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Fil d’infos sur l’IRAN

Mis à jour le 31 janvier 2023
Echanges et informations MIS A JOUR régulièrement et transmis directement par des camarades de l’intérieur de l’Iran via d’autres, réfugié.e.s en France; d’autres infos glanées sur le net. dndf

Nouvelles d’Iran du 18 au 29 janvier 2023

Introduction

Dans cette atmosphère de recul d’un soulèvement populaire qui a commencé il y a 4 mois, il semblerait que le Kurdistan et le Baloutchistan ont décidé de jouer les prolongations et de garder intact le feu de ce soulèvement malgré une répression inédite et un froid exceptionnel.

Dans les autres coins de l’Iran, malgré les slogans nocturnes dans les quartiers de grandes villes, les graffitis sur les murs, les mouvements de protestation au sein des écoles, des lycées et des universités et des grèves et rassemblements ouvriers éparpillés dans le pays, les manifestations et les rassemblements populaires s’amenuisent et le régime, profitant du froid et de la crise de l’énergie qui, physiquement crée une diversion dans les possibilités d’action et les objectifs de la population, essaie d’accélérer et de fortifier sa répression pour calmer le soulèvement tout en poursuivant ses efforts de normalisation notamment en continuant ses cérémonies annuelles comme le Festival artistique de Fajr.

Kurdistan, Baloutchistan, l’œil et lumière de l’Iran!

-Néanmoins à Zāhedān et à Rask les baloutchs continuent leurs manifestations hebdomadaires, les vendredis, pour démontrer leur détermination et pour essayer d’éveiller les autres peuples et villes du territoire ; et ce, malgré un froid avoisinant les moins 10.

Le régime qui constate que cette région, à côté du Kurdistan, est devenue un bastion de la révolte, a depuis deux semaines intensifié sa répression en essayant d’arrêter toutes les personnes qui, d’une façon ou d’une autre, étaient identifiées en tant que meneur des rassemblements et des manifestations.

-Le vendredi 20 janvier, encore une fois, on a vu une manifestation à Zāhedān, après la prière de midi, aux alentours de la mosquée Makki, qui était menacé de destruction, Molavi Abdol-Hamid, imam de vendredi de la ville, de confession sunnite, a encore une fois exigé la poursuite des personnes qui avaient tiré sur la foule le 30 septembre dernier et tué plus de 90 baloutchs ; aussi il a demandé la modification de la constitution iranienne.

Il a notamment déclaré que “notre constitution n’a pas bougé depuis 44 ans; il serait temps que cette constitution change. Comment peut-on fixer des lois et des règles pour les jeunes quand on n’écoute plus la jeunesse du pays ? Il faut mettre au goût du jour cette constitution pour que ça puisse correspondre à notre époque”.

Ce sont très exactement des propos que la République islamique n’a aucune envie d’entendre. Les forces de l’ordre, à plusieurs reprises, ont bloqué le parcours des manifestants en essayant de fouiller les gens et de créer des coupures dans leur rang.

La République islamique a augmenté la pression sur les responsables religieux sunnites dans toute la province, également à la ville de Rask, l’imam de vendredi de cette ville est interdit d’y tenir des rassemblements. Abdol-Ghaffar Naghshbandi, qui était l’imam de vendredi provisoire de la ville, a été convoqué par la police et depuis on a plus de nouvelles de sa situation.

La semaine avant c’est arrestation, il avait déjà prédit que « je ne sais pas ce qui va m’arriver cette semaine, mais ce qui est sûr, c’est que l’État doit arrêter de réprimer les baloutchs.

On avait dit qu’à un moment, la rumeur de la destruction de la mosquée principale de Zāhedān qui s’appelle la mosquée “Makki” était répandue; ce qui avait suffi pour que des dizaines de personnes se portent volontaires pour la défendre; ils y ont monté la garde jour et nuit; entre-temps, la semaine dernière, 17 personnes parmi ces “gardes” ont été arrêtés par le régime.

Au nord du pays, à Galikesh, dans la province de Golestân, les baloutchs qui y résident, à côté des turkmens qui sont eux aussi de confession sunnite, ont vu leur imam, Mohamad-Hossein Molavi Gorgui l’ex l’imam de vendredi de Azadshahr mis sous pression; il a été convoqué et destitué auprès du tribunal spécial du clergé. Les Baloutchs et les turkmens de cette région ont donc manifesté pour demander sa libération.

Le vendredi 27 janvier, à Zāhedān, sous la neige, des milliers de personnes se sont rassemblées et ont continué leur manifestation avec les slogans maintenant habituels de “Mort à Khamenei !” “De Zāhedān à Īzeh, je donne ma vie pour l’Iran !”…

Il faut voir dans la répression de ces deux dernières semaines, la main du nouveau gouverneur qui a été nommé et qui veut faire une démonstration de force en éteignant ces dernières flambées du soulèvement.

A Galikesh, la mobilisation de la semaine dernière a eu du succès et a pu libérer Gorgui de son assignation à domicile ; lui qui n’avait pas le droit de faire de discours, s’est présenté ce vendredi 27 dans le rassemblement ; c’est un recul du régime dans cette région ; le fait même de le laisser discourir en diapason avec le peuple baloutch et Molavi Abdul Hamid à Zāhedān constitue une victoire. Il était accompagné par un certain nombre de ses fidèles vêtus d’un linceul blanc pour démontrer leur détermination à défendre leur guide.

Les habitants de Taftân ont de nouveau arrêté les activités de la mine d’or dans cette zone.

La ville de Taftân est située au pied du volcan du même nom qui culmine à plus de 4000m ; La ville qui est dans la province de Sistan et Baloutchistan est à 100km de Zāhedān.

On a su que le 13 janvier dernier et pour la deuxième fois, les habitants de Taftân se sont à nouveau rassemblés sur la route de la mine d’or d’Anjirak de Taftan qui fait partie des mines les plus riches de l’Iran, pour protester contre l’extraction de l’or dans cette région et ont empêché les mineurs de poursuivre leur travail.

Des militants baloutchs ont rapporté que la mine d’or de Taftân est exploitée par la société Aria South”, alors qu’aucun permis n’a été délivré pour cela par les organisations environnementales. Ce n’est pas la première fois que les habitants de Taftân protestent contre les activités prédatrices de cette mine, et en octobre et novembre de cette année, ils avaient empêché la poursuite de l’exploitation minière à plusieurs reprises en se rassemblant devant la mine, en récupérant des machines et en bloquant les chemins qui y mènent. Mais aujourd’hui, en même temps que les vendredis de résistance à Zāhedān, les habitants de Taftân ont maintenu un autre bastion de résistance afin de ne pas laisser la république Islamique piller leurs terres ancestrales.

Les cérémonies de La quarantaine à Īzeh

Comme nous l’avons déjà indiqué, malgré le fait que la République islamique n’a pas rendu les corps de deux personnes tuées à l’occasion du soulèvement, à Īzeh (Khouzestân) la population dans le petit village de Persilla, a néanmoins organisé cette cérémonie sans le corps de Hossein Saïdi le vendredi 27 janvier.

Ils avaient déjà organisé la cérémonie de quarantaine de Mahmoud Ahmadi martyr du peuple Qashqai de la même façon, sans corps et en enterrant ses vêtements traditionnels. Rien n’entame la détermination du peuple Bakhtyari pour défendre le soulèvement contre la République islamique.

Rassemblement à Torbat-e Djam

Le mardi 17 janvier, dans la journée, à Torbat-e-Djam, une ville du nord-est du pays (100.000hab.), dans la province du Khorassan-eRazavi qui est située à 165 km au sud de Mashhad, la population s’est rassemblée au centre-ville et s’est plainte contre la crise du gaz et le fait qu’il n’arrive plus à chauffer leur logement. Des femmes qui racontaient leur galère à chauffer des enfants en bas âge ou des jeunes adultes qui se plaignaient de ne pouvoir chauffer leur mère qui doit s’asseoir sous 5 couvertures, mais qui tombe néanmoins malade. Un certain nombre d’entre eux ont pensé acheter des appareils de chauffage électrique mais le prix de ces appareils a augmenté en flèche et il est devenu très difficile de s’en procurer.

Une fois que les magasins ont été vidés de ce type de produit, les gens se sont amassés devant la Croix-Rouge qui a refusé de leur en donner ; après des essais de négociation avec les responsables, les gens y sont entrés en force et ont pris tous les appareils électriques pour essayer de chauffer chez eux. On était bien à Torbat-e-Djam, mais on avait l’impression d’assister à des pillages à Los Angeles où les gens sortaient des magasins avec des cartons de produits électriques.

Déjà la veille, ils s’étaient rassemblés devant le siège de la province pour interpeller le gouverneur sur la question du chauffage.

La nuit tombée, les gens étaient de plus en plus nombreux et en colère.

Le porte-parole du gouverneur s’est pointé pour les calmer mais ça n’a fait que faire monter la tension pour finir par des slogans de « A mort gouverneur, démission gouverneur ! »

« Concitoyen, crie ton droit ! »

Le rassemblement s’est transformé en une manifestation nocturne et les slogans se sont mutés en « A mort Khamenei ! »

Dans d’autres villes de Khorassan aussi, des scènes de révolte populaire ont été constatés. Partout ça commence avec des gens qui sortent pour trouver un moyen pour chauffer leur logement, et devant l’incapacité des responsables à répondre à leur problème, ils manifestent contre le régime.

Grève des ouvriers à la Pétrochimie de Mahshahr

-Les ouvriers de la pétrochimie de Bandar (port) Mahshahr (Khuzestân) sont entrés dans leur quatrième jours de grève pour obtenir les arriérés de salaire et l’amélioration de leur condition de travail. Ils se sont rassemblés devant l’usine pour protester contre la direction qui reste sourde à leurs revendications.

La protestation des travailleurs de cette boite pétrochimique au cours des derniers mois visait également le fait que l’entreprise avait transféré 300 personnes des employés, sous la supervision de Bandar Mahshahr Non-Industrial Operations Company. Ce transfert s’est traduit par la suppression de certains avantages tels que les primes à la production et, par conséquent, la réduction des revenus des travailleurs.

Un des ouvriers contractuels spécialisés, avec quinze ans d’expérience, a témoigné lors d’une courte vidéo que « leur salaire est de 13 millions de Tomans tandis que les organismes étatiques ont déclaré le seuil de pauvreté à 30 millions. Aussi, qu’il y a des Mollâs pour leur raconter des “balivernes” qui sont embauchés sur des contrats avantageux en CDI. »

Grève des ouvriers et employés du Cuivre à Shahr-e-Babak

-Les ouvriers et les employés du Holding “Mésse féléz ranguine” (cuivre-fer coloré) qui fait partie d’un ensemble de compagnies minières de la ville de Babak à proximité de la ville de Kerman (Sud-ouest du pays) se sont mis en grève. Les historiens pensent que la ville de Babak a été construite par Ardeshir Babakan, le plus célèbre des rois sassanides, il y a près de 1800 ans. Maymand, l’un des 4 villages les plus anciens d’Iran, se trouve à 36 km de Shahr-e-Babak. Sarcheshmeh et Miedook, les plus grandes mines de cuivre d’Iran, sont situées autour de cette ville.

Rangin Copper Metal Company a été créée en juin 1999, et a commencé ses travaux par la mise en place d’une usine de traitement de concentré de cuivre près de la mine de cuivre de Miedook dans la ville de Babak. En 2004, avec la formation de la Daryaban Gohran Company, qui est la principale exploitation du groupe, plusieurs autres entreprises manufacturières ont été incluses dans cette société. L’une des fonctions de cette société est l’extraction et l’exploitation de la mine de cuivre et la production de concentré de cuivre.

Nous savons que les ouvriers du cuivre de KhatounAbad depuis des années sont en lutte pour régulariser leurs conditions de travail précaires.

Déjà en 2003, à  KhatounAbad à proximité de Shahr-é-Babak, province de Kerman, l’employeur de la mine de cuivre a licencié 200 ouvriers du bâtiment du complexe de cuivre en construction, à qui il avait promis de les embaucher comme mineurs après l’achèvement des travaux de construction. Mais une fois les travaux terminés, il ne respecte pas sa promesse. Les travailleurs licenciés se mettent en grève et font un sit-in avec leurs familles pour protester contre cette décision. Mais cette grève et ce sit-in ne donne pas de résultat. Pour attirer l’attention, les ouvriers bloquent la route entre KhatounAbad et Babak. Mais au lieu de répondre aux revendications des travailleurs, les forces du régime attaquent les travailleurs avec des tirs à partir d’un hélicoptère. Un des ouvriers est mort sur le champ. Les travailleurs se dirigent alors vers le siège du gouverneur de la ville de Babak. Les autres citadins les rejoignent. Les forces répressives envoyées par le gouvernement (réformiste à l’époque!) attaquent les travailleurs. Dans cette attaque brutale, au moins 4 travailleurs nommés et un étudiant ont été tués et des centaines d’autres blessés.

Plus récemment, en 2016 aussi, plus de 200 personnes étaient rassemblées durant plusieurs jours devant le siège du gouverneur. Leur revendication était toujours l’obtention des contrats fixes en CDI pour sortir de la précarité.

Grève de l’aqueduc de MeshguinShahr

Samedi 28 janvier, une grève illimitée des travailleurs de l’aqueduc de Meshgin Shahr a commencé pour protester contre le non-paiement de 9 mois de salaires et les promesses non respectées des autorités.

Ils ont écrit : « Nous, 28 des ouvriers de l’aqueduc de Meshgin Shahr avec des emplois spécialisés de plombier, coloriste et dessinateur de contours, qui travaillons dans les villages de la ville, n’avons pas reçu de salaire depuis plus de 9 mois.

Il n’y a pas si longtemps, le PDG d’Ardabil Province Waterworks nous avait promis que les arriérés seraient payés en moins d’une semaine, mais cette promesse, une fois encore n’a pas été tenue. »

L’un des travailleurs de Meshgin Shahr Waterworks a également déclaré à un journaliste d’un média local : « Les travailleurs utilisent des véhicules personnels pour effectuer des missions dans les villages aux alentours, de sorte qu’en raison du non-paiement des salaires, ils n’ont même pas l’argent nécessaire pour remplir leur réservoirs d’essence et partir en mission;

C’est pourquoi, nous nous sommes unis et nous avons décidé d’arrêter de travailler à partir d’aujourd’hui, samedi 28 janvier, dans un mouvement de protestation et jusqu’à ce que nous recevions nos droits légaux. Cette fois-ci nous n’écoutons plus les belles promesses. »

Grève des ouvriers de production d’huile alimentaire Jahan

Le samedi 28 janvier, les travailleurs de l’huile végétale de “Jahan” ont annoncé leurs protestations contre le chômage avec des revendications en suspens et des promesses non tenues des fonctionnaires de l’Etat.

L’un des ouvriers de l’huile végétale de Jahan a déclaré à un journaliste : « Avant le licenciement, nous travaillions avec 80 autres ouvriers dans cette unité de production d’huile alimentaire, mais finalement, au début du second semestre de cette année, 60 d’entre nous ont été licenciés par l’employeur de Jahan Oil et depuis, nous cherchons partout pour trouver un emploi. »

Il a déclaré que « l’ancien employeur a soi-disant “ajusté” le surplus de main-d’œuvre après l’arrêt de l’exploitation de l’usine, en licenciant tous les ouvriers qui étaient sur des contrats précaire d’un mois; 13 de nos collègues ont pris la responsabilité de protéger et de garder l’usine. »

« Parmi les travailleurs licenciés, il y a des personnes qui ont des anciennetés de 15 ans.

Bien que nous recevions actuellement une assurance-chômage, mais dans les conditions économiques actuelles, il est devenu très difficile de faire face aux dépenses de subsistance, nous nous inquiétons pour notre futur, car il n’y a plus de travail…

Après cinq mois de chômage, nous n’avons pas été en mesure de trouver un nouvel emploi pour subvenir à nos besoins et à ceux de nos familles, et les autorités provinciales et municipales ne nous ont pas aidés dans nos recherches.

Chacun des chômeurs a déposé une plainte distincte auprès du Département du travail de Zanjan pour recevoir des demandes d’assurance-chômage et des arriérés, et cela fait maintenant trois mois que leurs règlements ont été décidés. »

Ce travailleur de l’huile végétale de Jahan a parlé des arriérés qui sont en suspens: « après la fin de la relation de travail, ils restent des arriérés comprennent quatre à cinq mois de salaires impayés ainsi que des heures supplémentaires et du travail de nuit, des trajets domicile-travail, des indemnités de déjeuner et d’habillement. Le règlement de ces arriérés passe par le département du travail qui ralenti leur application. »

Le budget 1402

Raïssi, Président de la République a fait un discours au Parlement en promettant monts et merveilles. Que le dollar, l’or, l’inflation … va baisser dans les semaines et mois à venir.

L’inflation d’après le centre des statistiques en Iran a dépassé les 46% ce qui est le plus grand chiffre depuis 27 ans.

Le dollar est à 45000 Tomans.

C’est dans cette situation que le parlement a décidé du budget qui a une augmentation de 40% par rapport à l’année dernière.

Les organismes étatiques vont recevoir un budget plus important comme le ministère du renseignement, l’armée des Pasdarans, la radio télé publique, l’armée, le centre des services de Howsé, l’organisation des publicités islamique etc.

Par contre, d’autres lignes budgétaires n’ont pas bougé comme la lutte contre la pollution atmosphérique.

A côté des augmentations de budget pour les organismes militaires, sécuritaires, de répression et de propagande, on voit que la ligne budgétaire concernant la protection des personnes souffrant d’un handicap a purement et simplement disparu. Un rassemblement de protestation de nombre d’handicapés a eu lieu devant le parlement ce 22 janvier.

Le budget pour la santé, l’enseignement, la protection de l’environnement n’ont pratiquement pas bougé; le budget pour les maladies qui ont des traitements difficiles a drastiquement baissé.

Pour la République islamique seulement la répression et la propagande justifient une augmentation de budget.

Il faut bien que les gens paient pour être réprimés et éduqués.

Une nouvelle vague de privatisation

-Le gouvernement Raïssi a fait passer en catimini une loi sous l’appellation de “Rendre productif les biens étatiques” pour mettre en vente l’équivalent de 108 mille milliards de tomans des biens et des propriétés lui appartenant pour essayer de combler le déficit budgétaire prévu  pour l’année 1402 (du 21 mars 2023 au 20 mars 2024), en fait, des dépenses non encore approvisionnées.

Sur proposition des chefs de pouvoir exécutifs, judiciaire et législatives et avec l’accord du Guide, une commission de 7 personnes a été désignée pour déterminer et conduire ces ventes qui ne sont que des privatisations aux profit des proches et des copains. Cette commission va travailler sous la houlette de M.Mokhber, adjoint de M.Raïssi,  mais surtout le patron du fameux “Quartier général de l’exécution du commandement de l’imam “.

L’État iranien a une longue expérience pour faire passer les biens publics au secteur privé.  Il soi-disant “vend” ces biens à des tarifs ridicules à ses proches en crédit. Au moment de l’achat, l’acheteur ne paie en liquide qu’une petite partie du prix et le reste doit être payé par mensualité sur plusieurs années. Même cette avance est en général empruntée à une banque sans caution sérieuse et par la recommandation d’une autorité militaire ou religieuse. En plus ce “reste ” est oublié et personne ne vient les enquiquiner pour le remboursement du crédit. Une fois que l’acheteur a mis la main sur le bien vendu, il commence à le démanteler et le revendre par lots.

S’il s’agit d’une entreprise de production, il entame la “restructuration” en virant le plus grand nombre d’ouvriers et d’employés, en démantelant les appareils productifs et en les vendant à prix cassé… souvent le terrain et les bâtiments de l’entreprise sont vendus une fois qu’ils ont obtenu un changement de destination ou d’affectation de la mairie du coin pour transformer par exemple une usine agroalimentaire en terrain bâtissable pour y construire des logements ou des habitations.

L’exemple parfait de ce genre de privatisation était l’usine agroalimentaire de Haft-Tappeh dont on a déjà raconté les péripéties.

Souvent les personnes qui sont à l’origine de ces forfaitures ne peuvent être inquiétées car ils exigent leur liberté d’entreprendre pour payer le salaire des ouvriers.

En réalité, l’État veut faire rentrer un peu d’argent liquide dans ces caisses mais surtout se débarrasser des biens ou des entreprises déficitaires qui lui créent plus de problèmes que ce qui lui rapportent.

Cette fois-ci, disposant de l’expérience passée des privatisations et tous les problèmes que celles-ci leur ont créés, en terme de poursuites judiciaires, le gouvernement a décidé de trouver dès le départ une solution en bloquant toute possibilité de recours ultérieur contre les décideurs et même les exécutants ; autrement dit toutes les personnes qui ont d’une façon ou d’une autre une implication dans ses privatisations ne seraient jamais inquiétées par la justice et leurs propriétés ne seraient pas mises en cause.

Et pour renforcer ce bouclier juridique, il a été décidé que toute intervenant contre l’application de cette procédure peut être condamné à 5 ans de prison.

Autrement dit si un responsable honnête quelconque des organes de protection de l’État, un comptable ou un observateur des procédures légales de l’Etat … trouve à redire sur un aspect d’une vente, trop manifestement contre le bien public, il aurait lui-même des problèmes avec la justice !

Les otages occidentaux en Iran

Nous avons appris ce samedi 28 à travers une manifestation qui a eu lieu à la place Trocadéro à Paris demandant la libération de 7 otages français détenus en Iran, qu’il y a au total une quarantaine de ressortissants étrangers notamment des franco-iraniens qui sont détenus depuis parfois des années en Iran et qui risquent des peines qui peuvent être très lourdes ; c’est la politique d’échange de prisonniers que la République islamique a toujours poursuivie pour pouvoir continuer ses actions terroristes sur le sol occidental ; ses agents peuvent toujours compter sur un régime qui ne lésine pas sur les moyens pour les libérer et peut aller jusqu’à prendre en otage de simples touristes ou de membres des ONG pour pouvoir les échanger plus tard avec ses envoyés.

Le festival des arts visuels Fajr : essai de normalisation

Le gouvernement islamique, de longue date, a essayé d’imiter tout ce que faisait le régime du Shah, en y introduisant ses règles et ses coutumes islamiques.

Une des domaines dans lesquels le régime du Shah était actif, surtout à travers le personnage de Farah Diba, “impératrice de l’Iran”, qui se considérait comme grande amatrice d’art et connaisseuse en la matière, était le festival de l’Art de Shiraz où étaient invité dans un faste extraordinaire, accompagné de frais considérables, les meilleures artistes internationaux du moment ; des réalisateurs de théâtre et du cinéma, des compositeurs de premier plan, des chefs d’orchestre, des danseurs et danseuses étoiles, des artistes peintres … Il fallait proclamer face au monde moderne que nous sommes dans le coup. Maurice Béjart faisait son ballet de Golestân, Stockhausen son concert de musique électroacoustique et de la spatialisation du son et Peter Brook y représentait sa dernière trouvaille théâtrale.  L’Iran, politiquement une dictature qui ne tolérait même pas la publication des journaux indépendants, d’un seul coup s’ouvrait, pour une dizaine de jours, à l’avant-garde artistique du monde culturel ! Il se considérait à l’apogée de la civilisation moderne et cherchait un rayonnement international.

Ce petit jeu a duré une dizaine d’années avant que l’insurrection de 79 y mette un point final.

Il y avait quelque chose d’ironique et en même temps dramatique de voir la population du centre du pays, du côté de Shiraz et les villes aux alentours, dont la population était encore très traditionnelle et même on pourrait dire campagnarde, d’affronter la musique moderne (qui était à l’époque, même moderne et audacieuse pour l’Europe) ou des filles nues attachées par les pieds et pendouillant dans les allées du Bazar Vakil par Shuji Terayama. C’était la confrontation de deux mondes qui laissait les gens perplexes et un peu en colère. Dans les mêmes allées du Bazar, la nuit les sans-logis, venus en ville pour se dégoter un boulot, dormaient en pleine rue quand les artistes étrangers étaient logés dans les palaces Safavides.  Il est vrai qu’un certain nombre d’intellectuels, notamment les étudiants de l’université de Shiraz ou d’Ispahan en profitait pour se mettre à la page de ce qui se passait en Occident. Ces festivals et notamment le festival international de films de Téhéran était l’occasion de voir tout ce qui était normalement censuré en Iran et donc vous pouvez y voir des films comme “la couleur de la grenade” de Paradjanov pendant une séance, tandis que même en France, il a fallu attendre 1977 pour qu’il soit projeté une seule séance au Cosmos à Montparnasse.

Après une première période de méfiance, ou le cinéma iranien n’a quasiment pas existé, la RI a accepté d’utiliser ce vecteur de propagande à condition que les artistes propageant les “valeurs islamiques”. Donc, la République islamique a essayé de renouer avec cette tradition en y mettant tout son cœur doctrinal.

Le festival de Fajr était l’exemple parfait de cet effort. Pendant une dizaine de jours, d’abord le théâtre puis le cinéma y sont à l’honneur. Le ministre de la culture ne manque pas l’occasion pour se féliciter à chaque fois de la qualité supérieure des œuvres jouées ou projetées pendant ce festival. Cette année, à l’occasion du 41ème année du festival, il a fait un speech à la gloire de la création artistique Islamique et a rendu hommage avec raison aux efforts de l’armée des Pasdarans car quasi toute la production audiovisuelle en Iran est sous la coupe des gardiens de la Révolution et de leur organisme de financement de production artistique qui s’appelle l’Organisation Owj.(Haut/Apogée)

Cette année une grande partie des artistes qui participent normalement à ce genre d’événements sont ou arrêtés ou menacés ; donc beaucoup d’entre eux s’abstiennent à y participer. Le secrétaire général du festival a critiqué les artistes qui n’ont pas voulu participer à leur cérémonie on les appelant des “dictateurs culturels et monétisés”.

Depuis l’année dernière et surtout le commencement du soulèvement, beaucoup de ces artistes, réalisateurs, actrices, acteurs ou techniciens ont publiquement annoncé leur démission et ne participent plus à ce genre de propagande honteuse; ce qui n’empêche pas, bien sûr, une autre partie qu’on appelle les « artistes gouvernementaux » de continuer à y produire leurs œuvres. Mais cette année, du moins la partie théâtre qui a déjà commencé, n’a pas attiré les foules et ils ont dû remplir les salles en amenant les familles des sympathisants du régime, de sorte qu’on distinguait parmi les spectateurs des enfants et même des bébés.

Le boycott était tellement fort que même les médias pro-régimes ont avoué que cette année « le théâtre n’avait pas trouvé ses interlocuteurs ».

Sur la partie cinéma, qui a commencé cette semaine, la présence des films produits par les organismes étatiques est encore plus prononcée que d’habitude.

En fait, c’est la liste des différents organes artistico-culturels du pouvoir en place :

« La Fondation cinématographique Fârâbî » y présente 9 films à elle seule. C’est l’institution nationale du Cinéma iranien sous la houlette du ministère de la culture et de la propagation islamique, à travers laquelle la politique culturelle et artistique de l’Etat est mise en musique.

« L’école artistique de la révolution islamique » a produit 3 films ; cette école est directement dirigée par « l’Organisation islamique de développement/de publicité » qui se concentre principalement sur les activités artistiques.

« Foyer d’éducation artistique de la jeunesse » ou « Institut pour le développement intellectuel des enfants et des jeunes adultes » qui est responsable pour la présentation de 2 films.

Cet institut a une part importante dans la qualité du cinéma iranien et a pu faire grandir des cinéastes importants comme Kiarostami en son sein.

Cette institution qui existe depuis 1975 sous la houlette de Farah Diba, avec notamment ses bibliothèques implantées un peu partout en Iran, a fait beaucoup dans le développement culturel de générations de jeunes.

Mais, justement comme elle a été créée par l’ancien régime, elle a toujours été l’objet d’attaques incessantes des responsables du régime. Dernièrement, le gouvernement de Raïssi a essayé, sous prétexte de la non-rentabilité de fermer l’institut et de vendre ses locaux au privé c’est à dire aux famille aux proches

« L’organisation artistique Owj » qui est la propriété du Sepah a présenté 2 films

En 2018, le directeur exécutif d’Owj, Ebrahim Hatamikia, a publiquement admis que l’organisation était gérée et financée par le CGRI.

Même l’armée régulière a produit un film qui fait partie de la compétition.

Donc on peut constater que sur une vingtaine de films présentés à la compétition, une grande majorité sont des productions gouvernementales et étatiques et donc il faut les considérer plutôt comme de la propagande officielle.

D’un autre côté, comme les réalisateurs confirmés n’ont pas voulu participer et présenter des films pour le festival, nous voyons que 16 des réalisateurs sont des inconnus et qui sont à leur premier film.  A quelque chose malheur est bon.

Malgré toutes les préventions de la République islamique pour choisir les personnalités qui vont s’exprimer sur la scène de cette cérémonie il n’a pas pu empêcher Mohamad-Hossein Farahbakhsh, scénariste et producteur de cinéma, qui est un des lauréats, de déposer son prix par terre et de dire qu’« il n y a pas à se glorifier quand nos meilleurs personnes ont été tués ou se trouvent en prison ».

Au commencement du soulèvement au mois de septembre, une centaine de cinéastes iraniens avaient rédigé un appel au boycott en faisant référence à la chanson de Shajarian, qui pendant la répression qui avait suivi l’élection contesté d’AhmadiNejad a interpellé les forces de l’ordre par une chanson qui est restée dans les annales : « dépose ton fusils par terre ». Sous ce titre, les cinéastes se sont réclamés pour le soulèvement et contre la répression qui est abattue sur les protestataires ; c’était leur deuxième déclaration dans ce sens.

Un des critiques du cinéma, au nom de Farasati aussi, a boycotté la télé et les festivals officiels. C’est pourtant une personnalité qui pendant des années avait travaillé avec le régime et avait critiqué d’un air très hautain le niveau du cinéma iranien par rapport au cinéma classique occidental.

Le cinéma indépendant iranien a toujours essayé de suivre les traces de ce qui était le cinéma du réel, le cinéma progressiste et aujourd’hui aussi un grand nombre de ces cinéastes se trouve exilé à l’étranger.

Le plus marrant c’est que le ministre de la culture lui-même dans son discours insiste sur le fait qu’il ne faut pas politiser ce genre d’événement artistique alors que la quasi-totalité de la production cinématographique présentée dans ce festival est produit par les organes de répression et les organes culturels de la République islamique et n’ont pas d’autres buts que de propager leur ligne politique et leur valeur soi-disant islamique. Si cette année, il se plaignent de la politisation du festival, c’est parce qu’une grande partie des artistes ont refusé de participer à cette mascarade de propagande.

Suite aux activités des cinéastes indépendants iraniens qui sont à l’étranger, le festival de Berlin a déclaré qu’il ne recevra plus les films produits par le gouvernement iranien.

Le rapport de l’État iranien avec ses cinéastes et à travers eux avec le monde culturel occidental est assez complexe, avec des hauts et des bas, suivant la politique déterminée de la République islamique avec le monde extérieur.

Quand les artistes iraniens, installés à l’étranger gagnent des prix, la République islamique censure les informations à leur propos pour les dénigrer ou les traite comme des personnes ayant vendu leur patrie.

Mais en même temps, il suffit qu’un de ces artistes, lors de son speech de remerciement, ne mentionne pas le sort de la population, ne dise rien qui pourrait être interprété “contre le régime” ou qu’il dédicace son prix au peuple iranien pour que le gouvernement en tire gloire et l’affiche sur tous ses moyens de communication comme réussite de la République islamique.

Les critiques internes et le rôle de Mojtaba, fils du Guide

On a déjà évoqué ici la question de la perte des soutiens internes du régime. Ce mouvement continue depuis quelques semaines et on entend des fuites à propos des critiques envers la façon dont l’État réagit par rapport au soulèvement actuel.

Ces critiques viennent même de la part des personnalités de l’armée des pasdarans, des Bassiji, ou autres responsables étatiques. On les a même entendus parfois de la bouche des imams de vendredi qui sont normalement censés formuler leur discours d’après les orientations qu’ils reçoivent d’un bulletin interne qui est publié chaque semaine par la maison du guide.

C’est en réaction à ce genre de discours critique envers l’État et le gouvernement que Khamenei le 10 janvier avait prononcé son discours qu’on a déjà relaté la semaine dernière à propos des tavabines.

Par exemple, on peut citer le discours qui a été prononcé le 30 décembre dernier par le remplaçant du commandant des forces armées, un certain Sepehri, remplaçant de M.Baghéri, chef de l’état-major des forces armées, mais aussi le discours de Sardar Hamid Abazari, conseiller général auprès du Sepah.

Dans tous ces discours, on entend la critique orientée non pas directement vers Khamenei mais plutôt vers les gens qui dans leur jargon sont appelés “les Khavas”, ce qui veut dire les particuliers. Ils entendent par-là, les hauts responsables de l’État, ceux qui ont une influence dans la gestion des affaires.

Quand ils sont en train de critiquer Khavas, ils entendent essentiellement les personnes qui, de leur point de vue, sont en train de mener réellement la répression et de l’organiser de manière quotidienne; ces personnes ne sont autres que le cercle de Commandants qui entoure le fils de Khamenei, Mojtaba qui est né en 1969, qui a fait ses études secondaires dans le lycée Alavi, qui était au temps du Shah, l’institution spécifique pour les enfants de l’élite du clergé et des nationalistes religieux. Il a fait ses études supérieures au sein de du Howsé et a fini par y enseigner.

Mojtaba était toujours auprès de son père et en quelque sorte a joué le rôle du secrétaire particulier. Il est marié à la fille de Monsieur Haddad-Adele que l’on a eu déjà le plaisir de présenter dans ses colonnes.

Apparemment, le couple a eu des problèmes de fertilité qui ont été traités à Londres durant un voyage de toute la famille pour accompagner la mère. La rumeur publique dit que ce traitement a coûté plus de 2 millions de livres sterling. Il a amassé une fortune importante, bien sûr, à travers des prête-noms au Canada et en Grande-Bretagne.

Pourtant Mojtaba n’a pas de travail, ni de fonction officielle à part l’enseignement dans le Howsé. Il doit en particulier enseigner ce qu’on appelle “les leçons externes” (درس خارج) qui sont celles qu’on est censées recevoir au-delà l’enseignement classique de théologie pour pouvoir prétendre au degré de Mojtahed. Au bout d’une dizaine d’années d’enseignement, il pourrait éventuellement et avec l’accord de ses pairs être nommé Ayatollah. Ce que son père Khamenei, au moment de sa désignation comme Guide n’était pas.

D’ailleurs, une vingtaine d’années après sa désignation par le “majless-é-khobregan” (“l’assemblée des élites”, c’est une institution qui a le devoir de vérifier la correspondance des lois avec la constitution, le Parlement des élites religieux, constitué par une cinquantaine de religieux. Ça peut être considéré comme l’équivalent du Conseil Constitutionnel en France). L’enregistrement vidéo de cette séance particulière et des discussions qui y ont eu lieu a été rendu public, il y a une dizaine d’années.

On y voit L’Ayatollah Rafsanjani, qui assure la présidence de cette assemblée, au moment où celui-ci est en train de décider si, après Khomeyni, la succession doit être assurée par un conseil ou par une personne.

 A ce moment particulier de la séance, Rafsanjani propose Khamenei en tant que guide provisoire, le temps que les khobregans désignent en temps voulu et sans précipitation un Guide définitif. Pour convaincre les autres membres de l’assemblée, il évoque un souvenir de discussion avec l’imam Khomeyni qui aurait désigné lui-même Khamenei comme quelqu’un de tout à fait apte à assurer sa succession.

Il faut savoir qu’avant cette date, la personne choisie par Khomeyni et tout indiquée pour cette charge était l’Ayatollah Montazeri qui après son intervention au sujet de la fatwa de Khomeyni pour liquider les révolutionnaires et les communistes en 81, a été, comme on l’a déjà expliqué, écarté du cercle du pouvoir et assigné à domicile. D’ailleurs quelques années plus tard, il est mort de manière douteuse et son fils a prétendu qu’il a été assassiné par le régime.

Donc Rafsanjani prétend que l’imam Khomeyni a lui-même désigné monsieur Khamenei comme un successeur potentiel.

Quand son nom est proposé comme candidat éventuel, Khamenei qui n’a pas encore le degré de l’Ayatollah se lève en refusant cette proposition et en précisant (c’est une phrase que tous les Iraniens ont maintes fois entendue) “qu’il faut pleurer pour la situation d’un pays où on me désignerait comme guide” et pour donner une explication à son refus il précise que “beaucoup de ces personnes, présentes ici même, ne vont pas accepter mes décisions”. C’est à ce moment-là qu’une partie des ayatollahs présents réagisse en disant qu’ils acceptent volontiers monsieur Khamenei « à condition que ça soit provisoire. »

Comme beaucoup d’autres situations, c’est un provisoire qui a, pour l’instant, duré plus de 30 ans. Khamenei aujourd’hui à plus de 80 ans et son camp depuis quelques années, suivant son choix de désigner son fils, prépare activement sa succession en plaçant des personnes de confiance en charge des responsabilités, c’est à dire ceux qui ont déjà fait allégeance à Mojtaba, notamment une grande partie des Pasdarans et toute la structure de répression mais aussi financière du pays.

C’est ainsi que les critiques qui sont faites aujourd’hui sur la manière de fonctionner le régime sont indirectement dirigées vers Mojtaba.

D’ailleurs, la rumeur dit que ça fait des mois que c’est lui qui prend les décisions les plus importantes et que son père ne fait que diffuser ses décisions auprès du public.

Quand la discussion au sujet de la succession du guide a pris de l’importance, notamment il y a quelques mois, quand Khamenei était malade et sous traitement, des personnalités se sont exprimées pour dire qu’on a fait une révolution pour ne pas avoir un système monarchique, basé sur l’héritage, que si on a chassé un souverain monarque, ce n’est pas pour le remplacer par un autre, même s’il est le fils du guide actuel.

D’autres ont répondu à ces critiques en disant que Mojtaba ne serait pas choisi en tant que fils de Khamenei, mais par ses qualités intrinsèques; c’est vrai qu’on ne veut pas un système basé sur l’héritage, mais en même temps, il n’y a aucune raison de se priver d’une personne qualifiée juste parce qu’il est le fils de quelqu’un.

C’est ironique de savoir que c’est exactement dans les mêmes termes que le petit Shah justifie sa candidature implicite pour le pouvoir futur de l’Iran.

Mojtaba, depuis des années, développe ses réseaux à l’intérieur du Sépah et les autres instances du pouvoir pour préparer le terrain avec l’appui de son père bien entendu; il a à sa disposition un vrai réseau de fidèles mais la crise actuelle que le régime traverse lui fait subir les critiques de l’intérieur de la part des gens qui ne sont pas contents de la façon que les affaires du pays sont gérées.

La tuerie des enfants, plus de 70, les condamnations par pendaison, les arrestations sommaires, la répression des peuples Kurdes, baloutch … la situation des prisonniers récents qui aujourd’hui dépassent largement les 20000, les tortures et les aveux publics, l’attitude du régime à l’égard de ses célébrités artistiques ou sportifs s’ajoutent aux critiques sur la gestion des protestations.

Beaucoup de ces personnes peuvent même considérer que des membres de leur famille soient impliquées dans les protestations.

L’appareil judiciaire aussi se trouve sur le feu des critiques pour ces tribunaux expéditifs et notamment les tribunaux « on line » qu’ils ont instaurés, qui après quelques minutes condamnent les gens à des peines de prison ou même à des exécutions.

Rassemblement devant le parlement européen

-La manifestation des Iraniens devant le Parlement européen, qui a eu lieu au début de la semaine dernière a rassemblé selon la police 12000 personnes, ce qui veut dire qu’il pouvait être entre 20 et 30 000 personnes.  À la fin de ce rassemblement la présidente du Parlement européen, Roberta Massola, a prononcé des paroles convenues sur le soutien de l’Europe, que les gens sont du bon côté de l’histoire et que l’histoire leur donnera raison, … que 500 million d’Européens sont derrière vous et soutiennent le mouvement pour la liberté.

Dans la manifestation de Berlin, au mois d’octobre, devant tous les caméras il y avait des drapeaux tricolores avec le signe de la royauté; même si on pouvait voir ici et là des banderoles qui disaient “on ne veut pas d’oppresseurs, que ça soit le Shah, que ça soit le Guide”. Visiblement ce slogan était porté par une minorité.

 Ce qui confirme de plus en plus que le mouvement d’opposition dans la diaspora tend plutôt vers le nouveau Shah, malgré tous les efforts des gens et des organisations de gauche qui essaient d’imposer un soi-disant bloc internationaliste.

Cette tendance idéologique n’est pas très étonnante vu le niveau de vie en générale de ces iraniens, dont une grande partie s’est sauvée de l’Iran suite à l’insurrection de 79. Beaucoup d’entre eux aussi sont tout à fait intégrés dans les classes moyennes des sociétés occidentales; depuis la manifestation de Berlin, on a l’impression qu’il y a une coupure entre les slogans scandés par les gens de l’intérieur et ceux de l’extérieur. La population modeste qui se trouve dans la rue en Iran, n’a jamais ou très rarement prononcé des slogans pro-royauté et une vraie coupure semble se dessiner entre les slogans choisis par la diaspora et la réalité des revendications politiques en Iran; on ne va pas jusqu’à dire qu’ils représentent aujourd’hui une contre révolution mais on n’en est pas loin.

Donc, suite aux actions et manifestations de la diaspora iranienne dans les capitales et les villes occidentales, surtout le rassemblement de Strasbourg, le Parlement européen a décidé de considérer l’armée des corps des gardiens de la Révolution de l’Iran comme terroriste. Cette décision qui à court terme pourrait, en cas d’acceptation par les instances supérieures de l’Europe, avoir une certaine importance dans l’activité économique du Sepah a fait réagir le gouvernement iranien. Le porte-parole de l’État iranien a de son côté menacé les Européens.

Pour l’instant, il s’agit d’une résolution du parlement qui porte sur la réponse de l’union européenne par rapport à la répression et les exécutions en Iran; le parlement donne ainsi des directives aux organes exécutifs de l’Europe et formule des demandes aux autorités iraniennes. La grande majorité de ces demandes concerne les questions de droit de l’homme, leur respect en Iran … et va jusqu’à demander aux iraniens de donner une date pour l’abolition de la peine de mort.

Par rapport aux organes exécutifs de l’Europe, le parlement demande qu’on soutienne plus activement la société civile iranienne, l’opposition, qu’on utilise les budgets qui existent pour aider les immigrés iraniens, Accorder plus facilement des visas aux iraniens qui sont en danger et poursuivis… et enfin Il a demandé à l’union européenne de mettre le nom du Sépah sur la liste des organisations terroristes.

Une partie des États membres ont insisté pour l’arrêt total des négociations sur le traité nucléaire. Cette demande a été rejetée et il semble donc que la majorité des pays désirent encore continuer les négociations sur le nucléaire iranien.

Toute la partie de la résolution en direction de l’Iran, est du blabla démocratique qui ne serait même pas lu avec attention par ses responsables ; la partie qui concerne les instances internes de l’union aussi, compte tenu des limitations de l’union concernant les questions de politique étrangère et de sécurité intérieure de chaque pays, n’aurait aucun caractère contraignant pour les États membres. Cette position de souveraineté sur ces deux champs, est surtout défendue par la commission et le conseil de l’Europe (à 27).

Donc, primo, l’Europe ne peut pas faire passer une loi contraignante sur la politique étrangère, et secundo au moment d’étudier une proposition, la commission et le conseil doivent la considérer du point de vue de chaque État et de ses intérêts particuliers.

En plus, il paraît que Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, n’est pas sur la même ligne politique que ce qui est exprimé par la résolution, c’est apparemment la raison pour laquelle il n’a même pas participé au débat sur cette résolution.

Si réellement, le Conseil de l’Europe et la commission européenne désiraient mettre les gardiens de la révolution sur la liste des terroristes, ils n’avaient aucunement besoin d’une résolution du Parlement, ils pouvaient le faire directement.

Au fond, on peut dire qu’il s’agit d’un élément supplémentaire de pression politique sur l’État iranien, sans conséquences immédiates sur son orientation. La diaspora iranienne et surtout cette opposition bourgeoise qui petit à petit est en train de se constituer à l’étranger, a besoin de dire au millions d’Iraniens qui participent à ces actions, qui se déplacent de pays en pays que leur activité sert réellement à quelque chose.

Les positions de Borrell mais aussi de Macron sur la question iranienne restent ambiguës. Macron, il y a une quinzaine de jours, a rencontré Abdollahi à Oman et a discuté chaleureusement avec lui. Il a relancé l’idée de poursuivre les négociations sur le nucléaire iranien qui, depuis le soulèvement, est au point mort. D’ailleurs cette rencontre “inopinée” a permis aux iraniens de se gargariser sur le plan intérieur encore une fois sur leur force et la stabilité du régime.

L’Iran en réponse aux décisions du parlement européen les a, de son côté, menacé en disant qu’il pourrait « considérer leur armée comme terroriste ».

Ils ont également parlé de sortir du NPT (Treaty on the Non-Proliferation of Nuclear Weapons).

Les efforts de la famille royale

En parlant de l’alternative bourgeoise, nous sommes obligés de signaler les efforts de la famille royale iranienne; dans ce creux du mouvement, accentué par le froid glacial du pays, la famille royale s’est mise en avant et essaie de combler le vide médiatique existant. Les médias iraniens de langue persane à l’étranger, essaient de tout leur pouvoir de gonfler cette alternative.

Le nouveau Shah est assis dans une interview type très moderne de CNN et discute avec une journaliste en persan (18 janvier 2023, la chaîne Manoto); quand la journaliste lui dit : “mais Monsieur le roi, pourquoi vous ne faites rien pour prendre le pouvoir?” il répond: “c’est parce que les gens ne m’ont pas donné leur tutorat pour que je puisse m’exprimer en tant que leur représentant; j’ai besoin que tout le monde me le demande” et ainsi Twitter devient un instrument de démocratie bourgeoise!

C’est à la suite de cette intervention que tous les défenseurs du régime royal ou du Shah en personne, se sont réclamés followers de Monsieur Pahlavi! Aussi à plusieurs reprises quand la journaliste lui dit “mais des millions de personnes vous réclament en Iran”, il hoche la tête de haut en bas en signe d’approbation, de manière très réfléchie, comme si c’était l’évidence même; tandis que personne n’a encore vu le nom du Shah, sauf peut-être dans des provinces arriérées où les gens pensent que le Shah est toujours Nasser-el-din shah Qajar! Ou plutôt Ahmad Shah Qajar! Je me souviens que ma grand-mère pensait toujours qu’il était au pouvoir!

D’ailleurs cette histoire de tutorat a donné l’occasion d’une autre humiliation pour le Roi autoproclamé. Sur les 4 millions de followers qu’il a sur les réseaux sociaux, moins de 400 milles l’ont nommé tuteur ! et tout de suite un autre hashtag a vu le jour qui dit : « je ne donne pas de tutorat ».

Sa mère aussi, Mme Farah diba n’a pas manqué de réagir à une déclaration du porte-parole de l’État iranien qui prétendait que le Shah est parti avec des coffres de bijoux appartenant à la royauté iranienne depuis des lustres et des dizaines de coffre de diamant, des pierres précieuses ainsi que des valises de devises étrangères et des bobards de ce type.

Elle s’est montrée outragée par ses propos et c’est vrai que ce qu’il racontait était tellement exagéré que ça pouvait faire douter de sa véracité. Néanmoins elle se décrit comme une femme dont le mari vient de lui dire “Lilianne,fais les valises, on rentre à Paris!”

