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“Restructuration sans fin”, blog des séditions asymétriques…

Les hausses de salaires obtenues dernièrement en Allemagne ( 6% dans la fonction publique et à Deutsche Telekom, 4% dans la métallurgie), ainsi que la mise en place annoncée d’un salaire minimum par branche, ont donné lieu à l’habituel concert de réjouissance de quelques keynésiens ahuris. Et ceux-ci de reprendre à leur compte les pirouettes de Wolfgang Schaüble (« Ces hausses de salaires contribuent à supprimer les déséquilibres à l’intérieur de l’Europe »), qui confirmeraient en retour la justesse des vues de la social-technocratie sur « la croissance », etc. …

Cette micro réforme du modèle allemand (la plus forte hausse des salaires depuis 92), ne concerne bien sûr que le noyau central (toujours plus restreint) de la classe ouvrière syndicalisée (90% de syndicalisation chez VW) et les velléités d’IG metall d’obtenir « un droit de regard » sur l’embauche de la main d’œuvre temporaire ou la titularisation automatique des apprentis ont fait long feu. Remarquons que ces concessions patronales interviennent alors que depuis quelques années, on s’inquiète beaucoup du développement de petits syndicats corporatistes et combatifs (Cf. la GDL et la grève à la Deutsche Bahn ou plus récemment la GDF et la grève des contrôleurs aériens de l’aéroport de Francfort). Comme le résumait le patron des patrons allemands « Nous ne voulons pas que soudeurs, monteurs, pompiers fondent leur syndicat, il y aurait en permanence des conflits et une surenchère de revendications » (FAZ 01/03)1. Il était donc temps de redorer le blason des grandes fédérations. Dans le même temps, la faillite de Schleker, les scandales qui entourent les pratiques de la chaîne de supermarché Aldi et quelques mouvements sociaux rendaient nécessaire une remise en ordre cosmétique dans le secteur des services, d’ou la loi sur les salaires minimums…Bref un peu de changement pour que rien ne change dans le « dualisme modèle » allemand2 , socle de l’extraversion par l’intégration européenne3.

D’un dualisme l’autre, la commission européenne a publié le 18 avril un rapport, « Pour une croissance riche en emplois », qui recommande de « revoir la dualité du marché du travail », bref d’en finir avec le CDI au profit de la « flexisécurité », d’« améliorer la fluidité des travailleurs intereuropéens » et enfin de créer partout (là encore) un salaire minimum ajustable, à la hausse ou à la baisse selon la conjoncture. Ces suggestions ne sont bien sur qu’un premier pas dans la longue marche de l’harmonisation des marchés du travail européens, qui en maintenant les disparités régionales suffisantes, permettra aussi de mettre en commun les innovations ou perfectionnements nationaux. On pense par exemple aux mini-jobs allemands, que le patronat espagnol réclame à grands cris, ou aux reçus verts portugais, forme jusqu’ici la plus aboutie de transformation du salarié en prestataire de services : « Ces reçus avaient été conçus pour les travailleurs indépendants. Ils ont été massivement adoptés par les entreprises, qui se transforment ainsi en clientes de leurs employés. Ceux-ci leur facturent leurs prestations sans être protégés par un contrat, sans disposer d’aucune des couvertures réservées aux salariés : maladie, retraite, chômage. La fonction publique a également usé de ces « faux reçus verts ». Faux, parce qu’ils servent à rémunérer des salariés qui ont toujours le même patron, qui travaillent dans les bureaux et avec le matériel de leur employeur. » (Le Monde 24/11/10)

Le nouveau régime d’achat et de reproduction de la main d’œuvre s’invente ainsi entre grands ajustements continentaux et extension locale des zones grises de la décontractualisation et du travail forcé. Et du closed-shop au Workhouse, il n’y a plus de formes dépassées ou arriérées de l’exploitation mais leur jeu réciproque dans l’hybridation généralisée.

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