communisation. En effet, si le prolétariat n’est produit que dans le mouvement même où il est segmenté, sa situation commune est identique à ses divisions. Pour s’unir, les prolétaires doivent briser le rapport dans lequel le capital les rassemble, dans chaque pays comme au niveau mondial. La question fondamentale de la communisation telle que TC la posait vers 1980 – comment une classe, agissant strictement en tant que classe, en vient-elle à supprimer toutes les classes ? – devient donc : comment les luttes des ouvriers, des femmes, des racisé-e-s, d’abord indépendantes les unes des autres, en viennent-elles à s’attaquer aux rapports capitalistes (division du travail, échange, propriété, séparation public / privé, racisation) et, du coup, à s’unifier dans un mouvement communisateur ?
8 – Cette première reformulation de la question fondamentale n’est pourtant pas suffisante, parce qu’elle n’intègre pas l’activité de ceux d’en haut. Le quatrième facteur à considérer est donc la concurrence, durcie dans la crise, entre États et blocs dominants, chacun luttant pour imposer aux concurrents sa propre solution capitaliste au problème de la restructuration du système. À ce niveau global des conflits intercapitalistes, on ne compte que trois grands « acteurs » : les États-Unis, avec leur bloc nord-américain et l’appui du Brésil au sud du continent ; l’Europe qui, politiquement et même économiquement se défait, pour une grande part sous l’action continue de la superpuissance américaine ; et la Chine, devenue grande puissance industrielle, devant l’Inde. Mais la Chine ne peut conquérir l’hégémonie qu’en intégrant une large part de sa paysannerie à sa production industrielle pour le marché mondial tout en achevant de rattraper son retard technologique sur les États-Unis. L’Europe, qui ne s’est pas renforcée en s’élargissant jusqu’aux frontières de l’ex-URSS et qui vient de perdre la Grande-Bretagne, n’est pas en train de se recentrer autour de son noyau dur initial et peut-être même pas autour de la seule Allemagne. Et les États-Unis, accrochés à leur propre bloc nord-américain depuis leur victoire sur le bloc capitaliste d’État eurasiatique, mènent une politique extérieure agressive mais plus isolationniste qu’intégratrice. Il ne s’agit pas ici de poser en modèle à reproduire l’intégration du monde prétendu libre sous domination américaine à l’époque du fordisme, intégration toute relative qui impliquait à la fois une concurrence très dure au centre du système et des guerres sanglantes à la périphérie. Il s’agit seulement de montrer que la restructuration qui cette fois s’impose à la classe capitaliste n’est pas facile à produire, même de son propre point de vue, et que plus elle sera difficile à produire – du fait de la radicalisation de la résistance prolétarienne – plus les différentes fractions capitalistes essaieront de nous entraîner dans leurs conflits internes. Si la radicalisation prolétarienne dépasse le simple durcissement des luttes revendicatives pour s’approcher du point de fusion de toutes les luttes partielles en lutte générale et potentiellement finale, il y aura donc un moment critique – sans doute court – où le risque d’une guerre mondiale sera maximal.
9 – Enfin, n’oublions pas – cinquième facteur – que la lutte des classes se mène jusqu’au bout sous des formes idéologiques, celles où prolétaires et capitalistes en prennent conscience. (11) Et dans la grande bataille qui vient, des idéologies affectant le prolétariat comme le démocratisme radical, l’expropriation du capital pour la gestion ouvrière, voire la communisation comme néo-programme activiste vont jouer un rôle aussi important que celles, mondialistes ou nationalistes, des différentes fractions de la classe dominante exploiteuse. Certes, dans le champ de ces idéologies exerçant une action sur les luttes du prolétariat, le réformisme démocratique radical s’oppose aux idéologies révolutionnaires, comme l’autogestion généralisée ou la communisation à la mode activiste. Mais la base commune à ces trois visions politiques est qu’elles ignorent la rupture nécessaire dans et contre les limites inhérentes aux luttes des gens d’en bas : la production de l’appartenance de classe ou de genre ou de race comme contrainte extériorisée dans la classe capitaliste. Autrement dit, on n’est pas fondé à raisonner en termes de transcroissance des luttes immédiates à la révolution ; la rupture communisatrice passe par l’auto-explication collective des gens d’en bas dans les assemblées de lutte et consiste dans la production d’un moment où il apparaît à tous et toutes que si nous sommes encore les prolétaires, ou les femmes, ou les non-blancs que nous ne voulons plus être, c’est uniquement parce que nous n’avons pas encore détruit le capitalisme. Comment donc la rupture, qui peut être annoncée par bien des écarts dans les différentes pratiques de lutte, est-elle à la fin produite ? Nous savons ce qu’est le moment actuel : déconnexion de la valorisation du capital d’avec la reproduction du prolétariat, d’une part ; conjoncture épidémique de la crise économique et de la crise écologique, d’autre part. Nous savons que la communisation commence par l’action de masses de prolétaires s’emparant, juste pour survivre et lutter, d’éléments du capital : de produits de consommation, de moyens de production, et bien sûr aussi d’armes. Il nous reste à comprendre le processus qui mène – peut-être – de la crise à la rupture.
10 – Aussi loin qu’on s’avance dans l’anticipation de la rupture, on ne peut raisonner que sur les luttes effectives dans leurs limites effectives. Limites inhérentes et donc pas fixées normativement de l’extérieur, que ce soit par une organisation de classe permanente ou par des groupes activistes intervenant au coup par coup là où pour eux ça bouge. Et dynamique produite sous la forme d’écarts aux limites inhérentes des luttes, dans et contre ces limites, qui sous des formes très diverses se ramènent toujours à la limite générale de l’action en tant que classe. Ainsi en ce début mai 2020, alors que la pandémie a cessé de s’étendre – sans qu’on puisse raisonnablement prévoir une seconde vague – (12) et que même le gouvernement français va déconfiner – tout en maintenant l’interdiction des rassemblements – lutter pour des équipements de protection et des soins efficaces est déjà en retrait par rapport aux besoins du moment. Il y a eu dans de nombreux pays des milliers de morts et il y a encore des masses de gens à tester et soigner, dans les conditions très mauvaises qui sont plus ou moins celles de tous les systèmes sanitaires nationaux. De plus, le confinement dans les quartiers et logements prolétaires a fait des ravages et peut-être autant que la réunion des travailleurs dans les entreprises maintenues en activité. Enfin, le personnel soignant, surtout dans les hôpitaux, a cohabité avec le virus au moment où il était le plus virulent et peut donc lui-même avoir besoin de tests et de soins. Mais l’écart, dans cette limite d’une exigence de protection et de soins, consisterait plutôt dans un refus du retour à la normale – très aggravée – de l’exploitation en général. Un tel refus pourrait se manifester, d’une part, dans le processus de production immédiat de survaleur, contre la compression constante des salaires réels et la précarisation continue du travailleur collectif, qui est en même temps intensification et prolongation de la journée sociale de travail ; d’autre part, au niveau de la reproduction du prolétariat, contre le paiement des loyers qui représente et de loin le coût le plus important pour les ménages prolétariens.
11 – Comment sort-on maintenant du confinement dans le monde, où un tiers de la population humaine a été confinée à des degrés divers ? En France, le gouvernement s’est donné les moyens, par la loi sur l’état d’urgence sanitaire votée le 23 mars 2020, de confiner, déconfiner, et reconfiner à volonté jusqu’au 21 avril 2021 ; de plus, alors même que la liberté de circulation individuelle est rétablie à partir du 11 mai 2020, l’état d’urgence est prolongé jusqu’au 10 juillet. Il faudrait savoir si ce type de dispositif légal existe en d’autres États et, si oui, dans quelle mesure il interdit les rassemblements, càd en fait les manifestations. Il se peut qu’il n’existe sous cette forme de loi spéciale qu’en France, où l’État bourgeois n’a jamais été franchement libéral, et que d’autres États disposent de moyens plus souples pour maîtriser les colères des gens d’en bas. En tout cas, un tel dispositif est régi par une logique très politique et bien des gens l’ont compris, même des scientifiques, s’ils sont un peu critiques de la science mainstream et de la démocratie réelle, càd de la dictature du capital. Mais la liberté dont nous, prolétaires et communistes, avons besoin n’est pas la liberté formelle de circuler qu’ont réclamée des masses de gens protestant contre le confinement au début de ce mois dans de nombreuses villes du monde. (13) C’est celle de nous battre tous et toutes contre les conditions d’exploitation très aggravées qu’ils veulent nous imposer ; et nous la prendrons sans attendre que les gouvernements nous l’accorde.
12 – On peut aussi considérer l’autre aspect, « purement » sanitaire de la gestion politique de la pandémie. En effet, tous les discours officiels paniquants sur « l’ennemi invisible » ont été commandés par ce qu’on pourrait nommer le complexe scientifico-industriel. Dans ce complexe, auquel participent tous les grands États, l’industrie pharmaceutique, très concentrée au niveau mondial, est le noyau dur. Elle détermine toutes les politiques de « santé publique » – entre guillemets, car le capital se fout royalement de notre santé. Avec le soutien financier de la Sécu (là où l’asssurance maladie n’est pas encore tout à fait privatisée), cette industrie produit des médicaments inefficaces (rendant la maladie chronique) et souvent nocifs. En même temps, elle promeut la vaccination généralisée, dont l’efficacité n’a jamais été démontrée mais dont les dangers sont scientifiquement prouvés. Il n’y aura sans doute pas de vaccin anti-corona et si l’on en produit un, ce nouveau vaccin ne sera pas moins inefficace et nocif que les précédents. (14) C’est ça, le bousillage du matériel humain. Il est objectif en tant qu’effet structurel de la production capitaliste, car toute industrie en position de consolider ses surprofits le fait, pour la plus grande gloire du Capital.
13 – La pandémie de coronavirus est terminée, mais nous ne sommes sans doute pas sortis de la conjoncture épidémique, à la fois parce que les États ne vont pas se priver facilement de l’avantage de mesures coercitives apparemment sanitaires et parce que d’autres épidémies peuvent succéder à celle due au corona, causées par un virus déjà connu ou par un virus émergent. La crise économique en cours aboutira soit à une restructuration supérieure de la production capitaliste, soit à une rupture communisatrice dans les luttes du prolétariat. Par contre, sauf si nous allons vers une rupture à court terme et si la communisation l’emporte sur la contre-révolution capitaliste, la dévastation de la nature continuera en ce 21° siècle. En tout cas, les communistes n’ont pas à raisonner en fonction d’un effondrement à venir du système, qu’il soit d’ordre économique ou d’ordre écologique. Le communisme n’est ni un idéal ou un programme à réaliser ni une course à la révolution pour éviter la fin du monde, mais le mouvement réel qui tend à supprimer les conditions sociales existantes.
FD
11 mai 2020
Notes
1 Voir Corona Capital, sur Dndf.
2 Dans la partie 1 de Conjoncture épidémique, thèse 2, il est question de « barrières naturelles » limitant la circulation des virus ; il faut lire « niches naturelles », car la nature est différenciée mais non cloisonnée.
3 Conjoncture épidémique, partie 1, fin de la thèse 5.
4 L’être générique, c’est l’Homme abstrait, le sujet-objet de la construction spéculative du communisme : voir Marx, Manuscrits de 1844.
5 Le thème de la déconnexion est apparu dans le travail de TC avant la crise de 2007-2009 mais il a été développé dans l’analyse de cette crise.
6 Voir Bihr, Trois scénarios … sur le site Alencontre.
7 Sur la division de genre, voir TC n°23. Sur la racisation, TC n°26.
8 Voir TC, La Cigarette sans cravate, pp 100-101.
9 Voir Le Ménage à trois de la lutte des classes, sur le site d’Hic Salta.
10 Voir la critique du sujet dans Tel quel, n°24 de TC.
11 Marx, Préface à la Contribution, 1859.
12 https://www.facebook.com/minotte.degun.10/posts/236850827601940
13 Voir The Great Awakening, sur you.tube.
14 Voir https://www.aimsib.org Vaccin anti-covid-19 et immunité de groupe, c’est non et encore non.
Juste une interrogation liée à tout ce qui s’écrit au sujet du lien entre Mode de Production Capitaliste et développement des pandémies, depuis le Moyen âge. J’ai peu trouvé de références à un passé plus lointain…
James C. Scott, dans “Homo Domesticus”, fait commencer les catastrophes épidémiologiques dans l’humanité au début du Néolithique, peut être en Mésopotamie… donc bien avant le développement du MPC, dès les début de l’invention de l’élevage, dès le début du travail et de la valeur.
Le paragraphe a un tire qui résume assez bien ce propos :
“Le camp de regroupement plurispécifique du Néolithique récent: une véritable tempête épidémiologique.” Il parle même de la possibilité que la moitié de la population ait été emportée….
La thèse #12 contient des énormités dignes de la pire propagande anti-vaccins du type “elle [Sécu] promeut la vaccination généralisée, dont l’efficacité n’a jamais été démontrée mais dont les dangers sont scientifiquement prouvés”. Je suis surpris que DNDF laisse passer ce genre de “prose”…
On n’est pas là pour faire la police à chaque phrase mais cette partie du texte nous dérange beaucoup aussi….
Entre autres, il y a des “preuves scientifiques” de la nocivité de la vaccination comme il y en a beaucoup de son efficacité vitale, de même qu’il y a de vrais arguments scientifiques en faveur du Bernard Tapie de la virologie marseillaise, presque autant que d’arguments qui en dénoncent la démarche non scientifique….La “Science” n’est pas…. une science exacte et ça n’est pas ici qu’on va reprendre les débats pour ou contre l’homéopathie…
Je rejoins la position de Patlotch , ici ….sous le post “blog Carbure”
Bon, ça critique enfin. Tant mieux, même si ça n’est pas sur l’essentiel !
Je m’attendais à ce qu’on m’attaque sur ce point précis de la mise en cause de la vaccination, qui n’est vraiment pas centrale dans mon argumentation, mais j’ai tenu à préciser ma position parce que j’ai lu chez mes camarades communistes trop de petites phrases qui laissaient entendre que la vaccination et la science en général sont au-dessus de toute critique. Il serait temps que les communistes comprennent que la critique de la science n’est pas une spécialité mysticoïde ou créationniste et qu’il y a même une critique, interne, scientifique de la science qui se fait sous le capital. Je conseille donc à tous les gens qui voudraient m’attaquer sur cette question d’aller d’abord explorer un peu le site de l’Aimsib et les 5 livres sur la vaccination de Lorgeril.
PM a commis une petite erreur de lecture : ce n’est pas spécialement la Sécu qui promeut la vaccination généralisée, bien qu’elle participe à cette promotion, mais l’industrie pharmaceutique, dont la propagande, ouverte ou insidieuse, est bien plus forte. Quant à Raout, qui s’est fait mousser en Savant de Marseille, je suis d’accord avec PP – et avec Lorgeril de l’Aimsib – pour dire que sa démarche est peu scientifique, mais il a eu le mérite de tester des masses de gens au moment où ils le demandaient. Enfin, quand je parle de dangers de la vaccination scientifiquement prouvés, j’entends bien, comme PP, que la biologie n’est pas une science exacte, mais les preuves scientifiques de ses dangers se trouvent justement sur le site de l’Aimsib et dans les livres cités plus haut. On peut d’ailleurs critiquer les analyses faites sur le site de l’Aimsib et sur le blog de Lorgeril.