Apparemment, le Shah est entré dans le Palais et a crié à sa femme “Farah, fait les valises on va se sauver en Égypte!” et elle a eu à peine le temps de mettre ses chaussures pour cavaler. Elle a certainement oublié que son fils a déjà répondu à cette question en disant qu’ils ont pris 67 millions de dollars, sans compter les biens immobiliers, les actions, les bons de trésor,… et l’argent qu’il avait déjà à l’étranger. Abbas Milani, un historien qui ne peut en aucun cas être classé à gauche, a fourni un témoignage direct dans lequel il précise que deux grands avions et un avion plus petit étaient remplis des possessions de la famille royale quand elle a quitté le pays; Aussi, nous avons su par la suite que (par exemple dans l’affaire Bettencourt) Liliane Bettencourt avait acheté une île de la famille royale iranienne, qu’elle avait refilé à son photographe, gigolo de service. Ce genre de biens devrait pulluler dans la fortune de la famille royale quand ils ont quitté le pays.

Mais au-delà de l’anecdote, cette séquence pose la question de savoir les manigances que la RI est en train de monter pour faire disparaître les joyaux de la couronne; est-ce qu’ils veulent les dérober et mettre leur forfaiture sur le dos de l’ancien régime?

Ce ne serait pas étonnant de la part des gens qui considèrent le pays comme leur prise de guerre.

La République islamique ne se voit pas comme une force d’oppression, mais plutôt comme une armée victorieuse qui a le droit de prendre ce qu’il a gagné à travers ses guerres. ِ

D’ailleurs, la sourate Al-Anfal (arabe : سورة الأنفال, Le butin) qui est la 8e sourate du Coran a précisé les choses :

« Les croyants qui auront abandonné leurs familles, pour défendre, de leurs biens et de leurs personnes la cause de Dieu, partageront le butin avec ceux qui ont donné du secours et un asile au prophète….

Nourrissez-vous des biens licites enlevés aux ennemis, et craignez le Seigneur. Il est clément et miséricordieux. »

Mais attention, il ne faut pas oublier la part du clergé :

« Souvenez-vous que vous devez la cinquième part du butin à Dieu, au prophète, à ses parents, aux orphelins, aux pauvres et aux voyageurs, si vous croyez en Dieu, et à ce que nous révélâmes à notre serviteur, dans ce jour mémorable où les deux armées se rencontrèrent. La puissance du Seigneur est infinie. »

(Traduction de Claude-Étienne Savary).

Projet Goghnous (phénix) 28 janvier 23

On avait déjà mentionné de projet Phénix comme un courant constitué sous la houlette de raisin par la vie et qui formait une sorte de « Shadow Government »

Monsieur Allahyar Kangarloo, physicien, résidant aux États-Unis et ancien directeur de ce projet qui fait partie des proches de Reza Pahlavi a fait part au média des discussions afin de créer des rapprochements entre les royalistes iraniens et ayatollah Sistani qui est un des Mojtahed shiites résidant en Irak qui pendant toutes ces années a su garder ses distances par rapport à la République islamique et qui, de temps en temps, peut éventuellement les critiquer; c’est quelqu’un de très influent parmi les chiites irakiens et le rapprochement de ces deux personnages peut constituer une base sérieuse pour la création d’une sorte d’alliance du sabre et du goupillon, sous forme d’une monarchie constitutionnelle.

Débat sur le séparatisme

Le comité Rouge de Mahabad vient d’intervenir dans le débat à propos de l’intégrité territoriale ; débat que les royalistes, après le bide de la candidature du petit Shah, viennent de lancer pour décrédibiliser les alternatives de gauche qui sont en général représentés par les comités de quartier révolutionnaires.

Voici le texte qu’il vient de publier :

“L’intégrité territoriale peut être considérée comme un droit des nations. Indépendamment de ce que le mouvement monarchiste qui s’est formé ces jours-ci, entend par intégrité territoriale, dont nous parlerons également, il est nécessaire d’énoncer quelques points sur le droit des nations à l’intégrité territoriale. Depuis que le pays d’Iran s’est formé pendant environ cent ans avec le nouveau concept d’État-nation, et sur la même base, cet État a été défini en fonction des structures et des caractéristiques de la nation perse. Un État-nation avec la langue officielle persane, avec l’histoire de la nation perse, la culture et la religion dominante de la nation perse c’est-à-dire le chiisme. Cela a été la cause du déni d’autres nations dans la géographie politique de l’Iran, et à la suite de ce déni, les autres nations ont subi répression, pillage, massacre, humiliation et occupation de leur territoire. À cet égard, le droit à l’intégrité territoriale de ces nations et par conséquent leur droit à tout pouvoir a été bafoué. De cette façon, l’intégrité territoriale du Baloutchistan est gérée par l’État-nation iranien, et les baloutchs ont été privés de toute souveraineté sur leurs terres. Donc, ici, celui qui a violé l’intégrité territoriale ce sont les dirigeants du gouvernement iranien et non pas les nations opprimées.

Ensuite, ce qui est en question c’est le concept de séparatisme; où et comment ce concept a été formulé et quelle est la raison de son utilisation.

D’après les justifications qu’on entend tous les jours, si les nations opprimées luttent pour se débarrasser de l’oppression, de la discrimination, du déni, de la suppression, du meurtre, de l’humiliation et du pillage des gouvernements iraniens et exigent leurs droits fondamentaux en tant que nation ou groupe de personnes, ils sont en train de menacer l’autorité et les intérêts des gouvernements iraniens; donc ils doivent être réprimés sous l’appellation de “séparatiste” et il faut protéger l’intégrité territoriale du gouvernement iranien qui est la force occupante.

Un autre problème est que si nous regardons l’histoire avec leur définition de la nation iranienne unique et la géographie de la nation iranienne unique, au cours des cent dernières années, il convient de noter qu’aucune des nations opprimées n’a donné une partie de cette terre à un gouvernement étranger. Parce que fondamentalement, la désintégration d’un pays ne peut se produire que suite à l’occupation d’un autre Etat, pas par les gens qui vivent sur ce territoire.

Au cours des cent dernières années, seuls deux dirigeants dictatoriaux de l’Iran ont été séparatistes et ont remis les montagnes d’Ararat, la province de Bahreïn et la plaine “Naomid”[Dasht-e Naomid ( persan : دشت ناامید), également Dasht-e-Namadī, est un une plaine désertique d’ Asie centrale, à la frontière entre l’ Afghanistan et l’ Iran] à d’autres gouvernements. Ainsi, les seules personnes qui devraient être critiquées sont la famille Pahlavi et personne d’autre.

Ces jours-ci, à côté du mouvement révolutionnaire et de l’avancée de “Jen, Jian, Azadi” [Femme, Vie,Liberté], un autre mouvement à caractère royaliste s’est formé par la volonté de Reza Pahlavi, le fils du dictateur déchu d’Iran, qui, en faisant appel aux médias, des groupes et des individus qui répondent à son appel pour lui faire allégeance, a posé comme condition préalable l’acceptation de l’intégrité territoriale. Se soucie-t-il vraiment de l’intégrité territoriale ? S’il est inquiet, pourquoi n’a-t-il pas, une seule fois, reproché à la famille Pahlavi d’avoir violé l’intégrité territoriale de l’Iran?

La réponse est claire. Il ne se soucie pas de l’intégrité territoriale, mais cherche à créer  une scission au sein du mouvement progressiste « Zhen, Jian, Azadi ». Dès le début de la révolution de février 79, le régime islamique d’Iran a su mobiliser, avec les mots-clés de l’intégrité territoriale et le séparatisme, la majorité du peuple du centre contre les luttes pour les droits des nations opprimées et a réussi à les réprimer, piller, tuer, exécuter, terroriser, humilier et donner une légitimité à l’occupation des terres de ces nations. Utilisant la même technique, Reza Pahlavi veut briser ce mouvement progressiste et la solidarité unique des nations d’Iran et des masses populaires. Mais pour quelle raison ?

Le mouvement “Femmes, Vie, Liberté”, avec son contenu radical, promet une nouvelle société, et c’est la cause de l’impact généralisé de ce mouvement non seulement en Iran, mais dans le monde entier, en particulier chez nos voisins. Tout en examinant les développements à l’intérieur de l’Iran, il est nécessaire d’examiner les développements mondiaux et régionaux afin d’être en mesure d’examiner les dimensions véritables de ce mouvement. Ce mouvement, qui promet la vie, la liberté et l’égalité, et qui rejette toute réaction, Vélayat, discrimination, censure, torture et exécution, a terrifié tous les dirigeants réactionnaires de la région qui sont hantés par la victoire du mouvement en Iran (qui est un pays vraiment influent dans la région) . Si ce mouvement arrive à triompher, ses prolongations se propageront à d’autres pays. Par conséquent, il n’est pas étrange que les médias travaillant avec les fonds en millions de dollars du régime réactionnaire saoudien soient complètement alignés sur le Velayat-e-Faqih dans la poursuite de la déviation et de la désintégration de ce mouvement. Certes, aucun des pays développés (impérialistes) ne veut la formation d’un Moyen-Orient nouveau et progressiste, et chacun d’eux essaie de renforcer les forces anti-révolutionnaires.

27 janvier 2023

Comité de la jeunesse révolutionnaire rouge de Mahabad”

Le taux du dollar

Le nouveau patron de la banque centrale iranienne a fait tout son possible pour réaliser la promesse qu’il avait faite à sa prise de poste pour faire baisser le dollar. Il a essayé de limiter drastiquement les transactions de change dans les bureaux de change (même en utilisant la violence) et d’inonder le marché. Mais rien n’y est fait et après quelques soubresauts le dollar est revenu dans son canal de 45000 Tomans.

Les nouvelles sur la monnaie démontrent que le processus de changement de la monnaie iranienne vers n’importe quel autre moyen d’échange reste aussi fort. Les gens essaient de sauvegarder leur économie ou leur capital en le convertissant vers d’autres équivalents. Notamment les cryptomonnaies et le Tether qui a le même taux que le dollar.

Mais dans ce domaine aussi l’État est présent et monte des coups. Les gens qui avaient acheté de cette monnaie se sont trouvés arnaqués et ont fait un rassemblement mercredi dernier à Mashad pour protester…

Les infos diverses, glanées par ci, par là

-Le samedi 21 janvier lors de la rencontre bilatérale du ministre iranien des affaires étrangères M.Abdollahi avec les responsables de la Turquie dans son discours est revenu sur “nous regrettons la mort accidentelle d’une jeune femme iranienne mais la vérité est que les intervenants étrangers, les médias occidentaux et les réseaux sociaux ont attaqué de manière organisée l’Iran avec des but politiques et sécuritaires particuliers contre la République islamique d’Iran”,

-L’exécution de M.Akbari, un des responsables binational (irano-britannique) de la RI a fait réagir les anglais qui se sont rapprochés des Américains pour harmoniser leur position  envers l’Iran. Blinken et le ministre anglais des affaires étrangères ont décidé d’étendre les sanctions contre l’Iran.

-Le vendredi 21 janvier à Ardebil en Azarbayjan des cocktails Molotov ont été lancés sur le bâtiment du palais de justice..

-Le 29 janvier, les médias ont indiqué qu’une usine de production d’armement a été attaquée par drones à Ispahan.

La population a entendu 3 déflagrations au centre de la ville, il semblerait qu’il s’agisse plutôt d’entrepots d’armement, ou de laboratoires pour les industries militaires au centre de la ville; il est improbable que le régime ait installé des usines de production d’armement au centre ville quand nous savons que plusieurs installations de ce type existent dans le sud et aux alentours d’Ispahan.

Ce genre d’attaque est généralement l’œuvre des organismes sécuritaires d’Israël sur les cibles en relation avec le nucléaire.

On saurait plus tard ce qui était réellement visé. La République islamique a bien entendu déclaré que cette attaque a été neutralisée à temps sans faire de dégâts.

-Le même jour, un tremblement de terre est survenu à Khoy ainsi que des déflagrations dans la région d’Azerbaïdjan; la rumeur met en doute l’origine naturelle de ce tremblement de terre car il existe beaucoup d’unités de productions d’armement militaire dans la région de Khoy.

-Le 25 janvier, Yahya rahim-safavi, commandant du Sepah et conseiller de Khamenei a déclaré lors d’un discours: “Dieu a jeté tout le tableau Mendeleïev dans le sol de l’Iran, on a non seulement du pétrole et du gaz mais du chrome, chromite, Fer, cuivre, uranium… on a tous les éléments. Dieu nous a donné le meilleur des territoires et le meilleur des nations”… Et bien sûr le meilleur des Guides!

-Monsieur Ahmad Vahidi ministre de l’Intérieur a nommé le soulèvement qui a commencé maintenant depuis 4 mois “des troubles” et il a dit que c’est le résultat d’une mauvaise mode de vie que les gens ont adopté. Il a prétendu que les gens qui ont participé dans ces événements étaient ceux chez qui, la notion de famille avait perdu son importance. Il a donc insisté pour renforcer le mode de vie islamique dans les familles.

La République islamique qui n’a pas pu imposer son mode de vie islamique par l’éducation et la propagande, a voulu essayer de le faire en usant de toutes les moyens possibles d’oppression et n’à pas hésité à user de la violence jusqu’à tirer directement sur population; ils veulent faire entrer cette façon de vivre, en fait leur vision de la vie, par la force dans les familles c’est-à-dire à l’intérieur même de l’espace privé. Ce mode de vie qu’il essaie d’imposer dans les foyers iraniens en réalité n’est rien d’autre que ce que Daesh essaie de faire en Afghanistan. Daesh pour eux est devenu un modèle idéal et ils n’arrivent pas à comprendre que ce modèle ne peut pas correspondre à l’évolution de la société iranienne depuis 50 ans.

-Le samedi 21 janvier, un rassemblement s’est tenu à Najafabad d’Ispahan où les gens ont protesté contre l’inaction des responsables contre la pollution.

Ils disaient qu’ils respirent du poison tandis que les responsables regardent ailleurs.

-La désorganisation régnant au sein du gouvernement de  Raïssi est devenue flagrante par exemple en marge  du Conseil des ministres, Monsieur Seyed Mohammad Hosseini, adjoint aux affaires juridiques du président, pour calmer les rumeurs au sujet d’un remaniement ministériel, a indiqué que la rumeur concernant des modification au sein du gouvernement n’étaient pas fondées.

A midi, le jour même, il a été limogé du gouvernement.

C’est une méthode qui était fréquemment utilisée par le gouvernement d’AhmadiNejad;

Le cas de Monsieur Mottaki à cet égard est exemplaire:

Avec 5 ans et 4 mois, Manouchehr Mottaki avait le record ministériel le plus long des deux administrations d’Ahmadinejad. On l’avait même appelé “Sheikh-ol-Wozara”(Le monsieur des ministres); Mottaki a été démis de ses fonctions le 22 décembre 2009, alors qu’il était au Sénégal pour délivrer un message de Mahmoud Ahmadinejad. Il a été informé de son limogeage par le président du Sénégal lors des négociations! Par la suite, le gouvernement du Sénégal a jugé cette action insultante et a rappelé son ambassadeur de Téhéran.

***

Ici, s’arrêtent nos dernières nouvelles du front iranien, en attendant la prochaine bataille!

Habib

29 janvier 23

 

Nouvelles d’Iran du 10 au 17 janvier 23

Un des écrivains majeurs de la littérature moderne iranienne Houshang Golshiri disait que: “si on commence à toucher à leurs rituels d’uriner, alors, c’est tout l’édifice qui va s’effondrer.”

Introduction:

Cette semaine, un froid de canard s’est abattu sur l’Iran. Il a été constaté par endroit, des températures allant jusqu’à moins 20 degrés celsius. Il semblerait que le général froid ait eu raison du soulèvement; Avec la crise du gaz, les gens sont tellement préoccupés et en galère pour se chauffer qu’il serait difficile de penser à autre chose.

Néanmoins il y a eu des points forts de contestations, au début et à la fin de la semaine.

Dès la nuit du dimanche au lundi, devant la prison de RajaïShahr et vendredi à Zahedan après la prière du vendredi.

Ces mouvements ont été suivis par les protestations des ouvriers du pétrole et du gaz qui ont débuté dès le samedi 13 janvier 2023;

Aujourd’hui 17 janvier on a reçu certaines informations au sujet de cette mobilisation que vous pouvez trouver sur le site dndf.org, à la date d’aujourd’hui, notamment les revendications précises de ces ouvriers. (Links: http://dndf.org/?p=20449#more-204

Entre-temps et pendant les autres jours de la semaine, le bruit de fond des protestations était maintenu par les slogans de nuit dans les quartiers résidentiels, les graffitis et les slogans inscrits par tous les temps sur les murs de la ville et ce, malgré les efforts redoublés des municipalités pour les recouvrir ou les nettoyer…. Et les suites des commémorations rituelles des morts et des martyrs du soulèvement.

Dans ce creux du mouvement, qui tient beaucoup au temps glacial de cette semaine en Iran, la diaspora iranienne à l’étranger aussi, a accentué sa mobilisation en exigeant un peu partout, dans les capitales occidentales que l’armée des Pasdarans  de la révolution islamique (Corps des Gardiens de la Révolution Islamique,IRGC) soit reconnue officiellement comme une organisation terroriste.

Hier, lundi 16 janvier, les Iraniens se sont donnés rendez-vous pour une grande manifestation à Strasbourg devant le Parlement européen. Des bus sont en partance de différents pays pour rejoindre Strasbourg.

L’alternative bourgeoise aussi de son côté, a publié son deuxième tweet à 5, pour réclamer la même chose. Ils essaient de s’organiser en multipliant les appels aux Pasdars, bassijis et autres membres de l’armée régulière de “rejoindre les rangs des opposants, qu’il ne va rien leur arriver, qu’ils seront accueillis avec les bras ouverts” … ils sont en train de rejouer le vieux refrain de 1979 qui, devant une insurrection qui venait, a chanté “l’armée est notre frère”… Il manquerait juste les fleurs au bout des fusils pour que la photo de la réconciliation nationale soit parfaite.

Mais reprenons, dès le début, les événements de la semaine.

A la prison de RajaïShahr

Dans la nuit du dimanche à lundi vers 3h du matin, un tweet a prévenu la population que deux autres condamnés, à la prison de Rejaïshahr aux noms de Mohamad Beroghani et Mohamad Ghobadlou ont été transférés en cellules individuelles. C’était le signe que ces deux personnes, ayant déjà reçu la sentence de la mort, vont être pendus à l’aube, au moment de la prière du matin. Sans aucun appel ou organisation préalable, les gens se sont rués dans la nuit glaciale vers la prison. À 3h30 du matin, il est rare de voir des bouchons sur l’autoroute qui lie Téhéran à Karaj. Les forces de l’ordre, de leur côté, ont envoyé des voitures militaires et des forces supplémentaires pour arrêter la population. Mais tous leurs efforts étaient vains; des milliers de personnes se sont rassemblées devant les portes de la prison et ont ouvertement scandé des slogans contre le régime et pour la libération des prisonniers politiques. Il était prévu qu’ils soient pendus en public, ce qui est une pendaison extrêmement sauvage car ça s’effectue avec des grues, ce qui est très différent d’une pendaison classique qui se fait au sein de la prison en jetant quelqu’un, la corde au cou, dans le vide. Quand la grue, petit à petit, s’élève, le condamné avant la mort va subir une torture effroyable. C’est une manière particulièrement sauvage d’exécuter les personnes. Nous savons que la préoccupation de Monsieur Guillotin était justement d’éviter de telles barbaries.

Quoi qu’il en soit, la détermination de la population qui a scandé et est restée, des heures entières devant la prison a pu empêcher leur pendaison pour l’instant. Le jour s’est enfin levé et le moment de la prière du matin largement passé, aucune voiture n’a franchi la porte de la prison.

C’était une grande victoire sur les forces de la répression.

Pour le 3ème jour de Mohamad Hosseini

– L’exécution par pendaison de 2 jeunes, Mohamad-Mehdi Karami et Mohamad Hosseini, a beaucoup ému la population et a reçu un retentissement à l’étranger. Le fait que Mohamad-Mehdi avait demandé à son père de “ne rien dire à maman” a bouleversé plus d’un et a été considéré comme le symbole de  l’innocence et de l’affection de ce jeune à l’égard de sa mère; un réalisateur italien a même déclaré son intention d’en faire un film.

Aussi, dès que le fait que l’autre victime Mohamad Hosseini n’avait pas de parents s’est ébruité, des milliers de personnes ont déclaré qu’ils se considèrent comme ses parents et au 3ème jour de son décès, ont participé à une cérémonie grandiose sur sa tombe, notamment les parents de l’autre martyr de cette journée lugubre c’est-à-dire Mohamed Mehdi Karami. Quand le père de Mohamed Mehdi avec ses doigts calleux a déposé une fleur sur la tombe de Mohamed hosseini, c’était tout le peuple iranien qui rendait à travers lui un hommage appuyé à son héros.

On a vu aussi des graffitis fleurir sur les murs qui disaient :

“Je suis ta sœur, Mohamad” ou “Mohamad est de notre famille”.

Tout le monde s’est empressé devant sa tombe avec des fleurs et a préparé du repas traditionnel, de la nourriture votive (غذای نذر). En Iran, le don de nourriture pour une intention vertueuse est un acte très répandu chez les croyants chiites pour remémorer quelqu’un ou lui témoigner de l’affection.

On a vu au moins, des dizaines de vidéos apparaître sur la toile qui montrent des petites cérémonies familiales à l’intérieur des foyers pour Mohamad Hosseini, avec sa photo entourée de fleurs et tous les repas votifs qui allaient être distribués.

Par la suite, on a vu des dizaines de vidéos sur la toile qui montraient les familles préparer des repas de vœux à la maison et organiser des petites cérémonies familiales pour lui rendre hommage; Par la suite on a su qu’il était ouvrier dans l’aviculture et rêvait de posséder un jour une voiture Pride qui est un modèle bas de gamme et sans prétention. C’était quelqu’un de modeste et très aimé par ses collègues.

La crise du gaz

– On avait déjà évoqué le manque du gaz dans le pays et le paradoxe que ceci constitue aujourd’hui; on est rentré dans une phase qu’on peut qualifier de crise du gaz car ceci est en train de prendre des proportions inquiétantes.

Cette crise, ironiquement plus que les grèves, est en train de mettre le pays à l’arrêt. Décidément, rien ne peut fonctionner logiquement dans ce pays, même pas ses luttes et ses révolutions !! Les responsables de la République islamique notamment le ministre du pétrole monsieur Ôwji, qui, il y a quelques mois, en imitant les responsables russes, prévoyait en ricanant un hiver très rude pour les pays européens, qui allait les mettre à genoux dans la guerre de l’Ukraine, aujourd’hui, ne sais plus quoi inventer pour cacher leur misérable faillite dans la fourniture du gaz dans un pays qui est pourtant assis sur des réserves de presque 10 % du gaz mondial.

Il est risible et en même temps catastrophique de constater que le pays qui a la deuxième réserve mondiale du gaz et même en comptant la découverte du gaz dans la mer Caspienne, la première réserve mondiale, n’arrive pas à fournir suffisamment de gaz pour contenter sa propre population !  Comme on l’avait déjà dit, une grande partie des industries et de l’administration sont fermées à cause du manque du gaz; Cette semaine, ils ont fermé les écoles et la fourniture du gaz pour les particuliers a été coupée dans beaucoup de régions.

La municipalité de Téhéran (par la voix de Monsieur chafighi adjoint au maire du terrain) a déclaré qu’à cause du froid et pour économiser l’énergie seulement ⅓ du personnel soit présent… le présentateur tu n’arrivais pas à avaler une telle absurdité qui n’a pas manqué de lui poser la question de savoir dans quelle mesure la présence d’un tiers du personnel réduit la consommation de l’énergie puisqu’il faut bien chauffer l’ensemble des bâtiments ? À cette question Monsieur l’Adjoint tu n’attendais certainement pas à être bousculé par un présentateur normalement à qui à sa cause, a répondu que de toute façon “si Dieu le veut on va arrêter tous les appareils de chauffage de l’administration” ! En fait toutes ces directives étaient tellement contradictoires et inpraticable que le lendemain ils ont décidé de fermer toute l’administration, ainsi que tout le secteur privé les écoles et en fait eux-mêmes ont transformé Téhéran en ville morte.

23 et le 24 du mois de Dey les pompes de carburant pour les voitures dans une grande partie des villes étaient complètement ferné et les gens grelotés dans leur voiture dans des queues interminables en attente d’une éventuelle ouverture. Les professionnels qui sont obligés légalement d’utiliser du gaz liquide étaient en rade bien avant les particuliers qui utilisent de l’essence.

Le ministre du pétrole qui faisait des plaisanteries sur la situation européenne cet hiver a été bien obligé de reconnaître sa situation catastrophique et d’un ton demandeur supplie la population à la population de faire des économies d’énergie.

Samedi hier la pression du gaz là où il y avait pas de coupure était tellement faible que tous les magasins et les commerçants ont gardé leur magasin fermé

La Caspienne et les rapports avec la Russie

Un mot pour expliquer ce qui s’est passé au niveau de la Caspienne et l’exploitation de cette ressource dans la plus grande mer fermée de la planète. Avant l’effondrement de l’URSS et la nouvelle répartition des frontières tout autour de la Caspienne, elle était divisé en deux parties égales 50/50; c’est un traité international du temps du Shah qui régit la chose. Après la dislocation de l’URSS et l’indépendance des républiques d’Asie centrale, le statut de la mer Caspienne est resté flou durant plus de deux décennies.

En 2018 sous le président Rohani, sans crier gare, la République islamique a voulu encore une fois démontrer son allégeance envers la Russie; c’est l’expression diplomatique du fameux principe de “ni occidental, ni oriental, République islamique”  qui s’est bancalisé(!) et qui boite vers l’Est.  Dans une conférence qui s’est tenue au Kazakhstan, l’Iran a accepté de revenir sur ce traité international qui pouvait très bien être défendu et a accepté de se contenter de 13 % de la totalité. Les experts russes qui avaient participé à ces négociations, ont avoué plus tard, qu’ils étaient tout à fait étonnés de l’attitude du représentant iranien car ils attendaient que les diplomates iraniens défendent, bec et ongle l’ancien traité qui leur garantissait la moitié des droits, ce qui n’a pas été le cas puisque les Iraniens ont tout de suite accepté la nouvelle répartition au profit de la Russie et les 3 autres pays riverains.

En plus, il se trouve que, sous ses 13 %, il y a des réserves de gaz très importantes; ce qui permet théoriquement à l’Iran de détenir le premier réserve du gaz au monde; mais la Russie a interdit l’exploitation de ces réserves de gaz et apparemment l’Iran l’a encore une fois accepté. L’Iran semble donc le pays le moins bien loti, il récupère la portion de Caspienne la plus petite!  Ce n’est pas pour rien que les forces occidentales accusent l’Iran de devenir une vassal de la Russie et qui accepte sans broncher le diktat de ce pays.

En réalité, l’Iran qui se veut champion dans la lutte contre les Américains a besoin de l’appui politique, diplomatique et éventuellement militaire de la Russie pour tenir tête aux Américains, mais aussi à sa propre population ; cela les oblige à accepter beaucoup de reculades successives sur le plan international. Le régime du Shah n’était pas un foudre de guerre quand il s’agissait de défendre les intérêts de l’Iran sur le plan international mais au moins face aux Russes, il était un peu plus regardant et ne cédait pas sur tout et n’importe quoi. Le régime du Shah était un territoire ouvert devant les exigences américaines, mais devant les Russes ils montraient une certaine résistance.

La république islamique, fière de vendre des drones à la Russie, est pourtant traité toujours comme un valet c’est-à-dire avec dédain et mesquinerie; on l’a vu à l’occasion de la vente des armements surtout des S400 (qui est un système de défense antiaérienne mobile) que la Russie sous la pression des États-Unis a traîné les pieds pendant des années pour les vendre à l’Iran. Depuis l’affaire des drones et des missiles, les deux pays ont commencé à parler de coopération militaire accrue dans le domaine de la défense aérienne. L’Iran pourrait recevoir des Sukhoi 35 et des S400. Du moins c’est ce qu’ils espèrent.

Revenons à nos moutons sur le manque du gaz en Iran; donc ils ont mis en congé les écoles et l’administration pour cause de manque de gaz, à l’exception des provinces où il ne fait pas très froid. On avait déjà précisé que beaucoup d’industries, d’usines et des zones industrielles étaient à l’arrêt depuis la semaine dernière.

Pour les militants ouvriers qui essayaient de mobiliser les gens pour faire des grèves, la situation est devenue paradoxale puisqu’il n’y a pas de production dans les usines pour qu’on puisse y entamer des grèves !!

Apparemment, la consommation du gaz des ménages est de 800 millions de m3 par jour par rapport à laquelle aujourd’hui on a un manque de 250 millions de m3.

Le régime a mis la pression pour augmenter la productivité de ses installations. Mais les installations sont vétustes et en manque d’entretien. Ce qui rend toute augmentation problématique. Des circuits sont sortis de la production immédiate pour être réparés ou entretenus.

D’un autre côté on entend parler des actes de sabotage de la part des ouvriers travaillant sur les plateformes, les puits et les raffineries, de sorte que le rendement du travail se situe sous la barre des 50%.

Ce qui a obligé le ministre en charge de  demander aux ménages d’éteindre 6 heures par jour le chauffage à la maison et aussi de ne chauffer qu’une seule pièce par habitation, de s’habiller chaudement à l’intérieur, de mettre de gros couverture devant des fenêtres et de ne pas hésiter à s’enrouler dans des couettes pour pouvoir passer l’hiver. On est bien loin de leur fanfaronnade pour l’Occident!

De toute façon le prix du gaz a tellement augmenté que les gens ont réellement du mal à le payer et ce genre de mesure d’économie était déjà entré dans le mode de vie des plus modestes.

Promesse du gaz au Liban

Tout ceci n’empêche pas notre ministre des affaires étrangères monsieur Abdollahi de visiter le Liban et d’y promettre monts et merveilles au Hezbollah.

La République islamique a dépensé des fortunes immenses au Liban à travers le Hezbollah pour le fortifier et en même temps renforcer sa présence politique et militaire. Tous les Iraniens connaissent un certain entrevue du patron du Hezbollah, Seyed Hassan Nasrollah, obèse et boursouflé, assis devant les caméras et qui termine son speech en disant aux musulmans shiites du Liban “de ne pas s’inquiéter, tant que la République islamique a du pétrole, nous on aura de l’argent.”

Ainsi que l’envoyé spécial de Hamas qui racontait fièrement en 2006 qu’à son retour de l’Iran le commandant Soleymani leur avait remis 40 valises contenant 22 millions de dollars en espèces. FalahatPisheh un des patrons de Sepah a dit clairement qu’ils ont donné 20 à 30 milliards à la Syrie pour soutenir leur régime. On ne peut pas douter que ces déclarations sont tout à fait exagérées mais néanmoins, ça nous dit quelque chose des rapports entre l’armée Ghods et le Hezbollah Libanais et les autres forces qui constituent “la profondeur stratégique” de l’Iran. Tout le prestige de Soleimani dans ces régions vient du fait qu’il était le principal pourvoyeur de fonds pour ces factions. C’est sur la base de cette croyance divine à l’islam chiite que l’Iran peut intégrer dans le corps de son armée pour la Syrie, les combattants du Hezbollah libanais ou de Hashd-ol-Shaabi irakien ou encore des fatimides afghans et qui aujourd’hui peuvent servir dans la repression interne en Iran. Ce n’est pas la croyance divine qui les amène sur les champs de bataille mais les dollars sonnants et trébuchants du pétrole.

Ces jours-ci, on raconte que l’armée des Pasdarans a créé des “branches culturelles” et il a été décidé en haut lieu de leur accorder un milliard et demi de dollars à chacune. On se demande qu’est-ce que ça peut être l’activité de ces branches ?!

Pour revenir à la crise du gaz, il faut ajouter qu’en pleine pénurie de l’énergie en général en Iran, (car le pétrole et l’essence aussi sont introuvables), avec le froid et la neige qui se sont abattus sur le pays, Monsieur le ministre des affaires étrangères Abdollahi en balade au Liban, le 13 janvier 2023, a dit que “l’Iran est prêt à fournir du gaz au Liban, comme il exporte de l’énergie vers l’Irak depuis longtemps” et qu’ils ont même signé un contrat avec un pays européen dont il tait le nom. “Le gouvernement de la République islamique va continuer avec force à soutenir le peuple et le gouvernement libanais”.  Bien entendu, sans aucune arrière pensée politique, vu que les élections présidentielle Libanaises sont en cours et les Iraniens aimeraient bien alourdir le poids du Hezbollah dans l’équation politique libanaise malgré le fait que les musulmans ne peuvent constitutionnellement prétendre à ce poste. Si Seyed Hassan Nasrallah, se met encore à prendre du poids, on pourrait assister à une autre déflagration à Beyrouth !!

Les pays Européens dans le discours de la RI

Un mot aussi sur ces prétendus “pays européens”, qui d’après les divers responsables iraniens “ont demandé de signer des contrats avec nous”. Cette expression a toujours joué un rôle absurde dans le discours du pouvoir iranien. Eux, qui ne ratent pas une occasion pour dénigrer les pays occidentaux, ne peuvent s’empêcher de se glorifier des soi-disant demandes de ces pays à leur égard ! Déjà au moment de la crise du Coronavirus, quand ils ont interdit les vaccins étrangers, ils ont prétendu avoir découvert eux-mêmes un vaccin “dont les pays étrangers avaient déjà commandé par millions”! Ces gens pensent réellement que le peuple iranien est amnésique et oublie dès que prononcées les mensonges de la République islamique.

La RI vient de créer une nouvelle organisme de répression

Le guide suprême de la République islamique cherche à ajouter une nouvelle organisation de renseignement parallèle aux nombreuses agences de renseignement iraniennes. Elle va  s’appeler “l’organisation de protection des informations du pouvoir judiciaire”. Mais,quelles sont les organisations de renseignement parallèles et pourquoi sont-elles formées?

L’histoire de la création d’institutions de sécurité parallèles en Iran remonte à une affaire nommée “les meurtres en série”.

Le 22 novembre 1998, Dariush Forouhar et son épouse Parvaneh Eskandari ont été sauvagement massacrés de plusieurs coups de couteau à Téhéran. Moins de deux semaines plus tard, les corps de deux écrivains nommés de gauche, poètes et traducteurs, Mohammad Jaafar Pouyandeh (traducteur de Balzac, Adorno, Horkheimer, Bakhtin, Lukach … ) et Mohammad Mokhtari (poète et critique littéraire) ont été retrouvés dans les rues de Téhéran. De nombreux autres écrivains et intellectuels se sont également ajoutés à cette liste de victimes, notamment Ahmad Alir-Alaï (traducteur de J.L.Borges) et cette affaire qualifiée de meurtres en série a été inscrite dans l’histoire noire de la République islamique. Au cours de cette série de meurtres, plus de 80 personnes, essentiellement d’ intellectuels confirmés, ont été assassinées par les agents du gouvernement.

A cette époque, Mohammad Khatami était le président du pays et ces nouvelles se reflétaient dans l’espace relativement ouvert des journaux. Sous la pression de l’opinion publique, Khatami a exigé qu’on procède aux investigations nécessaires et de poursuivre l’affaire de ces meurtres sur le plan judiciaire. Alors qu’Ali Khamenei attribuait, comme d’habitude, ces meurtres à des agents infiltrés et à des ennemis étrangers, un mois plus tard, sous la pression de l’opinion publique et de la presse, le ministère du Renseignement acceptait le rôle de certains de ses propres employés. Cela est devenu le point de départ de la formation d’une nouvelle institution de sécurité parallèle qui a été créée après le limogeage et la démission forcée de certains hauts fonctionnaires du ministère de l’Information du gouvernement. Ils ont donc créé une institution de renseignement indépendante du gouvernement qui n’est responsable que devant Ali Khamenei. De cette manière, la base de la création de l’Organisation du renseignement des gardiens de la révolution a été créée.

De nombreuses organisations et organes de sécurité de ce type ont été créés depuis. Tout d’abord, la faction ou le gang au pouvoir se crée une force spéciale de renseignement et de sécurité, et après avoir prouvé son utilité par rapport au pouvoir en place, elle est inscrite dans la loi.

La première institution parallèle en 2008 était l’IRGC Intelligence Agency, qui est devenue plus tard l’IRGC Intelligence Organization; Une organisation qui, contrairement au ministère de l’Information, n’est pas responsable devant le président et le parlement et est directement sous la tutelle du Guide. Cette organisation opérait auparavant officieusement sous la responsabilité du ministère de l’Information et est devenue en 2008, l’une des deux principales agences de renseignement de la République islamique d’Iran.

L’organisation que le Guide a décidé de créer ces jours-ci, s’appelle l’Organisation du renseignement et de la protection judiciaires. Considérant que l’organisation du renseignement du corps des gardiens de la révolution islamique est sous la supervision du commandant en chef du corps des gardiens de la révolution islamique et que l’organisation du renseignement de la police est sous la supervision du commandant de la force de police, naturellement , la nouvelle Organisation du renseignement de la magistrature sera également sous la supervision du chef de la magistrature. Il convient de noter que le commandant en chef des gardiens de la révolution, le chef du pouvoir judiciaire et le commandant des forces de police sont directement nommés par le Guide, de sorte que les trois institutions fonctionnent en fait sous la supervision d’Ali Khamenei.

Le plan de l’Organisation de protection des informations judiciaires a été présenté en mars de l’année dernière (février 2022). Ils transforment le service de protection des informations judiciaires en une organisation. Les aspects généraux de ce plan ont été approuvés. Cette organisation se transformera en une institution de sécurité supplémentaire

Il existe aujourd’hui en Iran une vingtaine d’institutions de sécurité, souvent regroupées au sein du Conseil de coordination des institutions de renseignement de sécurité. Il s’agit d’un ensemble d’institutions de sécurité, auxquelles s’ajoutent d’autres institutions, telles que le Bureau d’inspection du chef de la République islamique, le Bureau d’inspection du Président, etc.

Cette série montre à quel point l’atmosphère de la République islamique est devenue sécuritaire, et en même temps, les différentes factions de pouvoir se méfient les unes des autres, et chacune essaie de faire pression et de contrôler l’autre par le biais de sources d’information. Cette série montre aussi la méfiance de l’institution gouvernementale envers la société civile, qui ne peut penser qu’à renforcer sa force de sécurité pour améliorer la situation.

La revendication de La création d’Adalate-khane (la maison de la justice) a été la première étincelle de la révolution constitutionnelle iranienne, il y a plus de cent ans. Apparemment, la question de l’établissement d’un système judiciaire indépendant n’a pas encore été résolue et ne peut être obtenue qu’en renversant le gouvernement de la République islamique.

Pars-Sud et l’état du mouvement ouvrier

Nous avions déjà publié l’appel des ouvriers de l’industrie pétrolière pour le 16 janvier.

Vous pouvez trouver à la date d’aujourd’hui, le 17 janvier, sur le site DNDF.org, les développements de cet Appel et notamment les revendications précises de ces ouvriers. (Links: http://dndf.org/?p=20449#more-20449)

Comme vous pouvez le constater, dans cette déclaration ainsi que dans d’autres, on parle régulièrement d’Assaluyeh et de ses plateformes numérotées. Il serait donc utile de donner quelques mots d’explications sur le site gazier de Pars du Sud pour mieux comprendre les informations.

South Pars Gas Complex Company (SPGC) est l’une des filiales de National Iran Gas Company, qui a été créée en 1998, après la découverte en 1971 par Shell d’un important gisement offshore dans le Golfe Persique situé entre le Qatar et l’Iran. Avec une superficie de 9700 kilomètres carrés et à une profondeur de 3000 mètres sous le fond marin, c’est le plus grand gisement de gaz au monde, situé à 105 kilomètres de la côte du port Assalouyeh. SPGC est responsable de l’exploitation des installations terrestres à phases multiples de ce champ gazier. Ces installations sont conçues et mises en œuvre par Pars Oil and Gas Company, l’une des filiales pétrolières iraniennes. Il va sans dire que cette industrie est parmi les plus importantes du pays. La société South Pars Gas Complex Company a été établie dans les villes d’Assalouyeh et de Kangan de la province de Bushehr, le long de la côte du golfe Persique sous la forme de deux sites industriels. Les raffineries de gaz à South Pars sont situées sur deux ensembles portant le nom des deux localités : le site No 1 est Assaluyeh et le No 2 Kangan, qui se composent au total de 24 “phases” dont l’inauguration de chacune d’elles est source de gloire et éventuellement de cérémonie avec déplacement et discours du président de la République.

Les deux pays partagent cette ressource. La partie iranienne d’après les données officielles couvre une superficie de 3700 kilomètres carrés et ses réserves sont de 14 000 milliards de mètres cubes de gaz et 17 milliards de barils de gaz à condensat, soit l’équivalent de 8 % des réserves mondiales de gaz et 50 % des réserves de gaz du pays. En termes de ressources matérielles, ce domaine a donc une importance de premier plan.

Vous avez déjà vu que malgré des tentatives constantes et une tension vers l’Unité des diverses degrés de qualification (avec les niveaux de salaire correspondant), des différences existent entre les ouvriers officiels et les contractuels (notamment les “sur projet”), et encore plus entre les ouvriers opérationnels, c’est à dire sur site et les employés qui sont au siège et qui eux, bénéficient de ce que les autres gagnent par la lutte.

Nous avons pu lire ici-même un exposé des revendications des ouvriers “sur projet”.

Aujourd’hui, en plein soulèvement populaire qui s’est généralisé pendant 4 mois, on peut voir des mouvements de contestation de niveaux assez différents chez les ouvriers. Cela tient certainement du fait que nous n’avons pas “une classe ouvrière” homogène, qui revendiquerait de façon centralisée ses besoins et qui pourrait même éventuellement dépasser ses propres cadres et “assumer la direction et l’hégémonie” d’un mouvement populaire multiforme, comme les rêves d’une certaine gauche programmatique d’une autre époque nous y conduisaient.  Nous pouvons voir que chez les ouvriers de l’industrie en général, il y a des revendications de différents niveaux. Même chez les ouvriers de l’industrie pétrolière et gazière, nous pouvons distinguer ces différences de niveaux. Ne disons rien des employés non-industriels à proprement parler qui sont dans ces secteurs. Sans parler des millions d’ouvrières et d’ouvriers qui s’épuisent dans des structures plus petites ou dans les secteurs manufacturiers ou commerciaux ou dans les mines.

La question de l’unité de cette classe a devant lui des obstacles quasi-infranchissables (structurelles : secteurs et branches, niveaux d’emploi, ethnie, niveau de culture …) qui se reflètent aussi dans les revendications parcellaires et spécifiques de chaque unité de production et de distribution.

Le programmatisme des années 70 et 80, qui est toujours vivace en Iran parmi les forces constituées de gauche, préfère s’arc-bouter sur les positions classiques de l’Unité mythique de la classe, au lieu d’ouvrir ses yeux et voir réellement la complexité du problème de communisme dans ces pays. (Mais aussi ailleurs)

C’est pourquoi au sein même du mouvement ouvrier nous pouvons voir des valses hésitations qui expriment cette complexité. Nous assistons à une sorte de mouvement de marée entre des ouvriers qui se mettent en grève pour des questions notamment politiques et d’autres qui se tiennent précautionneusement à carreaux. Ces jours-ci, la RI a diffusé sur les réseaux, une petite vidéo montrant des “ouvriers du gaz”, sur les passages étroits d’une plateforme d’extraction, à une dizaines de mètre de hauteur du niveau de la mer, qui suivaient en queue leu leu, un Molla qui les dirigeait le poing levé et scandant : Mort à l’Amérique !” !!! Et les pauvres “ouvriers”, probablement des figurants embauchés à cet effet, répétaient ces slogans ridicules. Ceci fait partie de la propagande risible du gouvernement mais néanmoins nous dit quelque chose de la réalité du mouvement. Ce n’est pas pour rien qu’il y a au moins 2000 Mollas qui font partie officiellement du personnel de la compagnie nationale du pétrole.

Aussi, au début du soulèvement, on a vu l’annonce d’une “grève de la faim”, lancée parmi le personnel “officiel”; cet appel sonnait fort mais dans la pratique il ne s’agissait que de s’abstenir à prendre le plateau repas servi généreusement par l’employeur. Et pour quelles revendications ? L’application de l’article 10 de la loi votée il y a 10 ans (essentiellement une dispense de réglementations et des procédures d’embauche de la fonction publique, pour que les ouvriers puissent être engagés sur des contrats plus avantageux par rapport aux fonctionnaires et pouvoir bénéficier des primes et des indemnités opérationnelles spécifiques).

Aujourd’hui, dans leur action, ils reprennent ces revendications en les étoffant.

La question de la forme unitaire que les luttes révolutionnaires, en général, et ouvrières en particulier, doivent prendre en Iran reste entière.

Le vol ukrainien

Une autre manifestation qui a mobilisé les gens dimanche dernier, c’était la commémoration du vol ukrainien dont on a déjà évoqué le récit.

La commémoration des victimes du vol ukrainien a été l’occasion de pas mal de rassemblements et de manifestations. Nous en avons été témoins dans une vingtaine de villes ainsi que des dizaines de quartiers de Téhéran.

Dans certaines universités aussi (comme Sharif à Téhéran) les étudiants se sont rassemblés en hommage aux victimes en affichant des posters et affiches créés à cette occasion. La surveillance de l’université, dans un premier temps, puis les forces de l’ordre sont intervenus et ont perturbé la cérémonie.

On va néanmoins donner quelques précisions qui permettraient de mieux comprendre ce qui s’est réellement passé; tellement au premier abord, il paraît absurde que la République islamique tire des missiles sur un vol commercial en partance de Téhéran.

Dès l’instant que nous avons reçu la nouvelle du crash du vol ukrainien, nous avions des soupçons très forts, non seulement au sujet de la responsabilité de l’État iranien dans cette catastrophe, mais aussi dans le fait qu’ils ont descendu cet avion exprès, afin de l’attribuer à l’armée américaine. Ces soupçons, il est vrai, inimaginables pour quelqu’un qui ne connaît pas l’histoire de la République islamique en détail, ont été confirmés par les parents haut-placés de deux des passagers péris dans ce crash. Ces deux parents ne peuvent en aucun cas être considérés comme appartenant à l’opposition et sont des collaborateurs et soutiens du régime.  Il s’agit de Mme Zahra Majd et son époux Mohsen Assadi-Lari, médecin, professeur, qui figurent tous les deux parmi les cadres influents du ministère de la santé; le mari était même adjoint du ministre). Ils ont déclaré qu’à la suite de leur requête pour rencontrer le chef des Pasdarans, M. Salami, patron de cette armée leur a confessé que “si on n’avait pas descendu ce vol, on devrait faire face à une guerre”.

Ils ont précisé qu’après des recherches qu’ils ont effectuées, ils sont convaincus que le vol a été utilisé comme “rempart humain par le régime”. Qu’il ne s’agit pas d’une erreur mais d’un acte délibéré. “Ils voulaient abattre le vol et le mettre sur le dos des Américains. Ils ont déjà fait ce genre d’action dans des cas similaires.”

Monsieur assadi Larry n’a pas donné d’autres précisions mais nous savons par ailleurs qu’au moment de la révolution de 1979, à un moment de reflux du mouvement, des gens liés au clergé iranien, pour relancer le soulèvement ont mis le feu à une cinéma au Sud du pays (l’affaire du cinéma Rex d’Abadan) qui projetait un film connu pour sa thématique favorable envers les forces de gauche et ils ont attribué ce crime abominable qui a fait plus de 500 victimes à la SAVAK du régime du Shah. Cet événement a bien entendu eu les effets escomptés et a relancé le mouvement populaire contre le régime du Shah.

