“La communisation et l’abolition du genre”
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La communisation et l’abolition du genre
Nous proposons ici la traduction d’un texte de Maya Andrea Gonzalez paru en 2012 en langue anglaise dans un ouvrage édité par Benjamin Noys : Communization and its discontents [Malaise dans la communisation, non traduit]. Ce texte paraît aux Etats-Unis alors que la problématique du genre refait massivement surface dans les milieux d’Ultragauche et post-Ultragauche, par exemple dans le premier numéro de Théorie Communiste dédié à la question (2011, TC 21), ou dans la revue internationale Endnotes. Dans un premier temps, l’autrice s’attache à remobiliser les questionnements classiques de la théorie de la communisation pour tracer des non-dits et des oublis. Par la suite, la partie I commente la construction de la catégorie « Femme » pour ensuite, dans la partie II, proposer une ligne politique visant à l’abolition du genre.
La civilisation d’aujourd’hui donne clairement à entendre qu’elle admet les relations sexuelles à l’unique condition qu’elles aient pour base l’union indissoluble, et contractée une fois pour toutes, d’un homme et d’une femme ; qu’elle ne tolère pas la sexualité en tant que source autonome de plaisir et n’est disposée à le tolérer qu’à titre d’agent de reproduction que rien jusqu’ici n’a pu remplacer.
Sigmund Freud, Malaise dans la Civilisation
Introduction
La communisation n’est pas une position révolutionnaire. Ce n’est pas une forme de société que nous construirons après la révolution. Il ne s’agit pas d’une tactique, d’une perspective stratégique, d’une organisation ou d’un plan. La communisation décrit un ensemble de mesures que nous devons prendre au cours de la lutte des classes si nous voulons qu’il y ait une révolution. La communisation abolit le mode de production capitaliste, y compris le travail salarié, l’échange, la forme-valeur, l’État, la division du travail et la propriété privée. Que la révolution prenne cette forme est une caractéristique nécessaire de la lutte de classes aujourd’hui. Notre cycle de luttes ne peut avoir d’autre horizon, dans la mesure où le développement des contradictions du capitalisme a annihilé les conditions sur lesquelles reposaient d’autres formes de révolution. Il n’est plus possible d’imaginer une conjoncture dans laquelle les divisions sociales soient dissoutes après la révolution.
Puisque la révolution en tant que communisation doit abolir toutes les divisions au sein de la vie sociale, elle doit aussi abolir les relations de genre – non pas que le genre serait gênant ou désagréable, mais parce qu’il est une relation parmi d’autres reproduisant quotidiennement le mode de production capitaliste. Aussi, le genre est constitutif de la contradiction centrale du capital, et donc le genre doit être mis en pièces dans le processus de la révolution. Nous ne pouvons attendre la fin de la révolution pour que la question du genre soit résolue. Sa pertinence par rapport à notre existence ne se transformera pas lentement – que ce soit par l’obsolescence programmée ou par une destruction ludique, que ce soit sous la forme de l’égalité des identités de genre ou de leur prolifération en une multitude de différences. Au contraire, pour être révolutionnaire, la communisation doit détruire le genre dans son cours même, inaugurant des relations entre individus définis dans leurs singularités.
Dire que la révolution prendra la forme d’une communisation n’est pas le résultat de leçons tirées des défaites passées, ni même de l’échec lamentable des mouvements passés à résoudre la question du genre. Que nous puissions ou non discerner, après coup, une stratégie gagnante pour les mouvements du passé ne nous dit rien sur le présent. Car le capital n’organise plus l’unité des prolétaires sur la base de leur condition commune de travailleurs salariés. La relation capital-travail ne permet plus aux travailleurs d’affirmer leur identité de travailleurs et de construire sur cette base des organisations de travailleurs capables de prendre le pouvoir au sein de l’État. Les mouvements qui élevaient les travailleurs au statut de sujet révolutionnaire étaient bien « communistes », mais communistes d’une manière qui ne peut plus être la nôtre aujourd’hui. La révolution en tant que communisation n’a pas de sujet révolutionnaire, pas d’identité pouvant s’affirmer – ni l’Ouvrier, ni la Multitude, ni le Précariat. La base réelle de toute identité révolutionnaire de ce type s’est évanouie.
Bien sûr, les travailleurs existent toujours en tant que classe. Le travail salarié est devenu une condition de vie universelle comme jamais auparavant. Cependant, le prolétariat est diffus et éclaté. Son rapport au capital est précaire. La surabondance structurelle de main-d’œuvre est énorme. Une population excédentaire de plus d’un milliard de personnes – désireuses de trouver une place dans les filières mondiales de denrées de base desquelles elles ont été exclues – rend impossible la formation d’organisations de masse capables de contrôler l’offre de main-d’œuvre, sauf parmi les couches les plus privilégiées des travailleurs1. Le capital exacerbe, fragmente et repose plus que jamais sur les divisions entre les travailleurs. Jadis fière détentrice d’une essence révolutionnaire universellement pertinente, la classe ouvrière, dans son autonomie, classe au sein du capitalisme, ne peut plus construire son pouvoir en tant que classe contre le capital. Aujourd’hui, la révolution doit émerger de la désunion du prolétariat, comme le seul processus capable de surmonter cette désunion. Si l’action révolutionnaire n’abolit pas immédiatement toutes les divisions entre prolétaires, alors elle n’est pas révolutionnaire ; elle n’est pas communisation.