À part ça, j’invite les camarades qui discutent sur Dndf à lire toute la 2° partie de “Conjoncture épidémique” (les 13 thèses et pas seulement la 12) et à me critiquer sur le fond. Et s’ils pensent que c’est de la merde, qu’ils aient le courage de le dire.
FD
FD, tout à fait d’accord sur le fait qu’il y a une (de multiples, en fait) critique interne à la science, interne au capital, ce qui est entre autre une preuve de bonne santé. Je suis moins sûr qu’il faille que les communistes prennent parti pour l’un ou l’autre camp… Les ennemis de nos ennemis ne sont pas pour autant des amis!
Et, personnellement, autant je suis intéressé par tous ces débats scientifiques, autant je crains beaucoup les raccourcis du genre “c’est l’intérêt de l’industrie pharmaceutique”, argument qui peut avoir des fondements souvent mais qui sert aussi à abréger un peu vite les débats….
C’est un des arguments qui permet de défendre l’homéopathie, par exemple, sous prétexte qu’elle ne rapporte pas grand chose, ce qui est faux d’ailleurs!
A part cela, je continue de lire ton texte et je ne pense pas du tout que ce soit de la merde…..
FD a raison de demander que son texte soit critiqué “sur l’essentiel”, et il y a deux façons au moins de le faire :
1) du point de vue de la théorie de la communisation existante, dont il propose une refondation sur la base de la version de Théorie Communiste
2) d’un point de vue critique de la théorie de la communisation dans son ensemble, c’est-à-dire critique de la théorie de la révolution, et plus particulièrement de la théorie du prolétariat (cf Charrier, La Matérielle : Fin de la théorie du prolétariat, 2002-2006, dont FD ne parle pas). Point de vue qui est le mien
concernant 1), une phrase clé est en bas de la Thèse 7 :
« La question fondamentale de la communisation telle que TC la posait vers 1980 – comment une classe, agissant strictement en tant que classe, en vient-elle à supprimer toutes les classes ? – devient donc : comment les luttes des ouvriers, des femmes, des racisé-e-s, d’abord indépendantes les unes des autres, en viennent-elles à s’attaquer aux rapports capitalistes (division du travail, échange, propriété, séparation public / privé, racisation) et, du coup, à s’unifier dans un mouvement communisateur ? »
comme je l’ai dit dans ma critique chez dndf de la 1ère partie*, on n’est pas très loin de la critique interne que je faisais à la théorie de la communisation en 2014, et par conséquent, je vois mal comment TC pourrait admettre en 2020 ce qu’il a refusé en 2014, sauf si ça l’arrange de le faire du fait qu’il devra bien se prononcer un jour sur le rapport humanité-capital-vivant, et que l’intégration de cette “écologie communiste radicale” (pour le dire simplement) peut avantageusement pour lui partir de la critique de FD, procédé familier à TC (par ex “Le sexe sans excès” 23 janv. 2014 – Quelques réponses à Amer Simpson et Patlotch” fonctionnait méthodologiquement comme ça)
* en passant FD est gonflé de dire “ça critique enfin”, car j’ai également fait des remarques ici le 18 avril, qu’il a compris de travers comme un appel du pied
https://patlotch.forumactif.com/t240-ecologie-etat-capitalisme-vert-et-coronavirus#3384
“Ce dont je parle pas n’existe pas”, vieille ficelle à laquelle nous sommes habitués
toutefois, une telle méthode serait pour TC à double tranchant. En effet, du point de vue même de TC, je dirais que ce texte est mauvais, ré-exposition caricaturale voire par endroit risible des thèses de TC, perdant en chemin ce qu’on peut considérer, depuis une dizaine d’années, comme un plus grand soin “dialectique” à l’exposition, une complexification du schéma, une meilleure écriture. Et FD va se heurter là aux dernières considérations insistantes de RS sur l’idéologie de la communisation, son programmatisme, et récemment « l’idéologie du “prolétariat en tant que tel”
voir https://patlotch.forumactif.com/t108-sur-l-interclassisme-un-renversement-theorique-de-perspective-et-3-debats-en-1#3628
FD croit s’en préserver, vis-à-vis des activistes (thèse 9) en donnant comme ailleurs à TC des gages grossiers de sa fidélité (c’est pourquoi je pense que FD = François Danel auteur de « Rupture dans la Théorie de la Révolution », considéré dans le milieu comme excessivement favorable aux seules thèses de TC)
concernant 2) je pense que la tentative de FD est vouée à l’échec pour des raisons déjà exposées, et que TC aurait bien tort, en se contentant de la critiquer, de penser se débarrasser du problème de fond, le rapport humanité-capital-vivant et sa compatibilité, ou non, avec le schéma communisateur
quand FD aboutit, en thèse 13 à :
« La crise économique en cours aboutira soit à une restructuration supérieure de la production capitaliste, soit à une rupture communisatrice dans les luttes du prolétariat. Par contre, sauf si nous allons vers une rupture à court terme et si la communisation l’emporte sur la contre-révolution capitaliste, la dévastation de la nature continuera en ce 21° siècle. »
dont seul le dernier membre de phrase est certain, le binarisme de son alternative est d’un niveau de déterminisme pas piqué des vers de terre, éliminant toute autre perspective, soit pour sortir du capitalisme autrement que selon le schéma communisateur, soit d’un chaos qui n’est pas réductible aux idéologies de l’effondrement ou de la collapsologie. Encore cette façon, critiquant ce qui est le plus facile à critiquer, de croire qu’on va se débarrasser d’un questionnement
pour le reste, il y aurait pas mal de choses à relever, mais ce n’est pas mon “boulot”, et je ne doute pas que TC va s’y coller avec le malin plaisir, qu’on lui connaît, d’en rajouter, pour focaliser sur quelque chose qui du point de vue de la perspective communiste est tout sauf essentiel
Je persiste dans mes questionnements, même si j’ai bien noté les appels à une critique plus générale de FD. L’ensemble du texte me parait très intéressant, très proche des thèses défendues par ailleurs chez dndf (et bien sur à TC) et qui propose une refondation complète de la théorie de la communisation en y intégrant les concepts de “nature”, pour dire vite. J’ai la sensation tout de même que la notion de “destruction” du biotope naturel de l’espèce n’est pas tout à fait nouvelle, sans remonter jusqu’à “Espèce humaine et croûte terrestre” de Bordiga. La précipitation des événements actuels rendent cependant indispensable de les intégrer à l’ensemble du corpus théorique…. A voir et à suivre.
Je rejoins Patloch (dont je ne révèlerai pas ici l’identité présumée ou fantasmée, moi…) sur la faiblesse qui consiste à réduire à deux scénari la sortie de crise.
Mais je voudrais encore insister sur un désaccord profond autour de ce qu’on pourrait résumer comme le “cynisme de la classe dominante”. Je ne crois pas UNE SECONDE que celle ci se fout de notre santé. Notre santé est VITALE pour le capital et c’est pour cela qu’ils sont si emmerdés: il faut faire repartir la production mondiale de surtravail mais, “en même temps”, on ne peut pas risquer de détruire trop de travail vivant en le faisant trop vite….
Du coup, les deux classes en confrontation dans la conjoncture épidémique (belle formule!) sont pour le moment tétanisées, polarisées, chacune avec ses intérêts propres, sur la survie PHYSIQUE des prolétaires.
INTÉGRER LE RAPPORT HUMANITÉ-CAPITAL-NATURE
À LA THÉORIE DE LA COMMUNISATION
N’EST PAS UN LONG FLEUVE TRANQUILLE
@pepe
« Je rejoins Patloch (dont je ne révèlerai pas ici l’identité présumée ou fantasmée, moi…) »
d’aucuns ont cru voir jadis, chez moi, une sorte de flic du milieu, en termes dont on les désignait sous Staline, d’autres naguère un délateur, ou plus simplement quelqu’un qui regarderait le doigt pas la lune. Je me contrefous de connaître l’identité de FD pour l’état-civil, c’est d’évidence lui qui s’en préoccupe, mais pas de faire le lien entre deux auteurs aux mêmes initiales quand cela expliquerait d’où ils parlent, sur le plan théorique. Ce n’est pas essentiel, mais important pour comprendre le TCéisme exacerbé de l’auteur, vu son objectif qui, du strict point de vue de la théorie de la communisation, mérite peut-être une plus grande ouverture, ou adresse ? Sinon c’est une simple leçon à TC, qui appréciera
la remarque que j’ai faite quant à “qui est FD ?” se rapporte au nom du signataire d’un livre considéré comme déterminant dans l’histoire écrite de la théorie communiste et de la communisation “autour de 1968”, “Rupture dans la théorie de la révolution, Textes 1965–1975”, à preuve, Senonevero l’a fait rééditer chez Entremonde
https://entremonde.net/rupture-dans-la-theorie-de-la
très proche des thèses de TC, par quelqu’un qui n’en était pas membre, et a expliqué ses raisons de ne pas participer à Meeting, en gros la présence des activistes
“Un “Meeting Permanent” ! Sans Blague ?” – F.D. Meeting 2004
https://libcom.org/library/un-meeting-permanent-sans-blague-fd
du fait de son effacement depuis ce livre et ce texte en 2004, mais du contenu des deux parties de “Conjoncture épidémique…”, il est légitime et non anodin de se poser la question d’un même auteur, car la réponse éclairerait la lecture, pour les anciens malvoyants comme pour les petits nouveaux soucieux de ne pas se faire embarquer, dans une barque qui prend l’eau
rapporter mon interrogation à un “fantasme” renvoie étrangement à ma personne, alors que n’importe qui voit bien que ces cachotteries et cette mascarade n’appartiennent qu’au petit milieu de l’entre-soi, avec ses codes, ses initiales pour initiés, ses “anonymes” à la petite pelle etc.
une immaturité théorique s’exprime encore parfois des adultes d’un certain âge, peut-être parce qu’au fond, ils ont toujours été, en même temps, infantiles et déjà vieux. Rien de leurs gamineries actuelles ne les rajeunira
mon intervention est précisée et complétée, avec les liens de l’historique, ici
https://patlotch.forumactif.com/t21-critique-du-concept-de-revolution#3699
C’est très agréable d’être critiqué, même quand on sait que le plus dur de la critique reste à venir, du côté de TC. Je commence par répondre aux critiques de PP, puis je passe à celle de QVS.
À PP : Sur ton post d’hier soir, nous sommes d’accord, PP, pour reconnaître qu’il y a une et même des critiques internes à la science qui se fait sous le capital ; et nous le sommes aussi pour dire que les communistes n’ont pas à prendre parti pour l’un ou l’autre camp. En faisant référence au travail de l’Aimsib, je ne prends nullement parti pour l’Aimsib contre Raout, je signale qu’il existe un travail scientifique sérieux, critique non seulement de la vaccination généralisée mais de la science médicale en général. (On peut lire sur le site de l’Association la présentation qu’elle fait de son projet : cette présentation en montre les limites autant que l’intérêt). Quant à la puissance de l’industrie pharmaceutique, elle ne s’exerce que dans le cadre du système scientifico-industriel (qui comprend toute la recherche, sur fonds d’État ou privés), mais cette puissance est en général sous-estimée ou – ce qui revient au même – imputée à l’activité maléfique de ses lobbyistes et non conçue comme fonctionnelle au système.
Sur le post de ce matin, l’idée d’une destruction possible de l’écosystème terrestre par la production capitaliste n’est certes pas toute neuve ; il faut juste préciser qu’elle n’a pas été produite seulement du côté communiste (Bordiga, Camatte, etc) mais aussi du côté écologiste radical (Bookchin, Zerzan, etc) et pas du tout par TC. D’autre part, malgré ce que dit Patlotch sur un éventuel chaos prolongé, qui ne serait de toute façon pas une sortie de crise, je ne vois effectivement pas d’autre issue capitaliste qu’une restructuration supé-rieure de l’exploitation, problématique, certes. Enfin, quand je dis que le capital se fout de notre santé (thèse 12), j’entends bien qu’il s’en occupe beaucoup mais, comme je l’ai dit avant (partie 1, thèse 5 + partie 2, thèse 3), seulement pour préserver autant que possible la force de travail, seulement avec ce souci de ne pas user le matériel humain totalement trop vite. Ça n’est pas tout à fait l’image que la santé publique, cette institution et cette idéologie, projette de son activité.
À QVS : Bravo, Patlotch ! Tu as deviné – ça n’était pas trop dificile – que FD est bien le François Danel qui a signé la présentation de “Rupture”. Dans le débat présent sur Dndf, je n’ai pas signé en toutes lettres, parce que ça n’est pas l’usage et parce que je n’aime pas débattre « en tant que ». De plus, je n’ai pas cherché du tout à donner à TC des gages de ma « fidélité », ni par rapport au prolétariat classe révolutionnaire ni par rapport aux activistes, pour la bonne raison que je n’ai aucune espèce de foi – ni en TC, avec qui j’ai fait un bout de chemin de 97 à 04 sans jamais appartenir au groupe, ni même en la communisation comme nouvelle idéologie radicale du prolétariat. Dernier point de méthode : je n’ai pas répondu à ta critique de Forumactif, parce qu’elle ne se trouve pas dans le lieu théorique où j’interviens ; maintenant tu t’expliques sur Dndf et c’est là que je te réponds.
Sur le fond, 1) je ne propose pas « une refondation de la théorie de la communisation existante sur la base de la version de TC », je pose un problème qui, à ma connaissance, n’a jamais été posé par TC. Ce problème, celui du rapport capital / nature / communisation, sera – ou non – intégré dans le travail à venir du groupe. J’aimerais mieux qu’il le soit, mais si ça n’est pas le cas, je n’en ferai pas une maladie, avec ou sans virus en circulation. 2) La critique de la théorie du prolétariat faite par Christian Charrier, je n’en parle pas, car c’est en fait une théorie qui confond la fin de l’affirmation du prolétariat avec la fin de la contradiction prolétariat / capital : voir le débat de 01-07, de “La Contradiction à éviter”, de Christian, jusqu’à la 2° version du texte de TC, “Hegel, Marx, et la Contradiction”.
Quant au point 1, que mon texte soit bon ou mauvais du point de vue même de TC, que les camarades de TC intègrent « le problème du rapport humanité / capital / vivant » en partant d’une critique de Conjoncture ou d’une autre façon, je leur laisse le soin d’en juger. Par contre, je ne pense pas m’être contenté d’une « réexposition caricaturale des thèses de TC ». D’une part, j’ai tout de même reformulé un peu la problématique, en posant un problème non encore posé. D’autre part, si je m’en tiens à l’alternative restructuration ou révolution et qu’il y a en réalité un troisième terme, j’aimerais bien qu’on m’explique lequel.
