Appel de l’union des habitants de Kuzbass ….
(english text below)
Le bilan officiel d’un accident dans les mines de la ville de Mezhdurechensk en Sibérie occidentale fut de 66 morts, 24 portés disparus et 130 blessés. En colère contre les conditions de travail et les salaires de misère, poussant les ouvriers à enfreindre les règles de sécurité pour atteindre leur quota de production, 3 000 personnes se sont rassemblées (illégalement) sur la place centrale de la ville le 14 mai. Ils ont exigé de rencontrer immédiatement le gouverneur de la région et les propriétaires de la mine où s’est produit l’accident, ce qui leur fut promis pour le jour suivant. Les manifestants ne se dispersèrent pas tous pour autant. Quelques centaines d’entre eux se dirigèrent vers les rails et interrompirent le trafic ferroviaire. Les autorités avaient fait venir d’imposantes forces policières en provenance d’autres villes. Des affrontements violents s’ensuivirent jusqu’à très tard dans la nuit autour des rails, avec des blessés des deux côtés, les ouvriers ne cédant pas de terrain bien qu’en nette infériorité numérique. Les mineurs de la région tentèrent de coordonner leur action. Deux jours plus tard parut le texte qui suit, provenant d’une ville très éloignée de Mezhdurechensk et concernant tout le bassin minier de Kuzbass. Ce texte n’est pas (encore) disponible en Europe. Il a été traduit directement du russe. Il est signé par l’Union des habitants de Kuzbass, que la police a déclaré comme n’étant pas une association légalement enregistrée.
APPEL DE L’UNION DES HABITANTS DE KUZBASS AU PRESIDENT, AU PEUPLE DE LA RUSSIE ET AUX HABITANTS DE KUZBASS
Pendant qu’ils tirent de nous de milliards de dollars, avec lesquels ils se font construire des palais et des villas où notre premier ministre est accueilli et se distrait, nous sommes tués par centaines dans les mines. Les nôtres s’abîment pour des miettes.
Les évènements récents à Mezhdurechensk ont constitué la goutte qui a fait déborder le vase : nous ne pouvons plus supporter cela.
Nous ne serons pas des esclaves, des bêtes ouvrières qu’on pourra mépriser, n’en déplaise à certains qui se trouvent aux postes de commande. Nous sommes exténués de l’esclavage et de l’humiliation. Assez !
Nous nous adressons au Président Medvedev. Si, s’entend, c’est lui notre Président et pas quelqu’un d’autre.
Nos revendications sont les suivantes:
1. Libération dans les prochains jours de tous ceux qui ont été arrêtés à Mezhdurechensk. Cessation de toutes poursuites contre eux. Cessation de toutes les insultes et calomnies des médias nationaux contre les habitants de la ville.
2. Triplement des salaires dans toutes les mines rentables de la région, à commencer par les salaires les plus bas, qui ne devront en aucun cas être inférieurs de 45 000 roubles. Les salaires bas poussent à la violation des règles de sécurité, avec comme résultat que les nôtres périssent par centaines.
3. Cessation de la répression des activités syndicales indépendantes visant à la défense des intérêts ouvriers. Les responsables de cette répression doivent être sévèrement punis.
4. Retrait de Mezhdurechensk des forces du Ministère de l’Intérieur, amenées depuis d’autres villes.
5. Que dans toutes les villes s’institue une réunion populaire mensuelle de masse avec le chef de l’administration de la ville, pour que celui-ci rende compte au peuple sur ce qu’il a pu faire d’utile durant le mois écoulé et réponde en personne aux questions, doléances et demandes des citoyens.
Des décisions autres que celles mentionnées plus haut ne nous satisferont pas.
Nous attendons votre réponse, Monsieur le Président. Nous l’attendrons jusqu’au vendredi 21 mai.
En cas de non satisfaction de nos revendications, nous serons forcés de parler et d’agir dorénavant sur le plan de la politique, non des revendications sociales.
Maintenant nous nous adressons aux habitants de notre région.
Pour écouter les réponses de l’autorité suprême, nous allons nous rassembler le samedi 22 mai devant les bâtiments de l’administration de nos villes, à 16 h précises.
