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Argentine : « une question de semaines »

« C’est donc une question de semaines pour que des émeutes de la faim viennent donner une réalité aux chiffres abstraits qui remplissent la bouche des tarés du gouvernement. »

« UNE JOURNÉE PARTICULIÈRE À BUENOS AIRES »

extrait

« Des amis restent quelques jours à la maison. Je propose donc de faire un asado, rituel s’il en est. Je vais chercher de la viande au supermarché. Il y a foule autours des frigos. C’est assez habituel, ce qui l’est moins c’est que la plupart des clients ouvrent les portes, prennent un morceau de bidoche et le replacent dans le frigo avant d’aller chercher plus loin. Je fais de même et je comprends. Outre le prix (peut-être le tiers de plus qu’une semaine auparavant [1]), les coupes traditionnelles pour l’asado ne sont pas là, il y a surtout des viandes destinées au ragoût. En particulier, impossible de trouver un vacio (un morceau pris dans une gangue de graisse qui se cuit lentement à la braise, afin que la graisse imprègne doucement la chaire. Plus la cuisson est lente plus la viande est tendre et fondante). Je me rabats sur de la viande de porc, moins cher et aux coupes adéquates à un asado.

Cette pénurie de vacio est peut-être un effet des mesures de Milei. Le 1er janvier, il a supprimé une norme du gouvernement précédent restreignant l’exportation des morceaux les plus consommés en Argentine.

C’est un grand classique de la politique économique du pays. Durant longtemps, l’État se finançait essentiellement à travers l’impôt à l’exportation (Buenos Aires est un port par lequel transitait la plupart des marchandises destinées à l’exportation, d’où sa capacité à capter et concentrer les richesses du pays ; par ailleurs, l’Argentine ne disposait pas d’une administration fiscale qui lui aurait permis de récolter efficacement des impôts sur le revenu). Aussi, un gouvernement « populiste » ou « populaire » a tendance à augmenter la taxe à l’exportation afin de brider les ventes à l’extérieur et, ainsi, faire baisser les prix des aliments. Inversement, les gouvernements antipopulaires (toujours liés ou alliés à l’industrie de l’agro) ont systématiquement réduit les taxes d’exportation, si bien que les aliments sont vendus à l’extérieur et ceux qui restent dans le pays tendent à s’aligner sur les prix internationaux.

Bref, mon vacio doit être mangé en Chine, en Europe ou ailleurs. C’est d’autant plus dommage qu’ils ne savent pas comment le cuire là-bas. Ça va finir en viande haché alors que c’est l’un des morceaux les plus délicieux au monde s’il est lentement rôti à la braise.

Ce qui vaut pour le vacio vaut pour les pâtes. Un paquet de nouilles ordinaires coûte désormais l’équivalent de deux euros, soit presque le double qu’en Europe, alors que le salaire minimum est autours de 130 euros et le moyen autours de 300.

C’est donc une question de semaines pour que des émeutes de la faim viennent donner une réalité aux chiffres abstraits qui remplissent la bouche des tarés du gouvernement. »

https://lundi.am/Une-journee-particuliere-a-Buenos-Aires-5921

Categories: Nouvelles du monde Tags:
  1. 16/01/2024 à 06:21 | #1

    More about Argentina:

    Interview [en/es/pol] «So-Called Neoliberalism and Its False Critics»
    crimethinc.com/2023Argentina

    ¡Esto es lucha de clases! [es] https://boletinlaovejanegra.blogspot.com

    Nothing in French, for now…

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