Quant au point 2, nous verrons bien si ma tentative de poser le problème capital / nature est vouée à l’échec et si TC veut se débarrasser du problème comme incompatible avec le schéma communisateur. En tout cas, je n’ai pas voulu construire un humanisme théorique du troisième type, càd ni jeune-marxien ni camattien mais patlocheux. J’ai tenté, en pensant dans la conjoncture, de lier la crise écologique, déjà ancienne, à la crise actuelle de reproduction du rapport d’exploitation capitaliste qui, cette fois s’est produite sous une forme non strictement économique mais économico-épidémique. C’est là-dessus que je veux être critiqué.
PS, 16h40 : Je viens de lire la réponse de Patlotch à PP. J’ai déjà répondu sans le savoir à cette question sur mon identité. Je précise 1 que je me fous d’être classé « técéiste exacerbé » : je pense dans la problématique et les concepts de TC, même quand je « m’efface » du champ de vision de TC et même quand je m’oppose aujourd’hui à TC ! 2 Que je me fous aussi d’être classé « immature », car je ne mets pas d’ego dans la pratique de la théorie et je n’ai jamais dit à personne « ma théorie est plus grosse que la tienne ». Si maintenant quelqu’un parvient à me convaincre que je n’ai rien compris ni à la théorie de la communisation en général ni à celle de TC en particulier, je n’en ferai pas non plus une maladie. Ni Dieu, ni code, ni quoi – et basta !
@FD
dont acte pour pas mal de chose, puisque comme ça, notamment les “détails”, c’est plus clair pour tout le monde
> « ce que dit Patlotch sur un éventuel chaos prolongé, qui ne serait de toute façon pas une sortie de crise, je ne vois effectivement pas d’autre issue capitaliste qu’une restructuration supérieure de l’exploitation, problématique, certes »
“pas d’autre issue capitaliste” et “pas d’autre issue”, ce n’est pas la même chose, et si la menace est d’une destruction de l’humanité, ses causes ne seront pas que capitalistes, puisque le problème du rapport humanité-nature est antérieur, et déjà destructeur. C’est d’ailleurs ce qu’écrit FD précédemment
> « je n’ai pas répondu à ta critique de Forumactif, parce qu’elle ne se trouve pas dans le lieu théorique où j’interviens »
le lien était ici, et c’est une belle confirmation que n’existe que l’entre-soi du petit milieu, mais puisqu’il tend à s’ouvrir, merci à Pepe
> la “fidélité” à TC, je ne l’ai pas inventée, a été remarquée, y compris dans le milieu de la communisation, à propos du livre “Rupture dans la théorie de la communisation”, écartant certains textes et fonctionnant comme un entonnoir vers les thèses de TC. Si d’autres ne l’avaient pas fait remarquer, à l’époque où je débarquais, je n’y aurais vu que du feu. Et Conjoncture épidémique, a priori s’adresse bien à TC, du moins fonctionne sur la base de son corpus et de ses concepts. C’est un constat, moi perso je m’en balance, mais cela a des implications théoriques sur l’introduction des rapports à la nature dans la théorie de la communisation : d’abord celle d’une vision extrêmement étroite du problème, ensuite d’une quasi exclusion des autres a priori
– « je pose un problème qui, à ma connaissance, n’a jamais été posé par TC »
c’est vrai, moi j’ai essayé, ici-même, LE lieu théorique, mais il l’a même refoulé par tous les moyens rhétoriques avec la “mauvaise foi” de RS, qui la considère comme féconde pour faire avancer la théorie (remarque à RF). Certes pas pire que Carbure, “Le vert est la couleur du dollar”, texte traduit et diffusé sans aucune critique dans le milieu. Mais puisque en 2015 j’ai échoué, bon courage, puisque selon Pepe, c’est la pandémie qui aurait changé le problème, comme s’il ne se posait pas avant. Je suis loin d’avoir été en avance, j’ai eu mon temps de rejet de toute écologisme, mais dès que je me suis essayé à la théorie communiste, en 2002, cette question en était. Alors qu’on ne nous fasse pas le coup, comme pour le genre en 2008-2010, d’un événement considérable, en 2020, d’introduire une question que l’humanité se pose depuis un certain temps. C’est elle qui vous pousse au cul, et vous êtes les derniers, c’est comme ça
> « Ce problème, celui du rapport capital / nature / communisation, sera – ou non – intégré dans le travail à venir du groupe (TC) »
mais enfin, le rapport humanité-capital-vivant (nature), il se pose au mouvement du communisme au delà d’une théorie, marginale et quasi inconnue, il se pose à l’humanité, et aux communistes parce que le capital est la médiation incontournable. Il y va de la crédibilité du courant communisateur au-delà de ses rangs, ce qui changerait, puisque cette théorie de 40 ans intéresse au mieux quelques centaines en France et dans le monde, et je suis généreux, je compte ceux qui ne sont pas dans la ligne conceptuelle mais utilisent le label à l’envers : “communisons notre vie !”
> « En tout cas, je n’ai pas voulu construire un humanisme théorique du troisième type, càd ni jeune-marxien ni camattien mais patlocheux »
j’ai déjà réglé cette petite pique lamentable, un classique de l’évacuation. On colle sans preuve ni argument une étiquette, et te voilà dans l’autre camp, comme avant. Plus antistal que vous l’on meurt, sauf pour les bonnes vieilles méthodes. Qui ne rajeuniront personne, disai-je
Patlotch
Je te réponds – une dernière fois – puisque je suis de fait enfermé dans une polémique avec toi seul, qui ne m’intéresse pas.
Ta conclusion – « on me colle sans preuve ni argument une étiquette » – est un pur déni de la réalité de ton discours. Tu as effectivement construit un humanisme théorique. Parce que tu conçois l’humanité comme sujet, antérieur et extérieur au capital, alors que pour moi – et pour Marx, avant TC ! – l’humanité n’a jamais existé que sous des modes de production et des formes sociales historiques déterminées et qu’elle n’existe depuis deux siècles sous le capital que sous la forme de deux grandes classes antagonistes, dont la contradiction n’est pas indéfiniment reproductible. Ceci dit, bien sûr, pour simplifier : la lutte des classes effective est un peu plus complexe que le schéma simple à deux classes de la Critique de l’économie politique – et même que le Ménage à trois d’Astarian et Ferro.
Je te laisse le jugement sur la théorie de TC, « marginale et quasi inconnue ». Le problème n’est pas de savoir dans quelle mesure une théorie de la communisation sort de la clandestinité – pour reprendre une formule qui a été beaucoup utilisée dans et autour de TC dans les années de formation de Meeting. Le fait est que tout ton discours est construit dans et contre la problématique de cette théorie que tu te donnes l’air de mépriser. De plus, si ni Meeting ni Sic n’ont fonctionné comme lieux de débat productif, si TC a durant ces années-là produit ses meilleurs concepts (l’écart dans les limites des luttes, la déconnexion entre valorisation du capital et reproduction du prolétariat, la division de genre, la racisation, la révolution comme conjoncture, le prolétariat kaléidoscope) bien plus sous la stimulation des évènements de la lutte des classes que du débat interne au « courant communisateur », les deux « noyaux » successifs ont au moins rendu le travail théorique de TC plus visible. Quelques centaines de personnes intéressées en France et dans le monde, c’est pas mal, car jamais la critique radicale de l’ensemble des conditions sociales existantes n’a immédiatement mobilisé les foules, ni à l’époque du programme prolétarien ni au-delà.
Tu as en effet tenté de poser le problème du rapport du capital à la nature, mais en le bloquant dans ta problématique humaniste. Plus précisément dans une problématique dissociant la communisation de la destruction des rapports de production capitalistes. Alors que pour TC – et pour moi – abolition du capital = communisation, et vice-versa. Nous – les quelques centaines de personnes intéressées – ne savons que deux ou trois choses fondamentales sur la communisation, mais ce que nous savons, nous l’avons appris aussi en dicutant avec TC. Une théorie qui tient la route – je l’ai dit, je l’ai écrit, je le redis. Pour se limiter au champ théorique délimité par les individus et groupes intervenant dans Dndf, il y a d’autres théories aussi cohérentes – notamment la communisation à titre humain et l’immédiateté sociale du face à face capital / prolétariat – mais celle de TC est la plus en prise sur le cours effectif des luttes et c’est en cela qu’elle tient la route. Par ex, en 013, quand les partenaires de TC dans Sic en étaient encore à théoriser le temps des émeutes, comme s’il n’y avait aucune inflexion interclassiste et nationaliste dans les luttes, TC posait la bonne question : Où en sommes-nous dans la crise ? Et théorisait une « séquence particulière » durant laquelle l’écart n’allait plus éclater dans les luttes. En sort-on maintenant ? C’est LA question.
“Conjoncture épidémique”, dis-tu, s’adresse à TC. Bravo ! Tu as découvert un « lien d’intérêt » que je n’ai jamais caché ! Alors même que je n’ai jamais appartenu au groupe, j’ai beaucoup discuté avec les camarades de TC et je n’ai pas cessé de suivre attentivement leur travail depuis 04. Si maintenant j’interviens sur Dndf en posant la question écologique, càd la question du rapport capital / nature / communisation, je la pose uniquement dans la conjoncture déterminée par cette putain de pandémie. Man’s first and last thought, survival ? – comme disait l’IS à propos des abris anti-nucléaires et de l’idéologie de la guerre froide. NON ! Survivre n’est rien si l’on ne survit pas pour lutter et vivre enfin.
Je laisse tomber ta pointe sur « l’entre-soi » du débat sur Dndf. Les communistes n’ont certes pas intérêt à « mariner dans leur jus » (comme disait Lénine, avec lequel je n’ai aucune affinité), mais s’ils marinent encore, ça n’est pas forcément par plaisir de mariner. D’ailleurs, tu marines aussi.
FD
@FD
je maintiens que ton accusation d’humanisme-théorique, car chez vous c’est une injure, est de ta part pure invention, projection de tes limites – anthropocentristes dont relève aussi bien TC que Temps Critiques, sa bête noire humaniste-théorique par excellence – J’ai balancé tout ça bien au-delà de ton aveuglement sectaire
– « tu marines aussi »
certes, mais 10 à 100 fois plus lu que ce blog. Les sujets de la rubrique LE MONDE AU TEMPS DU CORONAVIRUS, ouverts à la mi-mars, avoisinent les 30.000 vues et le sujet théorique à épisodes THÉORISATION COMMUNISTE PAR TEMPS DE CORONAVIRUS dépasse les 8 500 vues, autant que le plus lu des sujets de dndf en 12 ans
c’est par contrecoup moi qui vous envoie des lecteurs et lectrices, via mon forum et twitter. Vos sujets les plus lus sont ceux où j’interviens, dans des discussions qui n’ont souvent rien à voir avec les articles qu’elles commentent. Le pire, vous ne parlez même pas entre vous, ou si peu. M’enfin, vous rendez vous compte de vos comportements de repoussoirs, certes fort peu humanistes, au sens banal du terme
vous n’êtes que des malades de votre théorie dépassée par l’histoire réelle, des malades de vous mêmes, une secte : une secte
Ca y est, le vieux papa ronchon qui chie sur la table et qui en a un plus gros que le notre (de lectorat) pointe dès qu’il est un peu malmené…Si ça continue dans l’insulte, il va falloir sortir les ciseaux pour la dixième fois….. Fatiguant….
C’est quoi qui t’oblige à revenir tous les deux mois????
@pepe
« C’est quoi qui t’oblige à revenir tous les deux mois???? »
ma connerie
Il va encore m’insuter, Mais tant pis; chaque fois qu’il est en panne de nouveau concept, il vient se dégourdir sur dndf.
François, même si ce qui suit n’est pas une vraie critique théorique en bonne et due forme, j’en suis bien incapable, je me permets quand même de t’interpeller dans le débat que tu as initié ici en interpellant TC (entre autres).
D’autres avant toi faisaient remarquer que TC n’avait pas (encore ?) intégré la dimension qu’on pourrait qualifier « d’écologique » pour faire court dans son corpus théorique. Mais tu es le premier à le faire « de l’intérieur », non pas au niveau platement organisationnel ou groupusculaire mais en sympathie, en convergence théorique.
Du coup, je voudrais questionner quelques éléments du débat…
Ma première crainte est que la dimension mondiale et spectaculaire de l’événement « pandémie » ne vienne un peu éblouir la problématique.
Tout le monde, et toi de même, semble s’accorder (dans notre microscopique milieu) sur le fait que la crise que nous vivons (la pandémie, pas la crise du MPC) serait majeure, voire pourrait déboucher sur….
Si nous nous intéressons à l’aspect factuel des choses, à moins de changement complet dans l’évolution de la pandémie, nous sommes devant un… petit événement mondial (sic).
A ce jour 300 000 morts dans le monde et une économie qui ne donne aucun signe de catastrophe même si ça souffre beaucoup…
Pour rappel : la grippe de 1969 a fait un million de morts dans le monde et 30 000 en France, et personne ne s’en souvient.
Il y a un siècle, le MPC basculait en subsomption réelle, la planète vivait une des plus grosses boucheries de l’histoire, la guerre de 14-18, la révolution bolchévique s’installait et la grippe espagnole faisait, au bas mot….. 50 millions de morts !!!! Au niveau événementiel, y’ a pas vraiment photo.
Cela dit, une « conjoncture » ne se mesure pas en intensité événementielle et tous les constats accumulés de la dégradation très avancée de la planète, faits PARTOUT et TOUT LE MONDE, sont incontestables.
Que le capital se soit avancé très avant dans la destruction de ce qui fait son propre biotope est incontestable. Mais cela ne signifie pas automatiquement que les contradictions du MPC en soient changées sur le fond. Autant la mise à niveau théorique sur la contradiction de genre (un vrai bouleversement théorique, celui-là !) a été une nécessité évidente (et tardive, oui, on le sait…) pour TC, autant TC a du préciser ses positions théoriques autour des débats sur la racisation, refusant de faire de celle-ci une nouvelle « contradiction » fondamentale, autant je ne comprends toujours pas en quoi la dimension « écologique » demanderait une refonte complète du système théorique de TC….
Je crains que le côté spectaculaire de l’événement ne vienne contraindre tout le monde à revisiter ses fondamentaux à son aune….On a déjà eu, il n’y a pas si longtemps, l’idée que l’armement et l’industrie nucléaires signaient pour la première fois la capacité de l’humanité à s’autodétruire mais ces rebond technologiques n’ont pour le moment servi qu’à asseoir des rapports de force géopolitiques, relancer les capacités de développement de l’énergie, fortifier tel ou tel capital national…. Pour le moment dans une maitrise à peu près contrôlée, au prix de Tchernobyl et Fukushima quand même !
J’ai déjà dit dans d’autres commentaires que je ne croyais pas à la dimension « suicidaire » du capital et que ce dernier avait montré dans le passé d’immenses ressources pour absorber , digérer et relancer bien des sources de ses crises. Les restructurations sont bien toujours des refontes majeures pour relancer la reproduction du rapport prolétariat/capital, sous la pression de la lutte des classes.
