Israël: une génération sacrifiée
Depuis plusieurs semaines, la jeunesse israélienne est mobilisée contre la vie chère et les loyers inabordables. Difficile pourtant de traduire ce mécontentement dans les urnes tant les partis politiques sont focalisés sur le conflit israélo-palestinien.
Ce qui avait commencé par l’installation d’une tente sur l’avenue Rothschild [la plus cossue de Tel-Aviv] il y a un peu plus de deux semaines est devenu aujourd’hui un vaste mouvement, avec des manifestations de masse dans tout le pays. Les dizaines de milliers d’Israéliens qui ont défilé le samedi 30 juillet au soir portent haut et fort la voix du mécontentement de l’opinion face au gouvernement et à l’absence de véritable politique sociale.
Les manifestants ne sont pas des pauvres ou des exclus habitant les “villes de développement” [créées à partir des années 1950 pour accueillir l’immigration juive], ni des haredim [ultraorthodoxes] qui consacrent leur vie à l’étude et vivent des subsides de l’Etat, ni non plus des colons de Cisjordanie, très organisés, qui savent manœuvrer dans le système politique grâce à un savant mélange de protestation et de cooptation. Ce sont de jeunes Israéliens diplômés, issus des classes moyennes, qui passent trois ou quatre ans dans l’armée ou dans d’autres formes de service national, et qui découvrent que l’ascenseur social ne fonctionne plus pour eux. Autrement dit, ce sont des jeunes qui pensent contribuer à un Etat qui les ignore et les néglige.
Reste à savoir s’il est possible, en Israël, de créer un parti politique qui se concentre exclusivement sur les questions sociales et économiques, sans prendre position sur le conflit israélo-arabe et sur l’avenir des Palestiniens. Jusqu’à présent, l’histoire nous a montré que c’était chose impossible. Même le Meretz [parti à gauche du Parti travailliste] et le Parti travailliste se définissent, d’abord et avant tout, par leur programme politique à l’égard du conflit. C’est là une excuse bien commode pour ne pas aborder les questions socio-économiques, nos politiciens arguant ainsi que, si ces questions sont bien essentielles, l’Etat doit se concentrer sur sa survie avant de pouvoir se “payer le luxe” de penser à son tissu social.
Au mieux, certains partis, tels le Likoud et le Shass [ultraorthodoxe], ont adopté des politiques populistes afin d’apaiser les plus pauvres. Aucun n’a accordé la moindre attention à la classe moyenne dont les impôts financent à peu près tout (les quartiers défavorisés, les colonies de Cisjordanie, l’énorme budget du ministère de la Défense). Mais il y a aujourd’hui une différence de taille : l’absence d’opposition de centre gauche. Le Meretz comme le Parti travailliste sont à bout de souffle. Ni l’un ni l’autre ne représente une véritable opposition face au gouvernement en place et ni l’un ni l’autre n’a de vrai discours social alternatif. De plus, même en pleine dégringolade, ces deux partis continuent d’être identifiés à l’élite du pays, cible de la colère des manifestants de ces dernières semaines.
Depuis quelques années, ceux qui tiennent les rênes de l’économie israélienne ont rallié la politique de laisser-faire du nouveau Likoud – celui qu’incarne Benyamin Nétanyahou –, limitant d’autant plus la marge d’influence d’un Parti travailliste diminué et épuisé. Quant à Kadima, il ne se fait tout bonnement pas entendre. Ce parti n’a aucune proposition à mettre en avant (pas plus politique que sociale ou économique), et il est très peu probable qu’il se maintienne encore très longtemps sur la scène politique. Triste panorama de la politique israélienne et d’une démocratie pourtant pleine de vitalité. Toutefois, pour introduire d’authentiques changements politiques, sociaux et économiques, il faudra bien aller au-delà des manifestations de samedi soir, charmantes et bien élevées, et des camps de tentes montés par [les fils et filles] de la classe moyenne.
courrierinternational.com
“Reste à savoir s’il est possible, en Israël, de créer un parti politique qui se concentre exclusivement sur les questions sociales et économiques, sans prendre position sur le conflit israélo-arabe et sur l’avenir des Palestiniens”.
“Triste panorama de la politique israélienne et d’une démocratie pourtant pleine de vitalité. … pour introduire d’authentiques changements politiques, sociaux et économiques, il faudra bien aller au-delà”
Pas de solidarité avec cette société profondément raciste fondée sur : expropriation des habitations et expulsion des populations, vol et expropriation de la terre et expulsion de ses habitants, apartheid et massacres récurrents perpétrés par l’armée colonne vertébrale et substance de cette société.
