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La gauche américaine remobilisée par l’Afghanistan

epuis plusieurs jours Barack Obama “consulte”. Le président américain doit répondre à la requête que lui a présentée le commandant en chef des forces de l’OTAN en Afghanistan, le général Stanley McChrystal, pour obtenir 40 000 hommes supplémentaires. Mardi 6 octobre, M. Obama a reçu les principaux élus des deux partis pour les écouter. Il leur a indiqué que sa décision “ne contenterait pas tout le monde”. Renforts ou stratégie de sortie à trouver ? Le président veut prendre son temps et échapper aux pressions.{print_link]En attendant, la gauche démocrate, dont l’activisme sur les questions internationales était en chute libre depuis l’annonce duretrait programmé d’Irak, se mobilise contre cette guerre qu’elle juge de plus en plus coûteuse, meurtrière et impopulaire. Une guerre qui a commencé il y a huit ans, et dont l’anniversaire tombe mercredi 8 octobre. Et la tension monte. Mercredi, le président devait être confronté à la première journée nationale de manifestations pour exiger, non plus le retrait américain d’Irak, mais d’Afghanistan.

Christopher Hayes, le directeur du bureau de Washington de The Nation, l’hebdomadaire phare de la gauche démocrate radicale, ne s’attendait pas à ce qu’elles soient de grande envergure. Mais l’essentiel, disait-il, à la veille des manifestations “est qu’elles s’inscrivent dans une désaffection croissante de l’opinion envers la guerre en Afghanistan, et dans son rejet de plus en plus évident tant à la base qu’au sommet du parti”.

Les adversaires de cette guerre “sentent qu’ils ne sont plus seuls, ça les remobilise car ils se disent qu’ils peuvent désormais influencer les décisions”, ajoutait M. Hayes.

Lundi, The Nation a publié une “Lettre ouverte au président Obama” signée William Polk, ex-directeur du Conseil de planification politique du département d’Etat sous le président John Kennedy. Pour résumer : les Etats-Unis et l’OTAN ne gagneront pas plus cette guerre que n’y sont parvenus les Soviétiques.

Le rapprochement entre l’Afghanistan et le “bourbier” vietnamien de la fin des années 1960 devient aussi de plus en plus fréquent aux Etats-Unis. Mais développé par quelqu’un comme le sénateur John Kerry, président de la commission des relations extérieures du Sénat qui combattit au Vietnam et y fut “multidécoré”, l’argument prend plus de poids. Récemment, le sénateur du Massachusetts, a en effet déclaré : “Au Vietnam, on a entendu l’état-major sur le terrain dire que nous avions besoin de plus de troupes. Et un président des Etats-Unis dire qu’il suffisait d’envoyer plus de troupes pour entrevoir la lumière et la sortie du tunnel. Le fait est qu’ils avaient tort.”

De son côté, la désormais célèbre militante californienne antiguerre Cindy Sheehan – la “Peace Mom” (Maman Paix) qui a perdu un fils en Irak – a été brièvement interpellée, lundi, devant la Maison Blanche. Elle brandissait un panneau réclamant en toutes lettres la clôture des centres de détention américains les plus décriés dans le monde. On y lisait : “Fermez Guantanamo et Bagram, augmentez les dépenses pour le logement et le travail.”

Mme Sheehan avait annoncé son intention de battre le rappel dans la rue mercredi : “La façade a changé, la politique reste la même à Washington”, avait-elle déclaré.

Jodie Evans, directrice du mouvement “Code Pink , des femmes pour la paix”, devait manifester, elle aussi, à Los Angeles. “On avait du mal à mobiliser contre cette guerre en Afghanistan. Après tout, c’est de là que les terroristes d’Al-Qaida sont partis. Mais depuis l’élection d’Obama, on est resté trop silencieux. On ne voulait pas l’empêcher de réussir, nous a-t-elle expliqué. Or il m’a beaucoup déçue. Maintenant, les gens sont bien plus réceptifs. Et de l’intérieur du parti, les pressions montent.” Elle cite le cas de Barbara Lee, représentante de Californie et amie personnelle de M. Obama, qui a mis au point avec une vingtaine de démocrates de gauche un projet de loi “interdisant toute augmentation des forces américaines en Afghanistan”.

Un mouvement est en train de renaître, dont il est trop tôt pour savoir s’il se développera. Son avenir sera beaucoup tributaire de la décision finale de M. Obama. De plus, la question afghane est loin d’être un enjeu majeur dans l’opinion publique. “Elle vient bien après la situation économique et la réforme de la santé, qui sont les deux premières préoccupations, suivies du changement climatique et des libertés civiques”, estime M. Hayes. Reste, selon le dernier sondage Washington Post-ABC News, que seul un Américain sur quatre soutient l’envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan. Et parmi les démocrates, on n’en trouve qu’un sur cinq.

Sylvain Cypel

Doutes sur la fermeture de Guantanamo en janvier
Le ministre américain de la justice, Eric Holder, a confirmé, mardi 6 octobre, que la fermeture du centre de détention de Guantanamo en janvier 2010, comme prévu, sera “difficile”. L’Association américaine de défense des libertés civiles (ACLU) s’est dite “très inquiète” de ces déclarations. – (AFP.)

Article paru dans l’édition du 08.10.09
LE MONDE | 07.10.09 | 15h37  •  Mis à jour le 07.10.09 | 15h37
New York Correspondant
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