J’aimerais réellement avoir un éclairage sur le fait que la dimension « écologique » bouleverserait les catégories de la théorie communiste au point d’en appeler à une refondation du sol au plafond. Sans en nier le coté dramatique actuel ou à venir. Il ne s’agit pas de dire comme les communistes d’avant pour la question du genre « ça partira avec le bâtiment », la révolution résoudra le problème.
Mais je ne vois pas comment on peut aujourd’hui théoriser le fait que le capital, devant CETTE crise sanitaire, ne PEUT la surmonter qu’au travers d’une restructuration sur une base écologique ou être détruit par la communisation… En bref, j’ai plutôt la sensation que cette pandémie est plus un événement, certes très chaud, dans la crise d’après 2008 qu’une réelle « conjoncture » pandémique….
Philippe, ton intervention de ce matin sur mon texte est importante, car c’est une esquisse de la « vraie critique théorique en bonne et due forme » à venir. Elle m’interpelle à la fois sur la méthode (je m’oppose en effet à TC sur la base de la problématique et des concepts de TC – en sympathie, comme tu dis) et sur le fond (mon concept, improvisé donc assez fragile mais non sans contenu, de conjoncture épidémique). De toute façon, si j’avais dû attendre pour me lancer dans la bagarre d’avoir un concept bien construit, nul n’aurait besoin de critiquer mon intervention, qui ne se serait pas produite.
Quant à la méthode, je m’adresse d’abord à TC, mais pas seulement : aucun des groupes qui interviennent sur Dndf n’intègre ce que je nomme la question écologique, càd la question du rapport capital / nature / communisation. Cette question est objectivement posée dès le début du cycle historique du capital qui maintenant s’achève, càd dès les années 1970 (début de la restructuration capitaliste et montée de l’écologie politique). Et dans le cours du cycle, toutes les catastrophes dites industrielles ou naturelles mais en réalité toutes sociales qui se sont produites n’ont fait que rendre la discussion de cette question plus nécessaire. Ce n’est donc pas la pandémie due au corona-virus qui m’a conduit à la poser ; la pandémie, en manifestant une fois de plus la profondeur de la crise écologique et précipitant l’éclatement d’une nouvelle crise économique, m’a seulement donné le signal : vas-y.
Quant au contenu, le concept d’une conjoncture épidémique de la crise écologique déjà ancienne et de la crise économique actuelle, n’est pas fondé sur la gravité de la pandémie coronaire 2019 (en effet mineure comparée à la grippe de 1918) ni sur celle supposée de la crise économique en cours (qui n’est pas encore catastrophique, mais tout de même assez grave). Ce concept est fondé sur le lien réel de la pandémie actuelle à la crise écologique désormais inhérente au devenir du capital et donc sur le fait que le capital peut encore se développer sur la base de sa destruction tendancielle de la biosphère. En même temps, la pandémie coronaire est un avertissement pour la classe dominante, qui va devoir intégrer les « perturbations » épidémiques : d’abord dans sa lutte pour imposer la restructuration de l’exploitation, ensuite, si la restructuration l’emporte, pour gérer “sanitaire ment” la population exploitable.
Maintenant, je ne dis pas que les contradictions du capital, du fait de la pandémie ou même du fait de la crise écologique, sont changées sur le fond ; je dis au contraire que la destruction continue de la nature n’est pas la contradiction dynamique du capital, constituée par les deux contradictions prolétariat / capital et femmes / hommes. Le système capitaliste peut se reproduire en accroissant encore sa matière exploitable, càd à la fois la population exploitée, le temps global et l’intensité du travail productif de survaleur, et bien sûr le champ naturel de l’exploitation. Je ne pense pas que ce soit une dynamique suicidaire, seulement une complication de toutes ses contradictions intriquées. En fait, malgré des catastrophes majeures du type Tchernobyl ou Fukushima et d’autres possibles, je ne crois pas plus au suicide qu’à l’effondrement du capital. J’essaie de penser les tendances à l’œuvre dans la conjoncture. Du côté de la restructuration comme du côté de la révolution.
Par ailleurs, il y a dans ton raisonnement un biais gênant. Si pour pouvoir théoriser une conjoncture épidémique de la crise écologique permanente et de la crise économique en cours, il faut supposer qu’une telle conjoncture impliquerait la capacité du capital à intégrer dans sa restructuration une vraie réforme écologique, une production capitaliste propre, mon concept est à rejeter. Mais la classe capitaliste, en toutes ses fractions concurrentes, ne prendra des mesures limitant la dégradation continue du milieu naturel qu’à la marge. Parce que, ne pouvant mettre en cause la production de survaleur, elle ne peut avoir qu’une vision parcellaire spécialisée des problèmes réels posé par sa destruction continue de la nature. Et parce que, dans la production d’une restructuration, les considérations écologiques n’interviennent pas ou très peu.
Finalement, comme Patlotch, tu me prêtes l’intention de refonder la théorie communiste sur la question écologique. J’ai dit et je le redis : je pose un problème qui se pose objectivement, que la théorie de la communisation en général ou celle de TC en particulier le reconnaisse ou non. J’ai dit – mais je ne le redirai peut-être pas – que ce problème est intégrable, comme question particulière mais non secondaire, dans la théorie qu’a développée TC. En tout cas, qu’il soit ou non intégrable votre théorie ne m’engagera pas dans un dilemme crétin du type ou avec Patlotch ou avec TC.
Je connais la structure du champ théorique où TC occupe une position centrale, attaquée ou contournée. Je sais que je n’y ai pour le moment aucune place et qu’on m’identifiera facilement à un « técéiste », au mieux vaguement hérétique, tandis que vous, TC, combattrez fermement l’hérésie. Je dois faire avec et contre ça, tant que j’ai une petite chance de me faire entendre.
Pour info, dans les 12 derniers mois, dans notre compteur de stats, nous avons eu 68 références depuis le site de Patlotch, et 3702 en 12 ans. Soit 0,84 références par jour. No comment.
Le soutier de permanence.
Pitoyable, le pire ce sont les références mobilisées à propos des vaccins…
Régression intellectuelle de la part de DNDF, le milieu de la communisation est à la dérive.
Ne mollissons pas dans l’excès….
Ca, c’est de l’argumentaire construit et scientifique!!!
J’aimerais savoir si EAGM aujourd’hui et, avant lui, PM (il y a une semaine, le 12) s’expriment en simples communistes persuadés que la science en général et la théorie des vaccins en particulier est au-dessus de toute critique ou s’ils s’expriment au double titre de communistes révolutionnaires et de travailleurs scientifiques. Je ne suis pas moi-même un scientifique mais j’ai donné deux références précises : dans la 2° partie de “Conjoncture”, notes 12 et 14. Qu’ils aillent y voir et discutent là, avec des références et des arguments scientifiques précis. Par ailleurs, PP a dit, mardi dernier, qu’il n’est pas là pour « faire la police à chaque phrase », même si le passage de mon texte sur les vaccins le dérange beaucoup. En effet, Dndf admet et appelle même des points de vue différents à l’intérieur du milieu communisateur et pour pouvoir me dire « dégage », comme le font PM et EAGM, il faudrait d’abord prouver que l’ensemble de mon argumentation n’a rien à voir avec la communisation. PP exige aujourd’hui qu’on argumente avec des moyens et sous des formes scientifiques lorsqu’on prétend que l’autre, en face, ne fait que délirer. Je ne peux que l’approuver et je l’approuverais de même si un autre que moi était sommé de la fermer.
FD
Salut
qu’une grande partie des commentaires sur le texte de FD se focalise sur cette histoire de vaccin c’est vraiment sidérant et affligeant. Les vaccins, on s’en fout en l’occurrence quand le texte soulève l’épineuse question de l’introduction du terme nature dans le rapport entre prolétariat et capital et j’ajouterai dans les rapports conjoints hommes / femmes ; prolétariat / capital, ce qui complique pas mal la question à cause des femmes et de la naturalisation de la construction sociale du “groupe”.
De façon très générale, pour le moment, perso, je demeure sur une conception assez simpliste, j’en conviens : la “nature” n’a d’existence que par et dans un mode de production. En cela, elle ne peut être un terme en rapport avec le mode de production. Si le capital “dévaste la nature”, c’est une contradiction interne du MPC, pas un rapport (ou autre terme) avec la “nature”. La “nature” ne fait rien, n’y est pour rien, et à la limite “ne subit rien”, c’est une réalité inexistante en soi (si on me répond, svp, laissons de côté les tremblements de terre, les éruptions volcaniques et les météorites avec la fin des dinosaures), constamment construite comme élément d’un rapport social. C’est assez “dogmatique” (et certainement pas totalement satisfaisant) mais cela demeure pour le moment mon opinion (en attendant mieux peut-être).
R.S
La nature est une catégorie sociale qui correspond aux questions que posent les problèmes d’une époque… Aujourd’hui le concept de nature se développe à partir du sentiment que les formes sociales dépouillent l’humain de son essence… Que plus la culture et la civilisation prennent possession de lui, moins il est en état d’être humain et de par cette réification le concept de nature devient le réceptacle où se rassemblent toutes les tendances agissant contre la mécanisation et la réification croissante… À partir de ce sentiment de déshumanisation la nature prend la signification de ce qui par opposition aux formations artificielles de la civilisation humaine a eu une croissance organique « naturelle » qui n’est pas issue de l’activité transformatrice des humains… Au final la nature devient la non-société de la société humaine…
R, merci pour ta mise au point sur cette polémique idiote. Moi aussi, à la limite, je me fous de la vaccination. À la limite seulement parce que ça fait partie du bousillage du matériel humain. Maintenant, je suis d’accord avec toi sur l’idée que la dévastation de la nature est une contradiction interne du mpc, mais à condition de l’intègrer dans la théorie de communisation. Il ne s’agit pas de reconnaître que la nature ne fait rien – elle n’est effectivement pas un processus autonome face au rapport social capitaliste. Il s’agit de comprendre ce que le capital nous fait à nous en bousillant la nature. Qui ça, nous ? L’espèce humaine, bien sûr, mais dans notre espèce le prolétariat, car c’est lui qui est exploité et qui peut faire la révolution. C’est en ce sens que j’ai parlé dans ma réponse à PP du 15 de complication de toutes les contradictions intriquées du capital. Enfin, l’existence purement sociale du groupe femmes est certes naturalisée, mais pour le capital les femmes ne sont pas nature au sens strict, càd réservoir de matières et d’énergie pour la production.
Nono, la nature est-elle une catégorie sociale correspondant aux problèmes que se pose l’époque? Attention! Si tu parles d’époque, ça veut dire par ex que cette catégorie sociale n’aurait pas été valide à l’époque où Marx développait sa Critique de l’économie politique, càd à une époque où l’écologie n’existait pas ni comme politique ni même comme science. Or Marx a bien produit un concept de nature dans sa Critique, même si pour lui comme pour TC et pour moi la nature est subsumée sous le capital. Quant à l’essence humaine, c’est un concept de Feuerbach, non de Marx : voir la 6° Thèse et surtout la suite du travail théorique de Marx. Le camarade Karl est vraiment sorti de la philosophie et du communisme philosophique de son jeune temps. Le sentiment de déshumanisation, je l’ai eu comme beaucoup de gens, mais on ne peut pas fonder là-dessus la théorie de la communisation.La nature, pour le capital, c’est sa propriété comme réservoir de matières et d’énergie pour la production : voir ma réponse. à RS.
FD
Salut
Laissons tomber “l’essence de l’homme”.
Je ne pense pas que le concept de “nature” (s’il existe comme concept chez Marx …?) soit ramené chez lui à quelque chose de subsumée sous le capital. A mon avis le “concept de nature” chez Marx est totalement pris dans ses propres “ambigüités” relatives au concept de travail (à la fois travail et non travail mais aussi métabolisme avec la nature, etc., voir -pour ceux que ça intéresse – “Pour en finir avec la critique du travail”, TC 17). Chez Marx, à mon avis, la nature est incompréhensible en dehors d’un certain concept de travail à géométrie variable. Par exemple, j’ai toujours été très sceptique sur le tout début de la “Critique du programme de Gotha” : “la nature est aussi la source” mais à condition que le travail s’en pose comme “propriétaire”. A ce moment là, la “nature” c’est pas grand chose, sauf comme prétexte pour dire que le “produit intégral” est une sottise.
R.S
R, tu es meilleur connaisseur de Marx que moi et je ne vais pas soutenir mordicus qu’il existe un concept de nature bien construit dans la Critique de l’économie politique, bien qu’il y en ait au moins les éléments.
D’abord, tu as sans doute noté cette convergence : pour moi comme pour toi, la nature ne fait rien, elle est une contradiction interne au mpc. (Il va sans dire – mais encore mieux en le disant – qu’il s’agit ici uniquement de la nature terrestre, et surtout de la nature vivante, dont fait partie l’espèce humaine.) Cette nature, d’une part, n’est pourtant pas une chose, elle se produit elle-même constamment à tous les niveaux ; c’est pourquoi j’ai utilisé le terme de processus. D’autre part, j’ai bien précisé qu’il faudrait intégrer la nature dans la théorie de la communisation ; si ce n’est pas un terme en rapport externe avec le capital, si c’est une contradiction interne, le capital se développe avec et contre elle, donc contre nous : il nous bousille en la bousillant.
Ensuite la nature, dans la mesure où le concept est produit chez Marx, n’est en effet pas subsumée sous le capital. La notion de subsomption réelle du travail et de la nature sous le capital en domination réelle sur la société, elle se trouve dans le texte de Chuang, “Contagion sociale”, et dans le mien, “Conjoncture épidémique”. Pour toi, la nature est chez Marx « incompréhensible en dehors d’un certain concept de travail à géométrie variable ». Incompréhensible en dehors de son concept de travail, oui. Concept à géométrie variable ? Pas tant que ça, puisque Marx, en bon théoricien du programme prolétarien, concevait le milieu naturel du travail humain comme le grand laboratoire des forces productives (Conjoncture 2° partie, thèse 1).
Les idées s’améliorent. Le sens des mots y participe. Le plagiat est nécessaire. Le progrès l’implique. Il serre de près le raisonnement d’un camarade, se sert de ses expressions, efface une idée fausse, la remplace par l’idée juste.