Dans le moment présent, l’incapacité même des travailleurs à s’unir sur la base d’une identité ouvrière constitue donc la limite fondamentale de la lutte. Mais cette limite est en même temps la dynamique potentielle de ce cycle de luttes, qui porte en lui l’abolition des relations de genre et de toutes les autres distinctions fixes. Ce n’est pas un accident historique que la fin de l’ancien cycle de luttes ait coïncidé avec une révolte contre la primauté du Travailleur – une révolte dans laquelle le féminisme a joué un rôle majeur. Concevoir un mouvement ouvrier qui ne reléguerait pas les femmes, les Noirs et les homosexuels à une position subordonnée, c’est concevoir un mouvement ouvrier auquel manquerait justement le trait unificateur/excluant qui autrefois l’empêchait d’avancer. Avec le recul, il est de plus en plus clair que si la classe ouvrière (en tant que classe de tous ceux qui n’ont pas d’accès direct aux moyens de production) était destinée à devenir la majorité de la société, le mouvement ouvrier n’était pas susceptible d’organiser une majorité claire à partir d’elle. La révolution comme communisation ne résout pas ce problème, mais elle l’emmène sur un nouveau terrain. En tant qu’arpenteurs de ce nouveau paysage, nous devons évaluer l’état actuel du mouvement conduisant droit à la fin du genre. Nous devons également élargir la discussion sur cette mesure communisatrice essentielle.
Jusque récemment, la théorie de la communisation était le produit d’un petit nombre de groupes organisés autour de la publication d’une poignée de revues annuelles. Si peu de ces groupes se sont attelés à la tâche de théoriser le genre, c’est parce que la plupart d’entre eux se sont complètement désintéressés de l’examen des fondements réels aux divisions qui caractérisent l’existence de la classe ouvrière. Au contraire, ils se sont mis à la recherche d’un décodeur secret révolutionnaire, grâce auquel ils auraient été en mesure de déchiffrer les mérites et les défauts des luttes passées. Ainsi, la plupart des partisans de la communisation ont considéré la révolution comme un dépassement immédiat de toutes les séparations, mais ils en sont arrivés à cette conclusion en analysant ce que la communisation devrait être pour réussir là où les mouvements passés ont échoué, plutôt qu’en se concentrant sur la spécificité historique du présent2.
Pour cette raison, la tendance organisée autour de Théorie Communiste (TC) est unique, et nous les suivons largement dans notre exposition. Pour TC, la révolution en tant que communisation n’apparaît comme une possibilité pratique que lorsque ces luttes commencent à « faire l’écart », car l’acte même de lutter force de plus en plus le prolétariat à remettre en question et agir contre sa propre reproduction en tant que classe. Les « écarts » s’ouvrent ainsi dans la lutte, et la multiplication de ces écarts est elle-même la possibilité pratique du communisme à notre époque. Les travailleurs brûlent ou font sauter leurs usines, en réclamant des indemnités de licenciement au lieu de se battre pour maintenir leur emploi. Les étudiants occupent les universités, contre le système universitaire, plutôt qu’au nom de simples revendications pour lesquelles ils sont supposés se battre. Les femmes rompent avec les mouvements dans lesquels elles forment déjà une majorité, car ces mouvements ne peuvent qu’échouer à les représenter. Et partout, les chômeurs, les jeunes et les sans-papiers rejoignent et submergent les luttes d’une minorité privilégiée de travailleurs, rendant le caractère limité des revendications de ces derniers à la fois évident et impossible à soutenir. Face à ces écarts proliférant dans la lutte, une fraction du prolétariat,
« en dépassant le caractère revendicatif de sa lutte, prendra des mesures communisatrices et entamera alors l’unification du prolétariat qui ne sera pas différente de celle de l’humanité, c’est-à-dire de sa création comme l’ensemble des relations que les individus établissent entre eux dans leur singularité »3 .
Pour TC, les divisions au sein du prolétariat ne sont donc pas seulement ce qui doit être surmonté au cours de la révolution, mais aussi la source même de ce dépassement. C’est peut-être la raison pour laquelle TC, seul parmi les théoriciens de la communisation, s’est consacré à l’examen de la distinction de genre, car il s’agit peut-être de la division la plus fondamentale au sein du prolétariat.