La République islamique est familière avec ce genre de coup de complot et maintenant les gens la soupçonnent dans chaque catastrophe qui survient en Iran; c’était le cas, il y a quelques années de l’incendie de l’immeuble Plasco dans le centre de Téhéran. Plus récemment, l’incendie de la prison d’Evin, ou il y a quelques mois, l’attentat à Shah-Cheragh pour la population sont tous l’œuvre des agents de la République islamique pour créer des diversions dans le soulèvement actuel.

-Intervention de Khamenei le 10 janvier

Dans une intervention de la semaine dernière  Khamenei a critiqué les gens qui attendent trop de temps avant de s’engager dans la défense de la religion.

On sait que depuis le début du soulèvement actuel qu’il y a beaucoup d’effondrement dans le camp de la République islamique. Des membres du clergé qui commencent à critiquer la répression, des membres de Pasdarans ou de bassijis qui hésitent de plus en plus à y participer et même des responsables politiques qui commencent à mollir et qui ne défendent plus le régime. Beaucoup gardent le silence et n’interviennent plus dans le débat public.

On a vu monsieur Ghalibaf, le président actuel du Parlement qui était l’ancien maire de Téhéran avec un dossier de corruption impressionnant, commencer dans une entrevue avec la télé iranienne, à critiquer le régime sur la question de hijab. Il a raconté sa visite dans un lycée de filles où des jeunes lui avaient dit “ça fait plus de 10 ans qu’on suit nos études dans votre système d’enseignement et  éducatif; jusqu’à l’obtention de notre diplôme supérieure, on aurait encore 6 ans au moins à effectuer dans ce système. Pourquoi pensez-vous que si au bout de 16 années d’études vous n’arrivez pas à nous faire comprendre la nécessité de porter le hijab, une formation de 30 minutes (quand ils arrêtent une fille pour la question du hijab, ils l’emmènent dans un centre où elle est obligée d’assister à une séance de formation d’une trentaine de minutes, sur les vertus du hijab et apprendre la façon correcte de le porter) pourrait changer quelque chose?”  Et Ghalibaf, qui fait comme si, il vient d’avoir une révélation lui répond “vous avez raison, nous devons complètement changer de système de gouvernance” et continue sur sa lancée en critiquant le système.  En réalité, il était en train de prêcher pour sa propre paroisse; il veut dire que si j’étais président de la République, on aurait mis en place ce nouveau système de gouvernance.

Le point intéressant dans ses propos c’était que chaque fois qu’il voulait parler du soulèvement en cours, il n’utilisait plus le mot de “troubles” ou  “complots”, mais parle simplement des événements ou des incidents.

Dans un de nos précédents écrits, nous parlions de la “couche grise qui ne bouge pas” et qui n’entre pas encore dans la bagarre. Apparemment dans l’autre sens aussi, cela existe et crée des mécontentements et des plaintes. La République islamique qui n’arrive pas à mobiliser ses soutiens commence ouvertement à les menacer. C’était précisément le sujet du discours de Khamenei qui, ces jours-ci, se démène comme un diable pour mobiliser ses troupes. Il a évoqué un hadith pour se plaindre “des gens qui sont arrivés trop tard”. Au temps de l’imam Hussein (2ème Imam Shiite) il y avait un groupe à Koufa qu’on a appelé les tavabines (les repentants). Ils avaient participé à un mouvement contre Hossein. Puis, ils se sont repentis et sont venus affronter ses ennemis ; mais, il était trop tard et ils ont été défaits. Khamenei en reprenant ce hadîth disait à ses fidèles qu’il ne faut pas tarder pour entrer dans l’affrontement, il faut s’y précipiter sans délai sinon ça serait comme le cas des tavabines avec l’imam Hossein.

Il a dit qu'”ils étaient venus à la défense de Hossein, mais trop tard. S’ils étaient à côté de l’imam dès le 1er ou le deux moharram (1er mois du calendrier musulman), on n’aurait pas les massacres de Achoura” (le jour de Achoura, le 10 moharam, est le jour de la commémoration du massacre de l’imam Hussein et de 72 membres de sa famille pendant lesquels Hossein et ses 71 fidèles ont été tués). Les tavabines sont donc arrivés trop tard et ils ont été tous tués.

Khamenei a poursuivi: “Vous qui avez décidé d’affronter le risque de la mort, pourquoi hésiter et ne pas entrer immédiatement sur l’arène ? Vous allez entrer plus tard et vous allez mourir, mais ça va être un mort sans gloire …” c’était une référence directe aux gens qui aujourd’hui hésitent à défendre le système.

Akbar Tabari

Akbar Tabari était patron des affaires financières et adjoint exécutif du ministre de la justice monsieur Larijani pendant plus de 20 ans. Dans les bisbilles internes du pouvoir et pour atteindre son chef Sadegh Laridjani, il a été dénoncé et arrêté en été 2019, dès la prise de fonction de Raïssi en tant que patron du pouvoir judiciaire sous la présidence de Rohani . Ce sont ces concurrence et divergences internes qui font que chaque clan a besoin de sa propre Force de renseignements et de sécurité. Le procureur du nouveau patron du pouvoir judiciaire a accumulé un dossier de corruption des plus impressionnants contre lui. Peut être un des plus conséquents de l’histoire de la République islamique.  Ce simple employé du ministère de la justice avait une fortune estimée au moins à 15 mille milliards de tomans de l’époque. Plus d’un demi milliards de dollars d’aujourd’hui ! Quand on lui posait la question de l’origine de ces biens, il disait que ce sont mes amis qui me les ont donnés. Il faut savoir que dans RI, tout est basé sur ce type d'”offrande amicale”.  Aujourd’hui on va dire que Khamenei n’a rien lui appartenant en son nom propre, qu’il vit dans un état de quasi-pauvreté. Dans la maison mise à disposition par un ami … C’était déjà le cas de Khomeini, qui vivait avec sa famille dans les palais de la royauté et qu’on amenait dans une petite maison modeste, quand il devait recevoir du public.

Un maire d’arrondissement qui était questionné dans le dossier Tabari a confirmé qu’il avait donné un appartement luxueux de la mairie à M.Tabari, “car il est mon ami”. Quand on lui avait demandé s’il avait eu ce genre de largesse (au frais du contribuable) à l’égard d’autres amis, il a répondu, comme un écolier qui ne voit pas ce qu’il peut y avoir de mal ” oui, au moins à une vingtaine de copains”!!!

Dans la bagarre qu’il y avait en haut du pouvoir pour attaquer indirectement M.Sadegh Larijani, ils ont attaqué Tabari.

Le tribunal a commencé à minimiser les faits qui lui ont été reprochés dès qu’il a commencé à parler des autorisations qu’il avait obtenues directement de la main de Khamenei ; en somme, il n’avait fait qu’exécuter les ordres de l’Imam. Tout s’est arrêté net et le reste du procès s’est déroulé en huis clos. On a su plus tard qu’il a été condamné à 31 ans de prison.

Aujourd’hui, au bout de 3 ans, on apprend qu’il a été libéré avec une caution de 300 milliards de tomans; ce qui est ridicule par rapport à sa fortune amassée. Un de ces jours, on va entendre qu’il n’est plus en Iran et qu’il est parti à l’étranger (avec ses biens !)

Il ne serait ni le premier, ni le dernier, à quitter le pays; on a eu déjà le cas, entre des dizaines d’autres, du patron de la banque centrale, M.Mahmoud-Reza Khavari qui s’est envolé en 2012 avec une fortune immense de trois Milles Milliards de Tomans (3 Milliards de dollars de l’époque) au Canada et que les forces de sécurité iraniennes qui se flattent d’avoir assassiné des centaines de personnes à l’étranger (dont des dizaines d’iraniens exilés politiques) et chassé clandestinement d’autres pour les ramener au pays (les médias officiels les appellent joliment  “les soldats anonymes du 12ème imam” (!)) ne sont pas capables de dénicher cette personne.

Oui, les souris ont commencé à quitter le navire. L’ennui c’est qu’il parte avec tout le pognon amassé depuis des années à l’intérieur et à l’extérieur du pays.

-D’après un rapport du ministère de Renseignemant, dans 3 provinces de Yazd, Ispahan et Kirmanshah les responsables et les directeurs des secteurs administratifs ont été pris la main dans le sac en train de transférer des sommes soutirées du  budget de leur administation pour ensuite s’envoler vers des cieux plus cléments, la plupart avec leur dernière femme ou maîtresse. Une partie de ces gens ont été arrêtés avant le vol de l’argent mais dans beaucoup de cas, l’argent est déjà transformé en biens immobiliers en Turquie, Espagne ou en Grèce et leur a permis d’obtenir des cartes de séjour et de s’y installer.

Sur la situation au Baloutchistan:

Vendredi dernier, c’était le 15ème vendredi depuis le massacre de Zahedan où plus de 90 personnes furent tuées. La population continue à y manifester ainsi que dans d’autres villes de la province.

Molavi Abdul-Hamid, le Mojtahed des sunnites Balloutch, dans son discours a précisé que “gérer un pays demande de la réflexion et des gens qui sachent gouverner correctement et pas de Madâh” (ceux dont le travail est de flatter les gouvernants par la poésie et des chants).

Déjà la semaine dernière il avait vivement critiqué la façon dont le pays est dirigé et la façon surtout injuste qu’ils ont traité les baloutch depuis des semaines, que les gens qu’ils ont exécutés étaient des innocents et ce n’était en aucune façon ces gens-là qui avaient attaqué les forces de l’ordre, que tout avait commencé par l’intervention des forces de l’ordre et des gens n’ont fait que se défendre.

Au cours de leur manifestation, la population avait écrit sur leur parcours le nom de Khamenei et l’ont piétiné tout le long de leur marche.

Une rumeur s’était répandue comme quoi le régime veut détruire la mosquée de Makki de Zahedan; les gens ont entouré la mosquée pour montrer leur détermination à la défendre.

A Zahedan, Il y avait cette semaine des milliers de personnes… on pouvait lire sur une pancarte tendue vers les caméras :

“Ce n’est pas comme une inondation où tu dois rester chez toi pour être en sécurité, c’est un tremblement de terre où tu dois sortir dans la rue”. Le message s’adressait à cette couche grise qui hésite encore à sortir…

-A Galikesh de Gollestan également, dans le nord du pays, ce vendredi les gens ont protesté à cause de l’absence de leur imam de vendredi Molavi Gorgui, qui est l’imam d’AzadShahr; depuis quelques semaines on ne lui permet plus de faire ses discours de vendredi; Il fait savoir que depuis les années 60-70 du siècle dernier, une population baloutch s’est installée dans cette région du Nord du pays pour trouver du travail. Aujourd’hui, ils se sentent en solidarité avec les Turkamans de confession sunnite ainsi que les Baloutch de leur coin d’origine et manifestent au rythme des mobilisation en Baloutchistan.

Les propos de Rassoul Khadem

Rassoul Khadem, est un ancien champion de lutte qui a été un moment le patron de la fédération de lutte iranienne. De ce fait et en général de par ses positions politiques, il ne peut pas être considéré comme un opposant au régime et il fait plutôt partie de cette couche grise qui se trouve dans le camp de la République islamique mais qui en même temps a l’honnêteté de dire la vérité, du moins jusqu’à maintenant.

Il a fait plusieurs voyages dans la région de Baloutchistan et son dernier voyage date de seulement quelques jours, précisément le 22 du mois Day (12 janvier 2023).

Au cours de ce voyage, Il y a constaté une situation indéfinissable de difficultés chez la population qui vit aux abords des villes. Il est allé chez des gens qui habitent dans ce qu’on appelle des tchapars ou kapars, c’est-à-dire des espèces d’abri construites avec du branchage, des roseaux et du feuillage et éventuellement couverts par de la paille tissée. Le mot français le plus proche serait probablement clayonnage, mais avec cette différence que ce mot est en général utilisé, ici, pour définir des œuvres provisoires de clôture pour du bétail.  Au Baloutchistan, comme dans beaucoup de régions pauvres, ( d’après une information de l’agence officielle ‘Ilna du 15 févr 2022, en Iran, ¼ de la population du pays vit dans les bidonvilles, près de 7 millions de familles), en on voit qu’après les “réformes agraires” (1962) du Shah et l’exode rural qui s’en est suivi, avec la “modernisation” capitaliste du pays, tout autour des villes, des habitations ont été formées qu’on a coutume d’appeler des “bidonvilles”, mais qui dans le cas présent, serait une appellation par trop luxueuse pour définir ces logis.

Ici, les enfants n’ont même pas de vêtements, ils n’ont pas de chaussures dans un froid de moins 8 et en pleine bourrasques et vent glacial du désert.

Pas d’électricité, ni de gaz ou du pétrole pour se chauffer sauf éventuellement des bouts du bois pour faire du feu.  Même dans ce cas, ou vous disposez du bois pour faire un petit feu, il faut s’y accrocher pour ne pas succomber à l’hypothermie.

Les enfants n’ont pas d’école. L’année dernière, pour la première fois, un bienfaiteur de l’autre bout de la terre a envoyé de l’argent pour qu’il puisse construire un bâti, baptisé  “école” et portant le prénom du fils du bienfaiteur, où un seul enseignant s’affaire pour essayer d’enseigner  un peu de connaissance aux enfants.

La situation que Rassoul Khadem a décrite est épouvantable et digne des études biologiques sur la survie et la résistance des Homo sapiens. …

On comprend maintenant pourquoi le peuple Baloutch est si décidé et déterminé à renverser la République islamique; ils ont toutes les raisons du monde pour le faire.

-Au même moment les journaux ont publié en manière de lutte contre les privilégiés et les “Aghazadeh” (nés de bonnes familles”) le bulletin de salaire de la fille de  Mme N.Ma’danipour membre du conseil de la ville de Téhéran qui à 20 ans vient d’être engagé et qui touche comme premier salaire plus de 34 million de toman par mois, quand les ouvriers touchent cinq à dix fois moins.. Mme Ma’danipour est par ailleurs championne de lutte contre la corruption et discours tous les jours sur les façon qu’il faut mener cette lutte efficacement.

Santchi

-Les familles du personnel du Pétrolier santschi, qui d’après la RI ont tous disparu dans l’incendie et le naufrage du navire qui a duré plus d’une semaine sont dans tous leurs états.

Des documents fuités par les Américains créent le soupçon qu’ils seraient toujours vivants… on parle d’une cargaison mystérieuse livrée par la RI à la Corée du Nord. Le personnel aurait appris quelques choses qu’il ne fallait pas et qui leur a valu d’être déclaré disparu dans un incendie.

Les gens sont tellement méfiants par rapport à tout ce que le régime affirme que toute rumeur déclenche des hypothèses les plus folles. On a du mal à imaginer les raisons pour lesquelles la RI aurait décidé de déclarer tout le personnel d’un navire décédé ! Qu’est-ce qu’il pouvait transporter qui mériterait une telle débauche de mise en scène et de mensonges ?!

Mais ils ont commis par le passé tellement de monstruosité pour préserver leur pouvoir que rien ne semble impossible de leur part.

Le dossier de la maison Ispahan

Trois autres prisonniers ont été condamnés à la peine de mort à Ispahan par le tribunal de première instance ? Ils font partie d’un dossier qu’on appelle “Khané Ispahan” (maison d’Ispahan). C’est le nom d’un des quartiers de la ville. Il paraît qu’au cours  d’une nuit de protestations, les protestataires étaient encerclés des deux côtés de la rue par les forces de l’ordre en vêtements de ville d’un côté et les Pasdars de l’autre. Les deux camps ont tiré des coups de feu sur les protestataires qui étaient a priori au centre de cette embuscade. Mais les jeunes s’étaient déjà enfuis et les balles ont atteint et tué les  gens du régime. Apparemment plusieurs personnes des forces de l’ordre ont été blessés et tués. Le régime qui a du mal à accepter une telle étourderie de la part de ses forces,  veut venger ces personnes et les trois personnes dont la condamnation à mort a été officialisée font partie des gens qui étaient arrêtés sur ce dossier.

Radan

-Ahmad Reza Radan, le nouveau patron des forces de l’ordre qui est connu pour sa fermeté et son passé de bourreau des protestataires en 2009, c’est la même personne qui avait théorisé l’utilisation des prisonniers (pour des crimes et des délits ordinaires) comme membre des forces de l’ordre. En Iran, il est extrêmement rare que les adultes de plus de 25, 30 ans aient des tatouages sur le corps, c’est quelque chose dont seulement les prisonniers pouvaient en avoir; c’était une sorte de marque de délinquance ou d’appartenance à des groupes de délinquants.

Pendant le soulèvement actuel, à plusieurs reprises, les gens ont rapporté que parmi les forces de l’ordre et ceux en “vêtements civils”  il y avait des personnes tatouées; ce qui est tout à fait impossible pour les pasdards, les bassiji  ou les soldats ordinaires.

C’est par la suite de ces constatations que la rumeur a couru que Monsieur Radan a théorisé ce passage des prisonniers condamnés dans les forces de l’ordre en contrepartie de quoi, ils vont être dispensés du reste de leur peine.

Aujourd’hui avec sa nomination on dit qu’il a une autre stratégie dans ses bagages: d’amener une partie des forces étrangères liées au Pasdarans (en Syrie, en Irak ou en Afghanistan) sur le terrain iranien en fonction de la langue parlée qu’ils utilisent. En fait, il ne fait que reprendre la pratique de Soleymani au moment des émeutes de 2019 où il avait réprimé les jeunes en utilisant Hashd-ol-Shaabi. L’ajout de ces forces étrangères aux forces de police iraniennes est un acte important surtout maintenant que nous savons que le régime rencontre des difficultés dans la mobilisation de ses forces. De plus en plus de Pasdars, de bassijis ou de police refusent de tirer sur la population de ou tabasser les jeunes qui pourront très bien être de leur famille.

Visite de Raïssi

-Président Raïssi, d’après une politique fixée depuis le début de son mandat, fait des visites régulières dans les différentes villes de l’Iran et à chaque fois il fait des promesses qui ne sont jamais tenues pour mobiliser un peu ses couches grises de la population.

Cette fois-ci, il est allé à Yazd, une ville du centre du pays.  Ils avaient tellement peur que personne ne se déplace pour l’accueillir qu’ils ont donné un sac de riz ainsi qu’un costume à chaque personne qui se présentait pour l’applaudir, les gens étaient amenés par des bus des différentes petites villes et villages du coin. Néanmoins il y avait tellement peu de monde pour l’accueillir que les chaînes de télé publique ont été obligées pour camoufler l’échec de la visite, de diffuser les vidéos du voyage du président Rohani quelques années plus tôt à la place des prises de vue lors de la visite de Raïssi.

Akbari exécuté

Ali-Reza Akbari était un des gros bonnets de la République islamique qui vient d’être exécuté par le régime. Il était binational (irano-britannique) et a été accusé d’être un espion britannique au plus haut sphère du commandement du régime.

Son exécution date de quelques jours seulement, mais d’après l’interview de sa femme, il a été arrêté depuis 3 ans et l’appareil de renseignement et de sécurité de la République Islamique a eu largement le temps de concocter des récits démontrant qu’il était un espion actif au service de son ex-majesté.

Les aléas de cette histoire ne nous intéressent pas beaucoup, à part le fait de montrer qu’à l’intérieur du régime il y a des soubresauts et les différentes factions sont en train de s’entre-déchirer.

En persan on a un proverbe qui dit “les chevaux se mordent les uns les autres dans les montées”. On a entendu à droite et à gauche des responsables qui se sont exprimés en soutien de la République islamique ou en sa défaveur. Même des religieux importants commencent à critiquer la façon dont le pays est dirigé et la répression est menée par les agents de la République islamique.

Dans le cas de Monsieur Akbari, ce qui est intéressant et attire l’attention c’est la liste impressionnante de ses titres, ses fonctions et nominations, ainsi que la façon dont les prisonniers sont traités par les agents de la République islamique même ceux qui appartient à leur propre camp. Comment Akbari, pourtant un personnage tout à fait obscur, de 3e ou 4e plan, que personne ne connaissait mais qui exhibait fièrement les attributs de la piété religieuse, avec les cols de chemises réglementés et la marque foncée de la pierre de la prière sur le front, peut trimballer à sa suite une telle flopée de titres, de fonctions et de nominations?! Ceci démontre bien comment ce régime fonctionne à travers le népotisme, le copinage et les réseaux de proximité dans lesquels certains arrivent à entasser des fortunes immenses.

Je vous donne texto la liste des fonctions et des positions que Monsieur Akbari occupait au moment de son arrestation.

Il était à la base, employé par le ministère de la Défense et à ce titre il est parvenu à faire partie du secrétariat du haut Conseil national de sécurité; il était également le consultant du commandant des forces navales, le responsable du domaine des recherches en matière de défense et de renseignements du ministère de la Défense, le responsable de l’exécution militaire de la résolution 598 de l’ONU sur l’accord nucléaire, le patron du bureau des études du ministère de la Défense, conseiller des affaires stratégiques du ministre de la Défense, et membre de bureau des investigations stratégiques de la présidence de la République.

Toute cette liste de responsabilités et de fonctions vient du fait qu’il était copain avec Monsieur Ali Chamkhani, ancien ministre de la défense et de la logistique des forces armées pendant 8 an, un des commandants de l’armée des Pasdarans et de l’armée de la RI, Amiral, anciennement patron des forces navales et depuis une dizaine d’années, représentant du Guide Suprême au sein du Haut Conseil de sécurité nationale. Shamkhani, natif d’Ahvaz au Sud du pays, est considéré comme le gouverneur général du Sud, khouzestan et le Golf Persique.  A travers ses nombreuses responsabilités, il a monté un Trust international de navigation pétrolière et a confié sa direction à ses deux fils. Les détournements de fonds et les cas de corruption de cette personne rempliraient plusieurs volumes et mériteraient une attention particulière. De sa femme, qui soi disant possède des appartements de luxe un peu partout en Iran, en particulier un château dans un chic petit quartier au nord de Téhéran (Lavassan) évalué à 1000 milliards de tomans (30 millions de dollars), ainsi que sa petite fille d’une dizaine d’années avec des comptes bancaires de plusieurs milliards de tomans et des actions de sociétés variées jusqu’à ses fils, son beau fils, ses frères, ses neveux… personne de sa famille n’a été oubliée dans le bazardage des biens publics. Comme on peut le voir, il a un sens très aigu de la famille et des affaires…

Les rivalités internes entre les personnages de premier plan de la République islamique ont entraîné plusieurs actions en justice contre lui pour détournement de fonds, corruption et autres broutilles de ce genre qui sont depuis des années bloquées par intervention divine!

M.Akbari qui a grandi à côté de son ami M.Shamkhani, se trouve donc aujourd’hui au fond du trou.  Dans un enregistrement audio, fuité après son exécution, probablement par sa femme, il dit qu’il a subi pendant la dernière année de sa détention en cellule individuelle, trois à 4000 heures d’interrogatoire.

Il raconte comment sur les dernières semaines de sa détention, on l’avait filmé sous toutes les coutures en lui promettant qu’il va être libéré, que c’était un malentendu et que maintenant tout était réglé. Ils l’ont même amené dans un studio professionnel, très bien équipé (à un moment il précise qu’il sait que c’était très bien équipé, puisque lui-même était un professionnel de la production de ce genre de document !), “ils m’ont fait changer à plusieurs reprises de vêtements pour laisser penser qu’il s’agit de  plusieurs jours de tournage et même arrangé et  coloré mes cheveux” pour qu’il ait l’air naturel et en forme. Ils ont fait un film dans lequel il avoue être un espion et avoir communiqué des documents secrets de première importance à l’État britannique.

À un moment, il dit que t’as beau vouloir résister mais après plusieurs mois de cellule individuelle, tu ne peux plus. Les agents jouent le bon flic, le mauvais flic … il y a quelqu’un qui te dit “c’est la fin, ne t’inquiète pas, tu vas être libéré” et un autre qui, dix minutes plus tard, entre dans la pièce, te jette dans un coin en criant “foutez-moi ça dans les geôles d’Ewin pour qu’il comprenne à qui  il a affaire”.

L’exécution d’Akbari, à côté des difficultés dans les régions du Sud du pays, peuvent être un signe de limogeage prochain de Shamkhani, qui voit un de ses protégés éliminé. En même temps avec cette exécution le régime prévient ses soutiens qu’il ne tolère aucune plaisanterie et qu’il les châtierai de manière la plus expéditive.

La torture

C’est impossible de résister et ne pas s’effondrer de l’intérieur sous la torture. C’est l’expérience de tous les mouvements révolutionnaires du monde, même si cette personne n’avait rien de révolutionnaire;  ça démontre néanmoins que tes geôliers qui commencent à te torturer, arriveraient de toute façon à leur but. Ceci ne veut bien sûr pas dire qu’on ne doit pas résister à l’ennemi et nous avons dans notre histoire de nombreux exemples des hommes courageux qui ont résisté jusqu’au bout et sont morts sous la torture ; il faut faire de son mieux et surtout sauvegarder les informations importantes, d’essayer de ne rien donner, même pas son nom mais quand ceci dépasse les limites de la tolérance individuelle qui pour chaque personne est tout à fait différente de l’autre et parfois même contraire aux apparences, il ne faut pas le traiter comme un paria. Il a fait ce qu’il a pu, la faute est toujours du côté de son oppresseur.

D’ailleurs c’est une des leçons que le mouvement révolutionnaire iranien a appris de ses camarades Palestiniens; les mouvements de guérilla iranien, quand ils faisaient leur apprentissage auprès des groupes armés palestiniens dans les années 1970, étaient présents en Jordanie au moment du Septembre Noir et avaient subi, à côté des Palestiniens, le déluge de feu de l’armée du Roi Hussein et des Syriens. Au cours du conflit, deux des responsables importants palestiniens étaient tombés dans les mains de l’ennemi qui les avaient torturés et obligés de passer aux aveux. Ces aveux et appel à déposer les armes étaient diffusés par l’armée jordanienne pour décourager les combattants palestiniens.

Face à cet acte d’intimidation, les autres commandants Palestiniens avaient très clairement affirmé qu’une fois un combattant capturé et dans les mains de l’ennemi, sa parole n’avait plus aucune valeur et ne devait pas être prise en compte.

C’est attitude était partagée par toute la population et les révolutionnaires iraniens ont bien compris la leçon et depuis l’époque du Shah, si un membre de la guérilla iranienne (qui à l’époque se composait essentiellement de deux organisations armées : les moudjahidines du peuple et les fadaïnes du peuple) tombait dans les mains de la SAVAC, il avait comme devoir de résister au moins pendant 48 heures, le temps que ses compagnons changent de place et prennent les mesures de sécurité nécessaires; une fois ces 48 heures passées, les informations qu’ils possédaient étaient considérées comme “brûlées” et n’avaient plus d’importance. Aujourd’hui, sous la République islamique une telle règle est de mise et quand, avec beaucoup d’efforts les agents de la République islamique arrivent à traîner les opposants devant la télévision pour faire des soi-disant  “aveux publics”, personne n’y attache de l’importance et ne considère ces actes comme de la traîtrise. Cette attitude, adoptée par la population, dévalorise complètement ses aveux, de sorte que le régime commence à comprendre que ce n’est pas la peine d’essayer de ternir les personnalités de l’opposition qui sont en captivité. Le meilleur exemple est le cas de Toumaj Salehi, le rappeur courageux qui depuis deux mois se trouve sous la torture et d’après les dernières nouvelles est en train de perdre la vue. La télé publique l’a amené devant les caméras, mais les gens n’ont vu que son visage tuméfié et n’ont pas fait attention à ce qu’il confessait. Il est toujours considéré comme un révolutionnaire se battant pour sa cause.

-Nouri

Le 11 janvier à Stockholm, c’était la première journée du tribunal de recours de M.Hamid Nouri.

Vous ne connaissez certainement pas le nom de ce personnage, haut en couleur de la République islamique qui avait participé comme assistant du procureur, aux massacres des prisonniers politiques dans les années 80 à 88 dans diverses prisons iraniennes et qui s’est trouvé piégé et arrêté en Suède en novembre 2019.

Il était invité par l’ex-mari de sa sœur qui l’avait alléché en lui promettant des soirées de folie alcoolisée, en compagnie de la belle gente féminine, suédoise bien sûr ! Nouri s’est précipité dans le piège et ne croyait pas ses yeux quand à la place des belles promises, c’est la maréchaussée qui l’attendait !

La police suédoise l’a donc arrêté à son arrivée à Stockholm, où toute une équipe d’opposants iraniens, réfugiés politiques accompagnés d’avocats spécialisés en matière de droits de l’homme l’attendait de pied ferme.

Une plainte était déposée quelques jours auparavant, auprès de la justice suédoise pour complicité de crime contre l’humanité, torture et d’autres broutilles de ce genre.

La cour a vu défiler durant 9 mois et 92 séance, plus de 60 plaignants et  témoins directs qui avaient survécu à ces années noires et qui parlaient pour eux-mêmes, mais surtout pour les milliers disparus, morts sous la torture ou exécutés par des tribunaux qui ne duraient que 5 minutes.

Il fallait y répondre juste à une ou deux  questions : croyez-vous en Dieu ? Priez-vous tous les jours?

La réponse affirmative aux deux questions, si vous arriviez à en convaincre les 3 “juges” qui-va-sans-dire étaient l’exemple même de la droiture et exempts de tous préjugés, vous faisait gagner le rang des survivants, innocents mais néanmoins condamnés à plusieurs années de prison. Les autres qui, courageusement défendaient leur croyance étaient directement expédiés à la potence. Il y avait parmi eux des prisonniers qui avaient effectué leur peine de prison et devaient être libérés depuis quelques mois mais pour des questions administratives leur dossier avait pris du retard.

Le fatwa de Khomeyni, rédigé et transmis au pouvoir judiciaire, ne faisait pas de distinction entre les prisonniers dont la peine était effectuée et les autres ; tous les prisonniers devraient être de nouveau jugé en fonction des critères politiques que Khomeyni venait d’estimer nécessaire pour garantir la stabilité du pays.

Dans les témoignages on a entendu des récits qui vous font glacer le sang. Les prisonniers qui avaient vu d’un coin de la fenêtre des toilettes, des camions parqués devant la prison où on balançait de grandes sacs noirs contenant le cadavre des exécutés, du sang qui couvrait le sol, des fausses communes constatées par les responsables de cimetières .. le nombre de victimes de cette purge est un des secrets les mieux gardés de la République islamique mais selon les sources, il oscille entre 7000 et 30000 personnes sur ces 8 années.

Les documents relatifs à ce massacre sont sortis plus tard; d’abord, le fatwa manuscrit de Khomeyni qui ordonnait ses exécutions, mais aussi la contestation de ce fatwa par le deuxième personnage religieux des chiites iraniens l’Ayatollah Montazeri, qui du fait même de cette contestation a été rejeté des cercles du pouvoir, et a subi le Hasr (assignation à domicile) et in fine a été victime d’une mort suspecte. Montazali avait convoqué les trois juges, qu’on appelait “clique de la mort” chez lui et leur aurait textuellement dit “ce que vous faites est une crime qui va rester dans les annales de l’islam”.

Nouri ne faisait pas partie des juges, mais était un membre actif de cette mascarade sanguinaire en tant qu’assistant au procureur et ne disait pas non quand l’occasion d’une petite séance de torture se présentait. Des témoins vivants ont longuement raconté aux juges suédois les amabilités qu’ils avaient reçues de la part de M.Nouri qui les envoyait, s’ils étaient chanceux, à l’infirmerie de la prison, ou sinon les rendait handicapés à vie.

Au premier jour du tribunal, avant même que le réquisitoire du procureur soit lu, Nouri a commencé un show qui était plutôt destiné aux envoyés de l’ambassade et le gouvernement iranien. Il criait pour dire qu’il a été traité avec brutalité et injustice de la part des gardiens et du système carcéral. Après plusieurs avertissements, le président de la cour a dû l’exclure de la salle principale et le placer dans une salle adjacente, vitrée qui lui permettait néanmoins de voir et d’entendre le cours du procès mais sans pouvoir le perturber.

Imaginez à quel point il faut mettre la pagaille pour qu’un juge suédois vous interdise de participer à votre propre tribunal !

Il a prétendu, pour démontrer l’injustice des Suédois, et leur prise de parti dans le cours de l’examen du dossier, qu’il a été torturé!  Ce qui, bien sûr, a étonné tout le monde, connaissant la façon dont la Suède traite les prisonniers.  Un des cas de torture qu’il a mentionné était le fait qu’il n’avait pas de chaîne de télé en langue persane sur son téléviseur dans sa cellule ou le fait qu’il n’a pas pu voir un opticien pour changer ses lunettes. Des prétentions tout à fait risibles, à la mesure du guignol qu’il est dans la vie.

Très probablement à l’issue de ce tribunal de recours, sa condamnation initiale à perpétuité va être confirmée. Il reste à savoir qu’après quelques années de prison, il serait échangé contre combien de citoyens suédois pris en otage par l’État iranien!

Le 25 et le 26 janvier, il est prévu que ses nouveaux avocats entrent en scène. Peut-être avec une nouvelle stratégie pour essayer de le sortir d’affaire; malgré tout, il semble improbable que le tribunal de recours rejette les décisions initiales.

Divers

-Suite à la pendaison de deux jeunes protestataires iraniens et la condamnation de plusieurs autres, beaucoup de parlementaires européens, notamment allemands, ont accepté le tutorat de ces jeunes pour éviter leur exécution.

-un citoyen belge, Olivier van de Castille, qui travaillait avec les Organisations humanitaires pour les réfugiés, a été arrêté en Iran et condamné à 28 ans de prison. En réalité, il s’agit bel et bien d’une prise d’otage en vue d’un échange de prisonnier avec Monsieur Assadollah Assadi, un membre de l’ambassade d’Iran en Belgique qui avait fomenté un attentat au moment de la réunion annuelle des moudjahidines (Organisation musulmane basée en Albanie) à Paris.

Les responsables iraniens ont précisé à l’État belge que cette personne ne sera libérée qu’une fois un accord d’échange de prisonniers signé entre l’Iran et la Belgique.

-Par ailleurs, on a été informé que face aux cautions astronomiques que la République islamique fixe pour libérer les prisonniers en attente de leur procès, les gens ont réagi et des bienfaiteurs prennent en charge ces montants.

-Des dispensaires clandestins aussi ont vu le jour, des médecins ont décidé de soigner les gens surtout les blessés du soulèvement qui n’osent pas se présenter dans les hôpitaux.

Habib

17 janvier 2023 a 23h30

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Le 17/01/2023 à 8h du matin

Nous avions reçu des appels pour des mouvements de grève de l’industrie pétrolière cette semaine.

-Des samedi dernier, 14 janvier 2023, les ouvriers de la Pétrochimie de Gatchsaran , (Gatchsaran Petrochemical Co) qui est une ville dans la province de Kohguilouyeh et Bouyer-Ahmad au sud-ouest de l’Iran avec 150000 habitants, se sont rassemblés sur leur lieu de travail et ont demandé l’éclaircissement sur leur situation. La ville et ses alentours se sont développés avec la découverte d’un champ pétrolier à proximité. La population est essentiellement composée des Lor et des Ghasghaï.
Apparemment les actionnaires de la pétrochimie de cet ensemble ont décidé de substituer la compagnie par une autre entité juridique qui s’appellerait Téhéran Sud et donc de donner congé à plus de 200 ouvriers de cet ensemble.
Cette décision fait suite à l’incident de l’explosion de l’ambulance de la compagnie qui est survenu le 28 novembre 2022 et qui a eu comme victime monsieur Mehdi Habibi qui travaillait comme ouvrier mi-temps au sein de la pétrochimie. La compagnie ODCC, sans effectuer les étapes administratives d’une fermeture de société et la création d’une autre, sans répondre au sujet de l’incident en question, sans y accepter aucune responsabilité est en train de se sauver en changeant de nom et licenciant le personnel.
-Dimanche 15 janvier, les ouvriers contractuels travaillant dans les opérations non-industrielles de Mahshahr se sont mis en grève et se sont rassemblés sur leur lieu de travail. Ils protestent contre la non-application de la grille des emplois, les salaires très bas et le temps de travail trop important.
-suite à l’appel des ouvriers officiels du pétrole, déjà lancé, ce 17 janvier les ouvriers officiels des unités opérationnelles dans la région de Siri ont commencé leur rassemblement de protestation. Leur revendication, entre autres, concerne la non application de l’article 10 de la loi qui a été votée depuis plus de dix ans mais qui est restée lettre morte.
-ce mardi 17 janvier, les ouvriers officiels du pétrole et du gaz de Aghajari également ont arrêté le travail et ce sont joints au rassemblement de protestation. La revendication centrale de ses ouvriers aussi et l’application de l’article 10.
-Ce même mardi, 17 Janvier, nous avons su que les ouvriers officiels de l’exploitation du pétrole et du gaz de Gharg (Ouest) situé à Tcheshmeh khosh de Dehloran, la raffinerie d’Ilam, la compagnie d’exploitation du pétrole et du gaz de Karoun, les employés officiels du pétrole à Shiraz et la compagnie d’exploitation du pétrole et du gaz Maroun à Ahvaz se sont joints au protestation.
Une annonce du compte Télégram des ouvriers contractuels reprend ces informations et les synthétise, dont voici la traduction
H.
Aujourd’hui, mardi 17 janvier, conformément à l’appel préalablement lancé des collègues officiels du siège et des unités opérationnelles, les mouvements de protestation ont commencé dans plusieurs centres, dont
– l’exploitation pétrolière et gazière de Gharb (l’ouest) dans Tchesmeh-Khosh de Dehloran;
– La raffinerie dIlam;
– Karoun Oil and Gas;
– Société d’exploitation du pétrole et du gaz de Maroun à Ahvaz;
– Société d’exploitation pétrolière et gazière de Pars;
– Société d’exploitation pétrolière et gazière d’Aghajari;
– Société du Falaté Ghareh (plateau continental);
– La Cinquième raffinerie de South Pars;
– La raffinerie de gaz de Fajr Jam;
– La raffinerie d’Abadan;
– Mahshahr Petrochemical et la région de Siri
ont tenu leurs rassemblements de protestation. Les revendications de ces collègues sont les suivantes :
1. Application correcte de l’article 10 des travailleurs du pétrole.
2. Amélioration du tableau de l’article 10, concernant les ouvriers qui viennent d’être embauchés, de manière à ce que, compte tenu de l’inflation actuelle, tous les salariés puissent en bénéficier;
3. Paiement des arriéré de salaire correspondant aux dix années de retard dans l’application de l’article 10, conformément à la loi;
4. Réformer et améliorer la situation de santé et de traitement médical des ouvriers du pétrole;
5. Paiement des primes de retraite complètes et sans déductions diverses, telles qu’il était courant par le passé dans le ministère du Pétrole;
6. Prendre soin des retraités de l’industrie pétrolière et améliorer la vie de nos valeureux anciens de l’industrie pétrolière;
7. Ajustement à temps et sans délai des qualifications des employés et rendre plus facile cet ajustement ;
8. Mettre de l’ordre dans la classification des emplois du personnel;
9. S’occuper de la situation chaotique et préoccupante du fonds de pension pétrolier, y remédier et modifier ses statuts.
Les rassemblements de protestation des collègues officiels conformément à l’appel publié, étaient prévus dans les villes de Téhéran, Ahvaz, Gatchsaran, Assaluyeh, Chiraz ; Ispahan ; Mashhad ; Khanaguiran, Lamard, Dalan et Farashband, Ilam, Abadan, Lawan, Kharg, Arak, Bandar-Abbas, ainsi que des plates-formes de forage et des plates-formes pétrolières et gazières. Au moment de publier cette nouvelle, nous n’avons pas encore reçu de nouvelles ou de photos des autres centres à l’exception des centres mentionnés.
Selon les informations reçues, plusieurs collègues ont été arrêtés lors du rassemblement de la deuxième raffinerie, mais ils ont été relâchés une heure plus tard.
À Mahshahr et Abadan, les forces de sécurité ont maltraité plusieurs collègues et des affrontements physiques ont eu lieu.
Le conseil d’organisation des protestations des travailleurs contractuels du pétrole soutient les protestations des collègues officiels.
Nous mettons toujours l’accent sur les grèves nationales et sur l’unité et la solidarité de toutes les forces travaillant dans l’industrie pétrolière.

« Rassemblement syndical

17 janvier

Pour protester contre la non application des exigences légales »

« Conseil de Coordination et de Solidarité des Employés Officiels de l’Industrie Pétrolière »

Nouvelles du 13 janvier

Dernière annonce en date des ouvriers officiels de l’industrie pétrolière de l’Iran

“Le jeu est terminé:

Annonce du Conseil de Coordination et de Solidarité des Employés Officiels de l’Industrie Pétrolière

Nous l’avions dit, notre patience a des limites; nous l’avions dit, débouchez vos oreilles;

nous l’avons dit et vous n’avez rien voulu entendre ; maintenant nous allons être le déluge qui va tout emporter sur son passage, destructeur et dévastateur.

Ce n’était pas prévu que nous soyons la flamme qui va, seul, se consumer ; nous serions la flamme que vous ne pourriez éteindre, même avec le flot de toutes vos larmes; nous l’avions dit, ne jouez pas avec nos nerfs.

Dix ans et 245 jours se sont écoulés depuis l’approbation de l’article 10 de la loi du 8 mai 2012 [il s’agit d’une loi qui dans “le but de renforcer la compétitivité et d’accélérer l’exploitation des champs communs et de maintenir les ressources humaines spécialisées” au sein de l’entreprise, surtout dans les secteurs de production mixtes avec un autre pays comme le Qatar, dispense les filiales de la compagnie de respecter les obligations découlant de la loi sur la gestion de la fonction publique et leur permet de leur accorder des contrats et des avantages spécifiques.ndlr]

Nous avons vécu le samedi noir de septembre 2022 [rassemblement devant l’hôpital où Mahsa était décédée], nous avons passé le 17 décembre [grève d’avertissement des ouvriers du pétrole], et maintenant, il est temps de déraciner vos mensonges et les étaler au grand jour pour vous déshonorer.

Le 17 janvier, sera le jour de la fin; guettez bien le déluge des hommes courageux de l’industrie pétrolière qui détruira vos fondations.

Jusqu’à présent, nous avons tout donné, tout ce que nous avions; nous avons travaillé avec tout notre cœur, sincères et loyaux pour une production dont le profit coule directement dans vos poches, et pour nous et notre famille il n’y a eu que des mains vides, la pollution, les maladies… et nos âmes et esprits en désarroi.

À chacun son tour.

Nous n’avons plus à répondre à personne.

Voici la balle, voici le terrain [équivalent à : Hic Rhodus, hic Salta]

Notre Rendez-vous, le 17 janvier

Une fois pour toute

Partout

À Téhéran, Ahvaz, Assalouyeh, Mahshahr, Gachsaran, ainsi que toutes les zones pétrolifères et opérationnelles.

Le 11 janvier 2023

Conseil de Coordination et de Solidarité des Employés Officiels de l’Industrie Pétrolière”          

 

Nouvelles d’Iran du 2 au 9 janvier 23

Zahak, le Roi maléfique des mythes iraniens, sévissant à Babylone et représentant le mal incarné, se nourrissait en nourrissant les deux têtes de serpent qu’il avait sur les épaules aux endroits même où il été embrassé par Ahriman (le diable). Chaque jour il devait tuer deux des jeunes de la communauté pour donner leurs têtes en offrande aux deux monstres qu’il avait en lui. Le noble et courageux maréchal ferrant Kaveh, qui avait déjà perdu plusieurs de ses fils dans ce macabre sacrifice, se révolta et in fine détrôna Zahak grâce à un soulèvement populaire et mit fin à son règne.

Ce samedi 7 janvier, ces deux jeunes s’appelaient Mohamad-Mehdi Karami et Mohamad Hosseini ; le matin très tôt, l’appareil judiciaire a exécuté ces deux prisonniers du soulèvement actuel par pendaison. Mohamad-Mehdi était en grève de la faim pour pouvoir bénéficier d’un avocat. Son père avait élevé son fils en travaillant comme vendeur ambulant. Mohamad-Mehdi était devenu champion de karaté.

La question de l’avocat dans cette situation a une importance primordiale car une fois que la peine de mort est communiquée au condamné, il a 20 jours pour déposer un recours ; si l’avocat est un vrai avocat, c’est-à-dire choisi par le condamné ou par sa famille , il va attendre le dernier jour pour déposer cette requête, ce qui, quel que soit la réponse au recours, prolongera de 19 jours la vie du condamné avec toutes les éventualités que cela pourrait entraîner; mais quand l’avocat est désigné par l’appareil judiciaire, il est au service du régime et le jour même où la condamnation est prononcée, il dépose le recours, ce qui fait qu’après la condamnation, le recours serait immédiatement rejeté et la peine appliquée. Nos deux jeunes condamnés n’ont pas eu la chance de profiter de ces 20 jours de délai.

Mohamed-Mehdi n’a même pas pu dire adieu à sa famille. Quand il avait su le verdict de la mort et qu’il le disait par téléphone à son père, il lui avait demandé de “ne rien dire à maman”.

Dimanche matin, sur les murs de la ville, on pouvait lire ce graffiti : “Maman l’a su”.

Mohamad Hosseini pour sa part n’avait pas de famille, ni personne, pour récupérer son corps; sa seule famille était son frère qui avait déjà disparu dans le soulèvement. Mais aujourd’hui, il est un héros de la révolution et des milliers de personnes ont pleuré sa perte.

La mise à mort de ces deux jeunes, s’approchant tellement du récit mythique, a fait apparaître naturellement la référence à Zahak dans les slogans du jour et de la nuit de dimanche. Le nom de Zahak était scandé de plus en plus dans les slogans notamment:

“Khamenei, espèce de Zahak, on va t’entraîner sous la terre!”.

Nous avons su qu’au moins un des deux condamnés, avait comme tutrice une parlementaire allemande; Il y avait beaucoup d’autres responsables politiques occidentaux qui s’étaient exprimés au sujet des exécutions, à commencer par les parlementaires d’origine iranienne en Belgique, Suède, Australie… et qui demandent des gestes forts de leur gouvernement respectifs. En Australie, ils ont demandé d’inscrire l’Armée des Pasdarans dans la liste des sanctions, ce qui est déjà fait par les Américains et ce que les Britanniques s’apprêtent à faire. En France, Clémentine Autain a, pour sa part, critiqué l’inaction du Président Macron à cet égard.

Mais tous ces efforts, apparemment n’ont rien changé à l’affaire. La République Islamique reste sourde à ce genre de pression. Par cet acte délibéré, elle montre toute l’importance qu’elle accorde à la diplomatie internationale ; Pourtant la veille, le chef iranien des affaires étrangères, avait ” officiellement ” condamné Charlie Hebdo pour avoir manquer du respect envers le Guide Suprême et convoqué l’ambassadeur français à Téhéran pour que le gouvernement français sévit contre cette publication insolente. Quand ils ont des réclamations à formuler, des négociations à mener, ils veulent bien traiter avec l’Etat français, mais en retour, ils ne se sentent aucunement tenus par les marques de respect et l’étiquette diplomatique qu’ils exigent pourtant à leur propre égard.

Toute cette politique démontre un tour de vis supplémentaire, si ceci serait seulement possible, dans la poursuite effrénée de la répression. La République Islamique a accéléré celle-ci en débarquant le patron actuel des forces de l’ordre Hossein Ashtari, bien avant le terme de son commandement et en nommant une personne connue pour sa cruauté et sa poigne féroce. Il s’agit de M. Ahmad-Reza Radan, commandant de l’armée des Pasdarans qui a maintes fois démontré sa brutalité, notamment durant les 7 années qu’il a passées comme gouverneur du Kurdistan et du Baloutchistan. Pendant la répression des manifestations qui ont suivi les élections présidentielles de 2009, il était responsable de l’épouvantable maison d’arrêt de Kahrizak où on amenait les milliers de personnes arrêtées au cours des manifestations. Durant ces événements, il y a eu au moins une centaine de tués et des milliers de blessés. Une grande partie des tués était attribuée à ceux amenés à Kahrizak.