La liste des villes pour lesquelles nous annonçons une assemblée générale de tous les citoyens, et où s’activent nos groupes d’initiative, est la suivante :
Kemerovo, Novokuznetsk, Prokopievsk, Lenin-Kuznetski, Mezhdurechensk, Anzhero-Sudzhensk, Belovo, Berezovski, Kaltan, Kiselevsk, Miski, Osinniki, Polisaevo.
Nous invitons à ces assemblées non seulement les mineurs et les membres de leur famille, mais aussi tous ceux qui ne se foutent pas de la situation générale sur nos terres. Que les responsables répondent à nos revendications. Nous n’accepterons rien de moins que leur satisfaction intégrale.
Nous avertissons d’emblée le ministre [de l’Intérieur – n.d.] Nurgaliev et le gouverneur Tuleev que nous leur déconseillons de « jouer » avec nous, comme ils l’ont fait le soir du 14 mai à Mezhdurechensk.
Nous savons que très souvent ils ne nous écoutent pas. Et qu’au lieu de pourparlers ils font venir les CRS [OMON en russe – n.d.]. Pour cette raison :
1) Nous nous adressons à tous les partis et toutes les organisations sociales du pays. Nous demandons votre soutien. Au moins, faites une déclaration officielle disant que vous soutenez nos revendications et que vous êtes prêts, de concert avec les autres partis, à nous aider – avec tous les moyens à votre disposition – dans notre autodéfense. Si vous ne prenez pas position solennellement d’ici le 21 mai, cela signifiera qu’en réalité vous vous rangez contre le peuple. Ce qui sera notifié à tout le pays. Jusqu’à présent, nous constatons qu’une seule représentante de parti a essayé de nous aider, les autres gardant le silence. Nous avons besoin d’aide au niveau de la communication et d’assistance juridique – déjà nécessaire pour nos frères arrêtés à Mezhdurechensk – ainsi que de toute autre contribution, y compris organisationnelle.
2) Nous demandons à tous les médias non vendus :
• de présenter nos revendications ;
• d’envoyer leurs correspondants pour le 22 mai ;
• de publier des informations véridiques sur les évènements d’ici, non les mensonges transmis par la télévision.
3) Nous nous adressons à tous les habitants de la Russie du fait du blocus médiatique que nous subissons – nos forums et nos groupes dans les réseaux sociaux sont bloqués par la FSB [successeur du KGB – n.d.], et ceux qui n’ont pas été fermés fourmillent de mercenaires, d’employés des services de l’État et de policiers qui se présentent comme de simples citoyens et mystifient les gens et le pays avec leurs mensonges. Nous demandons aux habitants de la Russie :
• de dire la vérité à leurs amis et sur l’Internet, de parler de ce qui se passe ici, afin que tout le pays sache et qu’ils ne puissent pas nous écraser. Si aujourd’hui ils nous écrasent, demain ce sera votre tour.
4) Nous nous adressons aux habitants de Kuzbass :
• Dressez des listes de ceux qui séjournent dans votre ville et qui exercent la répression contre notre autodéfense populaire : des listes des dignitaires de l’État et des policiers. Publiez-les sur Internet, faites de l’affichage dans les rues. Toute la ville doit les connaître nommément. Les familles de ceux qui sont prêts à frapper des femmes, comme il s’est passé à Mezhdurechensk, doivent avoir honte de leur père, frère ou fils. Si vous connaissez ceux qui ont été envoyés pour battre les nôtres dans d’autres villes, rassemblez des informations sur eux.
• Fabriquez vous-mêmes des tracts sur nos revendications et sur les lieux de rassemblement du 22 mai. Collez-les sur les murs, distribuez-les aux domiciles.
• Informer vos amis et vos connaissances du rassemblement.
• Ne croyez en personne qui vous dira que la mobilisation a été annulée, même s’ils vous disent qu’ils parlent en notre nom. Ne croyez pas non plus aux autres mensonges et calomnies qui foisonnent dans les médias vendus.
• Constituez vos propres caisses communes pour l’aide à nos frères arrêtés. Aidez leurs familles.
• N’avalez pas la propagande des pseudo-activistes vendus aux autorités.
• Fabriquez vous-mêmes des brassards blancs et portez-les sur vous sur le lieu de rassemblement.
• Constituez des noyaux informels indépendants de l’Union des habitants de Kuzbass
Le 22 mai nous nous retrouverons dans les rues de nos villes
Pour la Liberté et la Justice !