Le travail de TC sur le genre est relativement nouveau, surtout pour un groupe qui a passé les trente dernières années à peaufiner et à reformuler encore et encore quelques idées clés. Leur texte principal sur le genre, rédigé en 2008, a finalement été publié en 2010 (avec deux annexes supplémentaires) dans le numéro 23 de leur revue, intitulé Distinction de Genres, Programmatisme et Communisation. TC sont connus pour leurs formulations ésotériques. Cependant, moyennant quelques efforts, la plupart de leurs idées peuvent être reconstruites de façon claire. Comme leur travail sur le genre est provisoire, nous nous abstiendrons de longues citations. TC affirme que la communisation suppose l’abolition du genre autant que l’abolition des relations sociales capitalistes, car les divisions qui maintiennent en place le capitalisme font perdurer la division de genre, et la division de genre préserve toutes les autres divisions. Cependant, bien que TC prenne la direction de l’élaboration d’une théorie matérialiste rigoureusement historique de la production du genre, ils ne font finalement pas beaucoup plus que suturer le genre à une théorie déjà existante du mode de production capitaliste (en grande partie parce qu’ils s’appuient largement sur le travail d’une grande féministe française, Christine Delphy4).
TC développe une théorie particulièrement fascinante de la communisation dans la mesure où elle est aussi une périodisation de l’histoire de la lutte des classes – qui correspond elle-même à une périodisation de l’histoire de la relation capital-travail. Cela donne à TC un point de vue historique unique sur les perspectives actuelles du communisme. De manière décisive, TC se concentre sur la reproduction de la relation capital-travail, plutôt que sur la production de la valeur. Ce changement d’orientation leur permet de mettre à leur portée l’ensemble des relations qui construisent réellement la vie sociale capitaliste – au-delà des murs de l’usine ou du bureau. La relation de genre s’est toujours étendue au-delà de la seule sphère de la production de valeurs.
I. La construction de la catégorie « Femme »
La femme est une construction sociale. La catégorie même de femme se situe à l’intérieur et à travers un ensemble de relations sociales, lesquelles sont indissociables d’une scission de l’humanité entre deux éléments : femme et homme – et pas seulement femelle et mâle. La différence sexuelle se voit ainsi conférer une importance sociale particulière qu’elle n’aurait pas autrement.5 La différence sexuelle a cette signification déterminée dans les sociétés de classes dès lors que la catégorie de femme en vient à être définie par la fonction que la plupart (mais pas toutes) des femmes humaines exercent pendant une période de leur vie : la reproduction sexuelle de l’espèce.
La société de classes donne donc une finalité sociale au corps : parce que certaines femmes « ont » des bébés, tous les corps qui pourraient « produire » des bébés sont soumis à une régulation sociale. Les femmes deviennent les esclaves de leurs contingences biologiques de naissance. Au cours de la longue histoire de la société de classe, les femmes sont nées dans un monde organisé uniquement pour les hommes – principaux « acteurs » de la société, et seules personnes capables de posséder des propriétés. Les femmes sont ainsi devenues la propriété de la société dans son ensemble.
Parce que les femmes ne sont pas, par définition, des hommes, elles sont exclues de la vie sociale « publique ». Pour Théorie Communiste (TC), cette circonscription du domaine des femmes signifie que non seulement les hommes s’approprient leur corps, mais aussi l’ensemble de leur activité. Leur activité, autant que leur être même, est par définition « privée ». De cette façon, l’activité des femmes prend le caractère du travail domestique. Ce travail ne se voit pas défini comme un travail fait à la maison, mais comme un travail de femme. Si une femme vend du tissu au marché, elle est tisserande, mais si elle fabrique du tissu à la maison, elle n’est qu’une épouse. L’activité d’une femme est donc considérée comme s’il s’agissait d’une simple activité, sans aucune des déterminations concrètes qu’on lui donnerait si elle était exercée par une autre entité sociale plus digne. La distinction de genre femme / homme prend ainsi une signification supplémentaire en tant que distinction public / privé, social / domestique.
Le travail non rémunéré des femmes (y compris éventuellement la « production » d’enfants) correspond t-il donc, pour les hommes, à une relation de classe, ou même à un mode de production (Christine Delphy parle de mode de production domestique) ? TC définit la société de classes comme une relation entre producteurs de plus-value et extracteurs de plus-value. La division sociale entre ces groupes est constitutive des relations de production, qui organisent les forces productives dans le but de produire et d’extraire un surplus de valeur. Fondamentalement, ces relations doivent produire la reproduction de la relation de classe elle-même. Cependant pour TC – et nous les suivons sur ce point – chaque mode de production est déjà une totalité, et dans les faits la pertinence sociale du rôle des femmes dans la reproduction sexuelle change avec le mode de production. Cela ne signifie pas que les relations entre hommes et femmes sont dérivées des relations entre les classes. Cela signifie plutôt que les relations entre les hommes et les femmes constituent un élément essentiel de la relation de classe et ne peuvent être considérées comme un « système » distinct se rapportant au système fondé sur les classes.
Bien sûr, cette discussion reste abstraite. La question est désormais de savoir comment lier notre histoire sur les femmes avec notre histoire sur la succession des modes de production. Pour TC, les femmes sont la principale force productive au sein de toutes les sociétés de classe, puisque la croissance de la population constitue un support essentiel à la reproduction du rapport de classe. L’augmentation de la population en tant que force productive principale reste, tout au long de la société de classe, le fardeau des femmes. Ainsi, la matrice hétérosexuelle est fondée sur un ensemble spécifique de relations sociales matérielles.