Imaginons des colons Blancs en Afrique du Sud réclamant hausses de salaires, du travail, une meilleure protection sociale, bref, des jeunes diplomés qui se retrouvent, dans les conditions actuelles du système capitaliste mondial en dissolution, sans plus de perspectives d’assurer non seulement une place au sein de la hiérarchie du système mais en plus d’assurer une existence plus ou moins satisfaisante sur le plan social, matériel (prolétarisation, précarisation inévitable). Imaginez ces jeunes Blancs dont leur société est fondée sur l’expulsion, le vol, le massacre et l’apartheid, réclamer ce genre de subsides sans jamais prendre en compte les racines même de leur existence sociale, politique, historique; en s’en foutant littéralement des Noirs qu’ils ont expropriés, massacrés, et enfermés. Pas de solidarité tant qu’ils ne se remettent pas en cause, tant qu’ils ne remettent pas en cause radicalement leur société, tant qu’il ne se lient pas corps et âme à la force naissante des expropriés.
Imaginons des colons blancs en Algérie… etc.
Il n’y a pas de lutte commune entre colon et colonisés. Sauf s’il y a auto-négation des colons. Pour cela il y a trois conditions : 1° refus absolu de servir l’armée, 2° rendre la maison à ceux, celles qui en ont été expropriés, et construire la sienne à côté, 3° participer activement au sabotage de la société et à l’émergence de la nouvelle (développement des réseaux de refuzniks; travail de l’ombre de tous les jours avec les expropriés; etc.).
Par conséquent le parallèle établis par certains (cf. Bataille socialiste interview) entre ce genre de manifestation sociale banale d’israéliens moyens avec l’explosion sociale arabe est tout simplement une énième mystification faisant toujours, dans la représentation, le discours, les populations arabes les ombres d’elles-mêmes, et voulant toujours sauver en dernier ressort l’israélien; sans parler de cet article de courrier international (Il est curieux de voir que la faiblesse théorique (et par conséquent pratique) de l’extrême gauche la fait se positionner sur les mêmes points que l’idéologie ambiante diffusés par les organes du système). Pourquoi? Est-ce la culpabilité européenne d’avoir massacré, il y a 70 ans, une part de sa propre population qui lui paraissait dangereusement ‘étrangère’, dangereusement ‘dissolutive’?
Le spectre qui hante le monde n’en est pas un. Il est une réalité bien concrète (et pourtant toujours invisible) à laquelle il faudra plus qu’un beau discours pour s’y immerger. Cette réalité, le communisme, ne viendra plus nécessairement de l’aire euro-nordaméricaine, mais des aires non-blanches. C’est alors qu’il prendra des formes non prévues par l’imaginaire centrique des cerveaux bêtes et amorphes, imaginaire qui s’imagine le futur sur le modèle du présent.
Si tout mouvement social dans une société coloniale est automatiquement condamné à cause de la couleur de peau ou de l’origine ethnique des exploités “blancs” qui se révoltent, il n’y a pas de raisons de s’arrêter aux Israéliens. Les prolétaires “blancs” (j’adore voir les concepts raciaux et racialistes envahir le cerveau décentré – excentre ? – des ultragauches intelligents et combatifs comme Rapid) qui se battent dans tous les pays occidentaux en ignorant totalement les luttes des sous-prolétaires “non blancs” ne méritent pas plus le soutien des communistes comme Rapid.
Avec ce genre de raisonnement, Rapid aurait aussi pu dénoncer le mouvement contre les retraites comme un mouvement de privilégiés… par rapport à tous ceux qui ne toucheront jamais de retraites. Ou les indemnités pour licenciements économiques comme des primes accordées à des “privilégiés” par rapports aux chômeurs qui ne bénéficient pas des mêmes “avantages”.
Ensuite entre les prolétaires “non blancs”, il pourrait aussi établir une hiérarchie: après tout ceux qui bossent dans la confection à 4 euros de l’heure permettent aussi à ceux qui bossent dans le bâtiment à 9 euros de l’heure de bénéficier de l’Etat providence et ainsi de suite.
Qu’on ne s’ébaubisse pas devant les “si jolies tentes” israéliennes. OK. Faut se méfier des mouvements présentés comme sympa par les médias.