Centre directeur de l’Union des habitants de Kuzbass
Novokuznetsk
16 mai 2010
http://community.livejournal.com/mejdurechensk/12833.html
http://www.newsru.com/russia/16may2010/me.html
Mezhdurechensk, Kemerovo region.
On the night of May, 8 a powerful explosion ripped through the Russia’s largest coal mine Raspadskaya near the city of Mezhdurechensk, Kemerovo region, followed by another methane blast 4 hours later. Several ground-based structures were destroyed by the double blast which also led to the ventilation system being rendered inoperative. The exact death toll is still unknown. Currently, official media reported 66 workers dead, 84 injured and 24 missing. A sudden excess of level of methane is said to have caused the explosion.
All the essential safety regulations were poorly enforced in the mine. To continue the production process the mine workers were forced by the managers to cover the detectors measuring the level of methane and the amount of coal dust in the mine. Many of the workers lacked so called “self-rescuers” – oxygen cylinders, critical to have in such cases. Bodies of 25 of them were found dead.
These events and the authorities’ response to it led to the miners’ mass protests. They accused the officials of having distorted the information on the number of the dead and the amount of their wages at the enterprise. In the meantime the families of miners and rescuers, remaining underground, are not getting information on the progress of rescue works. The miners point out that the death toll exceeds 150 people, which surpasses the figures provided by the officials. It was stated by the authorities that the miners earn an average of 70,000 rubles a month, which is not true. According to the workers, their wages depend on the production and amount to about 25 000 rubles.
The pressure from the managers of the mine and piece-rate wages make the miners work in such risky conditions. It is not an hourly-payment that the workers are getting but the amount of the work performed is being estimated. This makes the miners ignore safety standards. It is required to leave a gas polluted mine when emergency alarm bursts out. But in such a case the workers do not get anything, or the amount of money is being calculated according to the tariff rate at the level of the minimum wage.
The city of Mezhdurechensk has formed around coal mining with the mine being one of the few places to earn a living. Most miners have families to support with the wages they get from the mine. Almost all of them have debt obligations which must be repaid to banks. Fear of dismissal and the lack of prospects for the future due to loss of the apartment make the miners turn the blind eye to the terrible working conditions and neglect of safety standards. They cannot speak the truth about what really happens. The workers’ attempts to establish independent unions in order to defend their rights are cut short by the mines’ management through repression.
Now patience has come to an end. Spontaneous rallies took place in the city, one of which ended in the section of Novokuznetsk-Abakan railway getting blocked by the workers during the night of May, 14. The mayor made attempts to speak with the miners urging them to disperse which was refused. About 300 people took active part in the clash with riot police called in to break up a rally. They were throwing stones and bottles at the police which resulted in about 28 people getting detained and 6 police officers getting injured.
It was not until the railway getting blocked that the issue gained attention. In his turn Aman Tuleyev, Kemerovo region Governor , called the protesters “the leaders of criminal groups and the unemployed,” voicing the attitude of those in power to the workers and their relatives.
We encourage anarchists from all around the world to express their support to the workers by way of solidarity protests. Only through joint action we can resist the oppression! Show your solidarity. Your support is critical to people being treated like slaves!
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Message from Russian anarchists to the miners of Mezhdurechensk:
What happened at the Raspadskaya mine is a tragedy. Those perished will never come back. Children of more than a hundred families have become orphans. We are overwhelmed with feelings of grief and hatred towards those in power. These explosions could have been avoided. But the greed of the owners of the mine and the hopeless position of the workers did not allow for it. Your reaction to what has happened is obvious and clear to us. We fully support you and your rage. Street protests and closing the railroad is a truly effective methods of resistance to those who make our lives unbearable.
But you should be aware that the dialogue with the authorities is not a fair play. We have seen how arrogant Mayor Sergei Shcherbakov was when speaking with you. We are just plough cattle for them, nothing more. Their task now is to suppress any protests by way of “handouts” to the families of the perished miners and the workers, who cannot continue working in the meantime. An initiative group was quickly established, but it neither expressed solidarity with the miners, nor demanded the arrested be released. It’s members even stated their negative attitude to such kind of activity of the workers. We assume that most of you did not participate in this group getting formed.