Nous devons toutefois rappeler que le fardeau particulier de l’accouchement est antérieur à l’avènement de la société de classes. Historiquement, chaque femme donnait naissance, en moyenne, à six enfants – juste pour s’assurer que deux de ces six enfants survivent et se reproduisent pour les générations futures. La probabilité qu’une femme meure en couches, au cours de sa vie, était de près d’une sur dix6. L’intuition de TC est que l’avènement de la société de classe – qui a vu une augmentation massive de la taille de la population humaine – a renforcé la pertinence sociale de ces faits. Mais même avant l’avènement de la société de classes, il n’y a jamais eu de régime « naturel » de reproduction sexuelle humaine. L’âge du mariage, la durée de l’allaitement, le nombre de naissances, l’acceptabilité sociale de l’infanticide : tout cela a varié selon les formations sociales humaines7. Leur variation marque une adaptabilité unique de l’espèce humaine.
Cependant, l’histoire longue de l’espèce humaine nous intéresse moins que celle du mode de production capitaliste. Le travail salarié est fondamentalement différent de l’esclavage ancien et du vassalisme féodal. Dans le régime esclavagiste, les producteurs de surtravail n’entretiennent aucune « relation » avec les moyens de production – les esclaves font eux-mêmes partie des moyens de production. La reproduction ou l’entretien des esclaves est la responsabilité directe du propriétaire de l’esclave. Pour les esclaves, hommes ou femmes, la distinction entre public et privé se dissout donc, puisque les esclaves existent entièrement dans le domaine privé. Il n’est pas non plus question, pour les esclaves, d’héritage de propriété ou de relations avec l’État (comme le régime de taxation). Il est intéressant de noter qu’il y a des preuves montrant que le patriarcat était, peut-être pour cette raison, plutôt faible parmi les familles d’esclaves dans le Sud des Etats-Unis8. Dans le régime féodal, en revanche, les producteurs de plus-value ont un accès direct aux moyens de production. Le surtravail est extrait par la force. Le paysan est, face à cette force extérieure,représentant public de son ménage. La propriété se transmet à sa descendance. Les femmes et les enfants paysans sont confinés au domaine privé du village, qui est lui-même à la fois un site de production et de reproduction. La famille paysanne n’a pas besoin de sortir de sa sphère privée pour pouvoir produire ce dont elle a besoin, mais seulement de céder une partie de sa production aux seigneurs. Pour cette raison, les familles paysannes restent relativement indépendantes des marchés.
Dans le régime capitaliste, la vie des producteurs de plus-value est divisée entre la production publique de la plus-value et la reproduction privée des producteurs eux-mêmes. Les ouvriers, contrairement aux esclaves, sont leur « propriété » : ils n’existent que s’ils prennent soin de leur propre entretien. Si les salaires sont trop bas, ou si leurs services ne sont plus nécessaires, les travailleurs sont « libres » de survivre par d’autres moyens (tant que ces moyens sont légaux). La reproduction des ouvriers n’est donc absolument pas de la responsabilité du capitaliste. Cependant, contrairement aux vassaux, les travailleurs ne peuvent s’occuper de leur propre entretien que s’ils retournent sur le marché du travail, encore et encore, pour trouver du travail. Voici l’essence de la relation capital-travail. Ce que les travailleurs gagnent pour une production socialement exécutée dans le domaine public, ils doivent le dépenser pour se reproduire chez eux, dans leur propre sphère privée. Les oppositions binaires public / privé et social / domestique sont incarnées dans la relation salariale elle-même. Ces oppositions ne s’effondreront qu’avec la fin du capitalisme.
Si les capitalistes étaient directement responsables de la survie des travailleurs – et donc, si leur reproduction était retirée de la sphère privée -, les travailleurs ne seraient plus obligés de vendre leur force de travail. L’existence d’une sphère de reproduction domestique séparée (dans laquelle peu de production a lieu sans la médiation des marchandises achetées sur le marché) est constitutive des relations sociales capitalistes en tant que telles. L’activité sociale se sépare de l’activité domestique car le marché devient le mécanisme médiateur du travail social concret effectué à l’extérieur du foyer. La production de marchandises, qui se faisait autrefois à l’intérieur de la maison, la quitte de plus en plus pour être exécutée ailleurs. A ce stade, la distinction public / privé prend une dimension spatiale. Le foyer devient la sphère de l’activité privée, c’est-à-dire du travail domestique des femmes et du « temps libre » des hommes, tandis que l’usine prend en charge le caractère public et socialement productif du travail des hommes.