FD
Pour le capital, la nature est un « réservoir de matière et d’énergie » donc c’est ce qui n’est pas encore entré dans le processus de production… Mais pour le mouvement écologiste qui est à l’origine de ce questionnement sur cette nature que l’on bousille, le concept de nature en est un où se joue l’essence humaine et c’est en cela qu’elle fait partie de la problématique de l’humanisme… Dans la question écologique – et soit dit en passant c’est là une question qui ne peut que renvoyer à un problème d’époque parce qu’il est un problème à l’intérieur du capitalisme mais c’est un problème qui est apparu avec la fin du programmatisme (voir plus loin) – la nature se définit toujours comme ce qui échappe au procès de production du capitalisme et par conséquent comme ce qui s’oppose à la réification et à la déshumanisation… La nature n’existe pas en soi parce qu’elle est définie par la société qui la produit comme son contraire : ce qui n’est pas réifié par le capital, ce qui n’est pas transformé par la production sociale, ce qui est encore en réserve comme ressources « naturelles »… La nature telle que la pose la question écologique renvoie nécessairement à la question de l’essence humaine parce qu’elle pose la nature comme « toutes les tendances agissant contre la mécanisation et la réification croissante » donc ce qui n’est pas « formations artificielles de la civilisation humaine » et finalement ce qui n’est pas société humaine comme si une telle chose pouvait exister dans une société humaine… Pour ma part, si nous voulons intégrer dans la théorie de la communisation la dévastation de la nature comme contradiction interne du MPC il va falloir critiquer le fondement humaniste de la question écologique…
En ce qui concerne le mouvement écologiste comme apparition de la problématique écologique interne au capitalisme, je dirais que l’évolution de ce mouvement depuis les années 60-70 trouve son origine dans la fin du programmatisme qui voyait dans le développement des forces productives les conditions préalables à l’abolition de l’exploitation capitaliste… En lien avec cette fin du programmatisme se forme une critique de ces forces productives comme limite à l’intérieur de l’action du prolétariat en tant qu’il est amené à prendre en charge ces forces productives au travers de son affirmation autonome comme classe face et contre – pour ne pas dire en concurrence avec – le capital… La critique de ces forces productives comme limite apparaît dans les contradictions qui naissent entre une classe ouvrière prête à défendre les moyens de production qui garantissent leur travail (et le salaire qui vient avec) et les luttes écologistes qui dénoncent et attaquent ces mêmes moyens de production comme nuisance qui détruit les conditions de vie de cette même classe ouvrière… Au final, dans ce cycle de luttes, agir en tant que classe pour le prolétariat est devenu une limite car être prolétaire c’est n’avoir que pour seul horizon non seulement la perpétuation de sa propre exploitation mais aussi la dévastation de son propre milieu de vie : c’est d’être toujours perdant…
« Les idées s’améliorent. Le sens des mots y participe. Le plagiat est nécessaire. Le progrès l’implique. Il serre de près le raisonnement d’un camarade, se sert de ses expressions, efface une idée fausse, la remplace par l’idée juste. »
Soit dit en passant, mon commentaire #23 est un détournement d’une citation de Georg Lukacs dans Histoire et conscience de classe que j’avais noté il y a fort longtemps et dont j’ai omis d’inscrire les références.
Pour Patloch qui revient gratter à la fenêtre avec insistance (il ne peut pas se passer de nous, le pauvre!): non, nononyme n’est pas Robin.
Comme on dit dans une langue près d’ici:” m’dassra complet”
Je ne suis qu’une subjectivité quelconque perdu sur un bout de planète qui tourne autour d’une étoile en fusion… Pourquoi cette manie policière de découvrir l’inconnu qui se cache dans le maquis de l’anonymat ? Lire ce qui est écrit n’est-ce pas suffisant pour comprendre et débattre d’une idée ? Et si la théorie n’appartient à personne, alors pourquoi mes contributions à cette théorie devrait-elle me coller à la peau ? Je n’ai rien à prouver, je ne fais que brasser la soupe des idées avec et comme tout le monde et ça me suffit amplement…
Nono et Soutier : OK, peu importe qui parle – quel est son « vrai » nom – seul importe ce qui se dit et comment ça se dit, en rapport avec ce qui pose problème, dans la perspective de la communisation.
Nono, merci pour la précision sur ton commentaire 23 ; j’aimerais seulement savoir si l’énoncé de Lukacs que tu détournes est dans ta première phrase sur la nature comme catégorie socio-historique.
Sur le fond, le mouvement écologiste est bien à l’origine du questionnement sur la nature que le capital bousille, mais il y a eu aussi une ouverture à ce questionnement du côté communiste à la fin de l’affirmation du prolétariat, en particulier du côté de Camatte. Et ce qui détermine le blocage de TC sur le problème – en plus des facteurs mentionnés dans « Conjoncture » I, thèse 4 – c’est aussi le fait que le communiste Camatte a produit un « échappement du capital » à son implication réciproque avec le prolétariat, tout en appelant à la rescousse une communauté humaine invariante. (Pour lui, la « destruction de la nature » est produite dans l’échappement du capital au contrôle des hommes : voir son texte, « Errance de l’humanité ».) Tout à fait d’accord avec toi, Nono : le discours et les luttes dits « écologiques » ont représenté dans les années 1970 une critique limitée mais pas fausse de la prise en charge par le prolétariat du développement capitaliste des forces productives. Enfin, je suis d’accord aussi pour refuser la dissolution de la nature dans le capital. J’admets que la nature ne fait rien – au sens où le prolétariat fait la révolution. J’admets que la nature est une contradiction interne du capital, qu’elle est réellement subsumée sous le capital comme production continue de survaleur. Elle n’est pas pour autant un non-être, une abstraction creuse, ou – ce qui revient au même pour TC – une collection purement empirique d’objets et de phénomènes sans réalité pensable. Car si la nature n’est pour R « pas grand-chose » – comme il le dit dans son commentaire 25 en parlant de Marx, mais c’est aussi ce qu’il pense lui – la lutte des prolétaires pour la défense de leurs conditions d’existence comme classe est vraiment devenue la limite de toutes leurs luttes. Et lutter pour continuer à se reproduire comme classe du capital, c’est en effet, comme tu le dis, Nono, n’avoir pour horizon que la perpétuation de sa propre exploitation avec la dévastation de son propre milieu de survie. Mais pour soutenir la thèse d’un prolétariat impacté par la dévastation de la nature, avons-nous besoin de l’essence humaine ? Je pense au contraire que nous devons la rejeter, comme appartenant au communisme philosophique du jeune Marx, qui, en 1844, concevait déjà le prolétariat comme classe révolutionnaire mais ne concevait pas encore la révolution communiste comme production historique du capital en tant que lutte historique entre les classes capitaliste et prolétaire.
Pour R : Quand je détourne un peu Ducasse (« les idées s’améliorent, etc »), c’est bien sûr ironique. J’aimerais beaucoup que les idées s’améliorent à mesure que se précise dans la discussion le sens des mots, surtout celui du mot « nature ». J’aimerais beaucoup que tu intègres mon discours en le critiquant. Le fais-tu ?
FD
Ce que je peux te dire c’est que quelque part Lukas dit que « la nature est une catégorie sociale » mais malheureusement j’ignore dans quel texte et à quelle page…
« Lutter pour défendre son existence » est devenu pour le prolétaire une contradiction car en tant que force de travail il doit défendre les moyens de production par lequel il peut travailler mais en même ces moyens de production sont ce qui détruit cette existence qu’il veut défendre… Bien que la question écologique soit révélatrice de cette contradiction elle n’en est pas le fondement car ce qui fonde cette contradiction c’est le fait que pour le prolétariat agir en tant que classe est devenu une limite à l’intérieur de ses luttes, c’est n’avoir pour seul horizon que le capital… La question écologique en tant que manifestation de cette limite tend à prendre une forme autonome parce qu’elle est critique des forces productives comme s’il existait un point extérieur à ces forces productives, un en-dehors où peut se concentrer cette critique comme point de fuite, comme une réalité qui incarne ce qui est opposé à ces forces productives et qui n’est déjà plus ces forces productives… C’est cette tendance à l’autonomie de la question écologique qui fonde sa problématique humaniste, ce besoin de trouver un point qui n’a pas été corrompu par ce qu’elle critique, qui n’est pas pris dans la contradiction dont elle est la manifestation…
Comme le disait Marx non pas dans sa jeunesse philosophique mais dans sa maturité scientifique, ce sont les bourgeois qui attribuent au travail “une puissance de création surnaturelle” parce qu’ils omettent une vérité centrale : le travail n’est rien sans la nature.
Autrement dit, c’est quand on se comporte comme un propriétaire de la nature que l’on peut dire que la nature n’est rien, ou presque rien, ou idéologie, ou réservoir matériel de la production.
Tout devient plus clair si on se place d’un point de vue communiste et que l’on cesse de regarder le monde avec les yeux d’un bourgeois. La nature devient alors ce sans quoi le travail n’est rien, ce sans quoi l’homme – cet animal social – ne peut plus réaliser aucune société et par conséquent n’existerait même pas, puisqu’il ne pourrait pas créer de richesse.
En détruisant la nature, c’est-à-dire en la réduisant à n’être que propriété à disposition des puissants, et plus tard idéologie de réformiste petit-bourgeois, le capitalisme produit donc aussi les conditions de l’aveuglement des communistes, qui n’ayant connu de nature que subsumée, pensent qu’elle a toujours été rien, et rien d’autre que rien. Or c’est à partir du moment où elle devient une catégorie de la pensée bourgeoise qu’elle n’est déjà plus conforme à ce qu’elle voudrait désigner, à savoir comme ce qui échappe à l’emprise de la production.
Mais bien sûr, avant que le MPC ne devienne hégémonique, il existait bien une nature qu’on n’avait pas idée de nommer. C’est après que le crime a été commis qu’elle est revenue, morte-vivante parmi les morts. Alors c’est un vrai problème pour les communistes, parce que si elle ne revient pas à la vie, s’il n’y a plus d’air, plus d’eau potable, plus d’espace vivable, alors il ne pourra pas y avoir non plus de communisme.
Comme telle la question de la nature est non pas périphérique, secondaire, ou idéologique, elle est absolument centrale, tellement centrale qu’elle amène à questionner non pas la vérité de l’humanisme, mais l’usage opportuniste et victorieux que pourraient en faire des anticapitalistes bien décidés à ne pas barboter plus longtemps dans un structuralisme qui commence à mal vieillir.
La question écologique se pose non pas pour sauver la nature mais pour que les humains puissent se sauver eux-mêmes… S’il existe une nature qui dépasse l’entendement humain c’est parce que l’activité humaine la pose comme telle pour elle-même et c’est en ce sens que la nature est le produit de l’activité humaine… Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a rien au-delà de l’entendement humain mais que cet au-delà n’existe que pour les humains… Par conséquent la nature n’est jamais rien car elle est ce qui est posé, nommée et définie comme nature et cette nature devient une définition en rapport au travail que lorsque le travail est lui-même posé et défini par le surtravail… Et ce n’est pas sans la nature que le travail n’est rien mais sans les humains… Bref ce rien de la nature n’est pas rien puisque rien n’est totalement dehors de la production sociale humaine même la nature qui semble vierge de toute intervention humaine mais qui se détermine comme telle par les rapports sociaux et se trouve en ce sens médiatisée par eux… Pour en revenir à la question écologique c’est parce que les humains ont besoin d’air pour respirer d’eau potable pour boire de flore et de faune pour manger et que c’est justement tout ça qui est mis en jeu pour ne pas dire menacé par le mode de production capitaliste que la « question de la nature » est devenu centrale : c’est quand une chose ne va plus de soi qu’elle devient un problème qui se pose historiquement…
Nono, la question écologique en tant que manifestation de la limite qu’est maintenant la lutte en tant que classe, tendant à prendre une forme autonome comme critique des forces productives, autonomisation qui fonde la problématique humaniste de l’écologisme radical, c’est une analyse très juste. Je me demande seulement quelle est ta position personnelle face à cette problématique humaniste : la considères-tu comme adéquate ou inadéquate au problème réel qu’est la destruction continue de la nature par le capital ?
FD
Il me semble que la notion d’humanisme est utilisée de manière un peu fourre tout et vite fait – ce qui est dommage – pour désigner ce que j’appellerai plutôt une vision alternativiste supposant un noyau non affecté par les rapports de production existants pensant ainsi fonder la légitimité d’une pensée faisant la promotion de l’abolition du mode de production capitaliste, au nom de ce noyau non corrompu servant de préfiguration pour le monde d’après. A la limite du côté de la pensée, ça pourrait être bien mais le problème bien sûr c’est que dans la pratique ça n’a aucune espèce d’existence du fait que l’exploitation est une contradiction et qu’il est dans sa nature d’être universelle. C’est-à-dire que rien ne lui échappe. On a donc d’un côté des pratiques de luttes prolétariennes avec les mains dans le ketchup et une conflictualité en actes qui ne s’en remet pas de ses contradictions, ce qui s’exprime dans leur nécessaire défaite, et puis par ailleurs des querelles intellectuelles bourgeoises qui promeuvent un noyau « sain » que cette pensée construit afin de défendre un sauvetage aménagé du monde existant sous l’appellation courante de « choix de société ». Ce qui en dit long sur l’inopérant projet politique tout autant que sur la détermination sociale qui rend possible d’en être le défenseur, certes tout autant soumis aux contradictions, mais de manière amortie.
Sur la question de la nature, je ne suis pas sûre de comprendre la nécessité de vouloir l’introduire dans une perspective de la révolution comme communisation et de la communisation comme action stricte de classe et donc de genre pouvant abolir les classes et les sexes.
Chez Marx moi j’avais compris que la nature était plutôt pour lui synonyme de sauvagerie devant être dominée, travaillée pour permettre une domestication totale servant de base à la constitution de la société sans classe du travail libéré. Donc si y’a de ça, on est bien loin d’une conception de la nature, subsumée ou pas, mais en tous cas dévastée et problématique car dévastée et donc soulevant la question de la limite vitale, pour les humains prolétaires et les autres. Du coup, j’ai effectivement l’impression que la conception du travail fait que la référence à Marx en matière de nature ne colle pas trop à ce qu’on veut dire.
La nature dans ce mode production est un bien, et je crois qu’en ce sens toute problématique écologiste la conçoit comme telle, comme extériorité. Je crois qu’on est tous d’accord là dessus. La nature n’est donc que la manière dont le capital distribue et ordonne le monde humain – c’est-à-dire le rapport entre les classes et les sexes – et le non humain. A ce titre, je trouve que toute catastrophe naturelle, y compris celle actuelle, ne met jamais en lumière – parfois de façon singulière – que des déterminations des rapports d’exploitation. Autrement dit j’ai l’impression que dès que la nature apparaît dans le rapport d’exploitation on est tout de suite contraint à ne plus en parler, car les seuls leviers pratiques de l’existence et des luttes ne peuvent concerner que les contradictions des rapports d’exploitation qui eux-mêmes concernent exclusivement le rapport entre les classes et entre les sexes. C’est aussi ça la contrainte extérieure. On n’a pas le choix des termes en jeu. Le capital est fondamentalement anthropocentriste.
Après si on se pose la question de l’abolition de la nature (et donc l’abolition de sa préservation/destruction y compris) dans le communisme on peut imaginer sans conséquence plein de trucs mais jusqu’à nouvel ordre j’ai l’impression que tout ce qui existe pour nous comme naturel, que ce soit dans la préservation, la destruction, la gestion, ou le surgissement catastrophique, ne nous renvoie qu’à notre malheureux monde fait de contradictions binaires, qui malgré l’éventuel bénéfice secondaire des gymnastiques dialectiques que ça nous amène à faire, n’en reste pas moins pauvre, étriqué, et donc ultra restreint dans l’analyse qu’on peut faire.