Par cette nomination, Khamenei démontre que malgré plus de 500 personnes tués et les dizaines de milliers d’arrêtés, il n’est pas satisfait du bilan de ses forces de répression et cherche à bien faire comprendre à ses troupes qu’il ne tolérerait aucune complaisance à l’égard des protestataires et que ce n’est pas le moment de lâcher du lest.

En même temps, il faut signaler que Khamenei vient de sortir d’une importante réunion avec les gradés des forces de l’ordre, de sécurité et du renseignements, et n’a pas beaucoup apprécié d’entendre leur plaintes au sujet de la difficulté qu’ils rencontrent pour mener à bien leur mission. (Voir plus bas)

-C’est ainsi que la semaine dernière ils ont arrêté nombre de journalistes qui pourtant travaillent au sein des journaux complètement inféodés au régime. Leur faute était apparemment d’avoir interviewé les familles des victimes récentes.

Mais avant de poursuivre, revenons aux événements du début de la semaine.

 

-La commémoration de Soleymani

Le 2 janvier, le régime était censé honorer la mémoire de Soleymani, mais il semblerait que cet événement, malgré tout l’effort de la République islamique, n’a pas eu le retentissement escompté. Ils avaient mobilisé plus de 160 bus pour ramener de partout les gens vers la capitale et avaient réservé plus de 60 entreprises d’alimentation et de restauration chargées de fournir la nourriture nécessaire à cette grande cérémonie. Ils avaient demandé à toutes les mosquées de battre le rappel auprès de leurs fidèles et de les inscrire sur des listes pour qu’ils soient plus ou moins obligés de participer à cette commémoration. Le but de tous ces préparatifs était d’amener le plus grand nombre de personnes possibles à l’occasion de cette commémoration pour démontrer que le régime n’est pas isolé au sein de la population et qu’il bénéficie toujours d’un solide soutien parmi elle. Nous avons déjà évoqué comment ils avaient recouvert les grandes villes avec des affiches, des posters et des bannières de Soleymani et du Guide Suprême.

N’oublions pas qu’au moment de la mort de Soleymani, il y a 3 ans, on a vu des millions de personnes participer à ses obsèques.

Quand Soleymani trouvait la mort dans une embuscade de l’armée américaine en Irak, il y a eu de très grandes manifestations partout en Iran et il est vrai que le nombre de participants dépassait largement ceux qui constituaient directement le soutien du régime; ceci démontrait que la propagande du régime pour faire de Soleymani un héros qui avait soi disant sauvé l’Iran de l’éventuelle occupation de Daesh avait bien fonctionné et était assez efficace surtout parmi la couche grise de la population. Le régime ne s’était pas privé de se glorifier à cet occasion et de s’attribuer ce soutien populaire. Mais aujourd’hui, la situation a bien changé ; cette propagande a perdu de sa force et a montré ses limites. Les gens comprennent qu’en 2011, quand Khamenei a envoyé Soleymani pour sauver le régime de Bachar-Assad qui, à l’époque du printemps arabe, était en prise avec les forces d’opposition révolutionnaires qui essayaient de le renverser, ne faisait rien pour sauver l’Iran des mains de Daesh car à cet époque Daesh n’existait tout simplement pas en Syrie et que c’est seulement 3 ans plus tard que Daesh y est devenu actif. A l’époque, la majeure partie des groupes insurgés contre le régime Syrien se structuraient autour de l’Armée syrienne libre (ASL), qui était fondée en juillet 2011. L’opposition politique en exil, quant à elle, était le Conseil national syrien (CNS) qui s’est organisé en septembre 2011 et puis on a eu une Coalition nationale des forces de l’opposition en 2012. Pendant ces années, c’est-à-dire de 2011 à 2014, les rebelles s’étaient emparés de la majeure partie du nord et de l’est de la Syrie, et le renversement du régime était en vue. Mais Bashar a eu le soutien indéfectible de Khamenei, qui lui a fourni les financements pour contourner les sanctions internationales et a dépêché, dès le début du conflit, Soleymani et l’armée des Pasdarans avec toutes les milices chiites du Liban, d’Irak ou d’Afghanistan qui l’accompagnaient pour le sauver.

C’est seulement en 2014 et 2015 que l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) — rebaptisé ensuite État islamique (EI) — est apparu; donc pendant ces 3 années, Soleymani et l’armée de Ghods (Jérusalem) qui est le bras de l’armée des Pasdaran à l’extérieur du pays, a combattu avec tous ses moyens la population de la Syrie et l’armée syrienne libre qui étaient en passe de renverser le régime d’Assad. C’est avec le soutien terrestre de l’armée des Pasdaran d’un côté et l’appui aérien de la Russie (surtout après 2015) de l’autre, que le régime d’Assad a pu massacrer sa population, raser et anéantir plusieurs villes et se maintenir au pouvoir. Par ailleurs, les commandants Pasdar ont depuis, à plusieurs reprises, raconté en long et en large leurs escapades héroïques en Syrie au service de Bashar, “bien avant l’arrivée de Daesh”.

Donc cette image de Soleymani “héros du peuple iranien” a perdu beaucoup de son efficacité et c’est bien ce qui a été constaté au moment de la commémoration de sa mort.

Néanmoins, le régime pensait sortir son personnage le plus populaire pour redorer son blason. Mais cette fois-ci, force est de constater qu’il a subi un échec cuisant car il n’y a eu que quelques milliers de personnes qui se sont déplacées. Ils avaient prévu même un grand concert dans la salle Vahdat (unité) anciennement appelée Rudaki de Téhéran qui était gratuit et ouvert aux personnes qui avaient participé à la commémoration; il s’est avéré qu’à part les responsables du régime, les gens n’ont pas daigné assister à ce concert.

 

-Un met typiquement iranien: le côtelette

Maintenant qu’on est en train de raconter les péripéties de la commémoration de la mort de Soleymani, il serait injuste de vous priver d’une information “sous-cutanée”: il faut mentionner une plaisanterie iranienne qui a eu droit de cité et se raconte de bouche à oreille depuis son assassinat par les Américains. Comme vous le savez, il a été ciblé par des tirs de drones américains le 3 Janvier 2020 et son corps, ainsi que le corps de Al-Mouhandis, commandant de Hashd-al-Shaabi ont été retrouvés carbonisés et en pièces; apparemment le seul membre de son corps retrouvé plus ou moins intact et qui a permis l’identification, était sa main droite qui portait à un doigt, une bague qui lui était offerte par Khamenei en personne.

D’un autre côté, dans la gastronomie iranienne, on a un plat qui s’appelle côtelette qui est un mélange de viande hachée, de pommes de terre et d’épices préparé en friture.

Dès la mort de Soleymani, on a commencé à entendre la nouvelle sous forme d’une plaisanterie de mauvais goût, l’expression consacrée était “Soleymani est devenu une côtelette”. Cette plaisanterie s’est généralisée et depuis, chaque fois qu’on parle de côtelette c’est la figure héroïque du Commandant qui vient à l’esprit!

Au moment de la cérémonie d’anniversaire de sa mort, sur beaucoup des affiches que l’Etat avait installées, on voyait griffonné le mot “côtelette” par la population; il y avait aussi des gens qui préparaient des sandwichs de côtelettes et qu’ils les distribuaient parmi les pauvres en tant que côtelettes de Soleymani.

L’affaire a été tellement prise au sérieux par la République islamique qu’elle a arrêté un chef cuisinier (Navab Ebrahimi) qui, le jour même de l’anniversaire de la mort de Soleymani, enseignait sur sa chaîne culinaire Instagram, par erreur ou de façon préméditée, la préparation de côtelette et de Mirza-Ghasemi qui est une recette à base d’aubergines et de l’ail et qui porte par malheur le même nom que le prénom du grand Général! Le pauvre cuistot a déclaré qu’il ne faisait que répondre à la demande de ses followers.

Il a été arrêté, son atelier et son restaurant fermés pour cause de préparation de côtelettes !!! On voit donc que cette plaisanterie a été même validée par le code de procédure pénale islamique !

-le 3 janvier, Madame Elmira Sharifi-Moghadam, une des présentatrices vedettes de la télé iranienne (chaîne No 2), faisait une revue de presse du pays. Elle s’est étonnée que le journal “Ham Mihane” (Compatriote) du 13 Dey (2 janvier) n’ait pas attribué sa “Une” à l’anniversaire et à la commémoration du Sardar (Commandant) Soleymani ; autrement dit on n’attaque plus les journaux pour ce qu’il produisent mais pour ce qu’il ose ne pas produire ! C’est un autre pas vers une dictature qui ne s’occupe plus uniquement de vos actes, ni même de vos intentions supposées, mais de ce que vous n’avez pas eu comme intention! Une fois critiquée, elle a osé dire qu’ il s’agit de la “critique des médias“ !!! (5 janvier Twitter :@elmira_sharifi)

-le 4 janvier, Tarané Alidousti, l’actrice connue en Iran et à l’étranger, après 3 semaines d’emprisonnement, a été libérée sous la pression des médias internationaux ainsi que les cinéastes iraniens et étrangers, avec une caution d’un milliard de toman (25000 dollars).

A sa sortie de prison, elle ne portait aucun hijab et a été accueillie par des dizaines de personnes qui lui ont offert des fleurs… Elle s’est fait prendre en photo avec ses amis, sans hijab, pour dire qu’elle ne reculait pas devant le régime. Sur le côté droit de son visage, on pouvait encore distinguer des traces de coups. Quand elle partait dans la voiture, assise derrière, elle a salué les gens par la fenêtre, a souri joyeusement en montrant avec ses doigts le V de la victoire et a tiré la langue pour dire merde à l’instance judiciaire qui l’avait emprisonnée.

-Le 4 janvier, il y a eu aussi une réunion au siège du guide où étaient convoqués tout le gratin des forces de sécurité et de renseignements du pays. Toutes les instances sécuritaires du régime y étaient présents, 45 responsables et commandant des Pasdaran, des chefs Bassidji, du ministère du renseignement et de l’information jusqu’au bureau de renseignement du Quartier général de Khamenei, les commandants de l’armée, et leur organisation de sécurité, les ministres de sécurité… enfin tous les gros bonnets qui s’occupent des questions de renseignements et de sécurité et de force de l’ordre.

La session a été essentiellement consacrée aux manques et difficultés que ces gens-là rencontrent quotidiennement dans l’exercice de leur fonction. D’après les premières fuites sorties de cette réunion, qui est la deuxième du genre depuis le début du soulèvement actuel, aucune solution n’a été trouvée et ces responsables sont sortis bredouilles de leur rencontre avec le guide. Ils se sont plaints du manque d’effectifs et surtout de motivations chez leur subordonnés; que dans un seul jour 17 des officiers de différents services ont déposé des arrêts de travail; que l’argent ne suffit plus; qu’ils entendent de leur personnel “comment tirer sur nos propres enfants et familles?”…

Un des commandants a rapporté les paroles d’un de ses soldats: “vous me demandez de tirer une balle qui vaut 150 mille tomans sur quelqu’un qui ne demande que 50 mille tomans par jour pour travailler?!

Jeudi 5 janvier

Nous avons eu le malheur d’entendre des dizaines de fois, sinon plus, le récit des jeunes tués par les forces de l’ordre de la République islamique.

Le cas d’un jeune de 19 ans, raconté par sa mère nous semble exemplaire pour saisir réellement ce à quoi les familles iraniennes ont affaire. Ce n’est pas juste l’histoire de perdre un jeune enfant à l’âge où normalement il est censé commencer à construire sa propre vie, mais tout ce qui suit pour la famille et la catastrophe que cela représente … et malgré tout, on voit les gens continuer à descendre dans la rue et mettre leur vie en danger.

Il s’appelait Nima ShafaghDoust. Il fait partie des jeunes comme Mahsa, Nika, Hadice, Sarina … qui ne pouvaient accepter l’absurdité du régime au pouvoir et qui ont eu le courage de protester publiquement.

Nima a été arrêté le 30 shahrivar (21 septembre 2022) dans le petit village d’Islamieh à côté de la ville de Oroumieh (Azerbaijan). Il est décédé 12 jours plus tard et c’est seulement au bout de 3 mois que sa mère a divulgué la nouvelle de sa mort.

Les raisons de ce délai est l’intervention des services de sécurité du guide qui les ont menacé en disant que s’ils parlaient publiquement de la mort de leur enfant, ils verraient leurs autres proches subir le même sort. Ils ont exigé que pour expliquer la mort de Nima, la famille dise qu’il a été mordu par un chien. La République islamique, jusqu’à maintenant, n’a accepté la responsabilité d’aucun de ces crimes; à chaque fois, ils disent que les jeunes sont tombés de haut, un chien les a mordu, une voiture les a heurté ou … des fables du même type pour comptabiliser ces morts comme accidentelles.

Sa mère explique qu’il a été à Islamabad le 21 septembre et c’est là qu’il a été blessé par balle. Les voisins l’ont pris chez eux et ont essayé de bloquer l’hémorragie au niveau de ses jambes, puis ils l’ont transporté chez son oncle. L’oncle l’a amené chez ses parents dans un état très critique. La famille a essayé de trouver une voiture pour l’emmener vers un hôpital; devant l’hôpital, il y avait tellement de présence policière qu’ils n’ont pas osé entrer et ils ont cherché un cabinet médical.

Nima a été soigné à domicile par le médecin du cabinet médical pendant 12 jours; Le 3 octobre, son état s’aggrave brusquement de sorte qu’ils ont été obligés de le transporter à l’hôpital mais une demi-heure plus tard il y décède.

L’hôpital refuse de rendre le corps en expliquant qu’il faut aller à la médecine légale. Deux jours plus tard, ils arrivent à se faire remettre le corps de Nima et ils procèdent à l’enterrement sans plus tarder.

À minuit le jour même, ils ont été contactés par les services de renseignement qui leur ont interdit d’organiser une cérémonie avec toujours cette menace de “prendre les autres jeunes de la famille pour leur faire ce qu’on a déjà fait à Nima”.

Quand ils reçoivent la réponse de la médecine légale, ils sont convoqués au tribunal qui leur indique que la mort de Nima était accidentelle.

C’est à ce moment-là que 5 personnes armées sont arrivés à la maison en les menaçant de bien préciser que Nima a été mordu par un chien.

Le lendemain de la divulgation de cette information (le 4 janvier) on a su que le père de Nima suite à ses événements a eu une crise cardiaque et est décédé.

Décidément, les caricatures de Charlie Hebdo (du 4 janvier) qui montrent la cruauté de la République islamique sont bien en dessous de la vérité.

-Une des promesses du candidat Raïssi aux élections présidentielles étaient la construction de 4 millions de logements en 4 ans, c’est-à-dire 1 million de logements par an; c’était une promesse que beaucoup de spécialistes ont jugé impossible à financer et encore moins à réaliser.

Aujourd’hui monsieur Mokhber, son directeur de cabinet et aussi le très influent directeur du “Quartier général de l’exécution du commandement de l’imam” vient de déclarer : “quand nous avons dit qu’on allait construire 4 millions de logements, on n’a jamais voulu dire que c’est l’État qui allait les construire! Les logements sont toujours construits par les gens pas par l’État;”

Donc, s’il y a une manque dans ce domaine, on ne peut pas le considérer comme la faute de l’État.

Reculade du Guide: trop peu, trop tard !

L’offensive de propagande du régime, la semaine dernière, a vu son apogée le mercredi 4 janvier où le Guide Suprême a jugé nécessaire d’éduquer encore une fois les femmes.

Réunies dans une grande salle, quelques centaines de femmes choisies soigneusement par le régime, qui les avait filtrées plusieurs fois et examiné leur doléances, étaient assises devant le siège du Guide qui avait derrière lui, affiché en belle calligraphie arabe, un Hadîth de l’Imam Sadegh (juriste de référence, 6ème Imam chez les chiites duodécimains) qui disait :

اکثر ألخیر فی‌النساء qui se traduit par “la plupart des bontés se trouvent chez les femmes”.

C’est une phrase que le clergé ressort en général à l’occasion de leur journée de la femme.

Khamenei à cette occasion a fait un discours dans lequel il a explicitement reconnu que les femmes qui portent le hijab “de façon faible” ou “mal” ne doivent pas être considérées comme en dehors de l’islam; il a précisé que c’est vrai que le hijab fait partie des principes de l’Islam mais néanmoins il ne faut pas être très sévère avec celles qui ne le portent pas de façon correcte.

Autrement dit, après 4 mois de soulèvement, après l’assassinat de Mahsa, on entend de la bouche de la République islamique qu’il n’y avait aucune raison d’inquiéter Mahsa et encore moins de l’arrêter ou de la tuer!

Il y a quelques semaines, on avait dit que le porte-parole du pouvoir judiciaire avait dit qu’ils étaient en train d’étudier la question et que ça allait prendre deux semaines; il paraît qu’à la suite de cette étude, ils sont arrivés à ce résultat qui est une franche reculade par rapport à leur principe et surtout par rapport à leur pratique. Mais cette question de hijab depuis longtemps a été dépassée et a donné sa place à la nécessité du renversement de la totalité du Nezam.

La structure totalitaire de la République islamique fait que la moindre revendication contre une partie de ses préceptes, entraîne la totalité sous le coup de l’opposition et se transforme en une opposition contre sa totalité.

D’ailleurs le même jour, les femmes à Izeh criaient leur colère contre le régime et comme une réponse aux propos de Khamenei scandaient :

“Avec ou sans hijab, on ira jusqu’au renversement !”

Ce qui, dans la réunion en question, était encore plus intéressant, était le discours d’une dame, Mme Paritchehr Janati, qui s’est présentée comme femme au foyer avec deux enfants, mais qui par la suite s’est révélée être depuis longtemps, membre des Pasdarans, faisant de la propagande pour la polygamie, le mariage des enfants et le mariage provisoire. Un coup d’œil sur internet nous apprend qu’elle s’est présentée comme spécialiste de la question des femmes dans la théologie chiite et qui fait propagande contre le féminisme.

Mais ce qui était intéressant ce n’était pas son discours mais son accoutrement; elle portait une fichue rose violet sur les cheveux et avait des chaussettes de même couleur. Cette couleur qui, chez les chrétiens, dans certaines cérémonies liturgiques est la couleur du chasuble des prêtres catholiques symbolisant la joie est interdite chez les chiites. l’Islam chiite est basé sur le martyre des Imams et de ce fait est une adulation de la mort. Il est contre toute sorte de cérémonies qui ne soient pas à la gloire de Dieu, ses prophètes et le martyre des imams et la couleur utilisée est toujours le noir. Le clergé chiite considère que la couleur rose est quelque chose d’inconvenant, de laid et qui pourrait être excitante pour les hommes. Jusqu’à maintenant si jamais une femme était vêtue en rose ou portait un foulard rose, elle était arrêtée par la police morale et ou au minima, elle était interdite dans les institutions publiques comme les écoles, les universités, l’administration et autres.

Il est vrai que depuis 43 ans la République islamique a tout fait pour tuer le sentiment de la joie, de la fête, du bonheur et oriente la société seulement vers l’expression de la douleur, de la tristesse et du martyr. De là, sa lutte incessante contre les cérémonies pré-islamiques que les Iraniens fêtent avec ardeur dans la joie et avec des couleurs chatoyantes, les couleurs qui vont vers la lumière du soleil. Et çe, de façon encore plus assidue depuis que ces faits sont devenus le signe de l’opposition politique au régime au pouvoir.

Donc le fait que Khamenei accepte de recevoir une dame avec ces couleurs est déjà le signe d’un recul important pour le clergé chiite, un recul qui a été formalisé par son discours.

L’appareil judiciaire tout de suite après a abaissé les exigences de l’accoutrement islamique en précisant que dorénavant ils ne vont pas arrêter les femmes qui portent mal le hijab mais qu’ils vont se contenter de leur donner un avertissement et les inviter à se former sur la façon correcte de porter le hijab. En réalité, sous la force du soulèvement des femmes en Iran, Khamenei ne fait que reconnaître un fait déjà établi dans la société. Personne n’ose plus arrêter les femmes qui ne portent plus de hijab, car il va devoir affronter non seulement la femme en question, mais tous les autres passants qui vont la défendre.

Aussi il faut préciser que les femmes n’ont pas lutté contre le hijab, elles ont réclamé leur liberté de choix entre porter le hijab ou non; donc, du même coup, la République Islamique essaie de fausser la revendication initiale tout en reculant d’un petit pas sur quelque chose dont la disparition totale … était demandée, puisqu’on n’est plus à ce stade.

-De nouveaux billets viennent d’être mis en circulation sur lesquels ils ont fait disparaître 4 zéros.. le Toman nouveau vaut donc mille anciens tomans. Apparemment c’est le seul moyen que le gouvernement a trouvé pour faire baisser au moins nominalement les prix, ainsi que de réduire ses déficits.

Comme ça le dollar équivaut à 40 toman et non plus 40 000 Toman, ce qui semble peut-être moins humiliant pour le pouvoir mais qui ne change rien au fond de l’affaire.

-Dans la ville de Khomeyn, Néguine, une jeune fille de 16 ans a été assassinée sauvagement par son père et son oncle suite à la dénonciation de sa mère au sujet de ses fréquentations virtuelles sur les réseaux sociaux.

Elle a été surprise par sa mère en train de tchatter sur Instagram avec un jeune homme.

Une fois que, les jours suivant, la famille recevait son oncle, sa mère se plaint de ce que fait Néguine sur Instagram.

Le père et l’oncle se ruent sur la fille et la massacre avec un pilon en bois.

Malheureusement ceci n’est pas exceptionnel en Iran. On entend régulièrement ce genre de nouvelles sur les assassinats qu’on appelle “namoussi” (soi-disant d’honneur) de sorte que le sujet n’intéresse plus les médias. Très souvent les parents ne seraient même pas inquiétés par la justice puisque la fille appartient au père et fait partie de ses biens. Le père ainsi que le grand-père ont droit de vie ou de mort sur la fille.

Et aucune peine n’est prévue. On dit que ces cas-là n’ont pas de Ghéssâs (vengeance).

A cette égard, un fait divers, il y a quelques années avait retenu les attentions:

Romina, une fille de 14 ans de Talesh, a été brutalement assassinée par son père dans son sommeil avec une faux pour s’être enfuie quelques jours avec son petit ami. Le tueur qui n’était donc autre que son père a été arrêté par la police mais il a été relâché.

A l’époque, un journaliste (du journal “Iran”) avait publié une photo de la scène et avait écrit: “tous les hommes de la famille, ont fièrement fait figuré leurs noms dans l’avis de décès. Parce qu’ils estiment avoir lavé la honte qui entachait l’honneur de la famille et maintenant ils peuvent crier qu’ils sont de vrais hommes !”

La fille est néanmoins considérée comme sexuellement majeure à l’âge de neuf ans (d’après l’article 1210 alinéa 1 du code civile, la majorité sexuelle est de 9 ans pour les filles et 15 ans pour les garçons), pour pouvoir être mariée à un mollah ou un grand commerçant du bazar qui peuvent avoir jusqu’à 4 femmes légitimes et tant qu’ils veulent de “provisoires” (cighé صیغه). Ce n’est pas pour rien que beaucoup d’hommes se montrent encore réticents à participer au soulèvement. Le cas, ces jours-ci, de la lutte des femmes en Afghanistan est exemplaire car il est très rare qu’on puisse trouver des hommes dans les actions ou les manifestations des femmes. Même s’ils ne crient pas sur les toits, cette infériorité des femmes, leurs procure des avantages non négligeables qu’ils ne sont pas prêts à abandonner.

-La manifestation de vendredi dernier 6/01/23 de Zahedan était très importante en nombre de personnes ainsi que les slogans qui étaient plus radicaux que d’habitude.

“Pas de koulbari (porter sur le dos des marchandises), pas de soukhtbari (porter sur le dos du carburant), liberté et égalité!”

“Pas de monarchie, pas de guide suprême, démocratie, égalité!”

“Mort au gouverneur Basiji!”

“Pas de couronne, pas de turban, le mollah est fini!”

Après la nomination de Mohammad Karami, ancien membre du Conseil de sécurité et commandant du Corps des gardiens de la révolution islamique, en tant que nouveau Gouverneur de Sistan et Baloutchistan, on voit se multiplier des arrestations “groupées” dans cette province. Cette tendance a atteint son apogée au cours des quatre derniers jours. Si bien qu’au moins 113 personnes ont été enlevées par les forces de l’ordre uniquement à Zahedan. La plupart de ces arrestations ont été effectuées dans les quartiers de Karimabad, Murad Qoli, Yerabad et Bazar Hamish sur des rond-points où habituellement les ouvriers journaliers attendent que des employeurs viennent les embaucher. Au cours de la journée du 5 janvier, les forces de l’ordre ont foncé en voiture sur les travailleurs et les ont arrêtés alors qu’ils étaient blessés. De plus, lors de ces attaques, ils ont pris pour cible ceux qui essayaient de s’enfuir. Il y a un grand nombre d’enfants et d’adolescents parmi ces personnes qui ne peuvent être identifiés faute d’acte de naissance. Souvent ils sont considérés comme étrangers et expulsés manu militari vers le Pakistan.

-D’après l’édition du 5 janvier 2023 du journal E’temad (confiance) qui a rassemblé les données du monde ouvrier sur la suicide, au moins 23 ouvriers en moins d’un an, se sont donnés la mort en raison de la pauvreté, des revendications d’arriérés de salaire, des revendications salariales et des licenciements.

Ces enquêtes sur le suicide des travailleurs (en 2021/2022) montrent que depuis le début de cette année (21 mars) jusqu’au 29 décembre, c’est à dire en seulement 283 jours, au moins 23 ouvriers se sont suicidés en raison de la pauvreté, des arriérés de salaire, des revendications salariales, des ajustements dans l’organisation ou du lieu de travail et des licenciements.

En moyenne, un travailleur se suicide tous les 12 jours. Tous les défunts étaient des hommes, journaliers, ou sous contrat de courte durée… en somme des précaires.

Dans deux cas seulement, la raison de leur acte n’est pas connue, pour tous les autres, la raison était clairement liée à leur travail ou à sa perte.

Sur un total de 21 cas, 11 étaient dus au licenciement, à une interdiction d’entrer sur le lieu de travail ou une sanction disciplinaire avec menace de licenciement; 5 travailleurs se sont suicidés pour cause de pauvreté et de chômage, 4 autres pour des problèmes de moyens de subsistance causé par des arriérés de salaire et un travailleur s’est suicidé après un conflit avec l’employeur.

Selon ces enquêtes, la province d’Ilam est en tête du tableau avec 5 cas de suicides d’ouvriers, les provinces de Kohgiluyeh et Boyer Ahmad, le Khouzistan et le Kermanshah avec 3 cas, la province du Fars avec 2 cas et les provinces d’Azerbaïdjan de l’Ouest, Ghazvin, Gilan, Golestan, Kerman, Khorasan Razavi et Semnan occupent la place suivante avec un cas chacune.

Selon les enquêtes de “E’temad”, sur la base des détails du suicide de 21 travailleurs, les moyens employés malgré leur diversité avaient ceci en commun qu’ils étaient tous définitifs, sans espoir de secours. L’auto-immolation, la pendaison, la prise de pilules et le tir avec armes à feu ont été les méthodes choisies par ces travailleurs pour mettre fin à leurs jours. 10 ouvriers se sont immolés par le feu, 6 ouvriers se sont pendus, trois ouvriers ont mis fin à leurs jours en prenant des pilules et 2 ouvriers se sont suicidés avec des armes à feu.

Pour rendre plus concret leur geste on se permet de présenter quelques exemples:

Sirous et Karim, deux ouvriers de 20 ans, tous deux vivant dans le même village et travaillant dans une unité de boulangerie de la ville de Mamasani, se suicident après avoir été licenciés. Ils ont laissé une petite vidéo expliquant leur geste. Ils disent qu’ils ont perdu leur emploi et sont fatigués de cette vie.

Arash, Ali et Mohammad étaient des ouvriers de pétrochimie dans la province d’Ilam. Tous trois ont été licenciés et expulsés de leur lieu de travail ; ils ont décidé tous les trois de mettre fin à leur vie. Ali et Muhammad se suicident à 24 heures d’intervalle; L’un s’est tiré une balle et l’autre s’est pendu. Arash est décédé après avoir pris des pilules.

Khosrow était un ancien combattant de la guerre à la retraite; il s’est immolé par le feu pour protester de ne pas être entendu malgré ses demandes répétées concernant ses graves problèmes de subsistance.

Un des plus horribles est certainement le cas de Mohammad; un ouvrier de 38 ans vivant à Khalilabad qui a d’abord tué ses deux enfants puis s’est pendu.

En dehors de ceux-ci, il y a eu certainement d’autres travailleurs qui ont volontairement abandonné la vie, mais la famille n’aurait pas divulgué la nouvelle pour protéger sa réputation ou en raison de conflits claniques et familiaux, ou de la peur d’être privée des prestations sociales (réduction des subventions et d’autres avantages). À ces prétextes, il faut ajouter le fait que les agents de l’État préfèrent dissimuler ces données dans l’annonce et la présentation de statistiques précises sur les problèmes et les enjeux de la société. Ces données ne constituent donc que le sommet de l’iceberg.

Même si la comparaison ne veut pas dire grand-chose, signalons qu’en France en 2008-2009 le suicide d’au moins 32 employés de France Télécom avait suscité une tolé général; elle avait obligé les gouvernants de mimer momentanément une préoccupation au sujet de burn-out, sans que cela aboutisse à quelque chose de vraiment concret; mais en Iran, ce genre d’information ne remplit même pas une page des principaux journaux, encore moins une réaction quelconque de la part du gouvernement.

-On a su le 6 janvier à travers la chaîne CNN que les drones iraniens utilisés en Ukraine par la Russie sont en grande partie fabriqués à l’aide des composants américains; apparemment les drones intitulés Shahed (témoin) No 13 possède 58 composants dont plus de 40 sont fabriqués par 13 compagnies américaines. On voit à quel point les sanctions commerciales contre l’Iran sont efficaces ! Ils vont dénicher les sociétés intermédiaires iraniennes qui ont réalisé ces achats et éventuellement vont les ajouter à la liste des sanctions. Deux jours plus tard, un membre de l’ambassade d’Iran dans un pays occidental quelconque ou quelqu’un de sa famille va créer une autre société commerciale qui va contourner les sanctions.

-Un autre mot au sujet des sanctions qui démontre que les seules sanctions efficaces contre la République islamique concerne le pétrole le gaz la banque l’assurance et la navigation maritime internationale. C’est-à-dire tout ce qui fait exister de circuit de la rente pétrolière ; les autres sanctions sur lesquelles les pays occidentaux font tant de publicité pour montrer leur prétendue solidarité avec le peuple iranien ne valent pas grand-chose.

À ce sujet, Ahmadinejad a récemment déclaré dans un interview à propos des sanctions (avril 2021) que: “pendant la première période, l’ONU publiait des résolutions, c’était de la paperasse sans valeur, on n’y prêtait aucune attention. Mais les sanctions suivantes de la part des Américains en 2011, qui concernaient la Banque Centrale et le pétrole étaient autrement plus sérieuses ; nous sommes allés dire à tout le monde, à toutes les ailes du pouvoir qu’il ne faut pas plaisanter avec ça, c’est très sérieux, c’est une vraie guerre économique; heureusement à ce moment-là, les Européens n’avaient pas suivi les sanctions américaines, ce qui nous laissait du répit ; mais alors qu’est-ce qu’on a vu se passer à Téhéran? On a vu tout de suite l’ambassade britannique à Téhéran attaquée par les forces extrémistes, ce qui a fait que les Européens aussi ont suivi les sanctions; en plus elles ont été élargies au cours de ces deux années à l’assurance et à la navigation maritime.”: (https://youtube.com/shorts/TrcCZIvKXEg?feature=share)

-Le 6 Janvier, la population pour multiplier les occasions des cérémonies qui sont en fait des possibilités rituelles de rassemblement a trouvé une nouvelle astuce:

Cette fois-ci, au lieu de se limiter aux journées coutumières de deuil (3ème, 7ème ou 40ème jour de la mort), ils ont célébré également l’anniversaire de naissance d’un des morts ! On a vu ainsi, l’anniversaire de Mohsen Gheysari fêté à Ilam avec la participation d’une foule de plusieurs milliers de personnes qui s’est transformé bien sûr en un meeting politique.

-Samedi 7 janvier, vers midi, dès que l’annonce de la pendaison de ces deux jeunes à atteint la rue, dans certains quartiers les slogans qui d’habitude dans la soirée et la nuit était lancés par les fenêtres ont commencé dans la ville en plein jour.

Par la suite de petites manifestations locales au niveau des quartiers ont repris avec toujours les mêmes slogans.

Dans la soirée et dans la nuit, les cris de slogans des gens dans les quartiers résidentiels était plus forts que jamais, on avait l’impression que toute la ville était en train de scander des slogans contre le régime.

-Le 18 Dey ( Dimanche 8 janvier) c’est la date anniversaire de l’explosion du vol 752 ukrainien par les Pasdarans qui a fait 176 victimes iraniennes mais aussi ukrainiennes. Des appels ont été lancés pour fleurir partout où il y a eu des morts, victimes de la RI, dans les cimetières, sur les tombes, les rues, les passages des manifs, les quartiers, les aéroports, les ports, les usines… là où les gens sont tombés sous les balles, la corde de pendaison ou les négligences de la RI. C’est une façon intelligente et à moindre risque pour montrer la solidarité de la population avec le soulèvement actuel et dénoncer pacifiquement les crimes du régime lors de la commémoration de ces victimes.

Ce dimanche, les manifestations et les protestations dans la rue sont de retour. Ce n’est plus uniquement à Sanandaj (Kurdistan) – ou à Zahedan (Baloutchistan). Dans d’autres villes aussi les gens sortent pour manifester leur opposition au régime. Les slogans du samedi soir lancés par les fenêtres, sont descendus dans les rues dimanche.

Dans la soirée, les gens à Téhéran accourent vers la place Azadi et dans beaucoup d’autres villes, les manifestations ont repris.

-Un texte avait circulé au mois d’octobre dernier qui annonçait la création d’un groupe militant s’intitulant les “Combattants Rouges”. Ils font certainement partie de la mouvance de gauche; même si ce texte ne contient pas d’éléments nouveaux, c’est important de le signaler car d’autres groupes et cercles de ce type ont depuis vu le jour.

La première déclaration du Red Fighters Group

Le 14 octobre 22 à Téhéran.

Déclaration No 1

“L’heure de la révolution iranienne a sonné !

Aujourd’hui, toutes sortes d’oppressions sur les gens ont atteint leur apogée. Non seulement les travailleurs, mais toute la population en a assez des conditions économiques actuelles. Les agriculteurs sont en colère à cause du manque d’eau, les femmes sont en colère contre l’oppression qu’elles subissent, les groupes ethniques et les minorités sont en colère contre les discriminations et les inégalités, les étudiants sont en colère contre la répression et l’avenir dont ils sont privés, et toute cette colère doit prendre comme cible l’État oppressif de la République islamique.

Peuple d’Iran,

Vous devez considérer la lutte contre la République islamique meurtrière et l’ordre oppressif existant comme quelque chose faisant partie de votre vie. Cette lutte passe par l’organisation de groupes de quartier pour vandaliser et détruire les centres gouvernementaux, pour identifier les informateurs, les Bassiji et les forces de sécurité et révéler leur identité. En scandant des slogans sur les toits des maisons la nuit, en bloquant les routes avec vos voitures, en mettant le feu aux banderoles gouvernementales et en écrivant sur les murs, en organisant des grèves et toute autre action ou initiative qui pourrait être mise en œuvre contre la République islamique.

Plus important encore, c’est que la rue nous appartient, être dans la rue détruit le pouvoir de répression de l’Etat. Avec toute la population dans les rues, le pouvoir de répression de l’État serait insignifiant. La République islamique touche à sa fin. Profitez de chaque occasion pour conquérir les rues. N’oubliez pas les samedis de la révolution, descendez dans la rue tous les samedis de toutes vos forces. Venez dans les rues, sur toutes les places principales du pays, uni pour un avenir d’égalité, pour Femmes, Vie Liberté !

Le Manifeste de la révolution iranienne sera publié dans nos prochaines annonces.”

Habib

« Le temps des ouvriers”

Info confirmé par l’agence Reuters

Nouvelles d’Iran du 25 Décembre au 1er Janvier 2023

Depuis le début de la semaine dernière (en Iran, le jour de congé hebdomadaire étant le vendredi, la semaine débute le samedi), et étant donné qu’à la fin de cette même semaine, le 2 Janvier, sera l’anniversaire de la mort de Soleymani, le régime a lancé une politique de normalisation qui se décline en plusieurs volets:

-L’intensification de la répression dans tous les domaines, sur tout le territoire et à tous les niveaux, les usines, l’administration, les universités, les lycées, les commerces … des centaines d’arrestation auprès de tous les gens qui ont été aperçus dans les mobilisations et en les condamnant à des peines de prison, si ce n’est plus… On a déjà dépassé depuis longtemps les 20.000 arrêtés.

-L’arrêt de l’Internet de sorte qu’aucune nouvelle ne puisse atteindre les réseaux sociaux et les chaînes d’information à l’étranger. À un moment, on avait entendu que le réseau de Star Link pourrait remplacer Internet; en fait il apparaît que quelques centaines d’appareils (100, 200 ou 800 selon les sources) sont sur le territoire iranien mais que seulement une centaine sont en fonctionnement.

-La désinformation par une propagande incessante à travers la radio/télé publique ainsi que tous les journaux qui, suivant leur degré d’allégeance au pouvoir, déclinent la grande nouvelle qu’on entend diffusée sur tous les tons: suite à l’essoufflement des “troubles”, le calme est revenu et la vague de protestation a cessé. Ce genre de publicité se veut en général performatif et auto-réalisateur.

A côté du message de ces médias, on a vu la surface des grandes villes se couvrir de grands panneaux, posters et d’affiches de Soleymani et du Guide qui, au moment de l’anniversaire de la mort de Soleymani, voulaient rassurer les citoyens fidèles sur la véracité de leur message.

4- L’intimidation et la tactique de propager la peur parmi la population.

Sur les 20.000 personnes arrêtées au cours du soulèvement, au moins une centaine aujourd’hui se trouvent dans les couloirs de la mort et attendent leur pendaison par l’appareil judiciaire de la République islamique. La semaine dernière, le patron de cet appareil Monsieur Egéï a demandé à tous les procureurs de ne pas hésiter à appliquer les peines qui ont été finalisées. Ces pendaisons qui se passent en général devant un public de Bassiji suivent deux buts principaux:

D’abord, créer une atmosphère de terreur et d’intimidation auprès de la population surtout parmi les parents pour qu’ils s’abstiennent eux-mêmes de descendre dans la rue et surtout qu’ils interdisent aux plus jeunes de participer aux manifestations et protestations.

Puis, de rassurer les Bassiji en les soutenant dans leur mission de répression; Pour les persuader de ne pas avoir peur car le pouvoir en place est derrière eux et les soutient; qu’en exécutant les ordres, ils ne font qu’accompagner un pouvoir juste, soutenu par la parole de Dieu et une volonté divine qu’aucun homme, ni entité mondaine ne pourrait mettre en cause.

Tous ces efforts, colportant le message de la fin des protestations et du calme, enfin survenu, bien entendu ne voulait pas dire que les protestations s’étaient calmées et que d’un seul coup des millions de personnes qui avaient participé à ce mouvement étaient rentrés dans le rang;

De toute façon, il faut bien se rendre compte qu’on a affaire à une révolution de longue haleine; que la République islamique ne va pas lâcher facilement le pouvoir et qu’elle dispose des moyens illimités d’un Etat pour continuer la répression et se maintenir au pouvoir. Il est plus judicieux de parler dans une telle situation de la respiration de la révolution avec ses temps forts et faibles.

On va jeter un coup d’œil sur les événements de cette semaine pour mieux appréhender la situation.

Il y a des signes de résistance à cette nouvelle vague de répression + intimidation + désinformation = normalisation.

-Les manifestations qui suivent les cérémonies du quarantième des morts se poursuivent malgré de vraies descentes, en bonne et due forme, des forces de l’ordre, avec équipements quasi-militaires. Ainsi au cours de cette semaine, on a été témoin de dizaines de ces cérémonies dans plus de vingt villes ou villages; ces cérémonies ont pris de l’ampleur de sorte que depuis jeudi dernier elles sont devenues plus importantes en nombre de participants;

-des slogans scandés dans la nuit dans les ensembles résidentiels (notamment à Shiraz, Karaj …) ou par petit groupe dans les quartiers des villes (notamment à Téhéran);

-La mise à feu des sièges de Bassiji à Boushehr (Khûzistân) ou des grands monuments/sculptures de Soleymani qui ont de nouveau obligé le régime à mettre des surveillants pendant la nuit devant ses monuments pour les protéger. Ça a quelque chose de risible de voir au milieu d’une place, sous le monument de plusieurs mètres de hauteur de Soleymani, posées trois chaises avec trois Bassiji en train de somnoler des heures durant dans ce froid;

-Les graffitis de slogan sur les murs continuent de plus belle;

-La mise en feu des grandes pancartes de photos de Khamenei et de Soleymani

-Collage des photos des jeunes tués par-dessus les pancartes de la République islamique et leurs Martyrs.

-On a vu aussi un appel commun des quartiers différents des villes de l’Iran.

Déclaration de l’Association des jeunes des quartiers d’Iran qui a lancé un appel à trois jours de mobilisation: (traduction automatique corrigée)

“Rendez-vous les 6, 7, et 8 janvier 2023

Nous n’oublions pas ce qu’ils nous ont fait au mois de “Day” [du calendrier iranien, correspondant à la période du 22 décembre au 20 janvier.] Les catastrophes de Plasko [Incendie non-élucidé d’un tour nommé Plasko en plein centre de Téhéran le 19 janvier 2017 qui a fait une quinzaine de morts], Sanchi [Sanchi était un pétrolier battant pavillon panaméen mis en service en 2008 et exploité par la National Iranian Tanker Company, filiale de la National Iranian Oil Company; Le 6 janvier 2018, alors qu’il transportait une cargaison de condensat de gaz naturel, le navire est impliqué dans une collision au large de Shanghai. Le 14 janvier 2018, le navire a coulé en mer de Chine; Les 32 membres d’équipage (30 Iraniens et deux Bangladais) sont considérés comme morts par les autorités] et du vol ukrainien PS752 [voir les nouvelles de la semaine dernière, 176 morts]. Le mois de Day est le mois où nos héros sans prétention nous ont été enlevés de notre terre, de nos mers et de notre espace.

À la mémoire de ces jeunes héros, riches de tous les espoirs qui sont tombés au sol sous les balles de la République islamique, à la mémoire de tous les pompiers de Plasko, de l’équipage de Sanchi et des passagers du vol ukrainien, et à la mémoire de toutes les victimes et les prisonniers de la République islamique qui a ses mains tachées de sang, nous nous rendrons du 6 au 9 janvier dans les rues, devant les casernes de pompiers, dans les aéroports et les ports de nos villes.

Nous invitons les pompiers, les équipages et les employés des aéroports et des ports à honorer la mémoire de ces proches et de leurs collègues en ces journées.

Pour Femme Vie Liberté

4 Day 1401[25 décembre 2022]”

Ce qui nous semble très important dans cet appel, au-delà de son contenu, c’est la signature qu’elle porte. Elle est signée « L’Association des jeunes des quartiers d’Iran »

Cette association a été créée le 7 décembre 2022 avec la participation des jeunes de plus de 30 villes. Ceci montre un grand pas effectué dans l’organisation spontanée de lutte de ces jeunes sur une partie importante du territoire.

-La semaine a donc commencé avec les protestations estudiantines ainsi qu’au sein des lycées; encore une fois les étudiantes-s et les lycéennes-s ont pris le flambeau du soulèvement et ont continué le mouvement de protestation. Il était très émouvant de voir le rang des lycéennes sorti sous la neige en scandant des slogans contre le régime. Le plus surréaliste et buñuelien était à Téhéran, dans le quartier d’AssadAbad où les jeunes se balançaient des boules de neige tout en criant au renversement du régime!

-Déjà les ouvriers avaient montré leur détermination à poursuivre leur mouvement aux usines Pétrochimie d’Abandan (Khûzistân), à Ilam (150.000 hab. province du même nom à l’ouest du pays) et sur les plateformes d’Assaluyeh, où la présence policière est devenue telle qu’on a l’impression qu’ils travaillent dans un camp militaire. (Voir les 2 traductions publiées dans la livraison “les oiseaux de la tempête” de cette semaine).

On a vu les forces de l’ordre, sur les plateformes gazières de Pars du Sud ou de la pétrochimie d’Abadan, carrément attendre les arrivées des services de transport des usines pour arrêter les ouvriers qui se sont fait remarquer au cours des mobilisations. C’est comme si les ouvriers étaient des prisonniers dans un camp militaire pour bosser dans une unité de production. Il ne serait peut-être pas exagéré de parler d’Assaluyeh comme d’une caserne de travail obligatoire. Le rapport d’implication réciproque de l’exploitation capitaliste semble de plus en plus suspendu pour devenir le rapport d’une armée qui détient des prisonniers pour le travail obligatoire; c’est pourquoi la première des revendications des mouvements ouvriers est d’arrêter l’ambiance sécuritaire et quasi militaire qui règne sur leurs unités de production.

Cette ambiance s’est élargie aux niveaux des autres villes et sur des bureaux en ville ou dans l’administration ; il n’est pas rare de voir les employés, dans l’entrée des bureaux privés ou publics, être fouillé par les services de surveillance et éventuellement arrêtés en tant qu’opposants, dénoncés par les fidèles du régime.

-Cette semaine, de nouvelles tactiques de protestation ont vu le jour notamment à Boucan (Kurdistan) ou au cours d’une cérémonie du 40e jour du décès d’un adolescent, ils ont lâché des colombes dans le ciel pour rendre hommage aux victimes. Aussi, ils gonflent des ballons d’hélium auquel ils attachent la photo des jeunes victimes et les lâchent pour qu’ils montent au ciel.

-Comme on le sait, le régime évite, tant que possible, de rendre le corps des personnes tuées au cours du soulèvement aux familles pour éviter les cérémonies d’inhumation qui très souvent deviennent des meeting politiques contre le régime et se transforment en manifestation dans les rues des villes. On a vu la famille d’une des victimes du tribu Kachkaïs (Qashqaï), qui sont originellement des nomades et qui sont actuellement en grande majorité sédentarisés et vivent entre Shiraz, dans le sud de la province d’Ispahan et dans le nord de la Province de Boushehr, qui a trouvé un moyen habile pour honorer la mémoire de leur enfant; Ils ont fait la cérémonie avec le costume traditionnel du jeune homme et l’ont enterré tout en chantant et dansant sur des airs folkloriques. Cette cérémonie aussi est devenue un meeting contre le régime avec la manifestation qui s’en est suivi.

Le jeudi 29 décembre, lors de la cérémonie des 40e jours de plusieurs martyrs de la Révolution à Téhéran, Semirum (Ispahan), Marvdasht (Shiraz), et une vingtaine d’autres villes, on a été témoin de manifestations importantes. C’était surprenant de voir autant de participants malgré tant de répressions, de meurtres et d’exécutions.