Mais qu’on n’essaie pas une seconde de faire le lien entre les difficultés économiques et sociales d’une grande partie de la population israélienne, d’un côté, et le budget de l’armée et une économie tournée vers la guerre et l’expansion territoriale me semble pour le moins curieux de la part d’un penseur “communiste”. Ne pas voir le lien possible et explosif (mais pas automatique bien sûr) entre les deux questions, c’est nier les potentialités de ce mouvement social qui lui pourrait faire le lien, progressivement, pas bien sûr du jour au lendemain en rendant “sa maison” ou sa “terre” aux Palestiniens que lui ses parents, ou ses grands-parents ont spolié, comme le préconise Rapid.
On remarquera que, dans la pensée agile du communiste Rapid la responsabilité collective s’étend à tous les prolétaires israéliens, et ce sur plusieurs générations.
Couleur de peau, responsabilité collective des opprimés, diable la pensée communiste fait des progrès sidérants en ce moment.
Un auteur israélien écrivait hier que chaque fois qu’il y a eu un mouvement social important en Israël, une guerre a vite fait de faire diversion.
C’est cela qu’il faudrait dire plutôt que de nous parler des “Blancs” en Israël (les Falashas apprécieront d’être traités de Blancs par le communiste Rapid)….
De plus que je sache, tous les auteurs dont se réclament les communistes comme Rapid sont des “Blancs” vivant ou ayant vécu dans des métropoles impérialistes qui pillent, font la guerre, etc.
Encore un effort, Rapid, et les Indigènes de la République t’accueilleront les bras ouverts…
Déformation de mon propos, cynisme, et enfin mystification. La rhétorique habituelle. Le propos est déplacé dans une invective falsifiant le mien. Une série de réponses, quand même, à certains propos -réponse qui ne se mérite pas mais une telle mauvaise foi est difficile à laisser courir… je fais seulement des remarques ‘théoriques’ et je laisse tomber l’invective.
1° “qu’on n’essaie pas une seconde de faire le lien entre les difficultés économiques et sociales d’une grande partie de la population israélienne, d’un côté, et le budget de l’armée et une économie tournée vers la guerre et l’expansion territoriale”, c’est vrai mais n’ai-je pas déjà écrit : “l’armée colonne vertébrale et substance de cette société”… Il n’y a pas de civils en israel, c’est une société militaire (mis à part les haredim et les arabes, qui, exclus de l’armée pour des raisons différentes, constituent néanmoins les facteurs premiers de dislocation).
2° il est curieux que tu fasses l’impasse sur la contradiction fondamentale de la société israélienne. Non celle entre travailleurs et capitalistes : la société israélienne étant un kibbutz géant (ce qui par ailleurs est à l’image de la communauté capitaliste mondiale), par conséquent parler en ces termes généraux permet de masquer ces profondes et insurmontables contradictions : les juifs israéliens sont divisés et ghettoisés ET socialement ET ethniquement (et je ne parle pas du cas des haredims, contradiction supplémentaire, qui ne font pas le service, et ne travaillent pas). C’est malheureux n’est-ce pas? C’est la réalité complexe qui déborde de toutes parts des concepts mystificateurs servant à masquer la peur d’une réalité ne correspondant pas au schéma de l’idéologie diffuse… Le caractère ‘juif’ a bien sûr servit à l’élite ashkénaze (européens) pour masquer la ghettoïsation ethnique des mizrahims à fins utilitaires (gestion territoriale) et leur exploitation économico-sociale. Occulter cette réalité par la généralité du propos ‘travailleurs tous égaux’ c’est l’entériner, justifier l’horreur (la société israélienne du point de vue de ses victimes juives… le racisme ashkénaze n’a d’égal que sa condescendance envers ceux qui veulent les imiter et se hissent aux hauts postes de commandements afin d’essayer de laver le péché d’orientalité qui marquent leurs chairs, leur existence…).
3° Au vu de ces deux spécificités, ce mouvement social n’a aucune potentialité tant qu’il ne rejette pas les fondements de la société d’apartheid. Je vois déjà se profiler l’antiracisme de cette contestation en intégrant la revendication à l’égalité du travail et des salaires pour les juifs comme pour les arabes. Mais l’antiracisme à âme sociale n’est que l’envers du racisme, son effet. C’est un expédient pour détourner la question de fond.