Évidemment, les femmes ont aussi toujours été des travailleuses salariées, aux côtés des hommes, depuis que le capitalisme existe. Pour TC, la nature sexospécifique du travail domestique des femmes établit que leur travail, même lorsqu’il est effectué à l’extérieur de la maison, reste uniquement un travail de femmes, c’est-à-dire qu’il reste un travail salarié d’un type particulier, à savoir le travail improductif ou à faible valeur ajoutée. Les femmes ont tendance à occuper des emplois à temps partiel avec de bas salaires, en particulier dans les services (bien qu’il y ait aujourd’hui au moins quelques femmes dans chaque secteur de l’économie, y compris parmi les professionnels les mieux payés). Les femmes effectuent souvent des services domestiques au domicile d’autres personnes ou encore dans des bureaux, des avions, etc. Lorsque les femmes travaillent dans les usines, elles sont séparées des emplois à forte intensité de main-d’oeuvre et sont employées lorsqu’il s’agit de travaux manuels délicats, en particulier dans le textile, l’habillement et l’assemblage électronique. De même, le travail effectué à la maison reste un travail de femmes, même si ce sont des hommes qui s’en chargent – ce qui, dans une large mesure, n’est pas le cas.
Une fois que le genre s’incarne dans la relation salariale, comme relation binaire public / privé, TC cesse de fonder le genre dans le rôle que jouent les femmes dans la reproduction sexuelle. Que le travail des femmes présente une nature particulière à l’extérieur du foyer n’est vrai que par analogie avec la nature du travail qu’elles effectuent à la maison. Une telle théorisation n’entretient aucune corrélation avec le fondement matériel du rôle des femmes dans la reproduction sexuée et, en ce sens, elle est plus ou moins idéologique. De même, TC définit de plus en plus le travail que font les femmes à la maison par son caractère de travail reproductif quotidien, nécessairement effectué en dehors de la sphère de production, et non par rapport au rôle que jouent les femmes dans l’accouchement, en tant que « principale force de production ». Si, dans le mode de production capitaliste, les femmes sont et ont toujours été à la fois des travailleuses salariées et des travailleuses domestiques, pourquoi restent-elles presque uniquement des femelles ? A mesure que TC commence à parler du capitalisme, ils abandonnent progressivement leur focalisation sur la reproduction sexuelle, qui disparaît sous une conception matériellement infondée du travail domestique (bien que que leurs références à la biologie réapparaissent plus tard, comme nous allons le voir).
Cet oubli est une grave erreur. La ségrégation sexuelle du travail dans le mode de production capitaliste est directement liée à la temporalité de la vie d’une femme : en tant que porteuse d’enfants, principale source d’alimentation des jeunes enfants (allaitement), et principale responsable des enfants durant leur puberté. Au cours de la longue histoire du capitalisme, la participation des femmes au marché du travail a suivi une courbe en forme de« M »9.La participation augmente rapidement à mesure que les femmes atteignent l’âge adulte, puis diminue à la fin de la vingtaine et au début de la trentaine. Elle augmente à nouveau lentement à mesure que les femmes atteignent la quarantaine avant de chuter à l’âge de la retraite. Les raisons de cette tendance sont bien connues. Les jeunes femmes cherchent un emploi à temps plein, mais avec l’espoir qu’elles cesseront de travailler ou qu’elles travailleront à temps partiel lorsqu’elles auront des enfants. Lorsque les femmes entrent en âge de procréer, leur participation à la population active diminue. Les femmes qui continuent à travailler alors que leurs enfants sont jeunes font partie des prolétaires les plus pauvres et sont surexploitées : mères célibataires, veuves et divorcées, ou femmes dont les maris ont des revenus faibles ou peu stables. A mesure que les enfants grandissent, de plus en plus de femmes retournent sur le marché du travail (ou travaillent à plein temps), mais elles sont nettement désavantagées en termes de compétences et de durée d’emploi, du moins par rapport aux hommes avec qui elles sont en concurrence pour l’emploi10.
Pour toutes ces raisons, les économies capitalistes ont toujours donné une « place » spéciale aux travailleuses, soit parce qu’on ne s’attendait pas à ce qu’elles restent très longtemps sur le marché du travail, soit parce qu’elles étaient plus âgées, arrivaient ou revenaient sur le marché du travail en retard. En outre, les femmes forment une composante importance de ce que Marx appelle l’armée de réserve « latente » de main-d’oeuvre, devant entrer et sortir du marché du travail en fonction des besoins cycliques des entreprises capitalistes. L’existence d’une position distincte pour les femmes dans la population active renforce alors le dévouement de l’ensemble de la société à l’idéologie d’une place naturelle des femmes, tant à la maison qu’au travail. Même lorsque hommes comme femmes travaillent, les hommes (du moins jusqu’à une date récente) gagnent généralement des salaires plus élevés et travaillent plus longtemps à l’extérieur du foyer. Il y a donc une forte pression sur les femmes, dans la mesure où elles sont matériellement dépendantes de leurs maris, pour qu’elles acceptent leur subordination : ne pas « trop insister » 11sur ce qui concerne la division sexuelle du travail au sein du foyer. Historiquement, cette pression a été aggravée par le fait que les femmes ont été, jusqu’après la Seconde Guerre mondiale, exclues de facto, sinon de jure, de nombreuses formes de propriété, ce qui les a rendues dépendantes des hommes comme médiateurs de leur relation au capital. Par conséquent, les femmes ne possédaient pas les libertés juridiques que les prolétaires masculins gagnaient pour eux-mêmes – et non pour leurs femmes. Les femmes n’étaient pas vraiment des travailleuses « libres » par rapport au marché et à l’État, comme l’étaient leurs homologues masculins12.