Annette et Nono, vous semblez d’accord avec moi pour reconnaître que c’est bien le mode de production capitaliste qui a un problème spécifique avec la nature et considérer la question du rapport capital / nature comme une question fondamentale à l’intérieur de la théorie de la communisation. Précisons : c’est le capital en domination réelle sur le prolétariat et la société, càd le capital subsumant réellement et le travail et la nature, qui a un problème spécifique avec la nature. Certes, en domination formelle, le capital la détruisait déjà, mais la crise écologique globale est une production de son 2° cycle d’accumulation en domination réelle, ouvert par la précédente restructuration, théorisée par TC. L’écologie se constitue comme courant politique dans les années 70 et le changement climatique devient une question politique dans les années 80 du 20° siècle.
ANNETTE, avant que le capital se soit imposé comme le mode de production dominant, càd avant le début du 19° siècle, la nature existe, bien sûr. Mais dans la transition au mpc et notamment dans la formation de la science moderne au 17° et dans la philosophie des Lumières au 18°, on la nomme et même on la pense. Ainsi la nature apparaît certes dans l’Histoire mondiale comme une catégorie sociale, mais elle apparaît, depuis le mpc constitué, comme catégorie sociale spécifiquement capitaliste. La première théorie de la nature comme objet de connaissance et base de la domination purement sociale de ce qui n’est bien sûr pas encore pensé comme mode de production capitaliste se trouve à ma connaissance dans le « Novum Organum » de Bacon, paru en 1620. Les deux grands classiques de la pensée bourgeoise à l’époque où la bourgeoisie est encore une classe révolutionnaire, la « Richesse des nations » de Smith (1776) et les « Principes de l’économie poli-tique » de Ricardo (1821) ne reprennent pas explicitement le concept de nature de Bacon, mais le présupposent.
Maintenant, quand tu reprends le raisonnement de Marx au début de sa « Critique du pro-gramme de Gotha », ça fait problème. Le raisonnement n’est pas faux : ce sont en effet d’abord les bourgeois qui attribuent au travail « une puissance de création surnaturelle » et qui se comportent en « propriétaires de la nature », sans laquelle le travail n’est rien. Mais ce raisonnement de Marx est pris dans la théorie programmatique du communisme, càd dans la théorie de l’affirmation du prolétariat se posant par ses luttes comme rival de la classe capitaliste. C’est pourquoi, tout en reconnaissant que la nature met à disposition des producteurs les richesses ou les valeurs d’usage qui, par le travail du prolétariat, deviennent les matières et l’énergie de la production capitaliste, le communiste Marx pense au fond, comme les bourgeois, que la nature n’est rien ou presque. Et c’est là qu’intervient RS (# 25) : « “la nature est aussi la source” mais à condition que le travail s’en pose comme “propriétaire”. À partir de ce moment-là, la nature c’est pas grand-chose, sauf comme prétexte pour dire que le “produit intégral” [du travail] est une sottise. » Ainsi lui, RS, est « sceptique » sur le raisonnement de Marx, mais seulement dans la mesure où Marx a l’air de poser la nature comme source de toutes les richesses. Sachant lui, RS, que Marx en a seulement l’air, il considère lui-même la nature comme « pas grand-chose ». « Elle ne fait rien », « elle ne subit rien » – ce qui est une pure tautologie, puisqu’ici faire et subir = faire et subir historiquement. Bref, ce n’est qu’une collection d’objets et de phénomènes sans réalité pensable – peut-être une formule journalistique, tout comme la « crise écologique » ?
Ainsi le capitalisme a bien produit les conditions de l’aveuglement – je dirais plutôt : du blocage théorique – d’au moins deux communistes : Marx à la fin du 19° siècle et RS au début du 21° ; mais que devient alors la catégorie sociale de nature ? Non pas un enjeu entre écologistes réformistes et communistes révolutionnaires, mais un enjeu dans le mi-lieu communiste lui-même et surtout dans notre micro-milieu qui pose depuis un demi siècle la révolution comme communisation, càd comme abolition révolutionnaire sans transition du capital.
NONO, j’approuve quand tu dis, en réponse à Annette, qu’il s’agit pour les humains non de sauver abstraitement la nature, mais de se sauver eux-mêmes. Et c’est ce que disait déjà Potier dans « l’Internationale » : maintenant, le prolétariat ne s’affirme plus comme rival de la classe capitaliste et les prolétaires ne peuvent plus se sauver en tant que « producteurs », mais en tant que prolétaires qui ne veulent plus l’être. Et s’ils « se sauvent », càd détruisent tous les rapports qui constituent le capital, ils sauveront l’humanité et la nature par surcroît.
@FD
Il ne s’agit pas de savoir si une telle problématique est adéquate ou inadéquate mais simplement de la voir telle qu’elle se pose…
@Tarona
Si j’ai utilisé jusqu’à maintenant le concept d’humanisme pour cerner la problématique que soulève la question écologique c’est parce que cette question qui critique les forces productives à partir d’un noyau non affecté ne le fait pas en tant classe prise dans les contradictions de ses luttes mais en tant qu’humanité face à la nature dévastée… C’est en fondant l’enjeu révolutionnaire sur l’humain dans le prolétaire et non sur le prolétariat qui doit abolir les classes en tant que classe que l’utilisation du concept d’humanisme me semble justifié et nécessaire…
TARONA
Laissons tomber la notion d’humanisme : en fait, la problématique et de Camatte et de Patlotch quand ils abordent la question du rapport capital / nature est bien humaniste et pas du tout alternativiste. Mais l’essentiel, c’est que nul n’a jamais construit un « noyau non affecté par les rapports de production existants », pas même Nono. Ceux qui l’ont fait, ce sont les écologistes, des penseurs du capitalisme à visage humain, que je critique tout au long de mon texte. L’exploitation est une contradiction, oui, et par nature universelle, oui aussi : en quoi l’universalité de cette contradiction fonderait-elle ta réponse, qui est celle de RS, à savoir « circulez, y a rien à discuter » ? Car c’est bien ce que tu dis : « dès que la nature apparaît dans le rapport d’exploitation, on est tout de suite contraint de ne plus en parler ». La référence à Marx, elle est nécessaire et nécessairement critique, dès lors que Marx a repris, dans sa théorisation de l’affirmation du prolétariat, la conception capitaliste de la nature comme extériorité. Certes, le capital – et derrière lui tous les écologistes (sauf les anarcho-primitivistes déjà critiqués en la personne de Zerzan par mon ami A.C) – posent la nature comme extériorité. Mais le capital la pose et repose toujours dans sa reproduction comme son extériorité à lui, capital, non comme extériorité à l’espèce humaine ; comme la seule source de matières et d’énergie qui puisse faire face à sa propre puissance sociale techniquement objectivée comme machinerie, tout comme il pose le non-capital, le travail vivant, comme son autre, comme la seule subjectivité qui puisse faire face à son objectivité automatique. Je ne pose pas la question de l’abolition de la nature, parce que la nature, qu’elle soit finalement détruite par le capital ou préservée par la communisation, n’est rien qui soit à abolir, comme les classes et les genres. Et je ne rêve pas non plus d’une « réconciliation » humaine avec la nature dans un monde communisé, parce que la nature dans un tel monde ne cesserait pas d’être utilisée par nous, humains, tout en continuant à se produire pour elle – car elle se produit, même si elle ne fait rien, au sens historique du terme. Donc ni abolition de ni fusion avec la nature, mais intégration de la question de la destruction capitaliste de la nature dans la théorie de la communisation.
Attention de ne pas caricaturer le débat (même si on ne débat pas avec des réformistes) avec l’écologie moderne. Il n’y a plus grand monde de sérieux qui définisse la nature comme un extérieur, un environnement de l’humanité….même si on peut considérer que la notion même “d’écologie” est déjà une façon de poser un extérieur à préserver ou a détruire….
“L’écologie […], est une science qui étudie les êtres vivants dans leur milieu en tenant compte de leurs interactions.” Défivition Wiki.
On est bien dans une relation entre éléments existants de façon séparée
LISBETH
Bonne question ! Qu’est-ce qu’on fait quand on pose la nature comme extériorité ? Tout d’abord, il y a différents agents qui posent la nature comme extérieure : la classe capitaliste et le réformisme écolo, d’un côté ; le tout petit courant communisateur et, dans ce tout petit courant, le groupe TC, de l’autre.
Ensuite, ces différents agents posent-ils sous le même terme de nature le même objet de pensée ? La classe capitaliste pose la nature comme sa propriété mais comme une réalité pensable, tandis qu’à l’autre bout TC pose la nature comme un non-être, càd comme un être sans réalité pensable. Dans les deux cas, la nature est pourtant posée comme extérieure au capital. Pour la classe dominante exploiteuse, une telle position va de soi : la nature est son réservoir de matières et d’énergie. Pour TC, elle tient au fait que sa problématique n’est pas faite pour intégrer l’objet nature.
La définition Wiki de la science écologique pose bien une relation entre éléments existant de façon séparée. La question est celle de la nature de cette science, dans son rapport à l’économie. En fait, comme politique et même comme science, l’écologie est gangrénée par le discours économique.
Finalement, s’opposer à la position de la nature comme pure extériorité (à l’humanité) n’implique pas de rêver une fusion des humains dans la nature, soit immédiate sur le mode alternatif, soit médiatisée par la communisation. C’est ce que j’ai indiqué en conclusion de mon dernier commentaire (# 39).
Mes remarques ne visaient pas à caricaturer le débat donc désolé si c’est l’effet que ça fait. Là encore ça va être du vite fait et ça risque d’être sûrement caricatural ou grossier mais bon.
Je ne pense pas du tout que la nature ne soit pas une réalité pensable, ce serait idiot. Mais d’une part toute réalité pensable ne fait pas en tant que telle partie de la théorie de la communisation, et d’autre part comme propriété des capitalistes la nature ne me paraît pas mettre d’autres termes en jeu et d’autres acteurs que ceux de classes et de genres pour penser la lutte des classes et la révolution.
D’ailleurs, dans ce que j’ai lu des thèses de FD je ne vois pas de dynamique propre au rapport capital/nature sinon par les contenus et acteurs que sont les classes/genres/races. Peut être que je suis complètement passée à côté mais je ne vois rien dans ces développements qui permettent vraiment de comprendre en quoi et comment “l’intégration de la question de la destruction capitaliste de la nature dans la théorie de la communisation” est nécessaire en tant que telle, puisque je ne voit pas quoique ce soit qui dans les luttes actuelles amènent à poser cette intégration autrement que dans les termes de l’exploitation que sont les contradictions de classes et de genres. Ou encore j’aimerais bien comprendre à quoi peut correspondre ces luttes ou cette opposition sur “la position de la nature comme pure extériorité”, qu’est-ce que ça implique alors?
Tarona confirme ici mon appréciation #6 du 13 mai : « du point de vue de TC, ce texte est mauvais », et irrecevable. Il ne montre effectivement aucune « dynamique propre au rapport capital/nature sinon par les contenus et acteurs que sont les classes/genres/races. » Sa logique même voudrait qu’il sorte de la théorie du prolétariat et de la communisation alors qu’il s’y refuse. Quant à la pertinente question de Tarona : « à quoi peut correspondre ces luttes ou cette opposition sur “la position de la nature comme pure extériorité”, qu’est-ce que ça implique alors ? », mon travail depuis 2014 l’a abondamment montré : si l’humanité entière et la nature sont mises en péril par le Capital, il est normal que nous observions des luttes et leurs théories supposant des sujets concernés et des voies différentes de sortie du capitalisme, que TC ne voit pas et que FD condamne comme “réformistes”… Que ces luttes et théories rencontrent leurs limites idéologiques, qu’elles n’aient pas encore le contenu et les formes adéquates n’est pas plus étonnant que le caractère réformiste des luttes prolétariennes. « Ça implique » effectivement de « poser cette intégration autrement que dans les termes de l’exploitation que sont les contradictions de classes et de genres », la sortie de l’anthropocentrisme des luttes et théories révolutionnaires, ça implique réciproquement la critique radicale du Capital par les écologistes, que seule engagent une faible partie. Que ce sujet soit ou non nommé “classe révolutionnaire” n’a aucune importance, mais qu’il puisse être encore “le prolétariat” n’a aucun sens car aucune base, ni dans les luttes, ni en théorie sauf tautologique
https://patlotch.forumactif.com/t251-rapports-humanite-capital-nature-et-conjoncture-pandemique-theorisation-communiste-suite#3879
TARONA
Je suis content d’apprendre que la nature est pensée par TC comme réalité ! Parce que, franchement, à lire RS d’abord (# 25 : « la “nature” [pour Marx en 1875 mais aussi, peut-être, pour moi RS en 2020] c’est pas grand-chose ») et Tarona ensuite (# 36 : « dès que la nature apparaît dans le rapport d’exploitation, on est tout de suite contraint à ne plus en parler ») ça n’était pas évident !
« Toute réalité pensable ne fait pas en tant que telle partie de la théorie de la communisation ». Bien sûr ! La Nature comme Tout, càd l’Univers, pourtant absolument réel et pensable, n’en fait pas partie. Pour autant, la nature terrestre – la seule nature qui nous concerne et théoriquement et, surtout, pratiquement ! – ne fait-elle pas partie de la théorie de la communisation ? Elle en ferait partie, nous dis-tu, si elle mettait en jeu d’autres termes ou acteurs que ceux des classes et des genres ; or ce n’est pas le cas ; donc on n’en fera théoriquement rien. Ici, deux observations. 1 J’ai dit et redit dans mon texte que la nature et sa destruction continue par le capital n’est pas la contradiction dynamique du capital, càd que j’admets tout à fait qu’elle ne met pas en jeu d’autres acteurs que les classes et les genres. 2 On n’a pas besoin, dans la théorie de la communisation, d’une nature ou d’une vie troisième acteur pour intégrer la destruction capitaliste de notre milieu naturel vivant. Maintenant, le problème se complique du fait que « on » peut désigner soit TC, qui manifestement ne peut pas intégrer ce facteur nature bousillée, soit un autre individu ou groupe du micro-milieu qui, lui, a priori le pourrait. Pour moi, le refus d’intégrer la destruction continue de la nature dans la théorie de la communisation n’est pas fondé, car la théorie doit penser tous les facteurs réels du devenir réel du capital. Pour fonder son refus, TC devrait donc prouver que le capital n’a pas déjà produit une crise écologique globale et permanente (“Conjoncture” I, thèse 1) et que la restructuration qui commence pourrait effectivement “réformer” le système de manière à poursuivre l’exploitation du prolétariat sans bousiller la nature (FD à PP le 2 avril dans la discussion du texte de Chuang). Enfin, il devrait prouver que la nature reste – au-delà du capital, dans un monde communisé – une pure extériorité ; pour moi, l’activité humaine poserait alors la nature comme extérieure, en tant qu’utilisée par nous, humains, ET comme intérieure, en tant que nous sommes des êtres vivants.