-A Téhéran au cimetière de Behesht Zahra, plusieurs milliers de personnes ont participé à la cérémonie du 40e d’Hamidreza Rouhi et ont scandé ouvertement des slogans anti-Nezam. Des slogans qui ont été entendus des milliers de fois dans toutes les régions du pays, comme “Mort au dictateur!” “Cette année, c’est l’année du sang, Seyed Ali [Khameni] sera renversé!”

“Toutes ces années de crime, à Mort ce Vélayat!”.

“Hamidreza n’est pas mort, c’est khameni qui est mort!”

“Cette année c’est l’année du sang, l’année du renversement de Khameni !

“Tant qu’on n’a pas fait la révolution, ne rentrons pas à la maison !”

“Tant d’années d’assassinat à mort ce Velayat”

C’est la première fois qu’ils scandent avec un haut-parleur

“Canon, tank, coup de feu, akhound (curé) doit foutre le camp!”

“Tant que akhound n’est pas enveloppé dans son linceul, cette patrie ne serait pas notre patrie!”

Une voix de jeunes fille parmi les manifestants a crié:

” je veux savoir qui est le connard qui a dit que les protestations se sont calmées”?

-Le vendredi 30 décembre, on a eu les manifestations, maintenant devenues hebdomadaires des Baloutch dans les villes de Zahedan, Khark,…

-le Samedi 31 décembre aussi, il y a eu une manifestation assez importante dans Téhéran; les gens se regroupent et renforcent les rangs de la manifestation tout en cheminant vers le sud de la ville en lançant des slogans:

“Pauvreté, corruption, la vie chère; on va jusqu’au renversement!”

“Tant que les mollahs ne seront pas ensevelis, cette patrie ne sera pas une patrie!”

Quand ils sont arrivés au bazar de Téhéran, ils étaient agréablement surpris de constater que les commerçants également avaient baissé le rideau de leur magasin et étaient en grève.

Vers midi, les forces de l’ordre sont intervenues en lançant des lacrymo et en essayant de disperser la foule. Ils se sont fait huer par les gens et photographier, car pour une fois ils n’avaient pas leur visage recouvert.

-A NajafAbad (Ispahan) ce même jour, samedi, on a vu les gens manifester.

Leur slogan était:

“Notre jeunesse en prison, nos dollars au Liban!”

Mais aussi

“Ohé, ohé, vous qui restaient assis, la prochaine Mahsa serait de vous!”

Ils se sont rassemblés devant le bâtiment du gouvernement de la province avec des slogans traditionnels contre le régime en plus d’un nouveau slogan qui disait :

“On ne veut pas d’un gouverneur daeshi!”

-A Samirom, on célébrait le quarantième jour de M.Ali Abassi. La foule était impressionnante pour une ville d’une trentaine de milliers d’habitants. Sa sœur a fait un discours très émouvant. Ils avaient aussi des haut-parleurs pour scander les slogans: “A Mort Pasdar, A Mort Bassidji !” … A la fin, il y a eu des bagarres dans lesquelles apparemment une personne des forces de l’ordre a été tuée.

-A Javanrood (Kirmanshah),

C’était un des points importants de la journée de samedi, puisque les gens étaient en train de célébrer la cérémonie de quarantième d’un jeune habitant tué quand les forces de l’ordre les ont attaqués. Ils ont attaqué directement en tirant sur les gens et une personne au nom de Borhan Eliassi a été tué.

Le jour même dans la cérémonie de l’enterrement de Borhan, une population importante s’est regroupée, ils étaient plusieurs milliers de personnes. Les slogans étaient toujours très radicaux comme “Kurdistan Kurdistan, cimetière des fascistes.”

De retour au centre de la ville, les gens ont fait de grands feux et monté des barricades et ils ont pu continuer leur protestation jusqu’à tard dans la nuit. Ils ont attaqué et mis le feu à la Banque de l’agriculture et à la Banque Sepah après les avoir occupées et dévastées. Leurs slogans étaient:

“À mort, A mort un gouvernement tueur d’enfants !”

“De Javanroud à Téhéran, notre vie sacrifiée pour l’Iran!”

Ils répétaient aussi les slogans 1000 fois entendus comme

“De Baloutchistan à Téhéran, je donne ma vie pour l’Iran!”

“Tout l’Iran sont des frères, ils sont assoiffés du sang du guide!”

-A Paris aussi, le régime tue:

Ali Moradi, jeune doctorant iranien en histoire à l’université de Lyon s’est suicidé ce 25 décembre en se jetant dans la Rhône en solidarité avec les luttes du peuple iranien et voulant attirer l’attention des occidentaux sur la réalité de cette répression. Avant son acte définitif, il a diffusé sur les réseaux un témoignage émouvant expliquant son geste.

En relation avec ce suicide, il faut également dire que cela démontre du même coup les limites des luttes que la diaspora a commencé depuis 3 mois; après avoir manifesté dans toutes les grandes villes de l’Europe, des USA, du Canada, après avoir manifesté à plus de 100000 personnes à Berlin et devant toutes les ambassades et consulats iraniens, qu’est-ce qu’il leur reste à faire pour démontrer leur solidarité et attirer l’attention du public en occident?

-Encore une fois une championne iranienne, cette fois-ci de l’échec Sarah Khademolsharié dans le championnat d’échec international au Kazakhstan s’est présentée pour la compétition sans l’hijab obligatoire.

La situation est devenue assez complexe. Il est indéniable que pendant quelques jours on avait l’impression d’un certain calme, relatif, qui faisait que les événements populaires n’occupaient plus le devant de la scène et c’étaient les sujets individuels qui remontaient à la surface; même si parfois ils étaient suffisamment importants et d’ampleur assez vaste pour qu’on ne puisse plus les qualifier ainsi.

Jusqu’à maintenant le fait que le mouvement de protestations était massif et populaire, empêchait les courants particuliers de se démarquer et imposait une unité de fait qui régnait sur toutes les manifestations.

Aujourd’hui, avec le reflux relatif du mouvement, les projets minoritaires osent se dévoiler et prétendre à la visibilité.

C’est ainsi que par exemple, jeudi dernier dans la manifestation à Behesht Zahra on a entendu parmi les slogans traditionnels de “A mort dictateur, à mort Khamenei!”… Pour la première fois, à notre connaissance, dans le soulèvement actuel, deux slogans à la gloire du Shah.

Il est à noter que c’était aussi une des rares manifestations où certains slogans venaient d’un haut-parleur et qu’en général la manif semblait moins spontanée que d’habitude.

  1. Pahlavi et la famille royale avaient semble-t-il envoyé une couronne de fleurs pour la cérémonie.

Les deux slogans en question étaient:

“RézaShah, que ta mémoire soit joyeuse!” (Équivalent de « à Vive RezaShah! »). Il était le père de l’ex-Shah du pays qui a fondé la royauté Pahlavi. Ce slogan, avant le mouvement actuel, était entendu de temps en temps, mais absolument pas après ce soulèvement populaire.

“Prince héritier, où est-tu pour nous sauver? (ولیعهد کجایی به داد ما بیایی؟)

-L’alternative bourgeoise

Parallèlement à ces mouvements, c’est le moment où la bourgeoisie de l’extérieur du pays profitant de ce creux a choisi de lancer ses chevaux dans la bataille. Ils viennent d’officialiser un projet qu’ils appellent Phénix (قنوس) qui est une sorte de préparation d’un gouvernement fantôme à l’étranger en attendant le retour victorieux du petit dictateur. Ce projet a vu son application directe dans une unité/coalition dont on avait déjà évoquée la semaine dernière et qui consiste à envoyer de façon groupée le même message et très exactement au même moment (à l’occasion de la nouvelle année) de la part de ses membres fondateurs sur les réseaux. Ce message twitter, dégoulinant de niaiseries sur la liberté et la démocratie et contre la dictature a fait fondre en larmes les tenants des médias iraniens pro-occidentaux (financés par Londres, les USA, l’Arabie Saoudite et le Qatar et une flopée de Fondations internationales) qui ne cessent depuis de promouvoir cette alternative.

A l’occasion de la nouvelle année, 6 personnages de la liste que nous avons énumérés la semaine dernière (avec la présence notable de Golshifteh Farahani, l’actrice internationale, qui soi-disant penchait plutôt à gauche car prétendument fille d’un ancien membre du PC iranien, le Toudeh) ont envoyé des tweets avec le même contenu au même moment; ce tweet a été soutenu par d’autres fidèles de la démocratie bourgeoise notamment Mme Shirine Ebadi, avocate et prix Nobel de la paix.

Quelques heures à suffit pour qu’on sache que cette heureuse alliance était mise en place à travers un certain Karim Sadjadpour, architecte d’un triangle dont lui-même se trouve au centre, qui a pour sommets :

1- les lobbies de la RI aux USA notamment NAYAK, les réformistes de la RI comme l’ex-Président Khatami et l’ancien ministre des affaires étrangères M.Zarif, …;

2- l’opposition de droite iranienne à l’étranger qu’on a déjà présenté;

3- les organisations, fondations et gouvernements occidentaux en liaison avec CEI (International Crisis Group), qui avait comme Président & CEO M.Robert Malley ( le responsable américain du bureau de l’Iran à la maison blanche), à travers son chef du projet iranien Ali Vaez qui apparemment a joué un rôle déterminant dans l’accord nucléaire de 2015 et qui joue encore ce rôle dans les négociations nucléaires).

Le financement vient du philanthrope connu M.George Soros. L’alliance profite de la collaboration du WORLD ECONOMIC FORUM qui “œuvre pour améliorer l’état du monde à travers la participation des chefs d’entreprises, des politiciens, universitaires et autres leaders de la société pour construire un calendrier et un plan global, régional et industriel au niveau mondial.” (Dixit leur site)

Bien entendu, la Banque mondiale et une variété de Think tanks sont dans le boucle comme Carnegie Endowment, The Aspen Institute … M.Sadjadpour se targue d’avoir comme amis de longue date les différents patrons de la CIA , les responsables politiques américains et européens.

Soit dit en passant que Mlle Golshifteh Farahani a insisté dans son entrevue avec la radio Farda (Radio Lendemain) sur le fait qu’il ne faut pas se montrer curieux sur la façon dont cette alliance a pris corps, il faut se concentrer aujourd’hui sur la lutte contre la dictature et pour la liberté et la justice”; Quand on sait comment “cette alliance a pris forme”, on comprend l’inquiétude de Mademoiselle Farahani!

Aussi, il est à noter qu’apparemment #femme vie liberté a disparu de cette série de tweets.

-L’encre de cet accord n’était pas encore séchée que nos camarades du Syndicat des ouvriers de Haft-Tapeh, à travers leur compte Telegram, ont répondu à cette invitation royale:

“La formation d’une coalition des droites à l’étranger doit être considérée comme un événement positif et instructif car ces personnes, elles-mêmes ont démontré très simplement et de façon homogène, à quel point ils sont autocrates, complotistes, manœuvriers, opaques, unilatérales, anti-majoritaires, en quête du pouvoir, autoritaires, … et sans rapport avec notre véritable combat.

Les leaders pratiques de notre lutte ne sont personne d’autre que nous-mêmes et nos amis emprisonnés. La totalité des personnes rassemblées dans cette soi-disant coalition, tous ensemble et rassemblées, n’ont pas l’expérience et l’ancienneté d’un seul militant syndical ou d’un seul enseignant de ce pays; ils n’ont aucune histoire et expérience de la lutte. Le plus important c’est que vous avez démontré qu’en tant que minorité non-travailleuse vous voulez régner sur la majorité des travailleurs! Notre représentant n’est personne d’autre que la majorité des ouvriers, des travailleurs et des salariés, et non des courtisans et des porteurs de projets des Etats capitalistes. Nous dépasserons l’État de la République islamique et construirons un nouveau système. Nous remercions les organisateurs de cette coalition virtuelle car ils ont rapidement démontré qu’une force de droite se démène toujours pour les intérêts de sa propre classe.

La révolution continue son chemin indépendamment des gesticulations marginales de ce groupe.

Vive la révolution

#woman_life_of_freedom

#Nan_Kar_Azadi_Government_Council

2 janvier 2023

-Le dollar a approché la frontière des 45000 Thomas ce qui a eu pour conséquence la fermeture de beaucoup de commerces par exemple dans un passage commercial à Téhéran, qui s’appelle Alaeddine et qui est un marché de produits informatiques, l’évolution des prix est telle que ça crée des difficultés pour leur fixation. Apparemment des magasins d’alimentation ont du mal à refaire leur stock car le prix de vente d’aujourd’hui ne permet pas forcément le rachat du produit pour compléter le stock la semaine d’après.

-Parmi les causes évoquées pour expliquer la dévaluation vertigineuse de Toman par rapport aux autres devises, on cite la nouvelle du blocage de quelques canaux de devises étrangères à travers quelques institutions bancaires irakiennes, lesquelles viennent d’être ciblées par les sanctions.

Face à cette situation catastrophique du marché de devise le président de la banque centrale a été limogé et remplacé par un des membres du “Quartier Général de l’exécution du commandement de l’imam” ce qui veut dire directement par Khameni. Ce nouveau directeur de la banque centrale a promis de faire baisser le dollar à la hauteur de 28000 Toman. Les premiers jours de sa nomination, il y a eu des soubresauts dans le marché; le dollar a baissé sous la barre des 40000, mais est reparti à la hausse pour se stabiliser actuellement au niveau de 41000 Toman.

-Les snap

Des conducteurs de Snap qui est une sorte d’Uber à Téhéran ont arrêté de fonctionner car le prix des courses ne couvre plus leur dépense.

-D’après un rapport officiel, des grèves du zèle ont été constatées chez les employés et dans l’administration. Ceci doit être relié avec les absences du personnel et des fonctionnaires de ses administrations qui ne se sont pas présentés au bureau pour des motifs inventés qui couvraient en réalité leur participation aux protestations.

-Les pénuries du Gaz

Dans un pays qui se targue de détenir la deuxième réserve du gaz au monde, plus de 800 unités de production sont à l’arrêt par manque de gaz ; notamment 56 productions de ciment qui sont à l’arrêt.

-Alors que les manifestations antigouvernementales se poursuivent en Iran, le gouvernement devra faire face à une multitude de problèmes économiques supplémentaires et à une crise énergétique dans les mois à venir.

Aussi, d’après un article du journal E’temad (confiance), daté du 15 décembre 22 et qui a ce cri de coeur pour titre:

“Pourquoi vous imprimez autant d’argent ?!”

“Au cours des 7 mois de l’année en cours, la base monétaire a augmenté d’environ 110 000 milliards de tomans. Ce nombre équivaut à une croissance de 18% de la base monétaire en 7 mois. L’augmentation de 18% de la base monétaire au cours des 7 premiers mois de l’année est sans précédent au cours des 20 dernières années. La base monétaire a bondi de 3,2% en octobre et atteint mille milliards de tomans. La croissance mensuelle de la base monétaire a toujours été à la hausse ces derniers mois et a atteint son plus haut niveau des 5 derniers mois en octobre.”

-D’après les données officielles citées dans un programme de la télévision nationale iranienne (du 27 décembre 2022), on apprend que les capitaux sortis du système bancaire du pays entre 2003 et 2017, c’est-à-dire sur une période de 14 ans s’élève à 284 milliards de dollars ce qui correspond, toujours d’après eux, à 7 ans de revenus pétroliers iraniens. D’après le spécialiste qui intervenait dans cette émission, le revenu moyen pétrolier de L’Iran est une somme se situant entre 40 et 50 milliards de dollars par an.

Ce qui rend cet intervention significative, sortant de la bouche d’un présentateur de télé iranienne, connue pour répondre à la moindre exigence et souhait de Khamenei, c’est qu’une fois donné ces informations, il pose une question accusatrice, d’un ton critique à son public : “mais qu’est-ce que vous faites, le peuple, les gens ?! Pourquoi vous sortez ces capitaux du pays ?!”

Comme si, ceux qui sortaient les capitaux du pays étaient les pauvres gens qui sont obligés de chercher de toute leur force à nourrir leurs enfants le soir même !

Mais les gens, “le peuple” comme il dit, savent très bien qui est en train de sortir ces capitaux du pays! Ce sont les gens qui, grâce à la corruption et au détournement d’argent qui sont effectués de façon structurelle dans le pays, arrivent à accumuler des sommes astronomiques et aussi de les sortir du pays grâce au système bancaire. Et justement, une fois à l’étranger, ces sommes sont placées dans les paradis fiscaux ou d’autres endroits non traçables ou non-recouvrables pour que demain quand leur famille est sortie du pays, ils puissent parader dans les rues de Los Angeles, de Toronto ou de Caracas en attendant leur papa Chéri qui en cas de force majeure càd une révolution, filerait en douce pour les rejoindre. On en voit déjà qui sans barbe, ni turban, en short de sport, reluquent les femmes sans hijab dans les salles de sport des quartiers chics de Londres et de Johannesburg.

Ce sont les mêmes qui, comme l’Etat les talibans en Afghanistan, interdisent l’accès à l’éducation aux filles et qui placent leurs enfants dans les meilleures écoles à Doha. Cette espèce d’Islam soi-disant radical est devenu un mode de pensée pour le peuple et un mode de gestion pour les gouvernants; ils savent très bien jouer de l’hypocrisie permise par un système religieux qui sépare les gens ordinaires des élus de Dieu.

Quand l’ouvrier iranien doit se battre tous les jours pour faire vivre sa famille avec 140 dollars par mois tandis que toutes les marchandises, le logement et autres minimum de subsistance lui sont facturées en dollars pour permettre aux intermédiaires de la vente du pétrole d’accumuler et amasser des fortunes … Quand on met la faute sur le dos des ouvriers, ça s’appelle “faire des sacrifices”, mais si, dans le discours du Shah, ces sacrifices étaient pour la grandeur de l’”Iran éternel” qui était censé passer “le Grand Portail de la Civilisation”, aujourd’hui, elles doivent être acceptées pour le royaume du Dieu et leur locataire sur terre qui sont le clergé chiite au pouvoir en Iran; avec les miettes tombant du ciel pour leurs serviteurs, les pasdarans, les bassiji et les forces de l’ordre.

On trouvera toujours un ayatollah quelconque qui dirait que cette masse de misère et de malheur est le châtiment que Dieu nous a réservé pour quelques mèches de cheveux rebelles de Mahsa; qu’on est en train de payer les péchés capitaux de nos jeunes filles qui n’acceptent pas de se couvrir la tête et se mettre à quatre pattes pour pouvoir être violé par ses serviteurs de l’islam pour accéder au Paradis qu’ils nous promettent.

Un texte intéressant en persan vu sur les réseaux :

“La situation du marché et du capital est critique et chaotique; la hausse continue des devises inquiète toutes les classes sociales; la question n’est plus de savoir si, au bout des années de labeur, on pourrait s’acheter un appartement simple et bon marché, mais de pouvoir payer un loyer qui augmente chaque instant avec le cours du dollar.

Même les commerçants profiteurs évitent de vendre des marchandises qui, une heure plus tard, quand le dollar deviendrait plus cher, auraient un prix supérieur.

Personne ne peut prétendre d’avoir une vision claire de l’avenir de l’économie du pays, il n’existe aucun plan de la part d’un gouvernement illégitime, de plus en plus impuissant, et qui de surcroît n’a la confiance de personne.

Après l’explosion sociale de la démocratie rebelle concernant l’hijab et les protestations des 100 derniers jours, le pays se prépare pour une nouvelle explosion, qui serait cette fois-ci, économique et “de classes “.

Cette fois, le mouvement des affamés remplacerait le mouvement des combattants de la liberté… Si les combattants de la liberté, d’après ce que prétendent les partisans du statu quo, voulaient juste se déshabiller, vous allez découvrir les affamés et les exploités qui vont dépouiller les partisans du statu quo. Ce jeu est très différent de ce que vous aviez l’habitude de jouer jusqu’ici.

Si le régime a pu réprimer le mouvement par la force, la répression, la menace, des balles, des fusils, des matraques, et des arrestations … le tsunami du mouvement de la faim est autrement destructeur et indomptable; il n’est lui-même que le résultat de l’application d’une répression incessante et intense.

Vous n’aurez même pas la chance de poser la question: “Qu’est-ce que vous nous voulez?” Ou de déclarer une situation d’urgence.

L’appareil étatique du régime a commencé sa chute folle vers l’anéantissement.

Le mouvement de « ceux qui ne sont rien » est en route.”

Source: https://t.me/kkfsf

-Les prisons aussi, sont la manifestation des écarts de classes.

Quand on parle d’arrestation et de prison il faut distinguer entre les prisonniers lamda qui doivent vivre dans des salles équipées pour huit à dix dans lesquelles sont entassées des dizaines de personnes, de sorte qu’ils ne peuvent s’allonger sur le dos pour dormir et doivent se mettre sur un côté, en sandwich, pour faire de la place pour l’autre … et les salles de haute standing où les riches entrepreneurs ou responsables du régime résident. Il y a aussi ceux qui sont soi-disant condamnés mais sont presque toujours en liberté pour différents motifs. Des gens comme le frère du Président Khatami condamné pour détournement de fonds qui n’a jamais été vu en prison, ou de grands commerçants qui, une fois payé l’impôt religieux à son mojtahed, vivent dans des conditions de luxe. Ils occupent des cellules prévues pour dix à eux seuls ou avec les personnes de leur choix, qui en général pour une contrepartie donnée à leur famille à l’extérieur, sont au service du condamné fortuné. Ils commandent la nourriture auprès des meilleurs restaurants (en invitant bien sûr le patron du prison), possèdent du matériel électronique dernier modèle (écran plat, téléphone mobile, ordinateur…) pour continuer leur business à l’extérieur et … avant de profiter des périodes de liberté…

Les classes existent aussi et surtout en prison.

Un des plus connus de ces condamnés n’est autre que Babak Zanjani, un jeune milliardaire iranien qui avait fait fortune comme un des principaux agents de vente du pétrole d’Ahmadinejad. Il a vu son empire démantelé et vendu aux enchères après sa condamnation à mort.

Les tribunaux l’ont condamné à mort en mars 2016, mais depuis il est toujours vivant et soi-disant en prison. Il était à la tête d’une fortune estimée à plus de 13 milliards de dollars (sous Ahmadinejad).

En manque de devises après l’embargo sur le pétrole iranien résultant des sanctions de l’ONU, de l’UE et des Américains, Ahmadinejad s’est servi de ce type de personnages pour vendre du pétrole en contournant les sanctions et qui, se faisant n’hésitait pas à se servir au passage.

En 2013, le nouveau Président Rohani a voulu démontrer sa détermination à lutter contre la corruption, il avait multiplié les déclarations relatives à la corruption et au paiement des commissions illégales qui avaient prospérées sous le régime d’Ahmadinejad. Le mode de vie luxueux et ostentatoire de Zanjani en a fait un candidat naturel. La RI qui n’hésite pas à exécuter les condamnations à mort décidées à la va vite, a du mal à appliquer à ses collaborateurs les peines encourues. Surtout s’ils étaient suffisamment malins et prévoyants pour accumuler des preuves de leurs liens avec les gouvernants en cas de mauvais coup du sort.

Habib

Le 2 janvier 2023

Nouvelles du 16 au 24 décembre 2022

La nuit de Yalda

-Dans la tradition iranienne, la nuit de Yalda, ou “tchéllé- bozorg” (grande quarantaine, car le froid doit durer en principe 40 jours jusqu’à fin janvier; Yalda est la première nuit de l’hiver et celle la plus longue de l’année: le solstice d’hiver) tient une place particulière ; c’est une fête pré-islamique qui célèbre la naissance de Mithra, dieu zoroastrien du feu et du soleil. Elle représente la victoire de la lumière sur les ténèbres.

On passe la nuit de Yalda en famille, réunis tous, grands et petits sous le Korsi; C’est une grande structure en bois ( un peu comme une grande table basse ), couverte de grandes couettes qui dépassant largement la structure, de sorte qu’on puisse s’asseoir par terre sur le tapis et y glisser les jambes. On met sous cette structure un dispositif de chauffage (dans le temps, c’était de la poussière de charbon ou de la houille façonnée en boule; aujourd’hui c’est plutôt des appareils électriques) qui, dans le froid de l’hiver, chauffe tout le corps du bas vers le haut. Cette disposition de la pièce peut durer une semaine ou plus, tellement elle est agréable et accueillante. Toute la famille passe la nuit de Yalda sous le korsi, en discutant de tout et de rien, dînant et grignotant des fruits secs (les noix), goûtant et dégustant des grenades, des pastèques et des fruits rouges. On passe une nuit de veille heureuse et agréable, ponctuée par les rires et l’expression de joie des plus jeunes ; une nuit qui restera dans les mémoires, surtout des enfants. On y chante des chansons, écoute de la musique et souvent le grand-père ou la grand-mère ouvre son vieux volume de Divan de Hafez, avec sa couverture fatiguée, pour lire les présages de l’année à venir et réciter par la suite des poèmes. C’est au cours de cette nuit que les enfants sentent la chaleur du foyer familial qui les entoure, quand en général, à l’extérieur la neige est en train de tomber. En général, un iranien garde un petit souvenir de ce type dans un coin de sa tête.

Le deuil

Mais cette année, Yalda a une odeur de mort . Elle est entachée par le souvenir de tous les jeunes tombés sous les balles, pendus et exécutés ; des milliers de famille ont veillé Yalda, comme une nuit de deuil et de tristesse en allumant des bougies sous les photos de Mahsa, de Yalda et d’autres Nika … ainsi que les personnes récemment exécutées pour avoir participé aux protestations, qui ont été victimes de la sauvagerie de l’État iranien.

La population en grand nombre est allée se recueillir sur les tombes des personnes tuées en y mettant des bouquet de fleurs.

A la suite de quoi, ils sont allés dans les rues, manifester avec des slogans hostiles au régime; à Téhéran (quartiers de: Téhéran-Pars, Sarsabil, Ekbatan, Sa’adat-Abad,…), mais aussi à Sanandaj, Saghez, Izeh, Karaj (Golshahr)… comme d’habitude on a entendu au cœur des ensembles résidentiels les slogans dans la nuit scandés par les fenêtres ou des toits d’ immeuble.

Cette année Yalda a la couleur d’une tristesse énorme que chaque iranien ressens au plus profond de lui en pensant à tous ces jeunes sacrifiés, les baloutches, les Kurdes qui sont toujours sous une répression féroce.

Cette nuit, un lourd manteau de tristesse couvrait les foyers iraniens.

la réaction de la RI

-La République islamique de son côté a insisté, une fois n’est pas coutume, car en général, elle déteste les fêtes iraniennes pré-islamiques et tente de toutes les manières possibles de les éviter et va même parfois jusqu’à réprimer les gens qui s’y prêtent; on a vu des dizaines de fois les agents de la République islamique les perturber, les interrompre ou même arrêter les personnes qui font la fête ; surtout la fête de tchar-shanbeh-souri (qui se célèbre le dernier mercredi de l’année) pendant laquelle tout le monde allume des feux dans les quartiers et saute par-dessus, pour conjurer les mauvais événements qui se sont passés au cours de l’année et commencer la nouvelle sous de bonnes auspices.

Elle veut faire entrer depuis 40 ans dans la tête des gens que les fêtes à célébrer se sont celles basées sur les événements appartenant à l’histoire islamique, surtout l’Aïd al-Adha عيد الأضحى ”la fête du sacrifice” (ce qu’on appelle en France “la fête du mouton” qui correspond au dernier jour du calendrier arabe), tandis que pour les iraniens, rien ne remplace leur norouz (le jour nouveau) qui est le nouvel an iranien basé sur leur propre calendrier, que même le Shah n’à pu changer ! Il a pourtant bien essayé! Il faut dire à sa décharge, que le gars se voyait successeur de Kourosh et de Darius des Sassanides, sous prétexte qu’il rêvait de surpasser son “duce” de père qui déjà se voyait Atatürk!

La République islamique a donc essayé de fabriquer des émissions à la télé publique pour fêter la nuit de Yalda. Mais il a eu beaucoup de mal à trouver des personnalités publiques, des artistes et autres célébrités à y participer. Ceux, Même très rare qui ont accepté d’y participer n’ont pas pu garder le silence sur les événements actuels et en particulier un des acteurs, apparemment assez connus, une fois exprimé toute sa reconnaissance éternelle auprès du Guide Suprême et Éternel a osé dire que les gens qui participent à ces manifestations “sont des jeunes égarés qui se sont trompés, avec qui, il faut faire montre de mansuétude”. Il a réclamé que le Guide Suprême dans sa grande sagesse et discernement, “annonce une réconciliation nationale” et “une amnistie générale” en même temps qu’il réclamait de la part de la population de la patience. Et tout ce spectacle accompagné d’une musique doucereuse et dégoulinante de rondeurs et de niaiserie.

On avait l’impression d’entendre Macron faire son pitch de la nouvelle année pendant les gilets jaune ! Tout de suite après, nous avons entendu la réaction de Fatima Pourmohammadi qui se trouve depuis 8 mois dans les prisons de la République islamique et a été condamnée à 6 ans de prison; elle a rejeté cet appel d’amnistie et s’est exprimé clairement en disant que c’est Khamenei qui doit nous demander pardon, nous n’avons commis aucun délit, c’est à la République islamique de demander pardon à tous ces gens qui ont été endeuillés.

Mohamed Ali karami, père de Mohammad-Mehdi Karami qui est un champion de karaté qui se trouve aujourd’hui dans le couloir de la mort à demandé au patron du pouvoir judiciaire d’annuler la condamnation à mort de son fils. C’est un vendeur ambulant qui a élevé son enfant avec beaucoup de difficultés et aujourd’hui doit vivre la douleur immense de le perdre. Son fils n’à fait que participer au quarantaine de Hadice Najafi, jeune fille kurde tuée par les forces de l’ordre.

Peut-on reprocher aux parents d’une personne qui se trouve à deux doigts de la pendaison de faire tout leur possible pour l’épargner ?

-Ces jours-ci, nous sommes face à une calme relatif avant la tempête que tout le monde attend. Les protestations, les rassemblements et les manifestations continuent surtout en fonction des journées de deuil du troisième, septième et quarantième jour de la mort des victimes de la révolution. Ainsi on a vu des rassemblements de protestation dans les cimetières de différents villes et villages où le corps des personnes ont été inhumés.

Il est assez rare que pendant la période de froid, il existe des protestations populaires et que les gens soient dans la rue; on a vu une telle chose uniquement pendant l’insurrection de 79 où la vague de protestation ne s’est pas arrêtée et a continué jusqu’à la chute du régime du Shah en février.

Personne ne peut dire aujourd’hui si nous sommes dans une période d’essoufflement du mouvement ou c’est le calme avant la tempête. Seul l’avenir nous le dira.

-Par ailleurs nous savons qu’une centaine de parlementaires français suite à l’action des parlementaires allemands se sont désignés comme les tuteurs des personnes condamnées à mort en Iran.

La position de l’Iran au niveau international est extrêmement affaiblie. Comme on a déjà mentionné, l’Iran a été exclu de la commission des femmes des nations unies; récemment le parlement suédois a dénnoncé l’armée des Pasdarans comme terroriste et réclame auprès de ses partenaires européens de faire de même. Les sanctions américaines aussi, contre des personnes et des entités iraniennes continuent de plus belle mais nous savons que toutes ces actions sont “pour épater la galerie” et n’ont pas grand effet sur le comportement de la République islamique. Il est vrai qu’en cas de sanctions plus dures des européens sur le plan commercial et financier, la situation de la République islamique serait plus fragile au niveau économique.

-Les sanctions exercées sur les personnes sont ridicules car on a affaire à un État qui produit la paperasse qu’il veut !

Les Pasdarans vont et viennent et font ce qu’ils veulent à l’étranger avec des documents fabriqués. Il est tout à fait illusoire de penser qu’on peut les empêcher dans leur activité en les soumettant aux sanctions.

On ne connaît même pas leur identité véritable, qui peut être différente de ce qu’il utilise officiellement en Iran.

-les sanctions contre les organisations et les sociétés (commeble l’armée des Pasdarans) aussi ne durent que le temps de création d’autres filière les contournant. Il existent des myriade de compagnie en Europe, aux États-Unis, au canada et en Amérique du Sud qui appartiennent à la RI sous de prête noms. Dans ce domaine depuis 49 ans la RI a acquis une expertise de haut vol qu’ils sont en train d’enseigner si besoin aux russes et d’autres de leur alliés sous sanctions.

-Avant-hier, le Rial iranien s’est effondré à un niveau historiquement jamais vu par rapport au dollar; celui-ci a dépassé la frontière des 400.000 Rials, Cad 40 mille Tolans., ce qui est un niveau inimaginable et historique.

La raison de cet effondrement est essentiellement le fait que d’un côté, les entrées de devise, c’est-à-dire essentiellement l’acheminement, la livraison et la vente du pétrole et du gaz rencontre de plus en plus de difficultés et d’obstacles; surtout ces ventes, même au prix bradé, ont du mal à se réaliser en argent sonnant et trébuchant. La Chine commence à se désintéresser du gaz iranien puisqu’elle vient de signer un contrat juteux avec le Qatar, ce très cher associé de l’Iran sur Pars-Sud.

D’un autre côté, la République islamique n’a d’autre choix que d’imprimer à fond perdu de l’argent pour satisfaire de façon relative ses forces de l’ordre, ainsi que les fonctionnaires, les retraités et tous les gens qui dépendent des pensions et des subventions de l’État.

La République islamique pour s’acheter un peu de calme au niveau social est en train de balancer de l’argent par la fenêtre mais cet argent n’a aucune base réelle et en fait il est sorti de la poche de l’avenir des gens (par les mécanismes de crédit) ou directement en dévalorisant leurs économies.

-Au cours d’une courte vidéo mise en ligne et par “BBC persian”, qui est consacré à une réunion du porte-parole du gouvernement M. Ali Bahadori-Jahromi avec les étudiants on peut entendre des paroles suivantes:

Ça se passe à l’université Bou-Ali à Hamedan; le régime, pour essayer de calmer le mouvement étudiant, a organisé la semaine dernière une de ses blabla ridicules entre le porte-parole du gouvernement Raïssi et les étudiants toujours choisis essentiellement parmi les associations islamiques.

Une fille s’est levée et a dit:

“Nous avons la liberté de la parole mais nous n’avons pas la liberté après la parole! Ça fait des jours que l’attentat à Shah-tchéragh [attentat durant lequel un terroriste, attribué plus tard à Daesh par les médias, a tiré sur des pèlerins et a tué et blessé plusieurs personnes. Selon l’opposition, cet attentat fomenté par les agents du régime, avait pour but de créer, au plus fort des protestations, une diversion pour essayer de calmer par le deuil le mouvement] a eu lieu mais vous, avec toutes vos forces de sécurité, n’avez pas été capables de trouver les terroristes tandis qu’il suffit que nous mettions un pied dans la rue pour protester pour qu’on soit arrêté. L’islam commence bien avec le verset bi-smi-l-lāhi r-Raḥmāni r-Rahīmi [Au nom de Dieu clément et miséricordieux], mais vous n’avez aucune clémence et aucun pardon, vous exécutez Karim Shekari pour avoir mis le feu à une poubelle …”

et toutes ces paroles ont été accompagnées des applaudissements incessants des autres étudiants. Elle a continué :

“Vous n’êtes pas bienfaisants, vous considérez que mettre le feu à une poubelle ou bloquer une rue c’est équivalent à faire la guerre contre Dieu tandis que les terroristes font ce qu’ils veulent et ne sont pas inquiétés par vos forces de l’ordre.

Vous avez proclamé qu’il y avait des gens qui ont retiré de force le hijab de la tête des femmes et vous les avez condamné à la peine de mort; nous ne croyons pas un instant à votre histoire mais supposons qu’elle soit vraie ; d’un autre côté, nous entendons tous les jours que les forces de l’ordre agressent les femmes et les filles sont violées ; ces actes, d’après vos propres lois sont susceptibles de peines judiciaires, alors pourquoi vous ne faites rien? Pourquoi appliquer deux poids deux mesures ? Ceux qui prétendent être endeuillés pour le premier crime est-ce qu’ils acceptent d’être endeuillés pour le second?

Ça fait plus de 4 mois, depuis le commencement des protestations; durant cette période qu’est-ce que vous avez fait dans le sens de de l’amélioration des choses, des réformes de l’État, des libertés publiques, de la lutte contre la corruption, du développement économique? Rien n’a été fait! Le peuple n’a reçu que de l’humiliation et des insultes! Uniquement la répression, uniquement des exécutions et des pendaisons! c’est tout ce que vous arrivez à faire!”

Suite à ces paroles fortes, un jeune étudiant continue sur la même lancée: “Vous avez été toujours très forts pour justifier et soi-disant expliquer les choses, pour fabriquer des explications concernant les crimes que vous commettez; qu’est-ce qui pourrait justifier la tuerie de 2019? là où vous avez tué des milliers de personnes?”

C’est là où, le représentant de l’État s’insurge et commence à protester en levant la voix. La même étudiante l’arrête net en disant “Monsieur l’État ! vous devez respecter le silence pendant que nous parlons et écouter ce que l’on a à vous dire. Vous êtes porte-parole de l’État, donc vous devez nous écouter!”

M.le porte-parole savait que sa mission serait difficile, mais il ne pensais certainement pas devoir encaisser des coups pareils!

-Entre-temps la bourgeoisie ne reste pas les bras croisés en attendant le résultat du soulèvement populaire. Elle est 9de toutes ses forces, active et cherche à influencer le mouvement. On a vu il y a quelques semaines, le Président Macron invitait 4 femmes opposantes iraniennes à l’Élysée avec toutes les honneurs dû au prochain Président iranien. Parmi ces personnes. À la tête de cette délégation, il y avait Madame Alinejade qui est une ancienne journaliste du parlement iranien, ex-femme provisoire d’un responsable réformateur de la République islamique, qui depuis quelques années est sortie du pays pour s’installer aux États-Unis, à Washington. Elle connaît bien les rouages des médias et sait mettre en œuvre son expérience dans ce domaine au profit de la lutte des femmes contre le hijab et éventuellement ses propres ambitions. Elle est certes très efficace et volubile dans sa propagande contre la République islamique et pour la liberté des femmes. Soutenue par différentes fondations américaines et européennes, elle a su se débrouiller pour posséder une villa de plus d’un million de dollars tout en prétendant défendre la veuve et l’orphelin en Iran. Elle a été lancée dans l’espace public comme l’initiatrice d’une campagne contre le hijab qui s’intitulait “les mercredis blancs” qui consistait pour les femmes iraniennes de sortir dans l’espace public, d’enlever leur hijab, de le filmer et l’envoyer sur les réseaux sociaux. La rumeur publique dit que l’idée de ce campagne appartenait à d’autres personnes et quand le mouvement s’est déclaré, Mme Alinejade s’en est emparé et depuis n’à cessé d’en faire propagande sur ce sujet dans son émission Youtube qui s’appelle tablette. Quoiqu’il en soit, elle est très suivie parmi les jeunes filles des couches supérieures et moyennes en Iran et des moins jeunes en Californie et la diaspora. Il faut reconnaître que beaucoup de femmes ont été influencées par ce programme et lui ont envoyé des vidéos de leur acte courageux. Avec la montée du soulèvement actuel, elle a pris une place de plus en plus importante au sein de l’opposition, de sorte qu’elle est aujourd’hui considérée comme un des symboles du mouvement, au moins à l’étranger. C’est pourquoi Macron, quand il cherchait à rencontrer des femmes de l’opposition, a naturellement invité cette personne.

Une autres femmes invitées de Macron était Nazanine Bonyadi. (Nâzanine Bonyâdi) actrice irano-britannique, aujourd’hui porte-parole officiel d’Amnesty International États-Unis.

Le régime américain de son côté a sorti de ses bocaux, les membres de l’opposition iranienne qu’il garde sous la main depuis l’insurrection de 79; une de ces personnages, nourrie, logée et prête à emploi n’est autre que le fils du Shah. Il se définit aujourd’hui comme rebelle et de tout cœur avec le peuple iranien. Il veut qu’une fois le régime de la République islamique renversé, organiser un référendum pour voir si les gens préfèrent la République à la royauté? Dans un élan de pudeur, il nous dit très modestement que son père a été obligé de quitter l’Iran “pour ne pas commettre de violence à l’égard du peuple” en prenant avec lui “seulement 67 millions de dollars”. M. Le prince oublie de mentionner les biens que la famille royale possédait à l’étranger, et surtout omet de dire que 67 millions de dollars de 1979 équivalait à quelque 70 milliards de dollars d’aujourd’hui! Ce prince qui n’a jamais bossé d’aucune façon de sa vie, à part bien sûr gérer cette fortune colossale, prépare depuis toujours un programme de prise de pouvoir avec l’aide de ses conseillers à la CIA et MI6.

Mais, toutes ces oppositions adossées au monde occidental sont par trop cousues de fil blanc pour que le peuple iranien dans sa radicalité constatée puisse les accepter. Ce genre d’alternative, directement lié au monde occidental à peu de chance de convaincre les gens qui gardent quand même le souvenir du régime du Shah; donc la bourgeoisie internationale cherche d’autres figures de l’opposition qui puissent représenter de façon plus feutrée la ligne de normalisation des rapports avec l’Occident. Une personne qui a été poussée par le mouvement n’est autre que Monsieur Ahmad Esmaïlioun, qui est dentiste et écrivain, résident au Canada. Il s’est trouvé embarqué par la force des choses dans le mouvement d’opposition à la République islamique car sa femme et sa petite fille de 9 ans faisaient partie des voyageurs du vol ukrainien 752 qui a été abattu le 8 janvier 2020 par la République islamique dans sa petite guéguerre avec les États-Unis après l’assassinat de Soleymani en Irak. Nous avions à l’époque expliqué que c’était les missiles de l’armée des Pasdarans qui avaient descendu ce vol commercial, car après l’attaque que la République islamique avait lancé contre les installations américaines en Irak quelques heures plus tôt (bien entendu après les avoir dûment prévenu pour que les locaux soient évacués de toute personne appartenant de près ou de loin à l’armée américaine!) elle était certaine que les américains allaient riposter. La République islamique n’a pas fermé son espace aérien et a attaqué ce vol commercial de la compagnie ukrainienne pour le mettre sur le dos des Américains et ainsi arrêter une guerre qui, si elle était déclenchée, aurait très certainement entraîné des pertes extrêmement importantes dans les rangs de la République islamique et pourrait même entraîner son effondrement. Quelque temps plus tard d’ailleurs, un des dirigeants des Pasdarans l’a clairement reconnu; Il a dit qu’ils ont préféré sacrifier 200 personnes au lieu de risquer une guerre qui leur serait fatale et aurait coûté la vie de plusieurs millions d’iraniens.

Bon, revenons à nos moutons; M.Ismaïlioun a perdu sa femme et sa fille dans cet horrible “accident” et depuis lors, il n’a cessé de se démener pour que la justice internationale entame des investigations sur ce qui s’est passé ce 8 janvier 2020. Ses efforts ont abouti à ce que le gouvernement canadien condamne la République islamique et des négociations sont en cours pour éventuellement arriver à la fixation des indemnités, mais la persistance de la République islamique à ne pas reconnaître sa faute dans cet événement a fait que M.Esmaïlioun est entré en opposition de plain-pied avec le gouvernement de la République islamique. C’est lui qui a pu organiser la manifestation de plus de 100000 personnes à Berlin le 22 octobre dernier. Il est depuis, considéré par beaucoup de personnes comme quelqu’un d’honnête et de juste, avec des positions modérées sur la question du rapport avec l’Occident et qui pourrait très bien être un autre Vaclav Havel pour l’avenir de l’Iran.

Une autre personne qui comme Monsieur Esmaïlioun a un certain crédit auprès de la population est Monsieur Ali Karimi. C’est un ancien footballeur qui a joué pendant des années en Europe et qui a pu amasser une petite fortune. Ali karimi malgré tous les efforts de la République islamique pour l’entraîner dans son camp, à su rester politiquement neutre et parfois même critique devant les pratiques de la RI. Ces dernières semaines, avec le soulèvement, il n’a pas hésité à critiquer la répression et a publiquement dénoncé la violence de la République islamique à l’égard de la jeunesse. Le 9 décembre il avait condamné l’exécution de Mohsen Shekari.

Récemment, il est sorti du pays et a rencontré le Président Allemand.

Il est donc devenu un personnage de l’opposition, très populaire et qui fait désormais partie de cette sorte de coalition qui est en train de prendre forme à l’étranger pour diriger le mouvement populaire. On entend de tout côté les gens critiquer l’opposition pour leur demander ce qu’ils attendent pour former une coalition afin de renverser la République islamique et de s’accorder pour instaurer un nouveau gouvernement.

–Le courage “chimique”

Nous avions déjà entendu le nom de Captagon. Le monde associe l’utilisation de ce “médicament” à la guerre en Syrie et Daesh.

Des comprimés de captagon, sont en fait des psychotiques pour dominer la peur.

C’est un médicament qui associe de l’amphétamine à du théophylline. Créé en 1961 pour les traitements des maladies d’hyper-activité, de dépression ou d’autres problèmes psychologiques.

Ce médicament a été par la suite interdit car ça crée trop de dépendance.

Mais, dans le sud de l’Europe et au moyen orient son utilisation, même interdite, a progressé. C’est une drogue psychotrope.

La Syrie à cause de ses liens avec les laboratoires Bulgare a commencé à en produire depuis les années 2010. Mais la dose d’amphétamine dans le produit a été augmentée pour ses effets euphorisants qui procurent une sensation d’invincibilité.

Daesh qui en était un gros consommateur en a produit en quantité industrielle pour faire de la contrebande comme source de revenu dans toute la région.

Cette drogue faisait des combattants, de courageux guerriers, c’est pourquoi on a appelé cette sensation “du courage chimique”. Ils n’ont peur de rien, peuvent supporter le manque de sommeil ou de fatigue et faire la guerre avec une vigueur décuplée.

Il y a deux ans, la police italienne a saisi 16 tonnes de captagons qui, à travers le Hezbollah du Liban, étaient arrivés de Syrie.

Apparemment le Hezbollah et certains responsables de l’armée syrienne contrôlaient cette contrebande. La production se fait encore en Syrie et à travers le Hezbollah et l’armée des Pasdarans est chargée de la distribution. Ça crée un grand marché et une source de revenus très lucrative pour Assad mais aussi pour les Pasdarans.

La République islamique contrôle une partie du Port Lazeghieh (Latakia) en Syrie; elle y dispose de 23 entrepôts pour soi-disant ses activités économiques, ce qui leur permet d’expédier leur cargaison de Captagon à leurs alliés. On estime ce commerce à 5 Milliards de dollars.

C’est devenu une nouvelle arme entre les mains de la RI.

On voit ce médicament apparaître partout où la RI a des alliés.

Au mois de juin dernier, Irak a obligé un vol clandestin d’atterrir à Basra dans lequel ils ont saisi un million de comprimés de captagon, comprimés produits en Iran et à destination du Koweït.

Cette drogue est aujourd’hui très répandue en Iran parmi les forces de l’ordre.

Le directeur de Hôpital de Gorgan, a signalé qu’il recevait des patients parmi les forces de l’ordre qui se trouvaient dans un état incontrôlable et avaient même attaqué leur commandant.

18 personnes des Pasdarans et de Bassij sont morts et l’autopsie a révélé une grande quantité d’amphétamines dans leur corps.

Voilà comment ils arrivent à dominer leur peur devant les vagues de protestataires!

Désobéissance civile

-A côté des protestations et les diverses formes qu’elles prennent, nous observons 2 autres qui sont apparues ces dernières semaines:

-Campagne de non-paiement des factures d’électricité

On ne connaît pas encore l’ampleur de ce mouvement surtout qu’avec le commencement de l’hiver et l’augmentation générale des prix, beaucoup de foyers sont absolument dans l’incapacité de régler leurs factures.