Now the salaries are promised to rise up to 40 000 rubles (ca $1333), but only once the mine has been restored. No one has an idea when this is going to happen, and besides the management of the mines is very unlikely to go for it once the protests have come to an end. Also the mines directors are not likely to be fired. All of this is unfolding in the context of fabulous profits gained from the exploitation of the mines, which in 2008 and in 2009 amounted to $ 500 million and $ 170 million respectively.
In view of the information blockade set up by the official media and the pressure from the police that you’re under we want to express our solidarity. You are not alone in your struggle. We follow the events taking place in Mezhdurechensk. We admire your opposition to riot police who have no shame. While we will support you by way of political action from our side.
Now the protest actions should be continued. Such requirements as to have a meeting with the Prime Minister, who should resolve all the problems, is a dead-end. Putin leaves – the situation remains the same. Especially that the significant holding of shares belongs to the closest loyal oligarch – Abramovich. You are in a very difficult position, but still able to ask for better working conditions. Ask for the abolition of piece-rate wages in hazardous production facility. Ask for the social protection for those working in hazardous production facility be increased. You can try to set up an independent labour union, controlled only by workers’ meetings and the delegates from their side, who, if required by others, can be replaced at any time. You can spread the ideas of self-management out to the people under exploitation, up to the take-over of the enterprise by the workers. You can use the direct-action tactics – strikes, boycotts, up to sabotage. Only such action will make the authorities consider those who pay taxes and, thus, ensure existence of those in power. You have the opportunity to spread the message out to other workers and urge them to join the social protest.
This should be realized that unless we see ourselves as the class suffering exploitation, we will remain suppressed.
Appel du ???? aux travailleurs :
Travailleurs
Dans la nuits du 8 au 9 Mai, dans la mine Raspadskaya (Mejdouretchensk, dans le Kouzbass (Russie)) une explosion a tués vos camarades, vos frères mineurs.
La tragédie a été causée par l’administration et les propriétaires de la mine, qui, pour des raisons de profits à outrance, ont obligés les travailleurs à violer les exigences de sécurité. Actuellement, les média officiels ont signalé 66 morts, 84 blessés et 24 disparus. Raisons de l’accident : un excès soudain de méthane.
Selon un rapport officieux, le nombre de morts serait proche de 150.
L’explosion d’indignation, chez les mineurs et leurs familles, est non seulement due au deuil pour les morts, mais aussi au fait que le directeur de la mine, qui a fait un rapport au gouvernement Russe sur l’état d’urgence dans la mine, prétend que les salaires des mineurs sont de 80000 roubles/mois, alors qu’en réalité, il est d’environ 25000 (600 euros) .
La patience a des limites, et des résidents de Mejdouretchensk se sont retrouvés spontanément, sans préavis, pour exprimer indignation. Après avoir écouté et discuté avec une partie des mineurs, surtout les plus jeunes, ils ont bloqué le chemin de fer Novokouznetsk-Abakan.
Le gouvernement a bien sûr détesté ne plus recevoir d’acier, et a envoyé la police anti-émeute pour réprimer les mineurs révoltés.
Le contrôle du chemin de fer passa plusieurs fois de mains en mains. Finalement, 28 personnes furent arrêtées, les chiffres donnés par la police variant entre 6 et 17 personnes.
Actuellement, la ville est ceinturée par les forces de police, venues en renfort d’autres régions. Aux entrées et sorties de la ville, les véhicules sont arrêtés et contrôlés. En cas de protestation des mineurs, les autorités sont prêtes à jeter contre eux plusieurs phalanges de policiers anti-émeute.
La Confédération Révolutionnaire Anarcho-Syndicaliste (????) encourage tous les travailleurs, peu importe l’industrie dans laquelle ils travaillent, à manifester du soutien aux mineurs du Kouzbass non-seulement le 22 Mai, mais tous les autres jours.
Sans votre soutien, il sera difficile aux mineurs de Mejdouretchensk de résister à la machine répressive que leur a envoyée l’Etat.
Les actions de l’administration, ainsi que des propriétaires de mines et d’entreprise du site de Raspadskaya peuvent à tout moment faire mourir l’entreprise, et vos familles et amis avec.
N’oubliez pas que personne ne peut rien faire pour vous, excepté vous-mêmes, et que votre force sera dans l’unité.
Unissons nous contre le capital et le visage de son administration qu’est l’Etat !
Les droits ne sont pas donnés, il faut les prendre !
Confédération Révolutionnaire Anarcho-syndicaliste