Point de méthode. Sigmund Althusser, pratiquant une lecture symptomale du “Capital”, disait par-dessus l’épaule de Marx : ce qu’ils ne voient pas [Smith et Ricardo], c’est ce qu’ils voient : la plus-value. Au point du débat sur la question nature / capital / communisation où nous en sommes, on peut dire des camarades de TC : ce qu’ils ne voient pas, c’est ce qu’ils voient : la destruction continue de la nature DANS l’exploitation du prolétariat.
Peut-on dire que, pour partie depuis l’invention du travail, mais de façon mondiale et totale depuis le MPC, l’extraction du surtravail broie des producteur.trice.s de marchandises et pompe sans mesure les ressources naturelles ? Quand je dis broie, cela peut être aussi au sens propre, comme les poussins mâles : guerres, 25 000 mort.e.s de faim par jour en ce moment, etc….
Elle broie des travailleur.se.s (et contrôle les ventres qui les produisent) qui sont pourtant son seul élément réellement vital, ce qui construit les contradictions mortelles à terme du rapport Proletariat/Capital/Genre.
Autant l’implication réciproque entre le Capital et le Prolétariat est non modifiable sur le fond mais simplement à reproduire ou à détruire dans une espérée communisation, autant rien ne s’oppose à ce que le Capital, non suicidaire et sous la pression de la lutte des classes essaye de se payer un « compromis écologique » : amélioration de son pillage des ressources naturelles contre gain de productivité.
Du coup, l’écologie n’est même plus une idéologie réformiste, elle devient l’idéologie « mainstream ».
@pepe
pour prolonger le questionnement de Tarona, ou celui de TC “Comment une classe… ?”, la théorie de la communisation est-elle intéressée par la question du “comment” concernant la chute de FD en #37 : « Et s’ils [les prolétaires] « se sauvent », càd détruisent tous les rapports qui constituent le capital, ils sauveront l’humanité et la nature par surcroît. »
ne l’appelez pas “question écologique” si ça vous tracasse d’apparaître comme des idéologues « mainstream », mais concrètement “qu’est-ce que ça implique ?”, qu’est-ce qu’ils “font”, là, les prolétaires, pour « sauver l’humanité et la nature par surcroît », quelles activités du prolétariat dans la supposée crise terminale de reproduction du capital, bref, dans le schéma communisateur ?
de fait, ça devrait être un petit peu VOS questions à vous, non ?
QVS ou PATLOTCH
Je tombe sur ton commentaire (# 43) après avoir posté le mien (# 44 à Tarona). Que mon texte soit du point de vue de TC irrecevable, c’est vrai. Mais je ne t’ai pas attendu pour savoir que la question capital / nature n’est pas intégrable dans la théorie de la communisa-tion made in TC. En fait, je le savais – intuitivement – dès ma rencontre avec les gens et la théorie de TC, en 97 ; mais je me suis intéressé au travail de TC pour ce que le groupe réussit à penser – la production historique du communisme, au-delà de l’affirmation du prolétariat – non pour ce qu’il ne pense pas. Et j’ai bien compris – théoriquement – il y a trois ans, en travaillant tout un été sur l’écologie et la biologie, que TC ne peut pas intégrer la question de la destruction capitaliste de la nature. Ainsi mon intervention actuelle dans le débat Dndf sur le moment épidémique n’est pas tout à fait naïve. Quand je dis, le 2 avril, dans la discussion du texte de Chuang (# 67), que la question pourrait être intégrée sans danger à la problématique de la communisation comme question particulière, sur la base même de la critique marxienne de l’économie politique désobjectivée par TC, il s’agit donc d’un procédé d’exposition : je suppose que TC le pourrait. Je n’aurais même pas pu écrire “Conjoncture”, encore moins le publier sur Dndf, si j’avais dit tout de suite : camarades, j’apprécie beaucoup votre travail mais je sais que vous n’intégrerez jamais la question capital / nature au problème de la communisation. J’aurais eu l’air de leur faire un procès d’intention, de leur chercher arbitrairement querelle.
La logique de mon raisonnement ne me pousse donc nullement à jeter aux poubelles de la théorie communiste le prolétariat comme classe capable d’abolir toutes les classes et la révolution comme communisation. L’abandon du prolétariat comme classe révolutionnaire et de la révolution comme destruction du capital, c’est la voie de Camatte et la tienne, Patlotch – non la mienne. La « sortie » du capitalisme autrement que par la communisation comme action du prolétariat, c’est encore ta voie – non la mienne : on ne peut d’ailleurs pas en « sortir », parce qu’il n’y a rien d’extérieur : il faut le détruire. La reproduction du capital comme société globale met bien toute l’humanité et la nature terrestre en péril, mais ça ne fonde aucune « sortie » d’un monde qu’on pourrait « quitter » ni aucun « adieu au prolétariat ». Au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, le prolétariat ne lutte nullement contre l’exploitation pour sauver l’humanité ou la nature, mais il lutte déjà contre l’exploitation en tant qu’il est impacté par la destruction capitaliste de la nature : et c’est manifeste en Chine, entre autres pays. Quant à la critique radicale du capital par les écologistes, je ne l’ai rencontrée chez aucun de ceux que j’ai lus : ni chez l’anarcho-primitiviste Zerzan, bien sûr, mais pas non plus chez les écolo-socialistes comme Löwy ou Foster, en fait de simples démocrates radicaux. (Foster, aux States, a d’ailleurs produit une réflexion intéressante sur la pensée de la nature chez Marx. Quatre de ses articles ont été traduits en français en 2011 sous le titre de « Marx écologiste ». Le titre, raccoleur, est de l’éditeur, Amsterdam ; Foster, lui, parle de « Marx’s ecology ».)
PP
Le capital va-t-il se payer un compromis écologique ? Non : ça lui coûterait trop cher. D’ailleurs, rien ne dit que la pression de la lutte des classes sera suffisante pour le pousser à tenter le coup. Enfin, il ne pompe pas seulement sans mesure les ressources naturelles ; il tend à détruire la capacité de la biosphère à se reproduire comme le milieu naturel vivant dont les humains ont eux aussi besoin.
QVS, bis
J’ai déjà répondu à ta question : « qu’est-ce qu’ils font, les prolétaires, pour sauver la nature et l’humanité par surcroît ? » D’autre part, on ne peut pas savoir qu’une crise de reproduction du capital devient finale avant de s’approcher du point de fusion de la lutte des classes. C’est très chaud et nous n’y sommes pas encore !
@FD
comme dit au départ, c’était très courageux de ta part de proposer cette prise en compte de « la question écologique » « sur la base de la problématique et des concepts de TC » tout en étant conscient qu’il n’en voudrait pas
quant à une « critique radicale du capital par les écologistes », je suis assez d’accord avec toi, sans parler de Zerzan, ou des marxistes démocrates radicaux Löwy et Foster, les travaux de celui-ci, je l’ai toujours souligné comme TC l’a fait de Silvia Federici, étant plus féconds pour nous dans la substance historique que dans ce qu’ils en font comme projection politique “Le ou Les Communs”)
je parle pour les communistes de la nécessité de s’appuyer sur l’écologie comme science, comme Marx l’a fait dans Le Capital, “critique de l’économie politique”, cad en critiquant ses prédécesseurs ou contemporains, Adam Smith, Ricardo… (Keynes il ne pouvait pas encore)
maintenant, comme tu considères, #37, que « comme politique et même comme science, l’écologie est gangrénée par le discours économique », ma comparaison avec les “sciences économiques” ne t’intéressera pas, et pourtant, elle tourne dans quelques têtes…
incidemment, “Temps Critiques” rend compte dans “Relevé de notes en temps de crise sanitaire (VI)” de l’entretien avec l’anthropologue Philippe Descola dans Le Monde du 22 mai. On voit bien que les “métiers” de la science ne sont pas ceux de la théorie communiste, mais à moins de penser comme les staliniens et l’ultragauche en 68 qu’il faut séparer “science bourgeoise” et “science prolétarienne”*, l’utilisation des “sciences de la terre” ne seraient pas honteuse, non ?
* « Programme Communiste », Brochure « le Prolétaire », nr 22: « Marxisme et science bourgeoise », traduit de « Marxismo e scienza borghese, Rapporti collegati di Marsiglia, 1968
http://www.sinistra.net/lib/bas/progra/vano/vanoqgecof.html
c’est intéressant, Descola utilise le concept de “fait social total” de Marcel Mauss, dans son essai de 1925 sur “le don et contre-done en prenant l’exemple de prestation totale de la Kula et du potlatch” (salut Ô géniteur !), et nonobstant des solutions démocrates radicales écolos relevées par Temps Critiques, il écrit que « En ce sens, la pandémie est un réactif qui condense, non pas les singularités d’une société particulière, puisqu’elle est mondiale, mais certains traits du système qui régit le monde actuel, le capitalisme postindustriel.[…] Ce n’est pas l’humanité en général, parce qu’une grande partie de l’humanité n’a pas d’effet destructeur sur les milieux de vie, c’est un projet [capitaliste, occidental et anthropocentriste] qui s’est mis en place il y a plus de trois siècles en Europe et qui a été adopté par d’autres civilisations. »
https://patlotch.forumactif.com/t240-ecologie-etat-capitalisme-vert-et-coronavirus#3883
voilà du blé à moudre, à la main de préférence, si vous voulez je peux vous prêter le moulin à café de ma grand-mère, je suis anti-électrique au possible ;-)
à publier ou non, je laisse Pepe apprécier, mais gardez-le pour votre gouverne
1) il me semble insuffisant de rapporter la position de Marx sur la nature, concept ou pas chez lui en relation au travail, à son programmatisme. C’est loin d’épuiser la question notamment en termes philosophiques, l’idéalisme de Hegel et l’humanisme de Feuerbach rejetés, entre son “naturalisme” revendiqué, son matérialisme. Marcel Conche disait à ce propos, en 1983 pour le centenaire de la port de Marx dans un Nouvel Obs’ hors-série, des choses qui aident à discerner entre ces concepts
« La nature est une donnée, non un concept ; la matière est un concept, non une donnée », et quand Marx « revient aux choses, en économie, il s’agit, il est vrai, de science, non d’interprétation. »
Quelle philosophie pour demain ?
Parce que la nature est cela seul qui s’offre à tous les hommes, ce sera une philosophie de la nature. Marx l’a rendue possible en nous délivrant de Hegel, chez qui la philosophie « de la nature » n’existe que dans le titre. »
https://patlotch.forumactif.com/t251-rapports-humanite-capital-nature-et-conjoncture-pandemique-theorisation-communiste-suite#3879
2) il me semble insuffisant de s’en tenir à une critique de Camatte qui a maintenant 45 ans, sur “l’errance de l’humanité” par quoi il entend simplement “depuis sa séparation d’avec la nature”. C’est le point où il en est arrivé maintenant qui est à critiquer, particulièrement son texte du 30 avril 2020, “Instauration du risque d’extinction” plus “‘Inversion is not a strategy’” du 23 mai, et certainement pas en se contentant de l’affubler du qualificatif honteux d'”humaniste”, ce que la discussion a fini par laisser de côté comme n’étant pas vraiment le problème
https://patlotch.forumactif.com/t75-camatte-et-nous#3858
c’est comme si on critiquait Marx après la publication du Capital, mais seulement à partir de ses Écrits de jeunesse à décennies d’écart. Ni très honnête, ni très efficace, et pas besoin d’être marxologue pour trouver ça léger léger
c’est pourquoi je donne à RS raison d’être beaucoup plus prudent que tous les débatteurs, parce c’est des années de boulot qu’il faudrait à TC ou aux partisans de la communisation, pour y voir clair et produire quelque chose “qui tienne la route”. C’est pourquoi je retire ma suggestion d’avant la sortie de TC26 en 2018, un numéro 27 sur la question écologique, même en l’appelant “Le vert n’est pas la couleur de Théorie Communiste” avec un édito de AC-Carbure réconcilié
mais comme on dit, vous voyez votre cas
On peut vouloir comme on peut intégrer le problème de cette « nature » que le capitalisme bousille, il n’en demeure pas moins qu’effectivement ce problème n’a pas de dynamique qui lui est propre… Au mieux ce problème est une conséquence de l’augmentation incessante des forces productives… Au pire il pose une question qui conduit au-delà de la lutte de classe pour foncer droit dans le mur de l’humanisme… Voilà brièvement ma conclusion jusqu’à preuves plus convaincantes du contraire…
sobre mais clair!
Salut
La lecture de ces longs commentaires me fait un peu sourire. Le propre de la philosophie, comme aurait pu le dire Althusser (voir plus loi sur le propos attribués …) est de ne pas “circuler” quand il n’y a rien à voir.
Tous les intervenants savent que TC n’a jamais rien écrit sur la question (à part les brèves et récentes interventions signées Tarona et R.S – je vais y revenir), mais tous semblent savoir pourquoi. Au lieu de lire cela comme une vérité autant acquise que convenue, je serais franchement intéressé par une explication de pourquoi aborder ce sujet est une impossibilité absolue pour TC (nous n’avons jamais parlé non plus de la meilleure façon de monter l’aioli). Non seulement tout le monde ici semble donc savoir pourquoi TC ne s’est jamais préoccupé de la question, mais encore j’ai l’impression que l’ “on” sait ce que TC aurait dit, pourrait dire, aurait pu en dire. C’est assez flatteur car c’est le traitement en général réservé aux “grands auteurs” morts, mais quand les personnes sont encore vivantes c’est un peu perturbant.
Donc seulement, comme corpus, les interventions signée R.S et Tarona, c’est un peu mince. En outre, ni Tarona, ni R.S ne sont “TC”. En guise de plaisanterie, je dirai que TC est une “structure” (mal vieillissante ?) et non une “totalité expressive” qui serait présente, de façon immanente et totale, dans chacun de ses éléments. Il n’est pas dans la nature de TC d’être une nature.
Au fait ! parodiant Staline : “La nature, combien de divisions ?”