-le retrait de l’argent liquide des comptes bancaires. Une forme de lutte qui pourtant au-delà d’un certain niveau, a plusieurs fois démontré son inefficacité. Ça pourrait momentanément créer des difficultés pour le système bancaire, mais ça reste tout à fait symbolique car une part très limitée des avoirs se trouve sous forme de billets de banque et de monnaie. Au moment des gilets jaunes, Cantona avait lancé l’idée avec le succès que l’on sait. Néanmoins, il a suffi que cette idée soit lancée dans la population pour que le gouvernement demande aux banques de monter leur taux d’intérêt.

-Taraneh Alidousti, actrice, (prix d’interprétation féminine Locarno) connue pour sa participation aux films “A propos d’Ely” ou “le client” d’Asghar Farhadi mais aussi une des actrices qui participait à l’organisation du mouvement Metoo en Iran avec la signature de 800 femmes du monde du cinéma et du théâtre qui avaient protesté contre les agressions sexuelles dans ces domaines. Elle a été arrêtée chez elle par des “civils” et avait disparu pendant plusieurs jours. On sait aujourd’hui qu’elle est incarcérée dans le bloc 209 de la prison d’Evin à Téhéran et le régime s’affaire à constituer un dossier contre elle.

Un certain nombre d’artistes qui travaillent dans le milieu du cinéma se sont présentés devant la prison en demandant sa libération ainsi que celle d’autres artistes comme les réalisateurs Rasoulof ou Jafar Panahi … on les voit aussi s’activer dans les réseaux sociaux dans ce sens. Une sorte de coalition internationale aussi à vu le jour rassemblant des artistes et des cinéastes mais également des festivals comme Berlin, Locarno,Rotterdam, Amsterdam … pour réclamer leur libération.

 

Et pour finir une pensée pour une autre Yalda

-Yalda Agha-Fazli, 19 ans, a été arrêtée le 26 octobre dernier. Elle a été torturée. Jusqu’au dernier moment, dans une conversation téléphonique elle a dit avoir résisté et que sur son dossier était noté: “elle a reconnu sa participation aux troubles et n’a pas exprimé de regrets.”

Dans cette communication téléphonique du prison, avec une voix éreintée à force d’avoir crié, elle raconte son arrestation et les tortures qu’elle a subies. Elle dit qu’elle était précisément ciblée et recherchée en particulier. Après 11 jours, elle a été libérée mais 5 jours plus tard, on a su qu’elle était morte. Officiellement, les autorités ont parlé de suicide après avoir consommé de la drogue.

On ne compte plus ce genre de témoignage des jeunes et encore pire, les jeunes qui sont libérés mais qui se suicident juste après leur sortie de détention. Une hypothèse qui ne peut être écartée et qui a été des centaines de fois confirmées, est certainement le viol en prison, qui pour une jeune fille éduquée dans la culture iranienne, de surcroît islamique et patriarcale est insupportable. Elles préfèrent partir pour ne pas avoir à affronter le regard de leurs parents, de leur père et de leurs frères. Elles se tuent pour ne pas embarrasser la famille et les proches, ni vivre comme une pestiférée.

Le slogan triste qu’on a entendu dans les cérémonies du troisième jour était : “Ils ont pris notre Yalda, ils nous ont rendu son cadavre.”

“Cette fleur effeuillée est une donation à notre pays !”

Habib

Vous trouverez sur cette page nos dernières infos venues d’Iran, au sujet du mouvement ouvrier. Comme le texte est long et a une portée plus large, nous l’avons publié en tant qu’article indépendant

Réunion sur le mouvement ouvrier en Iran

23/12/2022 à 10h55

 

Deux messages du « Conseil d’organisation des protestations ouvrières du pétrole »

IRAN, DALLA LOTTA DI STRADA AGLI SCIOPERI OPERAI

Premier message – 16 décembre 2022

Nous appelons à rejoindre les journées de protestation annoncées et à préparer des grèves nationales.

Les collègues de Naft ont appelé à de grands rassemblements dans tout le pays le 17 décembre. En outre, les collègues des raffineries de pétrole ont appelé à la grève les 24, 25 et 26 décembre. D’autre part, de nombreuses universités et de nombreux jeunes et étudiants révolutionnaires ont été appelés à des grèves, des manifestations et des marches de protestation pour les 18-20 décembre.

Le conseil d’organisation des manifestations des travailleurs contractuels du pétrole doit rejoindre tous les travailleurs permanents et contractuels et certains travailleurs contractuels du pétrole dans tous les secteurs et centres pétroliers, y compris les raffineries de pétrole, les secteurs pétrochimiques, de forage, de transport et de carburant. Se joindre à ces protestations est une étape importante pour amener le plus grand nombre possible de travailleurs sur le terrain dans tous les centres pétroliers et préparer des grèves nationales dans divers secteurs de l’industrie pétrolière.

Il convient de mentionner que nous, en tant que conseil d’organisation des protestations des travailleurs contractuels du pétrole, avons mis l’accent, dans notre dernière déclaration, sur la grève nationale comme une réponse forte aux exécutions et à la répression et pour défendre nos moyens de subsistance et notre dignité. Dans la déclaration (voir https://www.operaicontro.it/2022/12/14/iran-in-campo-gli-operai-del-settore-petrolifero/), nous avons demandé à tous les collègues de tous les départements de communiquer activement avec nous afin que nous puissions planifier notre grève nationale le plus rapidement possible. Nous avons reçu des réponses encourageantes. Le point commun de tous ces commentaires est qu’il y a des protestations partout et que tout le monde souhaite exprimer sa protestation contre cette situation. Dans le même temps, des amis ont souligné les trois problèmes suivants :

1- Les amis ont souligné que la tendance à la protestation est élevée et, se référant au manque de cohésion de groupe parmi les travailleurs sur le lieu de travail, ils ont demandé au conseil d’organisation d’appeler à la grève et à la protestation et, dans ses avis, chaque section a été spécifiquement nommée et invitée à se joindre à la protestation.

2- Friends a écrit que les travailleurs veulent protester depuis longtemps, mais que le problème est de ne pas avoir la sécurité de l’emploi et de s’inquiéter d’être licencié.

3- Certains amis ont exprimé leur inquiétude quant au fait qu’il existe des filières créées par les agents de sécurité eux-mêmes et ont demandé au conseil d’organisation de dénoncer le vol et le détournement de pétrole pour gagner plus de confiance [point peu clair, semble faire référence au détournement ou au vol de pétrole organisé et géré par les administrateurs des unités d’extraction et de raffinage, note du traducteur].

Le conseil d’organisation considère que les considérations de tous ces amis sont fondées, et en réponse aux amis du premier groupe, comme nous l’avons dit, une large participation à ces protestations nous permet de préparer plus facilement des grèves nationales.

Le problème est que le manque de sécurité de l’emploi est réel. Mais le maintien du statu quo ne signifie pas le maintien de la sécurité de l’emploi. Nous savons tous que les exécutions et les répressions servent à asservir de plus en plus les travailleurs que nous sommes. De plus, ce problème peut être résolu aujourd’hui en constituant un fonds de grève. Nous contribuons chacun un montant à ce fonds afin d’avoir une ressource pendant la grève en cas de besoins urgents. En outre, il est clair qu’en cas de grève nationale contre l’exécution, le peuple et les syndicats soutiendront tous cette grève et sa caisse de grève. Enfin, le dernier point concerne le travail destructeur que les forces de sécurité du gouvernement font pour créer la division et mettre en danger la sécurité de nos travailleurs. D’une part, ils nous ont privés du droit de nous organiser et, d’autre part, ils essaient de nous rendre méfiants avec de faux groupes et de nous empêcher de nous organiser. Bien sûr, l’une de nos objections concerne les détournements de fonds et les vols, le pillage des gouvernements et des fiers entrepreneurs, ainsi que les vols à grande échelle commis dans le secteur pétrolier, dont l’un entraîne la perte de plateformes pétrolières. La dénonciation de ces vols nous donne le droit de poursuivre nos revendications avec toute notre force et notre droit. Vive le syndicat, vive la grève

Deuxième message – 18 décembre 2022

Azar 26 (17 décembre) est un grand succès pour les collègues travaillant dans le secteur pétrolier.

Le 26 décembre (17/12), nos collègues se sont mis en grève dans différentes régions comme Asaluyeh, Mahshahr, Teng Bijar, Gachsaran, Jeziza Khark, Ahvaz et Mahmood Abad pour protester contre la détérioration de leurs conditions de vie et pour faire valoir leurs revendications légitimes. . Ces rassemblements ont été formés en réponse à l’appel précédent et ont été organisés à l’échelle nationale, ce qui est sans précédent au cours des dernières décennies. Aujourd’hui, nous sommes heureux que nos collègues soient si unis dans la poursuite de leurs revendications et nous pensons qu’il est temps pour eux d’annoncer officiellement leur conseil d’organisation de la protestation afin qu’ensemble nous puissions organiser des manifestations à l’échelle nationale pour mettre fin à l’oppression des esclaves. Allons de l’avant unis dans les régions pétrolières en tant que zones économiques spéciales et pour protester contre les détournements de fonds et les vols et la propagation des entrepreneurs prédateurs. Pouvoir mettre fin à l’environnement de travail précaire qui fait des victimes chaque jour, ainsi qu’à l’atmosphère sécuritaire [comprise comme policière] qui règne dans les centres pétroliers, et ramener nos conditions de vie et de travail à un niveau acceptable.

Le conseil d’organisation des manifestations des entrepreneurs du pétrole, comme il l’a souligné à plusieurs reprises, se considère comme uni à tous les secteurs travaillant dans l’industrie pétrolière et défend fermement les luttes des collègues du pétrole. Il est clair que la protestation des collègues du pétrole va se poursuivre. Leur grève et leurs réunions du 26 Azar (17 décembre) étaient une protestation d’avertissement. Ces amis ont annoncé que si leurs demandes ne sont pas satisfaites, ils prépareront leur prochain mouvement de protestation et cette fois à un niveau plus large.

Il faut dire que nos collègues des raffineries ont également appelé à la grève pour les troisième, quatrième et cinquième jours du Dey (du 24 au 26 décembre) pour protester contre la détérioration de leurs conditions de vie et de travail. Nous soutenons également les protestations de ces collègues et cherchons à être la voix de leur protestation.

Enfin, nous soulignons notre soutien aux appels nationaux aux protestations des 28-30 Azar (19 au 21 décembre) contre les exécutions et la répression. Le conseil d’organisation appelle tous les partenaires officiels et non officiels, les partenaires contractuels et de projet, les tiers et les salariés quotidiens, dans tous les secteurs pétroliers à Asaluyeh, Kangan, les secteurs du forage et de l’exploitation, les secteurs du carburant, les raffineries et les industries pétrochimiques et connexes, à se joindre largement à ces protestations et à déclarer leur colère et leur haine contre l’exécution en annonçant une grève.

#no_to_execution #free_life_woman @Shoratamas

MINIMUM NEWS

Liste des usines/sites en grève le 17 décembre 2022

-Pars Oil and Gas Company à Asaluyeh et Ahvaz

Raffinerie de Pars – phases 2 et 3

-Exploitation du pétrole et du gaz de Gachsaran et Mahshahr

-Les plantes de l’île de Kharg

-les pompiers d’Ahvaz, Mahshahr, Asalavih et Gachsaran.

-Employés des laboratoires chimiques dans les régions pétrolières.

-Gharb Oil & Gas Exploitation

-Grève à la municipalité de Yazd contre les réductions de salaire et la perte de certains avantages. Ils appellent à une grève nationale et au renversement du régime.

Il y a toujours des médiateurs réformateurs dont le travail consiste à blanchir les tombes : dans ce cas, il s’agit de Hossein Morashi, secrétaire du syndicat des travailleurs du bâtiment ; il déclare que “si notre jeunesse se concentrait sur des élections libres et anticipées, elle serait peut-être plus proche du succès que de dire que toute la République islamique doit disparaître”.

-Même certains mollahs sont mal à l’aise, alors ils se plaignent de la barbarie de la répression et enlèvent leur turban en signe de protestation (aussi pour ne pas se faire enlever leur turban dans la rue par les garçons). C’est le cas de Mohammed_Khoshbayan, descendant d’une importante famille religieuse. Cela lui permet de faire son temps en dehors de la prison sans souffrir d’une égratignure.

-L’ancien ministre des affaires étrangères, M. Velayati, est pressé de vendre son beau palais dans la banlieue cossue de Téhéran. Entre-temps, il semble que certains responsables se trouvent au Venezuela pour négocier un refuge pour les gros bonnets du gouvernement iranien si les choses ne se passent pas bien à nouveau. Seront-ils vraiment en danger ?

dit-on à Téhéran :

L’inflation est de 50 % et le ministre de l’Industrie affirme que les voitures seront bon marché. Le pays est sanctionné et le responsable des zones franches dit que nous allons faire venir des investisseurs étrangers.

La moitié des revenus pétroliers n’a pas été réalisée et le ministre du pétrole dit que nous vendons bien.

Le dollar devient plus cher d’heure en heure et la banque centrale dit, Dieu merci, nous avons beaucoup de dollars.

-Les détenus des deuxième, troisième et quatrième quartiers de la prison centrale de Karaj ont protesté contre l’action des autorités pénitentiaires visant à exécuter un certain nombre de détenus appelés “condamnés pour drogue”, parmi lesquels les détenus pensent qu’il pourrait y avoir des détenus protestataires anonymes, et ont protesté contre Khamenei et la République islamique. Le lendemain, des émeutes similaires ont eu lieu dans la prison de Qaimshahr. Dans les deux cas, la police est intervenue en force et a repris le contrôle, à quel prix pour les prisonniers, on ne le sait pas encore.

-presque chaque jour, les corps des jeunes arrêtés lors des manifestations sont remis à leurs familles, portant des traces de torture. La police empêche les funérailles publiques.

Nouvelles d’Iran du 11 au 15 décembre 2022

-Mercredi 7 décembre c’était aussi le jour où des milliers de personnes sont allées, à la tombée de la nuit, vers la place Shahyad ou Azadi actuelle.

Des groupes de gens éparpillés sur les trottoirs mais aussi des milliers dans leur voiture. Embouteillage de plusieurs km vers la place avec, au centre, ce monument énorme caché dans le noir. La place Azadi c’est un peu l’équivalent de l’Etoile à Paris. Les responsables politiques, que ce soit sous le Shah ou sous la RI sont très fiers de ce monument, représentant l’Iran “moderne” qui est tout le temps illuminé. Là, la contradiction est évidente entre les feux allumés des voitures qui font des rubans de lumière colorée tracée sur le boulevard et le noir de la place qui absorbe comme un trou noir toute cette lumière.

A la fin, les forces de l’ordre ont dispersé, en tirant des coups de feu, la foule qui entourait le monument, au centre de la place, et qui lançait des slogans. Ils ont remis les lumières vers 23h30.

-Ce même jour, le 7 décembre, on a vu, comme quasiment tous les soirs, des rassemblements de protestation un peu partout surtout dans la capitale. Un des plus remarquables était celui du quartier Gohar-Dasht à Karaj; les manifestants, à un moment d’une soirée ponctuée de bagarres et de poursuites avec les forces de l’ordre, ont monté une grande barricade de feu bloquant la rue pour empêcher l’avancée des forces de l’ordre.

-Cette semaine, sur le plan diplomatique aussi on a été témoin d’un certain nombre de changements, au niveau de la politique extérieure des pays de la région. Trois éléments, d’importance inégale, témoignent de l’isolement relatif de la République islamique même par rapport à ses alliés traditionnels.

*Vladimir Poutine, jeudi 13 octobre, en marge du “sommet de la conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie (CICA)” qui se tenait au Kazakhstan, à proposé au président turc Erdogan, lors d’un échange télévisé, de lancer un projet de création d’un “hub gazier” passant par la Turquie pour faciliter les exportations du gaz vers l’Europe. Ce que le ministre du budget et des Finances de la Turquie a accueilli de façon très favorable. Noureddine Nabati qui est le ministre en question, dans une discussion avec le site “arabe news” a dit que la Turquie, compte tenu de sa position géographique, est au centre de la création d’un hub d’énergie entre la Russie, l’Iran et l’Arabie Saoudite.

Apparemment ils veulent pouvoir remplacer Nord Stream par ce hub d’énergie et rendre plus facile le transit à travers la mer noire.

*Parallèlement à cette affaire, une autre information attire l’attention: la Turquie a décidé de créer une station télévision en langue persane.

*La rencontre du Président chinois (Xi Jinping) avec le gouvernement saoudien en Arabie saoudite et les chefs du Conseil de coopération du golfe a provoqué beaucoup de turbulences au sein du pouvoir iranien. A l’issue de cette rencontre, les deux pays ont publié une déclaration commune qui est jugée par les Iraniens comme une atteinte à leur intégrité territoriale. D’un autre côté la déclaration à condamné dans des termes feutrés la façon dont l’Iran conduit sa politique dans la région et désire que son allié iranien respecte la stabilité qui y règne notamment en s’abstenant d’intervenir dans la politique intérieure des pays voisins. Aussi, la déclaration condamne la politique de l’Iran par rapport au programme nucléaire et insiste sur la nécessité de la collaboration de la RI avec les autorités de l’agence internationale de l’énergie atomique.

Il va sans dire que cette déclaration a provoqué une explosion de nouvelles et de commentaires à l’intérieur et à l’extérieur du pays. C’est un choc politique pour les responsables de la politique étrangère de l’Iran car l’alliance avec la Chine constitue la base même de la coopération organisée et en développement entre les deux pays et de la part de l’Iran est considérée comme faisant partie sa “réflexion stratégique pour le 21e siècle.”

L’ambassadeur de Chine à Téhéran a été convoqué au ministère des Affaires étrangères à Téhéran pour que la Chine soit officiellement notifiée de la protestation de l’Iran contre la signature de la déclaration finale de cette rencontre.

-Les dates de la prochaine série de manifestations ont été fixées : les 19,20,21 décembre 22. D’importantes activités sont organisées dès le milieu de la semaine dernière pour préparer le succès de ces mobilisations de protestation et de grèves. Les activités telles que nous les avons déjà décrites, comme les rassemblements ponctuels dans les quartiers, les slogans criés par les fenêtres et les toits des immeubles, les manifestations ponctuelles dans les universités, la distribution des tracts et de flyers, des graffitis sur les murs, etc.

Il est à noter qu’on entend ici et là, surtout de la part des groupes qu’on peut qualifier “de gauche”, des critiques sur le sens qui a été attribué au mot d’ordre de “grève générale”; mot d’ordre qui est largement repris dans les appels. L’ennui c’est qu’apparemment on confond la grève générale au sens de l’arrêt total de toute activité dans le pays avec le fait même de la fermeture des bazars et des boutiques de commerçants dans les villes. C’est vrai que chaque fois, pendant les séries de 3 jours de mobilisation, nous avons vu essentiellement cette grève suivie chez les bazaris et les commerçants, même si ponctuellement elles ont été accompagnées par des journée de grève chez les ouvriers ou les camionneurs. Ce qui faisait qu’on avait des opérations de “villes mortes” qui, à part l’effet symbolique de souligner la solidarité avec le mouvement général de protestation a effectivement des aspects négatifs non-négligeables, notamment le fait que les manifestants et les protestataires qui se trouvaient dans la rue étaient isolés et facilement repérables par les forces de l’ordre. Dans ces moments en particulier, le fait même d’être présent dans la rue vous qualifie comme protestataire et vous rend susceptible d’être identifié et arrêté. De surcroît, ce genre de fermeture de magasin n’a en effet, rien à voir avec le pouvoir de nuisances que pourrait avoir une grève dans les secteurs de production et de distribution.

Un autre aspect négatif à mentionner c’est le “sentiment de travail accompli” que ce genre de grève peut procurer aux personnes concernées; ça peut avoir un effet démobilisateur car c’est comme si on disait aux gens “aujourd’hui ne faites rien, restez à la maison”.

Et dans ce cas, qui va faire la révolution ?

Il faut donc être très attentif à ce slogan et l’utiliser de façon réfléchie pour mobiliser non seulement le bazar, les commerçants et les boutiques, mais également les camionneurs, les chauffeurs de bus, les conducteurs de camion et surtout les ouvriers de l’industrie et les employés des services.

Il nous reste maintenant à surveiller la suite des évènements pour évaluer l’influence de ce genre de critique sur le choix des tactiques et des moyens, qui seront l’œuvre des groupements de jeunes de quartier qui en général sont à l’origine de ces appels.

-Nous avions déjà mentionné les manifestations au Baloutchistan et notamment à Zahedan, le vendredi 9 décembre, en réaction à la pendaison de Mohsen Shekari, la première personne exécutée par le régime après 75 jours de détention suite aux événements actuels.

Courant cette manifestation, à part les slogans maintenant devenus traditionnels de “À mort bassiji! “À mort khamenei!” , il y a eu un événement particulier qui mérite d’être souligné:

Les manifestations que, cette fois-ci, avaient commencé dans deux quartiers différents de la ville, se sont rejoints dans une ambiance de fête et les gens ont lancé ensemble le slogan suivant:

“C’est notre dernier message, si tu exécutes les jeunes, ça sera l’insurrection!”

-On avait entendu beaucoup de témoignages de violence faite aux femmes de la part des forces de l’ordre de la République islamique; des violences à glacer le sang; mais faute de source officielle et sans confirmation, il était difficile de les mentionner comme un fait. Voilà que The Guardian confirme ces pratiques horribles.

 

Voici un compte rendu de ce reportage repris par “Le Temps”:

“Selon le témoignage de la jeune opposante rapporté par le médecin anonyme, elle participait à une manifestation lorsqu’un groupe d’une dizaine d’agents de sécurité l’a encerclée et lui a tiré dans les parties génitales et les cuisses. Le praticien estime que les femmes sont ciblées d’une manière différente par volonté de « détruire leur beauté » .

Un avis partagé par un autre médecin de Karaj, une ville proche de Téhéran, pour qui les forces de sécurité « tirent sur le visage et les parties intimes du corps des femmes parce qu’ils ont un complexe d’infériorité. Et ils veulent se débarrasser de leurs complexes sexuels en faisant du mal à ces jeunes. »

 

Des gardes devant les hôpitaux

Les zones visées par ces tirs peuvent être difficiles à déterminer du fait de la dispersion des grenailles. Ce type de munition « est conçu pour la chasse et n’a sa place dans aucune action légale ou légitime de police », souligne Brian Castner, spécialiste des armes et des opérations militaires à Amnesty International. Un rapport fait aussi état d’utilisation de balles dites « slugs », des munitions lourdes normalement utilisées pour le gros gibier.

Pour un spécialiste britannique de la chirurgie faciale interrogé par The Guardian, les images récupérées auprès des médecins iraniens montrent des blessures oculaires résultant de tirs à bout portant « directement dans les yeux » et certaines suggèrent que les manifestants « auraient été maintenus ou immobiles et qu’ils n’auraient pas eu la capacité de bouger la tête » . Les manifestants déclarés ne sont pas les seuls victimes: de simples passants sont aussi pris pour cibles.

D’autres éléments montrent qu’il s’agit d’une stratégie du pouvoir en place. La surveillance dans les hôpitaux a par exemple été renforcée par les autorités. Un médecin de la ville de Shiraz (centre-sud du pays) affirme qu’un nouveau garde de sécurité a été posté à l’entrée du service d’ophtalmologie d’urgence à la fin du mois dernier.

Avec les menaces qui pèsent sur les médecins, difficile pour les manifestants de se faire soigner. Une professionnelle déclare ainsi qu’elle retire parfois toutes lumières éteintes les plombs de métal ou de plastique pour ne pas être repérée. S’ajoute à cela la honte pour certaines manifestantes d’aller à l’hôpital. Traités à domicile, ces blessés qui auraient pu survivre décèdent parfois faute de soins ou d’un traitement adéquat.”

Ces témoignages confirment donc ce qui avait déjà été rapporté sur les réseaux sociaux notamment une en particulier, qui semblait incroyable:

Une voix masculine racontait son histoire entrecoupé par ses sanglots:

Sa fiancée est arrêtée par les forces de l’ordre, vêtues en civil, durant une manifestation. Après quelques jours, elle est rentrée à la maison dans un état effroyable. Elle avait des blessures partout sur le visage et sur le corps. Ses vêtements étaient imbibés de sang, on lui avait tiré des dizaines de balles de plomb (grenailles) sur le corps, les seins, le ventre et en particulier sur le vagin. Elle a raconté qu’elle avait été violée par plusieurs personnes et puis on lui avait tiré dessus par un fusil de chasse.

Le couple a demandé l’aide d’un médecin ami, mais la femme a refusé, par pudeur, de montrer ses parties intimes à un homme étranger.

Les saignements s’aggravant, ils se sont déplacés à l’ hôpital. D’abord, les médecins ont refusé de la recevoir par crainte des forces de sécurité jusqu’à ce qu’une infirmière accepte finalement de la prendre en charge. Mais la gravité des blessures étaient telle qu’elle n’a rien pu faire et la femme est décédée.

Aujourd’hui, des dizaines de jeunes filles et garçons sont disparus ou arrêtés par les forces de l’ordre de la République islamique. Il y en a de qui on n’a aucune nouvelle depuis plus de 2 mois; personne ne sait ce qu’ils sont en train d’endurer. Il semble que la République islamique, n’ayant pas de moyens suffisant pour attirer de nouveaux recrues dans ses forces de l’ordre, a dégoté une prime exceptionnelle pour les appâter ; elle leur accorde comme rétribution, le droit de traiter les protestataires arrêtés comme des prises de guerre sur lesquels ils ont le droit de vie et de mort et avec lesquelles ils peuvent assouvir leur complexe les plus sadiques.

-La RI vient d’être exclue de la commission de la condition de la femme de l’ONU (CSW) par une votation au Conseil économique et social de l’ONU.

Cette Commission est le principal organe intergouvernemental mondial dédié exclusivement à la promotion de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes.

C’est la première fois qu’un pays se trouve exclu de cette commission. Elle a été votée malgré le vote négatif de ses alliés, essentiellement la Russie et la Chine. La résolution présentée par les Etats Unis a obtenu une majorité absolue.

La représentante des USA a appelé la présence de la RI dans cette commission comme “une marque indélébile de la honte” sur l’ONU.

C’est apparemment une décision inattendue, surtout le vote majoritaire de 29 pays pour l’exclusion et 8 seulement contre; (avec 16 abstention). Ces huit pays sont: la Russie, la Chine, la Syrie, le Pakistan, la Bolivie, le Kazakhstan, le Nicaragua, le Niger, l’Oman, le Zimbabwe.

C’était aussi l’occasion d’affirmer que la présence de l’Iran depuis 4 ans dans cette commission n’a en rien amélioré la situation des femmes en Iran, qui depuis 40 ans n’a fait qu’empirer. Le discours convenu du représentant iranien était plus qu’hypocrite en soulignant “le rang élevé de la femme dans la culture islamique” et des bobards du même genre qui, vu la réalité vécue par les femmes en Iran ces jours ci, devenait rageant.

Depuis 2021, la RI a accéléré cette remise en cause. Ils ont arrêté la distribution gratuite de tous les moyens de contraception parmi la population, ils ont créé toutes sortes de difficultés relatives à l’examen prénatal, pour la vasectomie et la ligature des trompes, qui seront désormais prises en charge par le secteur privé et ne sont plus couvertes par la sécurité sociale.

Khamenei en 2012 avait déjà décidé l’abandon des contrôles de naissances et assigné l’objectif de doubler la population du pays pour atteindre 150 millions d’habitants. Apparemment, ils ont besoin de plus d’ouvriers à 150 dollars et des soldats pour leur prétention stratégique dans la région. Plus récemment, la RI a annoncé l’interdiction pour les médecins et les sages-femmes de pratiquer des tests de dépistage des anomalies foetales. Dorénavant c’est la justice qui doit en décider. La loi en question, qui s’appelle ironiquement “protection de la famille et le renouvellement de la population” a été officialisé le 16 avril 2022.

Toutes ses lois et dispositions légales font que l’Iran devrait être reconnu comme champion de la négation des droits des femmes.

 

-Pour ne pas finir sur cette note triste, mentionnons deux appels de lutte et de protestation:

-235 personnes, faisant partie des militants de droits des femmes, de l’Association des écrivains iraniens, de corporations diverses, des enseignants, des retraités, des mères et des familles de Khavarans [cimetière des militants de gauche exécutés entre 1982 et 1989] , des artistes, des poètes et d’autres militants sociaux et civils ont rédigé une déclaration condamnant l’exécution des Baloutches et des Kurdes mais aussi celles de “Mohsen Shekari”, de “Majidreza Rahnavard”. Ils ont également protesté contre les jugements de “guerre contre Dieu” prononcés par les juges qui valent condamnation à mort pour les manifestants du soulèvement “Femme, Vie, Liberté”. Ils ont demandé de mettre un terme à ces ordres “d’exécution” réactionnaires, sans aucune raison ni motif.

“L’exécution et le meurtre par le gouvernement de Mohsen Shekari et Majidreza Rahnavard, deux des manifestants du soulèvement “Femmes, vie, liberté” dans la matinée du 8 et 11 décembre, n’est qu’une des tactiques du gouvernement pour faire taire les personnes qui en ont assez du gouvernement répressif de la République islamique, qui descendent chaque jour dans la rue, les mains vides, et s’unissent contre l’oppression imposée à leur société.”

Partout dans les villes, des citoyens courageux affichent clairement leur protestation en accrochant à une petite pancarte sur laquelle est inscrite le nom des exécutés, une petite corde de pendaison, symbolisant la pratique de la République islamique.

-Et voici la dernière déclaration des jeunes de quartiers de Marivan (Kurdistan) datée du 14 décembre 2022

“Ne soyons pas affligés, organisons-nous !

Nous nous approchons du quatrième mois de l’insurrection de Jina. Dès le premier jour, les médias et l’opposition de droite ont délibérément tenté de montrer que la révolution est finie et ils ont répandu des rumeurs d’évasion des chefs de gouvernement et de responsables ; Il ne s’agit que de faux espoirs, ils ont essayé de lancer des appels virtuels et sans fondement pour marginaliser la nécessité de l’organisation par le bas. La lutte continue et avec le temps, elle s’est organisée et un large éventail de jeunes révolutionnaires locaux se sont rassemblés en réseaux et en groupes indépendants de quelques personnes. Les nombreux rapports des activités pratiques que nous recevons de la part de ces révolutionnaires ainsi que l’évolution du processus d’organisation populaire de classe dans les universités, les écoles, les usines, etc. nous encouragent sur le chemin de la victoire de la révolution avec encore plus de force et d’espoir. Il faut, face à la force matérielle et organisée des oppresseurs que nous affrontons sur le terrain, amener la force organisée et matérielle des masses laborieuses et frayer ainsi, la voie à l’avancée de la révolution “Femme, Vie, Liberté”. En plus de la volonté et du courage révolutionnaires, la victoire de la révolution exige une organisation révolutionnaire par en bas. La Révolution est la fête des opprimés. Vive la révolution!

Organisation de masse/direction ouvrière

Organisation, l’organisation/solution des travailleurs

Un groupe de jeunes révolutionnaires des quartiers de Marivan

Mercredi 23 décembre 1401″

-On vient d’apprendre qu’une partie des employés du métro (essentiellement la vente des tickets de transport) de Téhéran a entamé une grève de deux jours depuis hier le 14 décembre et se sont rassemblés devant le siège de l’établissement qui le gère en signe de protestation. Leurs revendications principales sont les suivantes:

Le non-paiement du salaire du mois dernier, des contrats de travail stables, (en effet, depuis la fin de l’année dernière, leur contrat a été modifié pour devenir des CDD d’un mois, ce qui fait que l’employeur peut les virer quand il le désire), la demande d’une assurance complémentaire, la reconnaissance de la pénibilité et la nocivité de leur travail, des vêtements de travail adéquats … Beaucoup de ces ouvriers ont plus de 10 ans d’ancienneté.

Habib

15 décembre 22

 

Nouvelles d’Iran du 5 décembre au 10 décembre 2022

Un rapport assez détaillé d’une agence de presse en relation avec l’organisation de la défense des droits de l’homme nous donne un bilan du mouvement qui résume assez bien la situation iranienne :

le soulèvement qui a commencé après la mort de Mahsa dans un centre de détention de la “police morale” de Téhéran, ne s’est pas limité à la question du Hijab et a rapidement visé tous les fondements idéologiques du L’ORDRE (Nezam) dominant, si bien qu’entre le 17 septembre et le 7 décembre 2022, la population, notamment les lycéennes/ lycéens, les étudiantes/étudiants ont organisé des rassemblements de protestation dans au moins 31 provinces, 161 villes et 143 centres universitaires avec le slogan central ” Vie, Femmes, Liberté !” et en montrant leur opposition au fonctionnement, aux lois et à la structure même de la République islamique. Dès le début, le gouvernement n’a rien fait d’autre que se lancer dans une répression sévère des manifestants, par tout ce qu’il a comme forces de l’ordre : la Police et son “unité spéciale”, IRGC (Corps des Gardiens de la République islamique) et les Bassidji. Ils ont attaqué les manifestants en utilisant divers moyens de répression, tels que des gaz lacrymogènes, des fusils de chasse (à grenailles), des armes à feu et armes de guerre, des mitraillettes et même des mitrailleuses lourdes. On décompte jusqu’au 10 décembre 481 morts dont 68 enfants. Des estimations montrent également que plus de 18 000 personnes ont été arrêtées, dont 605 étudiants et 61 professionnels des médias. Ces chiffres sont en rapport à l’étendue des protestations : en l’espace de 82 jours, pas moins de 540 manifestations ont eu lieu dans 160 villes d’Iran. Cette statistique ne comprend que les rassemblements où le nombre de manifestants dépassait les 30 personnes ; En outre, les étudiants de 143 centres universitaires ont organisé 615 rassemblements d’étudiants au cours de la même période.

Comme déjà mentionné, un des moyens les plus utilisés pour crier sa colère est effectivement de la crier par la fenêtre ou sur le toit. Ce sont les manifestations nocturnes et les slogans, tout en gardant la ligne générale de “A mort dictateur!”, “A Mort Khamenei!”… peuvent différer de ville à ville ou de quartier à quartier. Suite à la forte présence des forces de sécurité dans les rues, à la répression sévère et aux arrestations généralisées, les manifestants se sont débrouillés pour inventer des façons nouvelles et différentes de protester. C’est parmi ces méthodes que le chant nocturne des slogans et des chansons a été généralisé surtout dans les complexes résidentiels. Là aussi, il faut souligner le rôle central des femmes. La chanson “barayé” (Pour) de Shervin Hajipour est très souvent chantée dans la nuit et pendant le rassemblement nocturne dans les dortoirs des étudiants. Cependant, les forces de sécurité ont tenté de réprimer ceux qui participent à ce genre de protestation en étant présent dans les quartiers et en semant la terreur parmi les gens.

Une autre caractéristique notable du soulèvement actuel est la participation du Bazar et des corporations de commerçants au mouvement de grève à côté des travailleurs, ouvriers ou employés. L’Organisation des droits de l’homme affirme que la grève des commerçants était principalement concentrée dans les régions du nord-ouest et du sud-est du pays, bien que certaines parties du Bazar de Téhéran, qui est le cœur de l’approvisionnement et de la distribution en Iran, aient été également touchées par la grève et ce, malgré leur relation traditionnelle avec le pouvoir. Sur la base de ce rapport, au total, les bazari et les commerçants de 53 villes se sont mis en grève; en moyenne entre 70 et 100% des boutiques étaient fermées. par ailleurs nous savons qu’ils ont été menacés de poursuite judiciaire ; parfois l’annonce de leur poursuite est placardée sur le rideau du magasin avec le No du dossier. Le lendemain des trois jours de mobilisation, nombre de commerçants ont vu leur compte bancaire bloqué.

Les grèves dans l’enseignement (université ou lycée) et chez les employés (unités de production ou de services) se sont déroulés pendant ces 82 jours dans 33 villes avec 110 rassemblements sur le lieu du travail ou dans les classes et 43 établissements en arrêt de travail dans 14 villes en milieu d’études ou de travail.

Des ouvriers d’usine, notamment des ouvriers de centres pétroliers à Assaluyeh, des ouvriers de la société de raffinage de pétrole d’Abadan, de la Sidérurgie d’Ispahan, de l’entreprise de production de pneus Iran-Tire, des camionneurs, des enseignants et des avocats faisaient également partie des gens qui ont participé à la grève et ont cessé de travailler.

Le gouvernement iranien a pris des mesures pour briser les grèves ou les empêcher, notamment le conseil d’organisation des manifestations des travailleurs contractuels du pétrole avait annoncé l’arrestation de plus de 250 travailleurs pendant les jours de grève les 10, 11 et 12 octobre dernier. Depuis, à chaque annonce de gréve, les meneurs connus sont arrêtés;

Récemment le régime a attaqué un rassemblement d’avocats; il a aussi procédé au paiement des arriérés de salaire des chauffeurs et des retraités pour mettre fin ou empêcher la grève. ًAussi, pour empêcher les informations de circuler il crée de graves perturbations sur Internet et ”filtre” les plateformes telles qu’Instagram et WhatsApp.

Malgré toutes les pressions et les arrestations arbitraires le soulèvement continue de plus belle.

On a entendu que sur ordre direct d’Ali Khamenei, une personnalité publique nommé Ali Daei a été arrêté. Il s’agit d’un ancien footballeur très aimé de la population car il s’est toujours tenu à côté du peuple.

Selon des témoins oculaires, Ali Daei a été arrêté par le gouvernement parce qu’il avait fermé ses magasins pendant trois jours. Il semblerait que l’ordre d’arrêter Ali Daei ait été émis par Khamenei en personne et qu’il aurait directement communiqué cet ordre aux forces de sécurité. Cette arrestation aura de graves conséquences pour le gouvernement de la République islamique.

 

Les manifestations de vendredi continuent à Zahédan!

Encore une fois les gens ont manifesté à Zahédan Baloutchistan après la prière de Vendredi et Ie régime comme d’habitude a utilisé le seul langage qu’il connaît c’est à dire la violence brute. Les villes de Chabahar, Khash, Zahak, Iranshahr…ont également été la scène de mouvements similaires.

A Zahak les femmes, voilées, criaient :

” je vais tuer, tuer, celui qui a tué mon frère!”

“voyeur c’est toi ! Pute c’est toi ! La femme libre c’est moi!”

A mort Dictateur !

”Avec voile, Sans voile, nous irons vers la révolution!”

Il faut mentionner un personnage très important qui se trouve, bien malgré lui, au centre des évènements du Baloutchistan surtout à Zahédan. Il s’agit d’un haut membre du clergé Sunnite M. Abdoul- Hamid, qui s’occupe des prêches de Vendredi. C’est lui qui faisait la prêche le vendredi où il y a eu une grande manifestation après le viol d’une fille de 15 ans par un gradé des forces de l’ordre. Manifestation qui a entraîné la mort de plus de cent personnes.

Abdol-Hamid s’inquiétait la semaine dernière du sort des personnes arrêtées et notamment des gens qui la semaine d’avant étaient blessés et qui étaient transportés à l’hôpital dans des ambulances quand les forces de l’ordre avaient bloqué les véhicules et procéder à leur arrestation. Il s’est trouvé donc à la pointe de la contestation même si, en tant que représentant religieux des sunnites, pendant des dizaines d’années il a collaboré avec le régime. Le soulèvement actuel l’oblige à ”se radicaliser” et la population qui le respecte en tant qu’autorité religieuse attend de lui un langage plus direct et contre Khamenei.

Abdol-Hamid a dit au cours de son dernier discours qu’”il faut que la punition soit proportionnelle à l’acte délictueux commis; face à quelqu’un qui a juste tenu un bâton dans la main ou balancé une pierre, on ne vas pas le considérer comme “Mohareb” (en guerre contre Dieu). C’est dur et disproportionné. (les Moharebs sont condamnés à mort). Je crains pour beaucoup de nos juges le jour de la résurrection. Celui qui donne ces sentences n’a pas peur du feu de l’enfer ?”

De son côté, le pouvoir en place ne veut pas sévir contre quelqu’un qui représente quand même l’Islam. Quand, paraît-il, les Pasdarans ont demandé l’autorisation de l’arrêter auprès de Khamenei, il leur a refusé en précisant qu’il faut le discréditer. Ils ont commencé depuis à répandre dans les médias les positions anciennes et forcément réactionnaires d’Abdol-Hamid sur la question des femmes dans l’Islam et leur rôle mais aussi le fait qu’il pratique lui-même la polygamie.

Le corp d’un des jeunes tués pendant le événements de la Semaine dernière, Hamed Salahshour, qui avait été enterré à la hâte par les forces de l’ordre dans un autre village que son village natale Izeh et où toute sa famille réside, a été déterré par sa famille et transporté à Izeh pour être enterré pendant une cérémonie en présence de tous les habitants. Cette cérémonie a été le point de départ des protestations et rassemblements importants à Izeh.

Deux autres villes, Anzali et Arak (pour la mort de Mehran Samak) ont connu des manifestations à l’occasion de cérémonies du 3ème et du 40ème jour de plusieurs personnes tuées lors des événements récents. Des agents du régime ont essayé de bloquer la route qui allait au cimetière au moment de l’enterrement de Mehran, mais sans succès.

Les slogans étaient :

“Libérez les prisonniers politiques!”

“Pour chaque personne tuée, mille autres se soulèvent !”

“L’iranien préfère mourir au lieu d’accepter l’humiliation !”

“Mort à Khamenei !”

La journée de l’étudiant.

Depuis presque soixante-dix ans, en Iran, le Seize du mois d’Azar est considéré comme la journée des étudiants. C’est ce jour là qu’on glorifie le mouvement étudiant iranien qui en 1953, juste quatre mois après le coup d’État américain qui a remis le Shah (Mohammad-reza Pahlavi) au pouvoir a fait une démonstration de sa volonté révolutionnaire contre ce régime inféodé aux occidentaux. En ce jour “glorieux” le Shah avait invité le vice-président américain Nixon, pour remercier les services secrets US de leur coup d’Etat. C’était également le jour de la reprise des relations diplomatiques avec la Grande Bretagne; relations qui étaient rompues par le gouvernement de Mossadegh, le premier ministre iranien qui a nationalisé le pétrole.

Les étudiants se sont rebellés contre cette visite et ont manifesté leur colère. L’armée du Shah, qui en avait pris l’habitude, n’a pas hésité à tirer dans la foule, à tuer trois étudiants et blesser des dizaines d’autres. SHARIAT-RAZAVI, GHAND-TCHI, et BOZORG-NIA sont depuis lors considérés comme les héros du mouvement estudiantin.

Tout ceci n’à pas empêché Nixon de recevoir le lendemain le doctorat honoris causa de Droit de l’Université de Téhéran.

Tout ce passé révolutionnaire oblige le régime de la République islamique à honorer cette journée. Pourtant il est de notoriété publique que les 3 étudiants tombés à cette occasion étaient des laïcs nationalistes sinon communistes.

Néanmoins le régime se voit dans l’obligation de fêter cet évènement.

Cette année, ils avaient prévu d’envoyer des émissaires du gouvernement dans les universités pour discuter avec les étudiants. Surtout que Khamenei s’est récemment étonné de voir si peu d’enthousiasme chez les responsables de l’ORDRE à défendre les victoires inestimables de la révolution sur les puissances occidentales.

Mais tout ceci était sans compter avec le soulèvement de Mahsa qui a renversé la table. Une grande partie des cérémonies et discours ont été tout simplement annulés, notamment celui du ministre de l’enseignement supérieur qui devait se tenir dans l’université Amir-Kabir. La grève des étudiants était tellement suivie que la porte-parole de l’association des étudiants musulmans a montré les salles et les couloirs entièrement vides de l’université pour expliquer l’annulation de la cérémonie et du discours du ministre.

Le maire de Téhéran M.Ali-reza Zakani pour ne pas prendre de risque avait amené avec lui sa petite armée de Bassiji pour l’applaudir, de sorte que même les étudiants membre de l’association islamique n’ont pas pu entrer dans la salle. M. Zakani, fort de ses activités “anti-corruption” quand il était jadis parlementaire et président de la commission de l’article 40 qui est censé lutter contre les pratiques mafieux du pouvoir, a commencé à discourir sur son glorieux passé d’Eliot Ness en criant qu’on arrête les voleurs, les corrupteurs… Quand une voix féminine (encore une fois!) a crié “c’est vous le voleur! C’est toi le voleur!” … ce qui n’à pas manqué de perturber complètement le programme et Zakani en sortant de la salle, dans l’enceinte de l’université à été accueilli par les slogans hostiles des étudiants qui l’attendaient.

Anecdote significative

C’était très tard dans la soirée du 29 vers 1h du matin quand pour la deuxième fois la population est descendue dans la rue à l’occasion de la défaite de l’équipe du foot de l’Iran face, cette fois-ci, aux États-Unis. On n’a jamais vu, de mémoire de footeux, fête plus joyeuse pour la perte de son équipe nationale !! Les rues des grandes villes étaient bondées par les voitures klaxonnant et les motos et les gens qui marchaient dans les trottoirs en donnant des slogans contre la République islamique. On aurait dit qu’on est sur les Champs-Élysées en 1998 quand la France avait gagné la coupe du monde, avec cette différence que maintenant ce n’était plus seulement dans une seule avenue mais quasiment tout le centre des villes qui était en liesse.

Dans les ensembles résidentielles (comme au cité Ekbatan à Téhéran) ou les bâtiments bordent tout autour des places et que d’habitude les gens dans la nuit se mettent à lancer des slogans qui se répètent à l’infini dans cette espèce d’amphithéâtre architectural, la joie et les cris de bonheur se mélangeaient aux slogans et c’était une ambiance de folie. Il faut savoir que le match à l’heure locale de l’Iran était à 22h30 donc on est à peu près vers 1h du matin que ce fiesta a démarré et duré des heures.

Sur les réseaux sociaux on a pu voir des vidéos publiant cette marée de joie dans les différentes quartiers surtout au centre de Téhéran à Zanjan, de Ghazvin à Neyshabour …

Un des conducteurs, bloqué dans la circulation où tout le monde klaxonnait et criait par les fenêtres abaissées, a prononcé deux mots succincts, si significatifs et délicieux par sa brièveté qu’il faut vraiment l’immortaliser: il a dit par la fenêtre de sa voiture : “akhound par”! (Le curé s’envole) ce qui a fait éclater de rire tous les gens qui étaient à côté de lui. Ça remonte au temps immémoriaux de notre enfance où un jeu existait pour occuper les enfants de 3 à 4 ans lors des soirées où les parents voulaient avoir un peu de tranquillité. Ce jeu s’appelle “kalagh par” (le corbeau vole). Ça consiste à ce que les enfants assis en rond sur le tapis, mettent ensemble leur index sur un point au centre de ce cercle; un enfant, en général un peu plus grand, qui mène le jeu, tire son doigt vers lui même tour en disant “kalagh par”et il soulève son doigt pour mimer l’envol de l’oiseau. Les autres enfants, s’ils sont attentifs, doivent suivre ce mouvement et glisser leur doigt vers eux même, et puis le soulever … et on continue en disant les trucs qui sont censés voler et les enfants font ce geste répétitif jusqu’à ce qu’il dit quelque chose qui ne vole pas, du genre “la maison vole”; et si un enfant continue dans sa geste répétitif, et soulève le doigt, il a perdu et sort du cercle.

Là donc, on a entendu crier Akhound (curé) par (s’envole) et tout le monde a soulevé le doigt. Ça veut dire “le curé s’envole!” .

Pour un enfant de l’Iran ces deux mots ont un pouvoir de dérision succulent !!