II. La destruction de la catégorie « Femme »
Bien que TC ne parvienne pas à expliquer ce qui est au fondement de la construction des femmes dans le capitalisme, la revue propose une théorie séduisante sur la façon dont la situation des femmes au sein du capitalisme change en fonction des contradictions qui se développent dans ce mode de production. Si « le capitalisme a un problème avec les femmes » c’est que, dans la période actuelle, la relation capital-travail ne peut suffire à la croissance continue de la main-d’oeuvre. Comme nous l’avons déjà noté, le capital est de plus en plus confronté à une surpopulation importante et croissante, structurellement excessive par rapport à ses besoins en main-d’oeuvre. L’apparition de cette surpopulation a coïncidé avec une transformation dans la manière dont les Etats capitalistes et les mouvements ouvrier et féministe ont considéré les femmes comme « la principale force productive ». Lors d’une séquence précédente, le taux de natalité avait chuté précipitamment en Europe et dans les anciennes colonies européenne. La réponse avait été « pro-nataliste ». La civilisation était prétendument menacée de dégénérescence imminente, car les femmes manquaient à leur devoir envers la nation ; il fallait les encourager à s’y atteler à nouveau. Dans les années 1920, même les féministes sont devenues de plus en plus pro-natalistes, transformant le maternalisme en une justification de la dignité « égale mais différente » des femmes par rapport aux hommes. Cependant, dans les années 70, alors que la population des pays pauvres explosait et alors que l’économie capitaliste entrait dans une crise prolongée, le maternalisme était en grande partie mort. Le monde était surpeuplé par rapport à la demande en main-d’oeuvre. Les femmes n’étaient plus nécessaires dans leur rôle de femmes. La « dignité particulière » de leur rôle subordonné n’était plus du tout digne.
Cependant, nous n’avons ici que la moitié de l’histoire. L’autre moitié se trouve dans l’histoire de la transition démographique elle-même, histoire dont TC n’a pas tenu compte. Au cours de son développement précoce, le capitalisme a augmenté la consommation des travailleurs et donc amélioré leur santé, réduisant la mortalité infantile. La baisse de la mortalité infantile a, en retour, réduit le nombre d’enfants que chaque femme devait avoir pour pouvoir reproduire l’espèce. Au début, cette transformation s’est traduite par une augmentation du nombre d’enfants survivants par femme et une croissance rapide de la population. Ainsi, la propagation des relations sociales capitalistes était partout associée à une augmentation de la charge reproductive des femmes. Cependant, avec le temps, et maintenant dans presque toutes les régions du monde, il y a eu une réduction subséquente, tant du nombre d’enfants mis au monde par chaque femme que du nombre d’enfants qui survivent ensuite à la naissance et à la petite enfance. Simultanément, comme les hommes et les femmes vivent plus longtemps, les femmes dédient une moindre part de leur vie à avoir de jeunes enfants ou à s’en occuper. On ne saurait surestimer l’importance de ces faits. Ils expliquent pourquoi, à notre époque, la camisole de force de la matrice hétérosexuelle a vu ses boucles légèrement relâchées, tant pour les hommes que pour les femmes (et même, dans une certaine mesure, pour ceux qui ne correspondent ni aux catégories de la distinction de genre, ni à celles de la différence sexuelle)13.
Comme pour tout dans le capitalisme, la « liberté » que les femmes ont gagnée (ou sont en train de gagner) quant à leur destin reproductif n’a pas été remplacée par du temps libre, mais par d’autres formes de travail. L’entrée supposée des femmes sur le marché du travail a toujours été, en réalité, une augmentation du temps de la durée de la participation déjà existante des femmes au travail salarié. Mais maintenant, comme les femmes passent, partout, moins de temps à accoucher et à élever leurs enfants, leur participation au marché du travail ne peut désormais plus être représentée comme un ‘M’ comme auparavant. La situation des femmes est donc de plus en plus partagée entre, d’une part, la charge décroissante mais encore lourde de la procréation et du travail domestique et, d’autre part, le rôle de plus en plus important du travail salarié dans leur vie – dans lequel elles restent cependant défavorisées. Comme toutes les femmes le savent, cette situation s’exprime comme un choix forcé entre la promesse d’une vie professionnelle supposée égale à celle des hommes et la pression, ainsi que le désir, d’avoir des enfants. Le fait que certaines femmes choisissent de ne pas avoir d’enfants du tout – et donc de résoudre elles-mêmes ce dilemme, même de manière inadéquate – est la seule explication possible pour comprendre la baisse du taux de natalité en dessous de ce que prévoit la théorie de la transition démographique. La fécondité n’est plus que de 1,2 enfant par femme en Italie et au Japon, presque partout ailleurs en Occident elle est tombée en dessous de 2, passant de 6 enfants par femme en 1950 à environ 2,5 aujourd’hui dans l’ensemble du monde.