R.S
Nononyme n’a pas toujours été aussi “clair”, cf. Commentaire 38. Mais ce n’était pas le propos de mon courrier.
je ne suis pas sûr d’être concerné par le tout de ce courrier de RS, dont je partage au demeurant la mise au point. À preuve, je n’ai pas confondu le jeu et les cartes, #49 : « je donne à RS raison d’être beaucoup plus prudent que tous les débatteurs, parce c’est des années de boulot qu’il faudrait à TC ou aux partisans de la communisation… » et j’ai retenu comme plutôt pertinentes du point de vue de TC les interventions de Tarona
RS m’a reproché d’écrire parfois RS/TC, surtout chez moi, avec une lectorate loin de ce milieu, ne sachant pas nécessairement qui est qui, et je précise donc Roland Simon du groupe Théorie Communiste, BA = Bruno Astarian de Hic Salta, etc., d’autre part parce que la nuance est d’importance, pour distinguer entre un texte DE TC et un autre, dans la revue même Théorie Communiste, pouvant être signé RS ou BL, ou Tarona… On comprend qu’il puisse ne pas y avoir de consensus, que des désaccords subsistent en attendant une position du groupe, sans que l’un ou l’autre soit empêché d’exprimer son point de vue. Il est normal dans ce cas qu’on se demande de quel ordre sont ces désaccords. N’empêche, là-dessus encore, je comprends la réaction de RS
mais c’est Pepe qui répond à FD en #16 « François, même si ce qui suit en n’est pas une vraie critique théorique en bonne et due forme, j’en suis bien incapable… », et lui aussi qui expliquait un jour que RS avait dans TC, de mémoire, “un statut particulier”. Peut-être pas de simple rédacteur pour tous et toutes ?
et c’est FD qui interpelle directement et personnellement RS, qu’il écrit “R”, comme si les réponses de Pepe et Tarona comptaient pour du beurre, n’étant pas “la totalité expressive” dans “la bonne et due forme”, tout le monde comprend et attend celle de RS, qu’il signe RS ou que le texte soit de TC. Effectivement, pourquoi attendre une recette de l’aioli ?
donc voilà, je veux bien que ce soit “perturbant”, mais c’est comme ça, et RS n’y est pas pour rien, c’est somme toute une “revendication légitime”, puisqu’il y a “asymétrie”, et même parfois “déconnexion” ;-)
NONO
Comme dit PP, ton dernier commentaire (# 50) est clair ; et comme dit RS, plus clair que le # 38, où tu disais que la problématique de l’humanité face à la nature dévastée fonde l’enjeu révolutionnaire sur l’humain dans le prolétaire, sans prendre position face à cette problématique. Donc en # 50, le problème de la nature bousillée par le capitalisme n’a pas de dynamique propre : au mieux, il résulte de l’augmentation incessante des forces productives ; au pire, il mène droit dans le mur de l’humanisme. OK. Je ne fonce pas dans le mur de l’humanisme, je tiens la route qui mène, peut-être, à la révolution : le prolétariat est pris dans les contradictions de ses luttes et la destruction de la nature n’en est pas une. OK. Pourtant 1 le prolétariat est bien impacté dans ses luttes, même interclassistes, par cette destruction 2 la destruction de la nature fait bien partie des conditions, inhérentes à la lutte des classes, de la révolution.
RS
Tu souris face aux intervenants qui semblent savoir ce que TC aurait dit si vous aviez discuté la question de la destruction capitaliste de la nature. Peu importe ce que les intervenants croient savoir. Peu importe que le groupe vieillisse, car il vieillit bien et parvient toujours à penser le cours effectif des luttes. Peu importe que la nature = 0 division. Le fait est que TC n’a jamais écrit un texte sur la question et que, maintenant, enfin, vous explicitez les raisons de votre abstention. À propos, j’ai cru comprendre (commentaire # 16 de PP) qu’une « vraie critique théorique en bonne et due forme » de mon texte allait venir. Ai-je bien compris ? Tu as noté, je suppose, que je ne dérive pas vers la position humaniste de Patlotch et que je pose une seule question : le capitalisme a-t-il, oui ou non, produit une crise écologique globale et permanente qui surdétermine désormais son devenir, càd la lutte des classes ?
FD, à propos d’une réponse de TC sur le sujet, désolé mais tu fais dire un peu plus à mon commentaire que ce que j’y dit réellement:
“même si ce qui suit n’est pas une vraie critique théorique en bonne et due forme, j’en suis bien incapable…”
Il ne fallait pas lire plus!
PATLOTCH
Même si j’ai interpellé personnellement RS, en l’appelant par l’initiale de son prénom (parce que je le connais personnellement), je n’ai pas du tout compté les réponses des autres membres de TC, d’ailleurs venues avant, pour du beurre : voir mes réponses à PP et Tarona. Que RS n’est pas TC, je le sais aussi bien que toi.
PP
D’accord, j’ai mal lu ton commentaire # 16 : je considère donc qu’il n’y aura pas à court terme d’autres critiques émanant de TC que celles faites dans le cours de la discussion par toi, Tarona, ou d’autres membres du groupe. En un sens, ça m’arrange, car ça va nous donner un peu de recul, sans nuire à l’expression des autres intervenants.
@FD
combien de fois as-tu écrit « je le sais aussi bien que toi… » ? Je n’en doute pas concernant le peu qui t’intéresse et, c’est un comble, le peu de connaissances du sujet “écologie” dont tu fais un titre, et de l’actualité de la science écologique et de la théorie communiste QUI EST LUE, comme d’autres ont lu Le Capital en retenant le conseil de Marx dans sa Préface à la première édition, en 1867 : « Je suppose naturellement des lecteurs qui veulent apprendre quelque chose de neuf et par conséquent aussi penser par eux-mêmes. »
tu me donnes l’impression, non pas de l’infantile informé mais de l’enfantin, pour ne pas dire du “jobard”, un mot à Pepe pour me qualifier naguère, le naïf qui se fait avoir par plus roué que lui, le souffre-douleur dans la cour de récré, là où l’on n’apprend plus, ou autre chose : à vivre
Lacan écrivait : « Aimer c’est offrir quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas »
c’est une sorte de “dialectique de la nature”
j’en ai fait une drôlerie, à tes dépens apparemment mais non sans compassion, parce que Certain, passée
toute une vie sur une estrade Il en a pris des habitudes,
oubliant que par temps qui changent,
le maître d’école même ne peut plus siffler la fin de la récré
https://patlotch.forumactif.com/t243-funambule-en-bulle#3895
en attendant, autour d’une question si peu importante pour la théorie de la communisation qu’on ne parle ici plus que d’elle, mes sujets sont lus 20 fois plus qu’ici, certainement parce que je vais “droit dans le mur humaniste”, que je suis la critique « mainstream », ou autres billevesées
mais ça, finalement, ironie de l’ironie du sort, ça te donne raison ;-)
On a hésité à laisser passer ce dernier commentaire tant il est strictement orienté ad hominem, sans rien amener au débat, même s’il n’est pas encore trop injurieux.
Nous savons que beaucoup nous trouvent bien patients avec Patlotch. On va dire que ce sera le vrai dernier si ce ton se confirme ou s’aggrave…..
PATLOTCH
Je ne sais même pas pourquoi tu t’énerves une fois de plus. Je ne pensais pas à toi quand j’ai dit OK je ne fonce pas dans le mur de l’humanisme, je répondais seulement à Nono. Maintenant, un conseil : oublie-moi un peu.
Salut
FD écrit :
“Pourtant 1 le prolétariat est bien impacté dans ses luttes, même interclassistes, par cette destruction 2 la destruction de la nature fait bien partie des conditions, inhérentes à la lutte des classes, de la révolution.”
Le problème et bien dans le fait de le poser comme “destruction de la nature” ce qui présuppose une existence de la nature que l’on dit ensuite subsumée mais aussi toujours existante en tant que telle, il me semble qu’il y a toujours deux fers au feu, du type : “le capital la produit comme son extériorité” (je cite de mémoire). Le genre de dialectique qui permet de ne jamais avoir tort en n’ayant jamais raison. Si c’est “subsumé”, “contradiction interne”, etc., il n’y a pas stricto sensu, “destruction de la nature”, quel que soit l’évidence réelle des faits ainsi décrits et leur “impact” (je n’aime pas trop le terme) dans la lutte des classes.
Excusez le côté un peu “blagueur” de ma précédente intervention.
Amicalement
R.S
RS
Tu dis : « Si c’est subsumé » ou « contradiction interne », etc, il n’y a pas, stricto sensu, “destruction de la nature”, quelle que soit l’évidence réelle des faits ainsi décrits et leur “impact” (je n’aime pas trop le terme) dans la lutte des classes. » Et là tu mets le doigt sur ce qui peut apparaître comme LE point faible de toute mon argumentation. Si c’est juste, en effet, je n’ai jamais tort sans avoir jamais raison ; mais il y a un diable – et même deux diables – dans ton argument.
Le premier diable, c’est la confusion du logique et du réel, que tu relèves par ailleurs dans le raisonnement de Ferro sur le sursalaire de la classe moyenne. Logiquement, la nature n’est pas détruite par ce qui la subsume ou par ce dont elle est contradiction interne, càd qu’elle n’est pas détruite par la production capitaliste. Réellement, elle est détruite – elle tend à l’être – car la classe capitaliste la pose comme SON extériorité en tant que SA propriété à chaque nouveau cycle du capital total. Et comme la destruction est réelle, c’est un problème réel 1) pour la classe capitaliste elle-même, dans la mesure où elle doit au moins penser la limitation des dégats 2) pour l’autre grande classe du rapport d’exploitation, le prolétariat, dont la production de survaleur « impacte » non seulement le lieu de travail mais tout le milieu de survie 3) pour la population humaine en général, car les individus de toutes les classes subissent ladite destruction, même si pas tous également. Sans parler des êtres vivants non humains ! Maintenant, la nature resterait une extériorité, non plus au capital bien sûr, mais à l’espèce humaine dans un monde communisé, parce que l’activité humaine, qui ne serait plus production autonomisée comme production de survaleur, continuerait pourtant à la poser comme extériorité en continuant à l’utiliser. Cette affirmation de l’extériorité de la nature à notre espèce vise d’abord les anarcho-primitivistes, qui dans leur pratique de vie alternative et dans leur discours utopiste rêvent une réconciliation – en fait une fusion – avec la nature. Elle vise aussi, dans NOTRE micro-milieu, l’illusion que le prolétariat pourrait se mettre à communiser le monde – et par là même à se supprimer lui-même en supprimant toutes les classes – sans se soucier de ce que la nature est devenue sous le capital.
L’autre diable – un sous-diable – c’est celui de la confusion du réel et de l’empirique. En effet, quand tu parles de « l’évidence réelle des faits décrits », tu amalgames l’empirique (l’évidence, les faits, la description de la destruction de la nature) et le réel (la destruction de la nature en tant qu’elle n’existe que pensée). On n’a pas, d’un côté, des faits décrits, mesurés, agrégés dans les statistiques des États ; de l’autre, une pensée écologique, réformiste ou même radicale. Même la description quantitative de la catastrophe en procès – la pensée absolument non critique de la classe dominante et de ses experts – n’existe que dans la réalité pensée, càd dans la destruction de la nature telle qu’elle a été pensée par des communistes (comme Camatte) et par des écologistes (comme Foster). Je sais : le fait que Camatte a en même temps pensé la destruction de la nature par le capital et produit un échappement du capital t’emmerde et ça m’emmerde aussi. Et je sais que Foster, bien que bon connaisseur de la pensée de la nature chez Marx, n’est qu’un écolo-démocrate radical. Ceci dit, la distinction du réel et de l’empirique se trouve non seulement chez Hegel, notre ennemi intime, mais chez notre camarade Marx, dans sa Critique de l’économie politique, et nous ferions bien de la garder à l’esprit. Quant à « l’impact » de la destruction de la nature sur la lutte des classes, tu peux remplacer le terme par un autre plus neutre, par ex « l’effet », mais le terme que j’utilise a l’avantage de suggérer que cet effet détruit et tue.
Voilà, c’est tout pour le moment. Je retourne à mon travail critique sur l’idéologie dans les luttes en cours.
Salut
me voilà pris, semble-t-il, au propre piège de mon “althussérisme”. Il va falloir y revenir.
R.S
“Si les prolétaires qui ne veulent plus l’être « se sauvent », càd détruisent tous les rapports qui constituent le capital, ils sauveront l’humanité et la nature par surcroît.”
Nous et moi, réuniEs ce jour en la coulisse de dndf, protestons véhémentement et demandons expressément au camarade DF de reformuler en ajoutant le genre, sous peine de se prendre les Camarades mais femmes dans les dents et pas que.
Cher-e-s camarades en la coulisse, je sauve mes vieilles couilles en reformulant : si les prolétaires qui ne veulent plus l’être se sauvent eux-mêmes en détruisant tous les rapports qui constituent le capital, y compris le genre, etc ». Camarade soutier, je te demande de reporter la correction, merci d’avance. Notez tout de même que la division de genre est intégrée dès la première partie de mon texte (thèse 3 : « les êtres humains, d’emblée divisés par le rapport social de genre » ; thèse 7 : « travailleurs » corrigé en « travailleuses » – ma compagne, en passant tout près, avait d’abord lu « travailleurs » sur la banderole) ; et dans la 2° partie, thèse 7 (réintroduire dans le raisonnement « les femmes, les racisé-e-s » ; « comptes à régler entre les femmes et les hommes »), enfin thèse 9 où quand je parle des « gens d’en bas », je désigne aussi bien les femmes que les hommes.
Amicalement
FD
FD a dit : « Maintenant, la nature resterait une extériorité, non plus au capital bien sûr, mais à l’espèce humaine dans un monde communisé, parce que l’activité humaine, qui ne serait plus production autonomisée comme production de survaleur, continuerait pourtant à la poser comme extériorité en continuant à l’utiliser. Cette affirmation de l’extériorité de la nature à notre espèce vise d’abord les anarcho-primitivistes, qui dans leur pratique de vie alternative et dans leur discours utopiste rêvent une réconciliation – en fait une fusion – avec la nature. »
Ce que les primitivistes révèlent dans leur approche (sans pour autant partager leurs positions théoriques, dois-je le souligner) c’est que cette « nature » n’a pas toujours existé dans un rapport d’extériorité… Que tout ce qui compose le monde du vécu se mouvait comme une totalité sans séparation et dans laquelle habitaient diverses formes de vie tout autant matérielles qu’immatérielles… Même les morts vivaient encore puisqu’ils existaient dans le rêve qui n’était lui-même qu’une autre dimension du même monde vivant et existant… C’est d’ailleurs ce que sous-entendaient les surréalistes lorsqu’ils parlaient du rêve comme de la vie nocturne et dont ils cherchaient à rompre la séparation d’avec la vie diurne par diverses expérimentations… Bref, tout ça pour dire que la « nature » comme extériorité est aussi une construction sociale et que par conséquent rien ne prouve pour l’instant que le communisme ne produira pas au travers sa propre production la fin de cette extériorité comme rapport immédiat au monde dans sa totalité… J’espère avoir été assez clair malgré l’ambiguïté de mes réflexions toujours en cour de route mais qui s’arrête de temps en temps pour faire le point…
NONO
Tout à fait d’accord : la pratique et le discours primitivistes manifestent que la nature qui fait maintenant problème (d’où tes guillemets, je suppose) n’a pas toujours existé comme extériorité ; l’extériorité de la nature est une construction sociale capitaliste, c’est spécifiquement le mode production fondé sur le capital qui. a un problème avec elle. Et donc si la nature était encore posée comme extérieure dans un monde communisé, ce ne serait pas du tout au sens capitaliste, comme réservoir de matières et d’énergie pour la production et comme séparée de la vie humaine, dans toutes ses dimensions vécues et pensées. La critique du mysticisme de la fusion avec notre Mère la Terre n’implique pas du tout que les humains – des deux sexes, camarades femmes ! – aient toujours un comportement agressif et prédateur face à ce milieu naturel vivant dont ils sont partie. Quant à la méthode, l’ambiguïté d’une réflexion continue ne me gêne pas, le progrès de la discussion l’implique : il suffit qu’à certains moments l’ambiguïté soit levée.