Habib

« Si vous nous touchez, ça va devenir un nouveau Foxconn ici ! »

« Si l’heure semble être à une lente et très progressive réouverture, le quotidien de centaines de millions de Chinois continue d’être marqué par les contraintes sanitaires. Des étudiants ont manifesté contre le confinement de leur université dans l’est de la Chine, selon des vidéos publiées mardi 6 décembre sur les réseaux sociaux chinois….

Dans la vidéo, on voit des étudiants se disputer avec des représentants de l’université. « Si vous nous touchez, ça va devenir un nouveau Foxconn ici ! », crie un jeune en référence aux violentes manifestations d’ouvriers le mois dernier dans l’usine chinoise du géant taïwanais, qui fabrique les iPhone pour Apple. »

https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/12/06/en-chine-des-etudiants-manifestent-contre-le-confinement-de-leur-universite_6153178_3244.html

Les nouvelles d’Iran du 30 novembre au 5 décembre 2022

Trois jours de mobilisation

Comme vous êtes certainement au courant, une autre série de trois jours de protestations, manifestations et grèves a été lancée en Iran pour le 5, 6, et 7 décembre. On ne sait pas exactement par quel miracle ces appels arrivent à s’organiser ensemble et de définir des actions communes dans des centaines de villes et villages différents.

Les séries de trois jours de mobilisation doivent être considérées comme le point apogée d’un ensemble d’actions et de mouvements qui font suite aux appels ponctuels des quartiers. Ces appels qui sont lancés à intervalles irrégulièrs, de sorte qu’on ne puisse définir un schéma par avance, sont le fait des jeunes des quartiers d’une ville qui serait relayé par d’autres quartiers et par d’autres villes pour s’agglutiner et devenir un appel national. Une fois les dates fixées, les jeunes s’activent pour les préparer. Il s’agit de passer l’information par tous moyens imaginables : flyers imprimés qu’on distribue ou qu’on jette du toit de l’immeuble sur la foule,manuscrits individuels qu’on met sous les portes des voisins ou sous les essuies glaces des voitures, inscription murale ou sur le mobilier urbain, manifestations ponctuelles par petits groupes, la nuit, dans les quartiers résidentiels, en lançant des slogans par le toit des immeubles… Cette fois ci, dans au moins 30 villes les jeunes sont sortis et ont manifesté pour demander à tout le monde de participer à ces trois journées de mobilisation.

Les universités aussi peuvent être un point de relais pour les information, les étudiants à travers les groupes informels existants entre les universités propagent l’appel et le jour du rendez-vous, elles sont un point de départ pour les protestations. Ça commence en général par un rassemblement devant le bâtiment d’un faculté puis une fois que le cortège a fait le tour du domaine universitaire tout en se renforçant, il s’écoule dans les artères de la ville et vont vers les quartiers; les quartiers qui, de leur côté ont parfois déjà entamé leur rassemblement de protestation vont parfois se rejoindre entre eux, de façon prémédité ou pas, pour converger vers une manifestation plus importante au niveau d’un arrondissement ou parfois aller vers le centre de la ville, vers les places centrales …. qui en général se termine par une dispersion violente des forces de l’ordre; ces contestations testent chaque fois leur portée. C’est en fin de compte, dans ces affrontements et l’équilibre des forces, chaque fois créée, que la question du pouvoir politique va se régler.

Quand ces petits cours d’eau vont se rejoindre et devenir une rivière puis un fleuve, des torrents d’eau vont s’abattre sur les lieux de pouvoir, vers le siège de la radio-télé publique, vers les ministères et les quartiers du guide…

Il semblerait d’ailleurs que la première journée ait été couronnée de succès. Non seulement les commerçants et ceux qui ont pignon sur rue ont respecté le mot d’ordre de la ville morte, mais même chez les fonctionnaires la grève a été assez suivie.

Malgré les difficultés de connexion internet les nouvelles de plus de cent villes sont sorties dans lesquelles de 50 à 100% des commerces étaient fermées et ont suivi le mot d’ordre de la grève.

-Selon des rapports reçus, environ cinq cents des ouvriers de Mahshahr Petrochemical Tanks and Terminal Company ont cessé leur travail depuis dimanche 4 décembre.

Ces ouvriers s’occupent du chargement des produits pétrochimiques pour l’exportation ainsi que de la réception des fournitures nécessaires aux fonctionnement des complexes. Ces travailleurs sont embauchés par des sociétés contractuelles dans les unités d’extraction du gaz chez South Pars et d’autres pétrochimies. Leur revendications sont: l’augmentation des salaires, droit aux primes d’exploitation, le rejet des discriminations ; Mise en œuvre de la classification des emplois et bénéficier des mêmes conditions salariales que leurs collègues officiels.

-Un appel est lancé pour une grève générale dans l’industrie minière du pays. Nous étions informés de l’occupation et la mise à l’arrêt d’une exploitation minière de l’or au moment des journées de protestations au Baloutchistan. Mais, nous n’avons pas encore de précisions au sujet de ce dernier appel.

-Ces trois jours de mobilisation coïncident aussi avec la grève des camionneurs, des routiers et des chauffeurs de bus qui s’étend de jour en jour. Le terminal frontalier de Soumar à Kermanshah aussi a rejoint la grève

.-Le 30 novembre était officiellement “la journée de l’infirmière/er”. A cet occasion, les infirmières et les infirmiers de l’hôpital Imam à Téhéran se sont rassemblés et ont précisé qu’en solidarité avec les 3 jours de mobilisation et les contestation en cours, elles/ils ne célèbrent pas cette journée.

-Les même jour, 30 novembre, les agriculteurs de l’est et l’ouest d’Ispahan ont organisé un rassemblement dans la place Pazou pour protester contre la pénurie d’eau.

-De leur côté, les ouvriers contractuels de pétrole, du gaz et de la pétrochimie ont exprimé leur solidarité avec ces journées de lutte.

 

Voici leur déclaration datée du 4 décembre 2022:

“Le conseil d’organisation des protestations des travailleurs contractuels du pétrole soutient l’appel à trois jours de protestation entre le 5 et le 7 décembre 2022

Des appels à manifester ont été lancés pour trois jours de mobilisation du 14 Azar au 16 Azar [5 au 7 décembre]

Les enseignants, le personnel médical et les médecins, les camionneurs, les commerçants et les boutiquiers du bazar et les habitants de différentes villes ont exprimé leur solidarité avec cet appel.

Il s’agit d’une protestation contre la répression, les arrestations qui se poursuivent et les tirs nourris qui ciblent les protestataires, contre les peines de mort que l’appareil judiciaire n’hésite pas à prononcer à l’égard de nos jeunes et des personnes qui n’ont rien fait d’autre que de souffrir. En fait, c’est une répression contre nous tous, écrasés que nous sommes par la pauvreté, le dénuement et l’insécurité. Voilà pourquoi nous protestons.

Ils attaquent les écoles et condamnent nos enfants comme «مفسد فی‌الارض» “corrupteur sur la terre” [expression juridique islamique qui correspond au péché capital et condamne l’accusé à la peine de mort] ils tuent des enfants, des hommes et des femmes, ils tirent sur Kianpour Falak qui n’avait que 10 ans et ses parents dans la voiture, et des dizaines de milliers d’autres se trouvent sous les verrous. Des personnes qui ont des droits légitimes et des revendications justes, qui ont été arrêtées et emprisonnées et de lourdes peines leur ont été infligées.

Nous, les contractuels du projet pétrolier, à côté de tout le peuple du pays, soutenons ces trois jours de protestation.

Tous les ouvriers arrêtés, les enseignants détenus, les étudiants emprisonnés et les dizaines de milliers de personnes arrêtées récemment doivent être libérés.

Les décrets de condamnation à la peine capitale doivent être annulés et rejetés.

Pour nous, les gens, il n’y a pas d’autre moyen que la lutte unitaire pour défendre nos vies.

Nous avons tous le même slogan : Femmes, Vie, Liberté!”

Source: https://t.me/shoranaft

La police des mœurs

-Il y a quelques jours, le procureur général Jaffar Montazeri a prononcé devant les reporters la possibilité de revenir sur la question du hijab mais il a précisé que c’était une investigation qui allait prendre 15 jours. Entre-temps, il semblerait que la police des mœurs a été démantelée. Les médias occidentaux ont largement diffusé cette nouvelle sans qu’on soit encore certain de sa vérité. Il faut comprendre que même si cette mesure est vraie, en fait la RI ne fait qu’officialiser un fait déjà en cours, car les membres de cette police étaient déjà affectés aux tâches de répression directe et avaient intégré les forces de l’ordre. La question du Hijab est autrement centrale pour la RI et Khameni peut difficilement avaler cette “coupe de poison”. (Khomeyni avait appelé le cessez le feu avec les irakiens “la coupe de poison” qu’il avait dû boire pour sauver les intérêts supérieurs de l’islam.)

L’Art de la Révolution

C’est tout un art de garder vivace la flamme de la révolution; un processus qui peut durer des mois et même plus; il ne s’agit pas d’une rébellion instantanée dont le régime au pouvoir pourrait venir à bout par une répression soudaine et féroce; il s’agit d’une véritable révolution dont la mémoire collective des Iraniens garde encore la trace: une année de lutte en 78-79 qui a abouti au renversement du régime du Shah et de sa fuite de l’Iran.

C’est un mouvement qui se construit à son propre rythme et pour ce faire, le peuple iranien est en train de montrer une détermination, une patience et une intelligence des mouvements sans égale; c’est comme si un chef d’orchestre expérimenté faisait intervenir les différents corps musicaux pour en sortir in fine une symphonie grandiose. On est certes loin d’une musicalité parfaite qui serait la révolution telle que nous l’imaginons et l’espérons mais néanmoins, on ne peut qu’apprécier le courage sans limite de ces jeunes femmes ou hommes qui défient, les mains vides, une des forces armées les plus sauvages qui puissent exister. Quelle que soit la forme que prendrait la stabilisation de ce mouvement complexe, il est vrai qu’aujourd’hui les forces vitales de la société iranienne font tout pour aller vers un avenir meilleur et se débarrasser de ce régime. Personne ne semble chercher une garantie dans l’action qu’il mène, puisque chaque action individuelle peut finir dans le sang, mais on a parfois l’impression qu’une cause supérieure les anime, une cause qui dépasserait les destins individuels et qui prendrait la forme d’une société idéale utopique même si tout le monde insiste pour dire qu’il ne veut qu’une vie quotidienne sans histoire et harmonieuse.

Quoi qu’il en soit, la flamme de la révolution est restée vivace depuis presque trois mois et tous les gens interviennent dans la sauvegarde et le renforcement de cette lumière : entre les cris de protestation quasi-quotidiens qui s’élèvent des universités, des lycées et même des écoles, parmi une jeunesse qui, malgré tant d’arrestations et de répression n’arrête pas de réclamer ses propres revendications mais aussi de faire écho aux protestations de toute la société, et les rassemblements et manifestations ponctuels dans les quartiers qui se relaient toute la nuit et qui, des fois, se rejoignent et qui se terminent dans des feux de joie animés par les slogans de renversement de la totalité de ce régime oppresseur … la lutte continue et le mouvement s’étend.

Ce parcours a forcément ses moments forts et ses moments faibles et il faut bien pouvoir les gérer pour qu’il ne s’essouffle pas, qu’il ne tourne pas en guerre d’usure avec la machine de répression étatique qui est là, payée et nourrie pour ces moments; même si trois mois de lutte incessante a montré les faiblesses, les points de décomposition de cet appareil, nous ne devons pas oublier que nous avons affaire à un État et qu’il possède des ressources illimitées donc il serait vain de penser le défaire sur le plan militaire. La preuve c’est la demande que vient de formuler la République islamique auprès de ses alliés russes pour qu’ils interviennent dans la répression du mouvement. Il est indéniable que la Russie depuis l’époque soviétique, depuis Makhno et Cronstadt, et puis les pays de l’Est et plus récemment en Syrie a maintes fois démontré sa capacité de répression. Surtout que récemment la République islamique est devenue partenaire et partie prenante dans la guerre avec l’Ukraine et qui ne cesse de s’enorgueillir de ses industries militaires, ses drones et ses missiles. L’Iran, par la force des choses et notamment les sanctions de toute sorte, a développé une capacité remarquable de “Reverse Engineering” qui le rend capable de fabriquer des engins militaires sophistiqués à condition que les Américains aient eu la gentillesse, auparavant, de leur balancer quelques uns sur la figure ! L’Iran depuis des dizaines d’années, a fait travailler ses meilleurs ingénieurs sur de tel projet et a démontré une certaine efficacité dans la guerre d’Ukraine, même si les petits moteurs d’engins qui équipent leur drone font tellement de bruit que les forces ukrainiennes, l’élément de surprise passé, arrivent assez facilement à les détecter et les cibler. l’Iran qui, apparemment a vendu quelque 4500 drones à la Russie et aussi un nombre inconnu de missiles, a aujourd’hui besoin de l’expertise russo-soviétique de renseignement et de contre-espionnage pour rétablir la chape de plomb adorée dans les deux contrés. Pour ce qui est de la sécurité informatique, c’est la Chine, avec son plan d’un internet “national”, qui est l’allié privilégié de la RI.

 

Stratégie de la peur et son renversement

-Une des stratégies utilisée en dernier recours par les forces de sécurité du régime c’est ce qu’ils appellent Al-Nasro-men-al-ra’ab (Victoire par la frayeur). Ils ne cessent de fomenter des manigances qui sont censées faire peur à la population. On avait vu les cortèges d’engins militaires et de véhicules blindés avec sur chacun, un Pasdar sorti du toit derrière sa mitrailleuse, faire des tours dans la ville sans destination particulière.

Déjà, à Ispahan, il y a quelques années et depuis, de temps à autre, devant la résistance des femmes à porter le voile, ils avaient balancé de l’acide aux visages des femmes qui ne le portaient pas correctement.

En ce moment, face à un mouvement étudiant sans précédent, ils n’ont rien trouvé de mieux à faire que d’empoisonner les étudiants pour les tenir éloignés des protestations dans les jours déterminants à venir. Ainsi au sein de 4 universités importantes, les étudiants sont intoxiqués à grande échelle après avoir mangé à la cantine. Rien qu’à l’Université de Téhéran, il y a eu plus de 160 étudiants malades avant que la nouvelle ne s’ébruite et les autres soient avertis.

Et pourtant, cette stratégie de la peur, de façon tout à fait spontanée, est en train de se répandre dans le propre camp de la République Islamique:

-Les signataires de la fameuse lettre ouverte des 210 parlementaires qui avaient réclamé la peine de mort pour les jeunes arrêtés pendant ces événements ont, un par un, démenti avoir signé cette lettre et en fait ils sont revenus sur leur signature.

-Il est notoire qu’à part le patron des Pasdarans, M. Salami qui tous les trois ou quatre jours a la lourde tâche de défendre le régime et de se réjouir des victoires obtenues contre les “contestataires manipulés par les forces occidentales”, ce qui par ailleurs est très risible et même comique, tous les autres commandants des Pasdarans se sont faufilés dans leur trou de souris et n’ouvrent plus leur bouche. Personne n’entend ces jours-ci M. Mohsen Rezaï, M. Rahim Safavi, M. Aziz jafari … pourtant habituellement si bavards et prolixes, parler des “troubles” comme ils aiment bien nommer la vague de protestation. Même les membres du premier cercle autour de M. Khamenei gardent le silence; Et même on entend par ci par là, surtout dans les provinces, les Mollas commencer à critiquer la façon dont le pays est dirigé.

Un régime qui, depuis l’arrivée du Virus Corona nous a raconté des histoires fantaisistes les plus folles, -malheureusement avec des conséquences désastreuses- qui a d’abord prétendu qu’il ne comporte aucun risque, puis a interdit l’arrivée des vaccins en soupçonnant qu’il est fabriqué par les occidentaux “pour tuer les iraniens”, puis en affirmant haut et fort que Corona n’a aucune force devant le pouvoir de l’islam et que rien ne peut résister à l’islam…de sorte qu’ils avaient interdit le port du masque dans les mosquées et ils allaient jusqu’à lécher les autels et les tombeaux religieux pour démontrer leur confiance en le pouvoir de l’islam, ou quand le nombre de morts a démontré l’impuissance de leur croyance face à l’épidémie ils ont prétendu que la médecine islamique du bon docteur-Ayatollah Tabrizian qui prescrivait de s’introduire par derrière un coton imbibé de l’huile de Violette est efficace et puis enfin après avoir interdit la livraison des vaccins américains et anglais se sont mis à créer leur propre vaccin qui en fait n’était qu’un prétexte pour allouer un milliard de dollars au “Siège exécutif du commandement de l’imam” et à l’armée des Pasdarans pour qu’ils fabriquent eux-mêmes ce vaccin … qui n’était autre que les vaccins importés de la Chine et de la Russie sur lesquels ils collaient leur propre étiquettes en persan …

(Oui, nous avons un régime malicieux qui, si ce n’est le nombre de morts accumulés, peut fournir l’occasion d’une franche rigolade entre amis.)

Un tel régime, qui a tant dénigré le port du masque est devenu, aujourd’hui, par peur de la population très assidu dans l’observation de cette mesure d’hygiène. On a vu à l’occasion du dernier discours télévisuel du guide suprême devant une parterre de Bassiji, qu’hommes et femmes, toutes et tous sans exception, portaient leur masque pour ne pas être reconnus! D’un seul coup le Corona a pris une importance jamais égalée.

-C’est bien la première fois qu’on peut rencontrer des Mollas du régime – si on arrive à les rencontrer, puisqu’ ils ne se montrent plus dans l’espace public- on verra qu’ils portent, eux aussi, de grands masques pour ne pas être reconnus.

-Le plus risible ce sont les photos que les Bassijis affichent maintenant sur leur compte de réseaux sociaux (Twitter, Instagram et autres Facebook). Les photos des filles et des garçons pro-régimes ou membres de leur armée cybersécurité, entièrement couverte par leur masque et aussi des lunettes de soleil de sorte qu’il est impossible de distinguer leur visage.

En somme, ils sont devenus les champions de la lutte contre l’épidémie, mais l’épidémie à laquelle, cette fois-ci, ils ont affaire, ce n’est pas du genre à s’arrêter devant un masque … ni d’ailleurs devant une balle !

Toumaj

-Il y a quelques jours, c’était aussi l’anniversaire de Toumaj Salehi, un rappeur qui a percé par la force lyrique de ses poèmes qui sont devenus parfois des slogans du soulèvement, surtout parmi les jeunes.

Quelques mois avant le commencement du soulèvement il avait chanté une chanson prémonitoire dans laquelle il disait aux responsables et agents de la RI de se procurer un trou de souris pour se cacher car la fin est proche. Les agents du régime ont pu l’arrêter après une traque de plus de deux mois.

Il est aujourd’hui en prison, sous la torture en attente des délibérations du pouvoir judiciaire. Sa condamnation à une peine très lourde est plus que probable.

-Les luttes des peuples Kurdes et Baloutch continuent de plus belle. Les Baloutch en particulier sont dans la rue tous les vendredis. C’est un rituel qui s’est mis en place : Après la prière de vendredi, les hommes commencent à former des cortèges qui est immédiatement rejoint par les femmes ; et ceci dans toutes les villes importantes de la province, de Zahedan à Saravan en passant par Khash, Tchahbahar, Zahak, Iranshahr …

Un des slogans : “Nous ne voulons pas d’un État tueur d’enfants !”

Le régime, comme d’habitude, a utilisé le seul langage qu’il connaît c’est à dire la violence brute.

 

Instantanés de luttes:

-Les pancartes suspendues des ponts pour piétons sur les grandes autoroutes ou les artères à grande vitesse…

-les slogans et les tags sur les murs,

Les petits flyers qu’on balance par les hauteurs ou qu’on place la nuit sous les essuies glaces des voitures.

-les slogans sur les billets de banque

-Les cocktails Molotov ou les troue-routes préparés à la maison pour les altercation avec les forces de l’ordre

-Déchirer ensemble tout en filmant la photo du guide des livres scolaires

-Haranguer l’enseignant ou le prof qui veut continuer son cours comme si de rien n’était.

-Produire des autocollants contre le régime et les fixer sur le mobilier urbain.

-Les jeunes filles qui marchent seule, en contre sens au milieu les embouteillages tenant haut une pancarte dénonçant le régime.

-Des slogans la nuit des fenêtres ou sur les toits.

Un nouveau slogan s’est répandu : “Si nous résistons nous allons être victorieux, si nous reculons on va être la Corée du Nord”.

Les milliers de créations artistiques, danse, performance théâtrale, dessin, collage, calligraphie, poésie, chanson, musiques, clips, dessins animés,.. qui pouvait imaginer ce peuple aussi talentueux!

Les gens inventent tous les jours de nouvelles façons de lutter et de s’exprimer contre ce pouvoir oppresseur.

Quoi qu’il arrive à la suite de ce soulèvement, la page semble définitivement tournée.

Habib

5/12/2022

 

Nouvelles du 23 au 28 Novembre 2022

Le bruit de fond des manifestations et protestations dans toutes les grandes villes de l’Iran continue.

Suite à la publication de l’appel à la grève par l’union des camionneurs et les conducteurs de camions, les travailleurs de plusieurs usines industrielles et automobiles ont aussi cessé de travailler et se sont mis en grève. Cet appel invite à un arrêt de travail de 10 jours.

La grève des camionneurs qui était relancée samedi 26 novembre s’est poursuivie dimanche et elle est bien partie pour être quasiment généralisée. On voyait de temps en temps des conducteurs de camion et des chauffeurs disant qu’ils étaient en grève et qui appelaient leur collègues à faire de même, mais c’était en général sans succès et restait assez limitée. La grève de cette semaine semble pourtant réellement avoir pris. Elle est suivie sur plusieurs axes routiers importants.

Dimanche matin à 7h30 un conducteur de camion a pris une vidéo montrant la route qu’il est en train de parcourir à toute vitesse vers le nord du pays. Cette route qui normalement est bondée de camions et de véhicules était entièrement vide et déserté ; il disait que ça fait plus d’une heure qu’il est en train de conduire, ni devant ni derrière lui il n’y a ni voiture ni camion et il s’inquiétait réellement de ce qui allait lui arriver car il n’avait pas suivi le mot d’ordre de la grève.

Un autre conducteur disait que l’État leur avait envoyé un message précisant que dans les ports les marchandises sont arrivées et il faut qu’ils aillent les chercher; ils avaient reçu également des bons de réduction pour du gasoil supplémentaire. Il répondait en direct que “vous n’avez qu’à envoyer vos footballeurs et vos parlementaires chercher ces marchandises, nous, on n’y va pas!

D’un autre côté le domino des grèves ouvrières qui avaient commencé au cours du dernier mois dans l’industrie pétrolière ont atteint l’industrie sidérurgique et d’autres secteurs notamment l’industrie automobile…

Voici quelques exemples des mouvements et grèves dans les usines en Iran durant la semaine dernière. Il semblerait que ces grèves soient beaucoup plus importantes que ce qu’en général apparaissent dans les médias. N’oublions pas que le régime fait tout pour empêcher ces grèves (menaces, arrestations, chantages…) ou à la rigueur d’empêcher les nouvelles et des informations les concernant de sortir dans les médias. Commençons par une grève des ouvrières :

-le mardi 24 novembre, les travailleurs de la “Cruz Auto Parts Company”, premier producteur des pièces et fournitures pour l’industrie automobile, (créée en 1983) avec plus de 12000 ouvriers, dont 70% de femmes, se sont à nouveau mis en grève et ont défilé dans les locaux de l’usine pour protester contre l’indifférence de l’employeur à leurs revendications. Déjà une première fois, le 19 Novembre 2022, ils étaient mis en grève pendant trois jours réclamant une augmentation de salaire, l’arrêt immédiat des retards de paiement des salaires et la modification [et le respect] des tours dans l’attribution des heures supplémentaires.

Les conditions de travail des ces ouvrières sont extrêmement difficiles, comparable à de l’esclavage moderne : 10 heures de travail debout par jour et l’interdiction d’utiliser le téléphone pendant ce temps; L’employeur n’embauche que des femmes célibataires et celles qui se marient sont passibles de licenciement.

Dans le texte qui annonce ce mouvement on peut lire: “Sous le règne du régime islamique, non seulement les femmes n’ont aucune visibilité et existence politique, leur existence sociale a été réduite à une machine de reproduction sociale … au nom de l’honneur du père, du frère et des partenaires; ces conditions font également d’elles une force de travail bon marché et obéissante renforçant les rangs des ouvriers précaires.”

Ce n’est pas pour rien que leur voix retentit, la plus forte dans les cortèges et les protestations.

Le même jour, les grèves ont commencé dans l’usine “Bahman motors” de Ghazvin, un constructeur de véhicules lourds, mais aussi sous-traitant et constructeur de pièces d’automobile pour “Iran-Khodrow” (principal producteur d’automobiles en Iran). Ce groupe industriel a été créé en 1952 sous le nom de “Khalij Co.” en construisant des petits véhicules à trois roues. En 1971 suite à un accord avec Mazda, le constructeur japonais, change de nom pour s’appeler “Mazda Iran”. En 1993, la société entre en bourse fondée en 1968 sous le Shah. (Il est à noter que dans l’intervalle 1979-1989 la bourse de Téhéran était restée inactive par la domination quasi exclusive du secteur public et le manque de demande de capitaux. C’est seulement en 1989 et les privatisations d’entreprises nationales qu’on assiste à une revitalisation de la bourse.)

En 1999, le Holding du groupe Bahman est créé en continuant de travailler avec Mazda et avec Mitsubishi depuis 2005 en mettant en place une chaîne de montage; ils produisent aujourd’hui des minibus, des camionnettes, des vans, des ambulances… Depuis 2009, ils sont aussi présents dans l’industrie pétrolière, du gaz et de la pétrochimie (production de goudron). Le principal actionnaire et propriétaire de cette société holding est depuis 2016 le groupé “Cruise”. L’entreprise compte plus de 4000 ouvriers.

Depuis le 22 novembre les ouvriers de l’unité de Ghazvin sont en grève pour des revendications touchant les conditions de travail, la classification des emplois, l’augmentation et l’unification des salaires dans tout le groupe et dans toutes les unités de production, contre l’obligation d’effectuer des heures supplémentaires et de travailler les jours de congés hebdomadaires, la prise en compte de la pénibilité du travail.

Selon les ouvriers, avant l’arrivée du nouveau propriétaire en 2016, la pénibilité du travail était prise en compte pour les ouvriers et leur permettait de partir à la retraite avec 20 ans d’expérience professionnelle. Mais ces dernières années, la pénibilité a été retirée des dispositions légales et les travailleurs doivent travailler pendant 30 ans pour prendre leur retraite. Alors que leur travail est légalement considéré comme l’un des emplois difficiles et comportant des risques pour la santé.

Le principal slogan entendu est “Nous exigeons nos droits, nous ne voulons plus de promesses!”

Apparemment dans un premier temps la direction a fait un geste en leur versant un petit pécule, suite auquel on pouvait entendre parmi les slogans: “Nous ne voulons pas de chantage. Nous exigeons nos droits!”

– Les travailleurs des entreprises industrielles de siderurgie d’Ispahan (Zob-Ahn_Esfahan), Sarma-Afrin_Alvand (réfrigération d’Alvand), Constructeur d’auto Moratab (Khodrosazi_Mortab), Constructeur d’auto Seif (Seif Khodro), les appareils ménagers Pars à Ghazvin (Lovazm_Khangi_Pars_Ghazvin) se sont mis en grève dans la continuité de la grève des commerçants et ouvriers de différentes provinces à partir du novembre.

un mot sur chacune de ces grèves :

-A l’usine de sidérurgie d’Ispahan, les employés ont entamé leur grève aujourd’hui en arrêtant le travail. Zob Ahan est une société mère de quatre mille employés, qui travaille dans la production d’acier de construction et de rails. A un moment les forces de l’ordre ont fermé la porte d’entrée de l’usine la nuit pour empêcher les ouvriers d’entrer sur le site. Mais ils ont pu finalement entrer et par la suite, se sont les ouvriers qui ont condamné les portes pour ne pas laisser entrer les agents du régime.

-Grève à l’entreprise Sarma Afarin (réfrigération et climatisation): Les travailleurs de la ville industrielle de Sarma Afarin à Alborz ont également rejoint la grève nationale ce 26 novembre dans la ville industrielle d’Alvand. Les travailleurs de cette entreprise ont scandé le slogan “Criez travailleurs, criez pour vos droits” pour protester contre le bas niveau des salaires et se sont rassemblés dans les locaux de l’usine. Sarma Afarin est une entreprise du secteur de la climatisation qui a démarré son activité il y a un demi-siècle.

-Grève au complexe sidérurgique de Bafaq: Les soudeurs du complexe sidérurgique de Bafaq (Folad Abuyi) se sont également mis en grève pour protester contre le non-respect des mesures de sécurité. L’élément déclencheur était une explosion au sein du complexe qui a entraîné la mort de deux de leurs collègues: la veille, le vendredi 25 novembre, une fuite de gaz et l’explosion d’une capsule dans le projet de fer spongieux de cette entreprise avait causé la mort de deux ouvriers et des blessures graves sur un autre ouvrier.

-Grève à l’usine Seif Khodro: Les ouvriers de l’usine Saif Khodro se sont mis en grève le samedi 25 nov. “Saif Khodro Company” est l’une des sociétés satellites de “Frico Holding”. Cette société est également propriétaire de l’entreprise industrielle de production Moratab, qui s’est jointe à la grève depuis la semaine dernière.

-Les ouvriers de l’entreprise industrielle Moratab se sont mis en grève pour protester contre le non-paiement des salaires depuis 9 mois et ont organisé un rassemblement devant l’entreprise. Selon le rapport de sources “Iranwire”, les travailleurs de “Moratab Automobile Company” ont cessé de travailler et se sont rassemblés devant l’entrée de l’entreprise depuis le 19 novembre, pour protester contre leur “paiement des salaires et traitements” qui a été retardé pendant des mois.

Moratab Automobile Company a opéré sous le nom de marque “Land Rover Factories” jusqu’à la révolution de 1979. “Ahrar Institute” est le principal actionnaire de la société depuis 1996 avec 61,1% des actions. En 2001, cette société a signé un contrat avec la société sud-coréenne Sangyong pour produire la voiture “Muso”. En 2016, les parts de Moratab Group ont été rachetées par Seif Khodro, après deux ans de fermeture.

-En 1985, la Société Nirou Moharekeh (force motrice) a été créée avec l’investissement de l’Iran Industries Development and Modernization Organization, sous le nom de Nirou Moharekeh et la Compagnie de construction de motocycles de l’Iran, dans le but de produire des moteurs de moto à essence et à engrenages. Actuellement, l’activité principale de l’entreprise est la conception, l’assemblage et la production de boîtes de vitesses de la famille Peugeot et de pièces de huit autres types de boîtes de vitesses, qui sont principalement utilisées dans les produits Iran Khodro. Depuis jeudi 24 novembre, les travailleurs de la société, située dans la ville industrielle d’Alborz à Ghazvin, se sont mis en grève et se sont rassemblés pour protester contre le manque de traitement de leurs problèmes. Il s’agit de la septième grève liée aux constructeurs automobiles.

-Aujourd’hui, 28 novembre, ça fait trois jours que la grève des camionneurs et des chauffeurs routiers a commencé. Les vidéos et prises de vue sur la grève que les camionneurs et chauffeurs ont diffusées sur les réseaux sociaux montrent que durant ces trois jours, la grève est suivie dans les villes de Ghazvin, région de Shahpur à Ispahan, sur l’axe routier Bouméhen vers Téhéran, Kermanshah et Bandar Abbas, Kashan, vers la frontière Bashmaq de Marivan, Marand et environs, Shiraz et la mine d’or Mouté d’Ispahan.

Dans le passé, chaque fois qu’il y avait un murmure de grève parmi les conducteurs, le gouvernement précédent tentait de diviser les grévistes en promettant un supplément de carburant. Maintenant, dans un message “Texto” aux camionneurs et aux chauffeurs, il leur a promis du carburant supplémentaire, mais cela n’a pas pu arrêter la grève. Il convient de noter que le problème des camionneurs et des chauffeurs n’est pas seulement le manque de quota de carburant, mais d’autres problèmes tels que la commission de fret élevée perçue par les intermédiaires souvent “désignés” par le pouvoir, le problème dite de “la tonne au kilomètre” (il s’agit d’une réglementation complexe pour calculer les salaires perçus par les chauffeurs) et l’augmentation du prix des pièces de rechange et des pneus affectent également leurs conditions de vie.

-Parallèlement aux chauffeurs de camions, les chauffeurs des bus (transport Intercités) aussi ont entamé leur grève. Le 22 novembre dans le terminal Akbar-Abad de Téhéran des centaines de personnes ont marché dans la rue et manifesté avec ces slogans:

Puis ils sont revenus dans la grande halle du terminal et ont continué leur slogan qui s’amplifie dans cet espace: Soutien! soutien! Ô Conducteur digne, soutien soutien!

-A mort dictateur !

Après quelques heures l’unité spéciale des forces de l’ordre (yegane vijeh) est intervenue et a arrêté nombre de personnes.

À cet ensemble de grèves, il convient d’ajouter le cri de protestation de retraités, des enseignants et des étudiants :

-Un groupe de retraités s’est réuni devant le bureau de la Caisse de retraite de la rue Mirdamad à Téhéran le 26 novembre et a exigé une augmentation de leur pension mensuelle. Les retraités présents à ce rassemblement syndical disent : “Pourquoi, malgré le fait que l’augmentation de salaire approuvée par le Conseil supérieur du travail pour les retraités des autres secteurs est de 38 %, notre pension mensuelle n’a augmenté que de dix pour cent.” Nous exigeons une augmentation légale de nos salaires mensuels.”

Selon eux, c’est un droit des retraités d’avoir une pension décente en rapport avec le taux d’inflation. Ces retraités protestent également contre d’autres insuffisances telles que : “leur traitement médical, l’assurance complémentaire et autres services sociaux” et ils attendent de la direction de gestion des fonds qu’ils agissent pour répondre à ces revendications..

-210 enseignants et professeurs d’université ont écrit une lettre aux responsables politiques réclamant la libération des étudiants arrêtés et emprisonnés.

-Le 26 novembre les étudiants de l’université industrielle d’Ispahan ont fait une manifestation qu’on pourrait qualifier de monstre en proportion du monde universitaire. Des milliers de personnes sont sortis de leur université avec les slogans hostiles au régime. Ce, malgré toutes les menaces qu’ils subissent et les arrestations dont ils font l’objet.

-Les étudiants de l’université Kharazmi de Karaj ont de leur côté continué leur grève et manifesté en lançant “On n’a pas subi des morts pour nous réconcilier maintenant et soutenir ce guide assassin!”

La lutte des peuples Baloutch et Kurdes

Ce vendredi 25 novembre à Zahedan, il y a eu encore une grande manifestation qui a été suivie cette fois-ci par une répression terrible. Il y a eu également des manifestations dans les villes Tchahbahar, Khash, Saravan, Iranshahr et Taftan.

Il faut constater que ce vendredi, on a vu pour la première fois une manifestation monstre telle que l’insurrection de 79 nous en avait habituée à Zahedan (700.000h; capitale de la province de Sistan-et-Baloutchistan,) des dizaines de milliers de personnes avec des slogans hostiles au régime iranien ont marché dans les rues et ont démontré leur solidarité avec les villes kurdes qui subissent depuis une dizaine de jours une répression des plus dures. Les slogans sont devenus de plus en plus radicaux : aujourd’hui on a entendu “les Kurdes et les Baloutch sont des frères et assoiffés du sang du guide !”

Les forces de l’ordre ont réagi en ouvrant le feu sur les manifestants en tuant au minimum 4 personnes et en blessant des dizaines d’autres. À cet instant nous ne connaissons pas le nombre exact de victimes.

Les forces de l’ordre n’ont pas hésité à arrêter les ambulances qui transportaient les blessés pour procéder à l’arrestation des blessés.

La présence des femmes dans la manifestation était remarquable. Elles ont rejoint les manifestants après la prière de vendredi.

La RI traite les deux peuples kurde et Baloutch avec une violence décuplée, elle ne tergiverse pas dans la montée de celle-ci et ne respecte aucune proportionnalité ; tout de suite elle use des armes de guerre, des fusils mitraillettes, et des munitions létales. On a mentionné l’utilisation de mitrailleuses lourdes appelées Doushka de construction russe.

-À Bouchehr, au sud du pays, les familles des tués empêchent les forces de l’ordre de s’accaparer le corps des victimes. Elles se débrouillent pour les récupérer et les préserver dans la glace pour les enterrer à l’occasion d’une cérémonie qui, elle aussi, se transformerait en une manifestation contre le régime. Hier soir, un de ces enterrements (pour Shomal khadivar) s’est déroulé à Bouchehr et a été l’occasion d’un rassemblement de contestation.

L’état d’esprit des forces de l’ordre

-Un signe important qui montre la réalité des pertes de soutien de la République islamique et des hésitations au sein des forces de l’ordre ainsi qu’auprès de la population qui d’habitude soutenait le guide est que lui-même a dû s’y coller le 26 novembre devant une assemblée de bassiji. Il a commencé son discours avec une phrase qui en dit long sur son état d’esprit. Il faut savoir que derrière son fauteuil, de là où il prononce ses discours, il y a toujours un verset de Coran, écrit avec une très belle calligraphie. Il est de notoriété public que c’est lui-même qui le choisit minutieusement à l’occasion de chaque discours et qui en général donne le contenu du discours. On peut le considérer comme une sorte de titre du discours.

Hier le 26 novembre ce verset ainsi que celui cité dans ce discours faisaient référence à celui révélé à Mohamed, le prophète, après la défaite de la guerre d’Ohod et qui dit “Ne vous découragez pas et ne vous affligez pas, et vous serez plus fort si vous êtes croyants.” (Verset 139 du sourate Alé-Omran).

Les bassiji dans la salle lui répondaient en s’appropriant un des slogans des protestations “N’ayez pas peur! N’ayez pas peur! On est tous ensemble !

Si on avait besoin d’une preuve démontrant que la peur a changé de camp, on est bien servi !

-L’enregistrement sonore de la réunion de Bassij du 15 novembre 2022:

Un groupe de hacker nommé black Reward qui avait déjà publié des documents sur le nucléaire iranien a de nouveau frappé en publiant un enregistrement sonore d’une réunion des bassij qui se déroulait entre le Patron des forces de Basij, Ghasem Ghoreyshi avec les représentants des médias de Bassij, des Pasdarans et autres agences gouvernementales. Cet enregistrement qui dure plus de 2h30, nous montre l’état d’esprit des forces de l’ordre face au soulèvement actuel. Voici quelques points évoqués :

1- ils avouent clairement que les grèves des commerçants dans les journées du 15, 16 et 17 novembre étaient beaucoup plus suivies que ce qui a été annoncées par les médias. D’après leur estimation, entre 70 et 100 % du pays était en grève et ont participé aux protestations. Cette grève et fermeture de magasins ont été suivies dans 24 provinces du pays.

2-ils ont avoué qu’ils n’ont pas pu “ramasser” [maîtriser] les protestations et que les forces de l’ordre perdent de plus en plus leur moral; d’ailleurs c’est la raison pour laquelle Khamenei à plusieurs reprises leur avait demandés de ne pas désespérer et de continuer à croire dans leur mission.

3- Les conclusions des services de renseignement démontrent une défaite cuisante sur le plan des médias et que le personnel de NAJA (LES FORCES DE L’ORDRE DE LA RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE) s’est affaibli. Une des personnes présentes a précisé que : “comment voulez-vous qu’avec 7 ou 8 millions de tomans [équivalent de 230$] de salaire nous ne perdions pas notre motivation? Pour des gens qui sont 24 heures sur 24 dans les rues, ce n’est pas suffisant. Le guide a bien précisé qu’il faut soutenir la motivation des forces armées et faire attention à leur conditions de vie donc Commandant, il faut faire quelque chose”.

4-Aussi dans leur rapport, ils ont évoqué la multiplicité des actes contre les religieux, qui sont victimes d’insultes et des “vols de turban” par les jeunes. Ils ont également parlé des attaques contre les sièges de bassiji et les bureaux des parlementaires dans les provinces sur lesquels on lance régulièrement des cocktails Molotov.

La politique et le foot

Pratiquement au même moment où les forces de l’ordre étaient en train de réprimer le peuple Baloutch et le peuple Kurde, pendant la coupe du monde de football, l’équipe iranienne a gagné son deuxième match devant le Pays de Galles.

Conformément à la réaction hostile de la population au moment de la défaite de l’Iran dans son premier match, cette fois-ci, les gens ne sont pas sortis de leur maison pour fêter dans la rue cette victoire. Les grands axes de grandes villes comme Téhéran, Mashhad et autres … sont restés désespérément vides et on a vu seulement les agents du régime brandir des drapeaux et faire du bruit soi-disant pour fêter la victoire devant les caméras de la télé publique. C’était un spectacle de joie populaire tellement en carton-pâte que ça en devient affligeant.

Parfois les forces de l’ordre habillées en Robocop ne se sont même pas données la peine de se changer en civil et ils faisaient soi-disant la fête avec un drapeau dans une main et le gourdin dans l’autre !

On a vu même des religieux enturbannés encerclés de leurs fidèles en liesse, distribuer des sucreries justifiant du coup le sobriquet de “Team Molla” utilisé par la population.

A Téhéran, dans le quartier de Sadeghieh les fêtards/forces de l’ordre étaient accueillis par les slogans “indigne ! indigne !” des protestataires.

Dans ce domaine non plus, la République islamique n’a rien inventé; c’est une pratique courante des régimes autoritaires d’utiliser le football comme moyen de propagande ou de diversion.

-À l’occasion de la victoire de l’équipe iranienne dans le mondial de foot, le patron du pouvoir judiciaire a déclaré qu’ils vont procéder à l’examen des dossiers des personnes arrêtées pour des motifs mineurs en vue de leur libération.

Deux jours plus tard, on a entendu que “pour fêter la victoire de l’équipe de l’Iran au mondial du foot”, ils avaient libéré plus de 600 personnes arrêtées à l’occasion du soulèvement. La RI a mis beaucoup de moyens dans sa propagande pour détourner l’attention des contestation en cours. Ils n’ont pas hésité à envoyer au Qatar des dizaines de personnes, membres de Bassij ou même parlementaires ou d’autres responsables politiques. Qatar de son côté à entièrement collaboré dans la répression des spectateurs opposants au régime. Les documents produits par le groupe hacker Black Reward ont démontré que c’était un plan préparé de longue date pour profiter de cette occasion. Apparemment ils ont dû dépenser quelque 4000 dollars par personne pour les envoyer brandir le drapeau iranien et comme on l’a déjà dit la police qatarienne a collaboré de manière active avec les forces de sécurité iranienne. La rumeur dit que cette collaboration a été obtenue contre certaines privilèges accordés au Qatar dans l’exploitation des plateformes pétrolier Pars-Sud.

Si jamais à l’occasion du prochain match avec les États-Unis l’Iran arrive à les battre, ils vont tout faire pour créer une diversion.

Il est intéressant de noter que parmi les spectateurs du Camp iranien ont pouvait distinguer non seulement les responsables de bassij, des parlementaires et des responsables des forces de l’ordre déguisées en supporters avec sur leurs joues les couleurs du drapeau iranien et portant des drapeaux et soufflant dans leur trompette, mais aussi des femmes sans hijab! En particulier une dame blonde a attirée l’attention du public car elle était présente et identifiée au moment de la cérémonie pour “le martyr de Soleimani.”

Quand il s’agit de propagande politique, la République islamique, non seulement peut soutenir l’accès des femmes dans les stades (ce qui est tout à fait interdit en Iran) mais encore elle est capable de s’asseoir sur ses principes sur le hijab. Même Khamenei dans son discours, a soutenu l’équipe de l’Iran et les footballeurs qui restent fidèle à la cause de l’Islam !!

«Même si les mouvements semblent « spontanés », presque des happenings qui surgissent brusquement, ils s’appuient néanmoins sur des formes de solidarité qui échappent à l’État-Parti, lequel se défie de toute organisation alternative : les ouvriers sont collègues, ils partagent des chambrées à douze, et se regroupent souvent en fonction de leur localité d’origine. Le maillage est certes lâche, pas bien coordonné, et sans leaders apparents, mais ces petites solidarités se superposent et peuvent très vite se consolider quand les ouvriers sont confrontés à des injustices patentes et qu’ils font l’expérience commune de la lutte. »

 

le 28/11/2022

« A Ispahan , des militants rapportent que des camionneurs du quartier de Shapour ont lancé une grève. Des camionneurs de Bandar Abbas, dans le sud de l’Iran, ont été vus poursuivre leur grève pour une deuxième journée consécutive…

Des camionneurs d’autres régions du pays ont rejoint les grèves.

Dans la province d’Ispahan, les camionneurs de la mine d’or de Mooteh ont cessé de travailler et se sont mis en grève. À Marand, dans le nord-ouest de l’Iran, des camionneurs ont également rejoint les grèves. À Kashan, dans le centre de l’Iran, les habitants signalent que des routes autrement encombrées de camions sont vides depuis le matin. Dans la province de Téhéran, la route Téhéran-Bumehen était vide. Dans la province de Qazvin, les camionneurs ont refusé d’aller travailler. Et à Karaj, les camionneurs ont cessé de travailler et ont organisé des rassemblements de protestation…

Dans d’autres informations parues samedi, des informations indiquent qu’environ 4 000 travailleurs de la célèbre aciérie d’Ispahan ont débrayé et se sont mis en grève. Des grèves ont également été signalées par des travailleurs à Téhéran et à Alvand (province de Qazvin). »

https://english.mojahedin.org/news/live-report-iran-uprising-expands-to-more-cities-as-college-students-continue-protests/

Nouvelles du 25 novembre

Le pouvoir iranien vient de procéder à une nouvelle nomination: le gouverneur de Téhéran a été limogé et se trouve remplacé par un ancien général de l’armée des Pasdarans de la révolution. Ceci est un signe fort de l’essor du mouvement de protestation qui oblige le régime à prendre des mesures encore plus radicales.

Beaucoup d’observateurs ont comparé cette nomination à celle

du Colonel Général Azhari le 5 novembre 1978, quelques mois avant

l’insurrection de février 79 et le renversement du Shah. A l’époque, Azhari,

face aux manifestations monstres qui prenaient place à Téhéran avait dit dans

un discours que sur 4 millions et demi d’habitants de Téhéran on a eu des

manifestations qui au maximum rassemblaient quelques 200000 personnes; et il a

commencé son petit calcul de pourcentage pour minimiser la chose et dire que le

mouvement ne pouvait pas aller plus loin; c’est très exactement ce que

M.Hadad-Adel, père de la belle-fille de Khamenei et à ce titre membre très

influent de la RI vient de déclarer. La biographie de ce monsieur peut, à elle

seule, transcrire la hiérarchie du pouvoir en Iran et ce qu’un peu

d’opportunisme peut réaliser dans une telle structure : ancien président du

Parlement, ancien président et membre actuel de l’Assemblée consultative

islamique, mais aussi directeur de l’académie de langue et de littérature

persane, membre du haut conseil à la révolution culturelle et membre du Conseil

de discernement, membre du conseil d’administration des dizaines d’organismes

et de fondations différents… Notons au passage qu’un tel cheminement n’a rien

d’exceptionnel sous la République islamique ; des gens qui faisaient partie des

soldats de la révolution ou même carrément des voyous qui se sont mis au

service du clergé sont aujourd’hui à la tête de toutes les organismes

politiques mais aussi économiques et militaires du pouvoir) ;

Donc Haddad -Adel a de son côté, a estimé que le nombre des

manifestants ne dépassait jamais les 200000 et qu’il ne fallait pas s’inquiéter

plus que ça !