Dans cette situation, il devient de plus en plus évident que les femmes ont un problème avec les marchés, puisque les marchés sont incompatibles avec les femmes. Cette incompatibilité se résume en deux faits qui concernent le mode de production capitaliste. Premièrement, le capital ne peut, s’il doit rester capital, assumer la responsabilité directe de la reproduction de la classe ouvrière. C’est parce que les travailleurs sont responsables de leur propre entretien qu’ils sont obligés de retourner, encore et encore, sur le marché du travail. Dans un second temps, les marchés du travail, s’ils doivent rester des marchés, doivent être « aveugles au sexe »14 : les marchés doivent mesurer la concurrence entre les travailleurs sans tenir compte des caractéristiques non marchandes propres aux travailleurs eux-mêmes. Ces caractéristiques non marchandes comprennent le fait que la moitié de l’humanité est composée de femmes. Pour certains employeurs, la différence sexuelle ne peut qu’apparaître comme un coût supplémentaire. Les travailleuses peuvent avoir des enfants et on ne peut dont pas compter sur le fait qu’elles n’en aient pas. Pour d’autres employeurs, la différence sexuelle apparaît comme un avantage pour exactement la même raison : les femmes fournissent une main-d’œuvre flexible et bon marché. Les femmes sont ainsi reléguées par les relations capitalistes — précisément parce que les marchés ne tiennent pas compte du sexe — au travail salarié des femmes.
Cette incompatibilité des femmes et des marchés a été une malédiction pour le mouvement des femmes. Le féminisme a historiquement accepté la nature sexospécifique de la vie sociale, puisque ce n’est que par le genre que les femmes pouvaient affirmer leur identité, et sur la base de cette dernière qu’elles pouvaient s’organiser. Cette affirmation est devenue historiquement un problème pour le mouvement, car il est impossible de concilier pleinement le genre – l’existence même des femmes et des hommes – avec l’existence simultanée de la classe ouvrière et du capital15. En conséquence, le mouvement des femmes a oscillé entre deux positions16. D’une part, les femmes se sont battues pour l’égalité sur la base de leur similitude fondamentale par rapport aux hommes. Mais quelle que soit la similitude de leurs aptitudes, les femmes et les hommes ne sont pas et ne seront jamais les mêmes pour le capital. D’autre part, les femmes se sont battues pour l’égalité sur la base de leur « différence mais égale dignité » aux hommes. Cette différence, rendue explicite par le statut de la maternité, est précisément la raison du rôle subordonné des femmes.
Le mouvement ouvrier a promis de réconcilier les femmes et les travailleurs au-delà, ou du moins dans le dos du marché. Après tout, les textes fondateurs de la social-démocratie allemande, outre le Capital de Marx, étaient les Origines de la famille, de la propriété privée et de l’État d’Engels, et Femme et Socialisme de Bebel. Par la lutte, le mouvement ouvrier promis de faire sortir les femmes de la maison et de les faire entrer sur le marché du travail, où elles deviendraient finalement les véritables égales des hommes. Afin d’accomplir cette égalité réelle, le mouvement ouvrier socialiserait le travail reproductif des femmes « après la révolution ». Les tâches ménagères et la garde des enfants seraient accomplies collectivement par les hommes et les femmes. Comme il est apparu clairement aux éléments les plus extrêmes du mouvement féministe radical dans les années 1970, ces mesures ne suffiraient jamais à a surer une « véritable égalité » entre les travailleurs et les travailleuses. La seule possibilité d’atteindre l’égalité des travailleurs, à la limite de l’intersection du genre et du travail, serait que les bébés naissent dans des éprouvettes, n’ayant finalement rien à voir avec des femmes17.
En réalité, le mouvement ouvrier a trahi ses femmes dès qu’il en a eu l’occasion. Chaque fois qu’ils s’approchaient du pouvoir, les travailleurs masculins étaient tout à fait disposés à démontrer leur capacité à gérer l’économie en montrant qu’eux aussi savaient comment maintenir les femmes à leur place. Au sein du Parti communiste britannique, libérer les maris du travail domestique était la tâche principale du « travail partisan » des femmes18. Comment aurait-il pu en être autrement ? Au sein d’un monde défini par le travail – ou plus précisément par le travail productif (une catégorie du capitalisme) – les femmes vaudront toujours moins que les hommes. La tentative d’ « élever » les femmes sur un pied d’égalité avec les hommes a toujours consisté à adapter un mouvement des travailleurs « universellement » pertinent pour répondre aux besoins « particuliers » de ses femmes. La tentative de le faire, dans les limites du capitalisme, s’est traduite par une socialisation minimale de la garde des enfants, ainsi que par l’institution d’un ensemble minimal de lois protégeant les femmes de leurs désavantages auxquels elles se confrontaient sur les marchés (c’est-à-dire le congé maternité, etc). Les mouvements ouvriers auraient pu aller plus loin dans cette voie. Ils auraient pu faire des femmes une priorité plus importante qu’ils ne l’ont fait. Mais le fait est qu’ils ne l’ont pas fait. Et maintenant, c’est terminé.