On se demande d’où ils sortent précisément ce chiffre ?! Ça doit être une sorte de seuil d’alerte enseignée dans les écoles militaires de jadis et … coranique d’aujourd’hui !

Ces déclarations des responsables du régime, surtout la

nomination d’un chef militaire à Téhéran sont signe d’un durcissement de leur

politique de répression.

Cet élément est lié au fait que, de plus en plus, les

soutiens du régime parmi la population sont en train de le lâcher. C’est la

fameuse « couche grise » de la société qui manque encore dans les

manifestations, mais on commence à les apercevoir en train de rejoindre le rang

des contestataires.

A cet égard une déclaration semble digne d’intérêt :

Il s’agit des paroles d’un ancien membre de l’armée des

Pasdarans M. Peykari-Shouchtari Ahmad qui, au moment de la révolution de 79

avait une quinzaine d’années et a participé avec ses 2 frères à la guerre

irano-irakienne; il est aujourd’hui outré par l’attitude du régime et fait

partie de cette vague de mécontentement qu’on entend monter parmi les soutiens

du régime. Ça permet de comprendre la position des “honnêtes gens” de

bonne foi qui ont participé au renversement du régime du Shah et qui

aujourd’hui se trouvent devant un régime impopulaire qui les a trahis.

-On entend de plus en plus des appels envers l’armée pour

qu’elle se mobilise afin de contrecarrer la répression des Pasdarans et des Bassidjis.

Parmi beaucoup de personnes qui comparent la situation

actuelle à l’époque du Shah, l’armée est considérée comme une force patriote,

politiquement neutre, qui est là pour défendre la nation et l’intégrité territoriale

du pays. Sous cette répression féroce qui s’est abattue sur l’Iran en

particulier au Kurdistan et à Baloutchistan, on entend parmi la population des

appels lancés vers l’armée leur demandant d’intervenir pour les défendre.

Voici ce que leur disait hier une mère kurde visiblement à

bout :“Vous avez l’expérience de la guerre, vous avez eu une formation de soldat ; en face de ces gens il n’y a que

des jeunes de 15 et 16 ans, sans arme, sans expérience, qui ne connaissent rien

à la guerre. Ils n’ont que des pierres pour se défendre. C’est votre

responsabilité de les défendre.

Qu’est-ce que vous attendez, mes frères? Vous attendez qu’ils nous suppriment tous ?

L’armée des Pasdarans nous frappe, les bassidjis nous frappent,

l’armée de Hashd-ol- châabi nous frappe, les Fatimiouns nous frappent et notre

armée est là sans rien faire, c’est ça notre douleur.”

– Depuis plusieurs semaines, les politiciens du régime et les

gradés de l’armée des Pasdarans ont intensifié propagande anti-kurde et

anti-Baloutch en les traitant d’indépendantistes aux mains des étrangers ;

Parallèlement aux “agitations” actuelles au Kurdistan et au

Baloutchistan, elle a profité de la situation pour bombarder lundi 21 novembre,

les positions des organisations kurdes qui se trouvent dans le territoire

irakien, notamment le siège de la direction de Kumala (Force de gauche laïque

originaire du Kurdistan, assez puissante) ainsi que l’hôpital et les quartiers

résidentiels du parti démocrate du Kurdistan d’Iran. Durant ces attaques

aériennes, 3 missiles ont été tirés ainsi que des “drones

suicidaires”.

– A ce jour on compte plus de 110 journalistes emprisonnés et

la République islamique cherche à condamner 21 d’entre eux à la peine capitale.

– Avant-hier après-midi (21 nov) l’équipe de football de

l’Iran a fait son entrée dans la compétition du mondial du foot à Qatar et a

subi une lourde défaite face à l’Angleterre.

Le rapport de la République islamique avec ses sportifs de

premier rang, qui ont l’occasion de se montrer sur la scène internationale, est

assez complexe et contradictoire. Ces sportifs qui sont en général pourris et

gâtés par le régime doivent se comporter à l’étranger comme l’expression de la

gloire et de la force de la République islamique. Les responsables des

fédérations différentes sont en général des gens (anciens sportifs ou non) tout

à fait sur la ligne politique du régime et qui, malgré la marque de la pierre

de prière qu’ils ont sur le front (pour dire qu’ils passent des heures entières

à prier !!) n’ont rien à faire avec la religion. Ils doivent se montrer très

pratiquants et absolument sur la ligne du guide pour pouvoir accéder à ces

postes de responsabilité avec tous les avantages qui en découlent.

On a vu, depuis le meurtre de Mahsa et les contestations qu’il

a provoquées voit quelques championnes

iraniennes à l’étranger enlever subrepticement leur hijab à un moment de la

compétition et puis quand elles rentrent (si elles ne se débrouillent pas pour

rester à l’étranger) elles disent qu’elles l’ont un moment oublié. A cet égard,

le cas d’Elnaz Rekabien (Championne du monde en escalade), a fait pas mal de

bruit fin septembre dans les médias ou récemment encore on a vu que l’équipe

féminine de basketball toute entière a enlevé son hijab au moment de la photo

officielle; le responsable de fédération de boxe féminin de son côté s’est

réfugié à l’étranger et n’est plus entré en Iran. Il a dénoncé la façon dont

les champions envoyés à l’étranger sont traités: Ils doivent laisser des

cautions très importantes et s’engager à respecter les critères de la

République islamique; ils sont pendant tout leur voyage suivis et surveillés

par des “accompagnateurs” qui n’ont aucune qualification sportif ou

médicale mais font partie de la police politique. Ils sont gardés à l’écart des

autres équipes nationales et du monde extérieur. En plus, leur famille

se trouve en situation d’otage au cas où leur enfant se montre trop expressif.

Pour revenir au mondial de Qatar, cet événement a introduit à

sa marge quelques incidents et effets qui semblent intéressant d’examiner.

Les joueurs du foot de l’équipe de l’Iran avant le début du

match, au moment de leur présentation sur le terrain, ont refusé de chanter l’hymne

national du pays. Ils sont restés silencieux avec des visages tirés tout le

long de la diffusion de l’hymne iranien. Les médias étrangers ont fait beaucoup

de bruit sur cette marque de protestation tout en montrant des gens, parmi les

spectateurs, qui brandissaient des pancartes hostiles à la RI et des drapeaux

avec l’emblème de la royauté en signe de protestations. Ils ont même lancé des

slogans à la 24e minute du match en hommage au 24 ans de Mahsa. Il est à noter

que ces gens-là étaient essentiellement des supporters du fils du Shah, venus

des États-Unis ou de l’Europe car ils sont les seuls à avoir les moyens de se

déplacer à Qatar et de se payer les billets.

Quand on connaît le parcours médiatique de l’équipe du foot

de l’Iran ces dernières semaines on ne peut s’empêcher d’être étonné de

l’hypocrisie dont les joueurs ont fait preuve ; quelques jours avant cette date,

toute l’équipe était reçue par le Président de la République en personne et

avait courbé l’échine en formulant des messages à l’égard du guide qui ferait

trembler de rage n’importe quel opposant.

Et quelques jours plus tard, ils sont capables de se montrer « en opposition » avec la politique de répression du régime en observant le silence pendant la diffusion de l’hymne national. Si c’est gars ne sont pas champions du monde du foot ils peuvent très certainement concourir pour le championnat de l’hypocrisie !

A leur décharge, il faut préciser qu’ils ont toutes leurs familles en Iran en situation d’otage.

Donc la synthèse pratique de ces deux tendances (la soumission au régime et la solidarité avec le peuple) s’est concrétisée dans le refus de chanter l’hymne national. Ils ont montré de cettefaçon un minimum de solidarité envers les gens qui subissent la répression mais le niveau de la haine à l’intérieur est tel que ce genre de tergiversation n’est plus toléré ; ce qui s’est passé dans le pays à la suite de la défaite de l’équipe était incroyable. C’est peut-être la première fois qu’on voit les gens fêter la défaite de leur équipe nationale ; des Iraniens qui sont en général très footeux et derrière leur équipe nationale, cette fois-ci se sont montrés tout à fait contents et satisfaits de leur défaite ; on a vu même des drapeaux de l’Angleterre tenus par des jeunes montés derrière leur copain sur les motos traversant les rues de Téhéran et d’autres villes. Pour les Iraniens, la défaite de leur équipe nationale est une victoire du camp des protestataires. Ils ont dansé dans la rue à l’occasion de la défaite de leur équipe tout en brandissant le drapeau de leur adversaire du jour.

– De son côté le régime Qatari a collaboré activement avec les agents de la RI et la police politique du régime tenait à l’écart du stadium ceux qui visiblement étaient venus manifester leur colère face à un régime qui deux jours auparavant avait tué des enfants au Kurdistan. Même les journalistes des médias iraniens à l’étranger, qui sont bien entendu financés

par l’Arabie Saoudite comme “Iran international” n’ont pas eu accès aux événements.

– Il est à noter que la chaîne Al-Jazeera appartenant au Qatar, à l’inverse des autres chaînes d’information en langue anglaise ou persane n’ont toujours pas évoqué les événements récents de l’Iran.

Toutes ces fêtes après la défaite, se sont terminées dans des rassemblements avec des slogans hostiles au régime et à Khamenei.

La joie du peuple était une vengeance à l’égard de l’attitude “cul entre deux chaises” de l’équipe nationale qui est maintenant appelée par paronymie “team Mollas” (équipe des curés au lieu de “team Melli” (équipe nationale).

Depuis la semaine dernière où une répression féroce s’est abattue sur le Kurdistan (à Mahabad, Saghez, boukan, Marivan, Sanandaj…) ou d’autres villes kurdes située à Kermanshah comme Djavanroud (40.000 h), dans toutes les manifestations ponctuelles des autres villes et quartiers la référence au combat de cette région est constante. La structure des slogans dans chaque ville reprend son propre nom qui s’ajoute au mot “Kurdistan”. Par exemple, à Karadj qui se trouve à une quarantaine de kilomètres de Téhéran, ils entonnent “De Karaj au Kurdistan, on donne notre vie pour l’Iran“; ou “de Dashti au Kurdistan…“. Dashti est une petite ville rurale de 5000 habitants du Province de Hormozgan au sud du pays; (cette région borde sur presque mille kilomètres le Golfe Persique dont fait partie le

détroit de Hormuz.)

– Des slogans en solidarité avec le Kurdistan fleurissent dans toutes les protestations : “Mahabad, Kurdistan, modèle partout pour l’Iran”.

– Dans toutes les manifestations et protestations c’est la voix des femmes qui domine, même en pleine nuit ce qui était plus rare il y a quelques semaines.

– La rumeur dit que durant ces 72 dernières heures “l’unité spéciale de la protection du guide” (Yegane sar-ollah), qui fait partie de l’armée des gardiens de la révolution et qui compte quelques 12000 personnes dans ces rangs a dû déplacer Khamenei 4 fois et l’installer dans différentes résidences à Téhéran ou ses alentours par peur d’être attaquée par la foule.

– Dans des petites villes de Baloutchistan et du Kurdistan, très souvent après les manifs, les cortèges attaquent les sièges des forces de l’ordre. On a vu le 21 novembre à Kamyaran une ville à 60 km au sud de Sanandaj avec quelque 70 000 habitants les manifestants attaquer le siège des Bassidjis.

Habib

Nouvelles du 20 novembre

Bilan de 3 jours de luttes en Iran

Pendant les 3 jours des manifestations à la mémoire du massacre de novembre 2019, qui correspondent au 60ème jour du soulèvement de Mahsa, on a été témoin du développement de grèves des commerçants et la généralisation des occupations et manifestations des étudiants et des lycéens ainsi que le commencement de la grève dans certaines industries notamment la Sidérurgie d’Ispahan qui est, semble-t-il la plus grande usine de Sidérurgie au Moyen Orient et chez les contractuels du gaz. Beaucoup de petites villes de 50 à 100 mille habitants sont entrées dans le mouvement. Les médias ont compté plus de 200 villes, grandes et petites et même des villages dont on ne connaissait pas le nom font partie du mouvement. Dans beaucoup de ces endroits, les manifestants ont mis le feu aux bacs poubelle, ont fait descendre les drapeaux de la RI et les ont brûlés en lançant des slogans.

– pour la deuxième fois sous la RI les bazars des villes importantes ainsi que les quartiers commerçants ont entamé une grève et ont baissé leur rideau. Il faut savoir que les commerçants souffrent de plus en plus du monopole commercial exercé par les sociétés en rapport avec le “QG exécutif des ordres de l’Imam” ou “Siège de l’application de l’ordre de l’imam Khomeiny” qui tient toutes les ficelles des affaires dans le pays. Il est, comme tous les bonyad (fondation) religieux et les forces armées (Armée des Pasdarans), dispensé de l’impôt. Ils ont soit disant l’autorisation signée de Khomeiny qui est considéré comme révélation divine. A contrario les bazaris privés se sont vus imposés lourdement, ce qui les poussent dans la contestation.

– Aussi, le bazar traditionnel a beaucoup évolué et se doit de démontrer une solidarité avec les gens, qui constituent le gros de leur clientèle. A Téhéran, Ispahan, Shiraz, Tabriz, Hamedan, … toutes les villes grandes et petites de Baloutchistan et du Kurdistan… malgré les communiqués menaçants des chambres de commerce, les rideaux des marchands étaient tirés et toute la journée une ambiance de ville morte y régnait… Jusqu’à dans la soirée où les rassemblements ponctuels commencent. Les gens sortent peu à peu et commencent à se retrouver dans les quartiers.

Avant – Hier, 18 novembre on a entendu qu’à Téhéran les manifestations de deux quartiers se sont jointes. Si cette information est fiable on irait vers la formation des manifestations monstres dont l’Iran en 1979 en a été un précurseur.

-Ça fait des semaines que suite aux protestations et manifestations au Kurdistan et au Baloutchistan le régime a commencé une répression féroce et constante de la population. Mais depuis quelques jours en réaction à la montée des vagues de protestations, le régime a intensifié sa réponse répressive à Saghez et à Mahabad ; hier, le 19 novembre, cette répression a atteint un niveau jamais vu ;

En particulier à Mahabad où dans la soirée la population est sortie massivement dans les rues qui étaient désertées pendant la journée à cause de la grève des commerçants. Les slogans les plus radicaux contre le régime et en particulier dénonçant ceux qui collaborent étaient lancés.

Les forces de l’ordre, beaucoup plus nombreuses et équipées que d’habitude (des témoins sur place témoignent de l’arrivée des colonnes de véhicules de transport de troupes avant les événements d’hier soir) ont attaqué la population qui, de son côté, a monté des barricades pour faire face. On assistait réellement à des scènes de guerre civile. Pendant des heures, le bruit ininterrompu des mitrailleuses et des explosions s’est fait entendre et il y avait des colonnes de feu et de fumée à chaque coin de rue. Des hélicoptères volant à basse altitude ainsi que des drones ont été utilisés contre les gens.

A cette heure on ne connaît pas le nombre de victimes.

Un slogan en particulier c’est retenti dans la nuit noire : “Kurdistan Kurdistan, l’œil et la lumière de l’Iran!”

– L’effondrement de la devise

L’échec des négociations avec les Américains et les Européens sur la question nucléaire (qui semble s’éloigner de plus en plus avec le mouvement populaire), la possibilité d’autres sanctions européennes, la victoire relative des républicains dans les élections midterm aux États-Unis, ont fait fortement baisser la devise iranienne. Raïssi, le président de la République actuel qui avait promis un dollar à 5000 Tomans quand le dollar était effectivement à 8000 (sous le gouvernement de Rohani) doit faire face aujourd’hui à 1 dollar qui s’approche de la ligne des 40.000 ce qui entraîne mécaniquement une perte effroyable du pouvoir d’achat et des économies de la population. Il faut ajouter à ces raisons de la baisse du devise iranien le fait que le marché des capitaux s’est effondré car de grandes quantités de capital sont en train de quitter le pays; ceci est causé par l’incertitude économique qui règne sur les marchés mais aussi la fuite des capitaux qui a été entamée depuis deux mois dont un des signes est la mise en vente aux prix sacrifiés des villas et des appartements de luxe de la haute société iranienne. On parle des ventes à moins 50 % du prix du marché; les responsables de la République islamique et leur famille sont massivement en train de transférer de l’argent à l’étranger pour acquérir des biens immobiliers et d’investir dans les marchés et aussi de déplacer leur famille et préparer leur départ à eux, notamment par le biais d’achat d’appartement en Turquie, en Espagne et en Grèce où l’achat d’un appartement à plus de 600000 € les fait bénéficier d’un visa de séjour qui pourrait plus tard faire évoluer leur statut vers l’obtention de la nationalité.

La chute de la devise a eu aussi des conséquences importantes sur le marché de l’immobilier et de la construction automobile. Toutes les transactions en cours ont été stoppées à cause de ces instabilités.

Les grèves dans l’industrie qui semblent beaucoup plus importantes que ce qu’on entend dans les médias ont eu également de conséquences très importantes sur le ralentissement de l’économie.

-La répression féroce de la République islamique sur les ouvriers, leur arrestation préventive, l’arrestation de toutes les meneurs des mouvements politiques ou corporatifs et l’attitude sécuritaire adoptée rend très difficile le déclenchement des grèves; la République islamique a réussi à décapiter les têtes de toutes les protestations au niveau des usines…

Les ouvriers sont obligés donc de trouver des voies détournées pour “se mettre en grève” de façon pratique et technique, sans le proclamer de manière ouverte.Par exemple on assiste à des vagues de sabotages sur les machines, sur les camions ou sur les bus pour arrêter effectivement le travail ou créer des blocages dans la chaîne de fourniture des pièces et accessoires de travail; ainsi l’ouvrier peut toujours cesser le travail à cause d’une impossibilité matérielle sans se trouver arrêté pour motif de grève. Ce type d’arrêt de travail est devenu très fréquent en Iran.

Si j’essaie de vous donner un maximum d’informations “sous-cutanées”, c’est pour vous permettre de saisir l’ambiance générale du mouvement actuel au-delà des informations plus ou moins officielles qui tôt ou tard arriveraient à vos oreilles ; que ça soit de la part des médias officiels du régime ou d’autres qui se trouvent essentiellement à l’étranger et qui sont directement ou indirectement sous influence occidentale et en général pour la royauté devenue “républicaine” et démocrate ces jours ci.

Pour ce qui est des réseaux sociaux, on doit les différencier car on y trouve de tout.

Par exemple, sur les réseaux sociaux on a entendu une technique intéressante pour couper la vidéo surveillance dans les villes au moment des manifestations de rue. Un technicien de réseau électrique expliquait que si, avant les manifestations, à une heure très précise les gens arrêtaient ensemble leur consommation d’énergie à la maison, le régulateur automatique du système ferait baisser le niveau de production. Après quelques minutes, les gens devraient remettre les appareils en route. Ceci va créer une coupure d’électricité dans beaucoup d’endroits car il faut remettre en route le système manuellement ce qui pourrait prendre quelques heures durant lesquelles les manifestants ne seront pas filmés et reconnus par les forces de l’ordre.

– Selon un camarade Baloutch résidant à Londres, qui est resté très proche de sa communauté, au deuxième jour de l’anniversaire du massacre d’Aban (novembre 2019), les femmes du Baloutchistan sont descendues dans la rue.

Deux clips ont été diffusés depuis Kanarak et Zahedan, qui montrent que les femmes ont joué un rôle de premier plan dans les manifestations de rue. Un signe qui ne trompe pas : cette fois-ci la manifestation est organisée un mardi et non pas un vendredi (jours de mosquée et de prière collective), le lieu de leur manifestation aussi est la rue et non plus la mosquée. Ce mouvement de protestation des femmes pour la vie et la liberté, est très significatif car il repose sur une certaine indépendance par rapport à la religion et à la tradition. Elles sont sorties des espaces du vendredi et de la mosquée qui étaient censés les “protéger”. On sent une nouvelle force et une dynamique de contestation au Baloutchistan parmi les femmes, qui remettent en cause profondément le hijab obligatoire, mais pas seulement. Elles brisent le monopole masculin de l’espace public et elles transgressent l’espace exclusif qui leur était réservé.

Ces protestations donnent un nouveau contenu social au mouvement au Baloutchistan et établissent une relation entre les protestations et l’ensemble du mouvement des femmes, de la vie et de la liberté à travers l’Iran. Jusqu’ici les manifestations à Zahedan et d’autres villes de la région, malgré les slogans hostiles à la RI étaient basés sur un sentiment de vengeance “tribale”; car il s’agissait de punir le gradé violeur de la fille de quinze ans et comme les responsables de l’État ne faisait rien pour l’amender, c’était le peuple qui s’en chargeait. Mais cette manifestation change la donne et pourrait être le point de départ d’une nouvelle vie dans cette province.

Il ne faut pas non plus se faire trop d’illusion. Le processus de leur libération se heurte à beaucoup d’obstacles et d’hostilité. Il faudrait que le cri de liberté du mouvement des femmes qu’on entend de tout côté en Iran vienne à la rescousse des femmes et des filles Balloutch pour leur permettre de se libérer de la domination archaïque de la tradition et de la religion.

La voix féminine de cette révolution ne cesse de gronder dans tous les rassemblements et de toutes les manifestations.

– Dans une interview radiodiffusée par une station à l’étranger, une jeune fille de 18 ans qui parlait de l’intérieur du pays, expliquait la stratégie du mouvement en disant que “le régime et ses blogueurs essaient de normaliser la situation, il faut les ignorer et poursuivre nos buts principaux ; pour les rassemblements dispersés dans la ville, il faut que chacun soit dans son quartier, là où il connaît la disposition des lieux, les gens… Il pourrait mieux se défendre en cas d’attaque ; nous sommes dans le premier stade de la révolution. Il ne faut pas désespérer. Dans la deuxième phase les manifestations deviendront massives et par millions pour finir dans une troisième phase qui serait la prise du pouvoir.

Nous sommes encore dans la première phase, juste en train de passer à la deuxième.

Aussi, je dois dire que cette révolution est, comme la révolution française basée sur l’idée et pas sur une idéologie comme la révolution de 79 chez nous ou la révolution d’octobre. Une telle révolution qui cherche à réaliser une idée n’a pas besoin d’un chef ou d’une force de direction précise. Tous les gens qui à un moment se trouve meneur du mouvement, dès qu’ils se retournent de l’idée poursuivie, serait immédiatement rejeté.”

L’animateur n’a pas pû s’empêcher de lui demander avec stupeur “excusez-moi vous avez réellement 18 ans” ?!

– dans une réunion d’où une vidéo a fuité, un des chefs Bassidji, Pouyane Hosseinpour, adjoint de direction de l’organisation de l’espace virtuel”, connu pour ses exploits contre le mouvement, racontait avec étonnement à ses collègues sa journée. Il expliquait avec forces de détails ce qui l’avait impressionné; il disait que “maintenant les gens n’ont plus peur et ils résistent! À l’inverse des dernières fois où après quelques bagarres ils s’enfuyaient et qu’il nous suffisait 10 minutes pour disperser un rassemblement dans la rue, aujourd’hui on peut y passer des heures sans forcément réussir. C’est la nouvelle stratégie de l’ennemi. Aujourd’hui on était dans la rue Zahir-ol-islam à l’intersection de Saadi, à part le rassemblement dans la rue, on avait les habitants aussi sur le dos ; si dans la rue il y avait 30 bâtiments, de tous les 30 on nous balançait des trucs, si chaque bâtiment avait 4 étages, de chaque étage on était pris pour cible; on nous a balancé des pierres mais aussi tout ce qu’on peut imaginer, des pots de fleurs, des barriques, des chaises même des bancs .. un de nos collègues a reçu un fer à repasser !!! Vous avez vu les films qu’on a montrés. Ça n’a rien à voir, maintenant ils n’ont plus peur, ils résistent!

– Dans la journée, au moins à Téhéran, de plus en plus les femmes et les filles se montrent fièrement sans le hijab accompagnées des sourires complices et encourageants des passants.

– la vente des bombes de peinture aux jeunes de moins de 30 ans a été interdite !

Habib

 

Nouvelles du 18/11/2022

Il serait significatif de commencer ce fil d’info avec une nouvelle qui en surprendrait plus d’un et qui n’aurait pas été concevable il y a seulement quelques mois.

Hier le 17 novembre 2022 dans la ville de Khomeyni-shahr la foule a mis le feu à la maison natale du fondateur de la République islamique l’Imam Khomeyni. Cette maison est bien entendu située dans la ville de Khomeyn, du côté d’Ispahan dans le centre du pays. C’est une ville très religieuse avec plus de 500 000 habitants dont un bon nombre des forces de l’ordre en sont originaires et qui n’avaient pas jusqu’ici participé au soulèvement.

Il fallait bien mettre un point d’honneur aux deux mois de soulèvement et de protestation héroïque en Iran. Au troisième jour de grève et de manifestation appelée à l’occasion de l’anniversaire du “massacre d’Aban” survenu en novembre 2019 au cours des manifestations au sujet de l’augmentation du prix de l’essence et qui a entraîné d’après les données officielles plus de 1500 morts, des milliers de personnes sont sorties pour lancer des slogans hostiles au régime et ont finit par incendier la maison de l’Imam. Tout de suite après cet événement une rumeur a couru, que la prochaine cible serait le mausolée de l’imam qui se trouve à proximité de Téhéran et qui est aujourd’hui considéré comme un lieu de pèlerinage des chiites.

Revenons à ce qui nous intéresse le plus 

Il semblerait qu’un mouvement de grève chez les ouvriers des plateformes pétrolières est en train de s’installer; hier (16 novembre) on a entendu qu’à côté des sidérurgistes d’Ispahan, une partie des ouvriers des plateformes d’Assalouyé (Pars du Sud, gisement offshore très important de gaz naturel -apparemment premier mondial- appelé aussi North Field ou South Pars situé à cheval entre les eaux territoriales de l’Iran et du Qatar dans le golfe Persique) qui construisent et développent les installations exploitées au sud de l’Iran par plusieurs pays dont l’Iran, le Quatar et l’Irak) sont également entrés en grève.

À ce jour, on avait reçu des vidéos et des prises de vue individuelles montrant des ouvriers menaçant le régime de leur grève s’il n’arrêtait pas la répression générale des protestataires et s’il ne libérait pas les prisonniers politiques. Ces ouvriers étaient allés jusqu’à menacer de détruire “tout ce qu’on a déjà construit”, ce qui avait entraîné un renforcement des dispositifs sécuritaires sur le site.

Aujourd’hui une partie de ces ouvriers, probablement les contractuels ou ceux qu’on appelle “sur projet” ont déclenché une grève. On ne connaît pas encore précisément les motivations de cette action; même si le but de l’opération semble évidemment d’accompagner le soulèvement en cours, mais très probablement, ils ne vont pas mettre au premier plan ces motivations politiques pour ne pas aggraver la pression qu’ils subissent quotidiennement. Jusqu’à maintenant au niveau global les revendications étaient très corporatives.

Il serait intéressant de voir les premières publications de ses ouvriers sur leur compte Telegram pour mieux comprendre leurs revendications avant ce mois de septembre et le soulèvement en cours.

Habib

Source: publications du compte Télégramme du Conseil de l’Organisation des Protestations des Ouvriers Contractuels du Pétrole (COPOCP) qui a été inauguré début juillet 2021 à l’occasion des grèves pour l’obtention du plan 20/10 (20 jours de travail 10 jours de repos).

Voici une traduction (automatique, ameliorée) de leur première déclaration de grève:

“Déclaration des travailleurs contractuels du pétrole au sein des raffineries, des industries pétrochimiques et les centrales électriques.

Par la présente, nous déclarons que nous allons déclencher une grève nationale pour poursuivre nos revendications.

Nous, travailleurs contractuels du pétrole œuvrant dans les raffineries, la pétrochimie et les centrales électriques, protestons contre le bas niveau des salaires, la réduction quotidienne de notre pouvoir d’achat et le non-respect des promesses faites auparavant. Comme déjà annoncé, nous reprenons nos grèves et rassemblements, cette fois-ci de façon généralisée et nationale devant chaque centre de production. Nous poursuivrons ainsi nos revendications maintes fois répétées. À cet égard, le 29 Khordad (19 juin 2021) nos collègues “de projet” [des ouvriers engagés sur la base de la réalisation d’un projet, qui est en général un segment d’un plan beaucoup plus vaste découpé en projets distincts; très souvent ces projets sont confiés à des boîtes privées appartenant soit aux Pasdarans soit aux responsables politiques ou leur proches] de la société Farab de la centrale électrique de Bidkhoun se sont mis en grève pour réclamer une augmentation des salaires et exiger 20 jours de travail et 10 jours de congé, ce qu’on appelle le plan vingt-dix, et ils quittèrent en masse les centres de production pour rentrer chez eux. Ces ouvriers ont annoncé qu’ils ne reprendraient pas le travail tant que leurs revendications n’auraient pas été satisfaites.

Vous devez considérer cette grève comme un avertissement ; elle se poursuivra pendant une semaine, et le 9 juillet, nous allons rejoindre les rangs de nos collègues officiels qui ont annoncé une journée de protestation à cette date.

Tout au long de cette semaine de mobilisation, nous essayerons de prendre une décision collective en nous rassemblant sur nos lieux de travail et en faisant entendre notre voix par nos collègues à travers le pays.

Voici nos revendications:

– Le salaire de tout ouvrier travaillant dans le pétrole ne doit pas être inférieur à 12 millions de Tomans, et le niveau général des salaires doit être augmenté de façon immédiate; le niveau des salaires doit être indexé sur les prix des marchandises et être réévalué au fur et à mesure que les prix augmentent.

– En outre, les niveaux de salaire des autres catégories de travailleurs devraient être basés sur l’accord avec leurs représentants élus.

– Le retard dans les paiements de salaires doit être considéré comme un crime et un vol flagrant. À la fin de chaque mois, les salaires doivent être versés à temps.

– Nous nous opposons au travail temporaire et contractuel et exigeons que les patrons et les sociétés de sous-traitance ne soient plus admis dans l’industrie du pétrole de sorte que nous puissions bénéficier de la sécurité de l’emploi et que tous les contrats de travail deviennent permanents. Nous exigeons l’interdiction des licenciements.

– Les lois esclavagistes des zones économiques spéciales, qui créent une séparation entre nous et les autres travailleurs de la société, et selon lesquelles les employeurs sont libres d’attaquer nos vies et nos moyens de subsistance, doivent être annulées immédiatement.

– Nous voulons que notre environnement de travail soit sécurisé. Actuellement, il ressemble à une bombe à retardement. On doit faire face aux terribles incendies, chutes de hauteur, nuisances sonores dues à l’explosion de produits pétroliers, inhalation de substances toxiques et chimiques; en plus des conditions de santé et de cliniques non standard, font des ravages sur nous tous les jours et ont causé de nombreuses blessures physiques et mentales aux travailleurs. Travailler dans la chaleur atroce de l’été et le manque d’équipement de conditionnement d’air et de climatiseurs standard a multiplié par cent la pression du travail. L’industrie pétrolière est un grand secteur rentable de la société. Nos centres de travail doivent être sécurisés et dotés des normes environnementales les plus élevées. Dans l’industrie pétrolière, des fonds suffisants devraient être alloués pour sécuriser les environnements de travail et équiper les centres de travail des installations de climatisation et de chauffage, ainsi que d’autres dispositifs nécessaires dans la mesure requise, en élevant la norme sanitaire dans les dortoirs et les lieux publics tels que les toilettes et les salles de bains, etc.

– Nous, les travailleurs du pétrole, en avons assez des pressions sécuritaires dans nos environnements de travail et il faut mettre fin à cette situation. C’est notre droit le plus absolu de nous organiser, de nous rassembler et de protester.

– En conclusion, nous déclarons notre ferme soutien à nos collègues officiels de Naft (pétrole) qui ont annoncé que si leurs demandes ne sont pas satisfaites , ils manifestent le 9 juillet et un appel dans ce sens est déjà lancé.

Les revendications listées sont les revendications de tous les travailleurs du pétrole, y compris nos collègues officiels. En outre, ces collègues s’opposent à la manière d’augmenter les salaires en 1400, qui est en fait une atteinte à leur vie et à leurs moyens de subsistance, l’imposition de lourdes taxes sur leurs salaires et la non-application de l’article 10, et par conséquent, la suppression de certains de leurs avantages salariaux. L’objectif de la protestation des collègues officiels comme nous, les travailleurs contractuels, est la question des salaires et de son inadéquation avec nos frais de subsistance; l’augmentation soudaine des prix au niveau des biens de consommation et le logement, la privation d’assurances de base, le manque de l’éducation gratuite pour tous, … ont rendu la vie difficile pour nous ainsi que pour tous les membres de la société. Nous voulons la réalisation de ces droits fondamentaux.

Une vie humaine décente est le droit de chacun d’entre nous.

Conseil pour l’organisation des manifestations des travailleurs contractuels du pétrole

30 juin 2021″

Nouvelles du 16/11/2022

« Je suis à Téhéran, la capitale de l’Iran. Les sidérurgistes iraniens ont également rejoint les grèves nationales contre le régime des mollahs. »

https://twitter.com/i/status/1592516612003082240

15 nov.

« Des grèves nationales ont commencé dans l’une des plus grandes entreprises sidérurgiques d’Iran (Zob »

« Les ouvriers du pétrole en Iran sortent. Énormément de courage. Incroyablement significatif »

Nouvelles du 12/11/2022

transmis par le cde du texte « Mahsa: larme sacrée, colère sacrée, violence sacrée. »

« nous ne descendrons pas dans la rue les mains vides »

Voici la traduction rapide d’un appel lancé par “les jeunes des quartiers de Rasht [Capitale régionale de Guilan, ville importante au nord du pays, 700.000 habitants]. Cet appel montre une tactique très innovante entre de petits rassemblements ponctuels qui, en fait constituent le liant avec les manifestations plus importantes dans les grandes villes. Aussi, il est à noter que l’appel mentionne “la défense légitime du peuple”. Ce qui constitue en fait l’acceptation de la violence légitime.

Habib

“Appel public pour le vendredi 11 et le samedi 12 novembre 2022

 

Appel n°10 des jeunes des quartiers de Rasht

Que la paix soit avec tous les Iraniens épris de liberté, en particulier les gens qui n’ont pas peur de briser les interdits à Rasht.

Depuis plus de 50 jours, nous crions à l’unisson “Mort à la République islamique” dans tout le pays, et nous nous rassemblons dans les rues en exposant nos poitrines et notre sang aux balles brûlantes des mercenaires de ce gouvernement fasciste. Cela fait plus de 50 jours que les mercenaires au solde d’Ali Khamenei nous prouvent chaque jour et de plus en plus qu’il n’y a pas d’autre voie pour la liberté que son renversement et celui de son gouvernement mensonger.

Compatriotes épris de liberté, le chemin que nous avons commencé est le seul moyen de salut pour nous et les générations futures. À l’heure actuelle, l’appareil de propagande du gouvernement corrompu de la République islamique essaie de nous décourager et nous détourner de notre chemin en diffusant de fausses nouvelles, mais le fait est qu’à mesure que nous avançons, de jour en jour, notre pouvoir augmente et se sont eux, les mercenaires de la républiques islamiques qui perdent de plus en plus de leur capacité à résister à notre unité et à notre solidarité.

Aujourd’hui, l’appareil de répression du gouvernement anti-iranien de la République islamique se trouve affaibli face au peuple épris de liberté. Ils sont obligés d’utiliser les méthodes les plus brutales et les plus violentes pour réprimer les luttes révolutionnaires, mais pourtant, tout l’Iran, sans distinction d’ethnie, de race ou de langue, crie pour sa liberté. Ce Zahak [personnage mythologique du “livre des Rois” qui était un souverain avec deux serpents sur les épaules qui se nourrissait en mangeant la cervelle des jeunes gens et qui a été in fine défait par un forgeron appelé Kaveh] de notre temps pensait qu’en faisant traverser les frontières sacrées de notre pays, par ses milices et mercenaires étrangers, il pourrait faire taire notre cri de liberté, mais non seulement ces étrangers dodus et bien-nourris n’avaient pas la capacité d’affronter la fière jeunesse iranienne, mais cette décision a surtout révélé le manque d’effectifs de l’appareil répressif de la République islamique mais aussi sa faiblesse opérationnelle.

Courageux compatriotes, maintenant que nous nous trouvons tout proche de la liberté, nous sommes condamnés à poursuivre le combat et à extraire cette tumeur cancéreuse qu’est la République Islamique qui s’est enracinée dans nos territoires, notre sol et nos fleuves. Par conséquent, sur la lancée de ces luttes pour la liberté, nous vous informons que nous prévoyons d’organiser de grands rassemblements révolutionnaires dans les rues de Rasht le vendredi 11 et le samedi 12 novembre, et de combattre ce régime cruel avec le mot d’ordre de ” A Mort la République Islamique” et de nous soulèver ainsi contre ce régime tyran et corrompu. Nous demandons aux autres combattants de la liberté, habitants d’autres villes et villages de notre province Guilan, où les conditions nécessaires pour organiser ce type de rassemblements ne sont pas réunies, de choisir les rues de Rasht comme bastion de notre lutte commune. Nous demandons également aux habitants des autres grandes villes de la province et de tout le pays d’organiser leurs rassemblements révolutionnaires en coordination avec les habitants de Rasht.

Il convient de noter que ce genre d’appels au rassemblement pour des jours spécifiques ne signifie pas qu’on va arrêter de manifester les autres jours de la semaine dans nos rues; le but de ce genre d’appel généraux est de privilégier des rassemblements plus importants lors des dates marquantes du mouvement.

Comme tous les rassemblements récents, nous ne descendrons pas dans la rue les mains vides et nous considérons qu’il est de notre droit de nous défendre de façon légitime contre les mercenaires de Khamenei.

Avec notre lutte, le soleil de la liberté brillera à nouveau sur la patrie.

Jeunes des quartiers de Rasht,

19 Abân 1401 [10 novembre 2022]

 

Ce commentaire ne répond pas au précédent mais à une demande d’infos:

Le mouvement ne s’affaiblit pas. On assiste aux manifestations locales et très mobiles en attendant des appels de manifestations plus generales lancés par “les jeunes du quartier de … “.

Le mouvement étudiant a pris le relais et dans quasiment toutes les grandes villes et même des villes plus petites les universités et les facs sont en grève et en manifestation journalière. En général les manifs commencent à l’extérieur des bâtiments officiels et puis se répandent par petit comité dans divers quartiers des villes. Le régime a essayé de créer des endroits pour la discussion avec les protestataires mais à chaque fois leur représentant a été humilié et insulté. En même temps ils n’ont pas cessé d’arrêter les étudiants; les listes des étudiants arrêtés ou disparus s’allongent tous les jours. On parle de milliers de personnes emprisonnées.

En plus, comme vous le savez on est en pleine cérémonies des quarante jours des gens qui ont été tués au début du soulèvement. Chez les chiites après la mort de quelqu’un au troisième jour, au 7e jour et au 40e jour il y a des cérémonies. Donc les manifestants importantes de l’ordre de plusieurs milliers de personnes se sont déplacéses vers les cimetières, à l’extérieur des villes.

La semaine dernière dans plusieurs villes il y a eu de grandes marches et manifestations des gens qui allaient, malgré le blocage des routes, vers les cimetières où ces jeunes sont enterrés.

Des villes comme Karadj à 40 km de Téhéran ou Foulad Shahr (Ville d’acier) aux alentours d’Ispahan qui était construite pour loger les ouvriers de l’usine de Sidérurgie d’Ispahan et qui reste une ville industrielle، ont vu de grands rassemblements qui se sont terminés dans une bagarre avec les forces de l’ordre.

Le Kurdistan et le Baloutchistan constituent des régions où l’affrontement est journalier. Avant hier, à khark (Baloutchistan) ils ont encore une fois tirer sur la foule et il y a plus de 16 tués dont plusieurs enfants.

On a vu que les forces de la repression ont tellement de difficulté en Iran qu’ils ont fait entrer des groupes entier de jeunes Afghans qui étaient membres d’une milice appartenant à l’armée des Pasdarans qui s’appelle Fatémioun (d’après les disciples de Fatima, fille du Prophète); ils sont plus de 15000 personnes et ont déjà combattu en Syrie pour le compte de la République islamique; en fait se sont des mercenaires qui pour quelques centaines de dollars par moi mettent leur vie en danger en tuant les opposants.

Ils ont été vus, preuve à l’appui, au moment de leur arrivée à l’aéroport de façon très officielle, avec passeport et visa.

Aussi, dans la répression au sud de l’Iran (Khouzestan) on avait déjà vu en 2020 des Arabes irakiens faisant partie de Hashd-ol-shâabi participer à la répression des manifestations. Ces jours-ci on les revoit encore participer aux côtés des bassidji et des forces de l’ordre dans la répression au sud du pays.

Hier, deux-cents vingt parlementaires iraniens ont signé une lettre demandant aux forces de l’ordre de “châtier” par le “ghéssâs” (vengeance islamique) tous les manifestants arrêtés dans le soulèvement en cours. Ils les qualifient d’”ennemis de Dieu” passibles de la peine de mort. Ils y ont écrit que défendre le guide suprême est “plus important que défendre la vie de l’Imâm caché”.

Hier dans une manifestation contre le régime à l’étranger (Bruxelles) un slogan a été entendu qui montre une série d’évolution:

Au début des manifestations ponctuelles en Iran nous entendions très souvent ce slogan :

“N’ayez pas peur! N’ayez pas peur ! Nous sommes tous ensemble !”

Après quelques semaines ce slogan a changé d’interlocuteur :

“Ayez peur ! Ayez peur! Nous sommes tous ensemble !”

Pour devenir :

“Ayez peur ! Ayez peur! Les femmes sont toutes ensemble !”

La semaine dernière un tract a été collé dans les rues de Téhéran d’un groupe s’appelant “Ceux qui sèment [cultivent, répandent] du soleil”. Ce groupe qui a été récemment constitué résume assez bien les revendications générales de la frange “progressiste” des protestataires.

 

Voici une traduction rapide de ce texte :

“Pourquoi nous ne voulons pas le renversement du régime, tout en étant des révolutionnaires ?

Nous ne sommes pas des subversifs car renverser la République islamique ne nous suffit pas. Nous voulons que si la République islamique est renversée les femmes et les hommes soient égaux. Que les gens puissent vraiment décider par eux-mêmes des questions qui les concernent. La propriété privée doit être abolie et les travailleurs doivent bénéficier de leur propre travail. La crise de l’eau doit être résolue et l’eau des villes et régions défavorisées ne doit pas être donnée aux villes riches. La répartition des richesses doit être équitable dans toutes les régions du pays. Les personnes non-persanes doivent pouvoir apprendre et enseigner dans leur propre langue. Personne ne devrait être exclue de la société en raison de son orientation ou de son identité sexuelle. Les universités devraient être dirigées par des étudiants, des professeurs et des employés. Le service militaire ne doit pas être obligatoire et être soldat ne soit pas une profession. Que les forêts ne soient pas pillées. Que les quais d’embarquations illégaux [dans les mains de l’armée des Pasdarans] soient fermés. Personne ne devrait être forcé de transporter sur son dos du carburant ou des marchandises [dans les régions frontalières beaucoup de jeunes et d’adultes sont devenus, par la misère, des transporteurs de carburant vers l’étranger ou des marchandises manufacturières vers l’Iran] et être abattu à cause de cela. Les enfants ne devraient pas être forcés de travailler, les enfants devraient être des enfants et profiter de leur enfance. L’éducation, la santé et un logement convenable et gratuit doivent être accessibles à tous. Les retraités doivent pouvoir vivre confortablement. Les enseignants et les élèves dirigeraient les écoles. Nous ne voulons pas être pauvres. Que les mains des 1% de riches soient écourtées de la vie des 90% de pauvres. Et nous avons bien d’autres rêves que nous ne pouvons réaliser tant que nous n’avons pas renversé la République islamique. Le renversement de la République islamique est une condition nécessaire pour réaliser les souhaits de la majorité du peuple, mais ce n’est pas une condition suffisante. Pour cette raison, nous ne sommes pas des subversifs, nous sommes des révolutionnaires, car la révolution signifie le renversement de l’ordre dominant oppressif et le changement radical au profit de la majorité des travailleurs.

Ceux qui sment [cultivent, répandent] du soleil

Bonne journée

Habib

Categories: Nouvelles du monde Tags:
  1. pepe
    18/01/2023 à 13:13 | #1

    Série d’émissions sur le Kurdistan, les organisations Kurdes et l’Iran sur France Culture cette semaine:

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/cultures-monde/turquie-minorite-opprimee-electorat-convoite-1089128

    Celle de ce mercredi, en particulier, éclaire le rôle de locomotive unificatrice des kurdes sur le mouvement de révolte en Iran

  2. pepe
    19/01/2023 à 19:25 | #2

    Pour information, le chiffre de fréquentation du fil info sur l’Iran (sur la colonne de droite) ne prend pas en compte les visites qui arrivent du site de Mille Bâbords Marseille, qui est programmé pour “passer sous les radars” statistiques.
    https://www.millebabords.org/
    Par exemple, à ce jour et depuis le début du fil infos, il y a eut plus de 1500 clics depuis MB!!

  3. salle des machines
    19/06/2023 à 13:20 | #3

    l’oracle a parlé !

    « Ce n’est pas parce que l’Iran ne fait plus la une des médias pour ses exécutions arbitraires que tout est rentré dans l’ordre au pays des mollahs. Non, bien au contraire, les Iraniens souffrent de plus en plus, mais c’est un mal qui les ronge sans bruit, insidieusement. Ils ont si faim, si peu de moyens pour se soigner et si peu de perspectives que certains sont prêts à vendre un organe pour survivre, d’autres à se suicider pour en finir. L’inflation atteint des records dans le pays (près de 170 % avancent des experts, alors que le chiffre officiel avoisine les 50 %). Et les sanctions internationales ne sont pas seules en cause. Ce bilan catastrophique serait largement dû à la mauvaise gestion et à la corruption des dirigeants qui, décidément, cumulent les déshonneurs.

    Alors que la rue commençait à se calmer, ou du moins en donnait l’impression pour mieux reprendre des forces, cette situation pourrait bien provoquer une nouvelle explosion de colère. L’absence de libertés, cumulée à la faim, peut donner à la population la sensation qu’elle n’a plus rien à perdre et que risquer sa vie sous les balles vaut toujours mieux que de la voir s’éteindre dans l’indifférence générale. En 2019, c’est bien la hausse des prix de l’essence qui avait déclenché des émeutes que les autorités avaient immédiatement et violemment réprimées. »

    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/editorial/liran-le-pays-qui-cumule-les-crises-20230618_63DMZHWAXRG3HIIZJQEQMR3O6E/

    « les difficultés économiques auxquelles est confrontée la population en raison d’une inflation galopante et d’une mauvaise gestion du pays pourraient être l’étincelle qui embrase à nouveau la République islamique, selon Kasra Aarabi, responsable du programme sur l’Iran au Tony Blair Institute for Global Change et au Middle East Institute. »

    «Je mets en vente mon rein» : en Iran, une crise économique qui risque d’embraser le pays

    Inflation galopante
    Selon les statistiques des autorités de la République islamique, le taux d’inflation a atteint le mois dernier un record sans précédent depuis huit décennies. Mais alors que le chiffre officiel oscille autour de 50 %, la réalité vécue par la population semble bien plus difficile. »

    https://www.liberation.fr/international/moyen-orient/iran-la-revolution-aboutira-a-lissue-dun-marathon-et-non-dun-sprint-20230619_UCU37OWCIJGZ5E7LJ2F7OL74TE/

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