La mort du mouvement ouvrier a été envisagée dans d’autres textes. Sa mort marque aussi le passage d’une forme historique de révolution à une autre. Aujourd’hui, la présence des femmes dans la lutte des classes ne peut fonctionner que comme un écart, une déviation dans le conflit des classes, déstabilisant ses termes. Cette lutte ne peut pas être la leur, même si, dans certains cas, elle rassemble hommes et femmes. Aussi longtemps que les prolétaires continuent d’agir en tant que classe, les femmes parmi elles ne peuvent que perdre. Au cours de la lutte, les femmes vont donc entrer en conflit avec les hommes. On leur reprochera d’avoir fait dérailler le mouvement, de l’avoir détourné de ses objectifs premiers. Mais le « but » de la lutte est ailleurs. Ce n’est que de l’intérieur de ce conflit (et d’autres) que le prolétariat en viendra à considérer son appartenance de classe comme une contrainte extérieure, une impasse qu’il devra surmonter pour être quelque chose au-delà de sa relation au capital. Ce dépassement c’est la révolution comme communisation, détruisant le genre et toutes les autres divisions qui nous séparent.
Merci à Francesca Manning pour son aide inestimable dans l’élaboration des idées développées dans ce texte. J’aimerais également remercier Aaron Benanav pour son aide dans l’édition de ce travail.
1. Voir ‘Misery and Debt’, Endnotes 2 (2010): 20-51, http://endnotes.org.uk/articles/1.
2. Pour un débat clé sur cette question, voir Endnotes 1 (2008), http://endnotes.org. uk/issues/1
3. Théorie Communiste, ‘The Present Moment’
4. Christine Delphy and Diana Leonard, Familiar Exploitation (Cambridge: Polity Press, 1992).
5. Les êtres humains ne rentrent pas tous dans les catégories de ‘mâle’ et de ‘femelle’. Il ne s’agit pas d’utiliser le langage de la biologie pour fonder une théorie de la sexualité naturalisée, qui serait distincte du genre socialisé. La nature, elle-même sans distinctions, s’intègre à une structure sociale – qui transforme des moyennes naturelles en normes de comportement. Toute les ‘femmes’ ne portent pas d’enfants ; peut-être certains ‘hommes’ le font-ils. Cela ne les rend pas moins redevables des structures sociales, y compris en ce qui concerne leurs corps, parfois modifiés à la naissance pour assurer leur conformité aux normes sexuelles.
6. Ces statistiques montrent clairement à quel point la violence envers les femmes, parfois perpétrée par les femmes elles-mêmes, a toujours été nécessaire pour les maintenir dans leur rôle dans la reproduction de l’espèce. Voir Paola Tabet, ‘Natural Fertility, Forced Reproduction’, in Diana Leonard and Lisa Adkins, Sex in Question (London: Taylor and Francis, 1996).
7. Pour une introduction à la démographie, voir Massimo Livi-Bacci, A Concise History of World Population (Malden, Mass. and Oxford: Blackwell, 2007).
8. Ellen Meiksins Wood, ‘Capitalism and Human Emancipation’, New Left Review I/167 ( Jan-Feb 1988): 3-20.
9. Cette expression provient du Japon. Voir Makotoh Itoh, The Japanese Economy Reconsidered (Palgrave 2000).
10. Johanna Brenner et Maria Ramas, ‘Rethinking Women’s Oppression’, New Left Review I/144 (Mar-Apr 1984): 33-71.
11. Johanna Brenner et Maria Ramas, ‘Rethinking Women’s Oppression’, New Left Review I/144 (Mar-Apr 1984): 33-71.
12. Pour une théorie plus développée de la relation des femmes à la propriété, se référer à ‘Notes on the New Housing Question’, Endnotes 2 (2010): 52-66, http://endnotes. org.uk/articles/3. Les fondements de ce desserrement, tout comme sa temporalité, sont demeurés inexplicables dans le cadre de la théorie queer.
13. Brenner et Ramas, ‘Rethinking Women’s Oppression’.
14. En ce sens, c’est bien sûr seulement l’histoire de la situation des femmes dans le mouvement ouvrier qui nous intéresse. Les suffragettes bourgeoises défendaient un accès au vote basé sur des critères de propriété – excluant des femmes comme ennemies de classe. Au milieu du 20e siècle, ces femmes bourgeoises défendirent le rôle maternelle des femmes – tandis qu’elles fondaient des organisations pour contrôler le corps des femmes issues des ‘classes dangereuses’.
15. Joan W. Scott, Only Paradoxes to Offer (Cambridge, Mass.: Harvard University Press, 1996).
16. Le féminisme radicale a suivi un étrange trajectoire au cours de la seconde moitié du 20e siècle, plaçant d’abord la maternité, puis le travail domestique, et enfin la violence sexuelle (ou l’orgasme masculin) au fondement de l’oppression des femmes. Le problème étant que dans chaque cas, ces féministes cherchaient un fondement anhistorique à ce qui était devenu un phénomène historique.
17. Pour une histoire de la situation des femmes au sein du mouvement ouvrier, voir Geoff Eley, Forging Democracy (Oxford: Oxford University Press, 2002).
18. Théorie Communiste, ‘Much Ado about Nothing’, Endnotes 1 (2008),http://endnotes.org.uk/articles/13.
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