3bis° Il ne s’agit pas d’une responsabilité collective. C’est un sophisme de ton propos. Se solidariser avec un mouvement social de jeunes issus de la colonisation réclamant une place dans la hiérarchie d’un système fondé sur l’expropriation, le massacre, la ghettoïsation? … On revient au début du point: rejeter ses propres fondements est la condition première. Un mouvement social ne suscite pas l’adhésion parce que c’est un mouvement social (si je suis cette logique alors en ce sens alors l’adhésion au boulangisme se justifie), mais en fonction de la réalité de son phénomène.
5° Il n’y a pas à comparer cette situation à celle de l’Europe. C’est la faire à l’envers… Encore un sophisme pour éviter la question… Il ne s’agit pas de l’Europe. Mais de cette zone particulière où existe cette société-Etat particulière dans une aire géo-sociale particulière avec une situation particulière qui doit être traité en fonction de son phénomène particulier. Amadeo Bordiga, si mal compris tout autant d’ailleurs par les ‘bordiguistes’, avait compris, réactualisant finalement Karl Marx, la puissance des sociétés non-blanches (non-européennes dirons-nous plutôt) à enclencher une synergie sociale émancipatrice se fondant sur leurs présupposés historiques et ce non de façon particulariste (et progressiste, ça c’est le tiersmondisme) mais dans une synergie englobant l’ensemble de l’humanité selon sa diversité. Tout ça pour dire : Prendre en compte la particularité d’une aire géo-sociale, c’est-à-dire son phénomène historique et social, n’est pas faire du particularisme opposant l’une à une autre; Prendre en compte les contradictions historiques et sociales n’est pas faire de la morale. En revanche, les occulter c’est justifier.
Le propos de la déformation et de l’insulte, c’est celui d’une mentalité d’assiégé.
@ Rapid
Ce que je voudrais savoir c’est que signifie ce “pas de solidarité” : “Pas de solidarité avec cette société profondément raciste…” D’abord qui demande de se sentir “solidaire” et cela fait quoi la “solidarité avec” ? ou l’inverse. Puis avec ” cette société…” Les manifestants de ce qui considéré dans ce commentaire avec légèreté comme “… ce genre de manifestation sociale banale d’israéliens moyens…” ne sont pas LA société.
Je suis d’accord avec Yves Coleman et le deuxième commentaire @anonyme n’arrange rien au fond de la question qui n’est pas selon mon point de vue posée correctement, puisqu’il ne s’agit pas d’aboutir à une solidarité (qui a demandé cela ?), ni de fournir une plate-forme sur laquelle les mouvements sociaux devraient se baser, sans doute pour mériter notre “solidarité” active(?), il s’agit plutôt de comprendre comment s’inscrit ce mouvement exceptionnel en Israël dans le déroulement de la crise actuelle, je précise que des grèves ont accompagné ce mouvement de la “classe moyenne”, classe salariée en cours de dévalorisation, et de prolétarisation : profs, étudiants, fonctionnaires, etc..
J’ajoute, enfin, que je n’ai pas trouvé la réponse d’Yves Coleman, ni injurieuse, ni très agressive, ni tendancieuse, humoristique, un peu. Evitons les rhétoriques et les hyperboles.
Salutations manifestes
A.D., tu touches le fond de mon propos: “il s’agit plutôt de comprendre comment s’inscrit ce mouvement exceptionnel en Israël dans le déroulement de la crise actuelle, je précise que des grèves ont accompagné ce mouvement de la “classe moyenne”, classe salariée en cours de dévalorisation, et de prolétarisation”.
C’est bien là la question. Et c’est pour cela mon intervention (qui devait paraître peu claire quand à ses fondements, je suis d’accord, et le but de la discussion c’est d’éclaircir les propos, pas l’inverse n’est-ce pas) sur “pas de solidarité” et “comprendre le phénomène”. Disons qu’il me semble décalé de considérer cette manifestation sociale en israel en déconnexion complète avec ce qu’est cette société, comment elle fonctionne, sur quoi, et pourquoi. C’est ce que je reproche à de nombreuses personnes, qui sont des camarades sincèrement communistes qui préfèrent se cantonner à des schémas simples, de façon à ne pas comprendre la spécificité que pourrait avoir un mouvement social en israel car ne prenant pas en compte la réalité de cette société, et par conséquent se trouvent en décalage par rapport à celle-ci. (d’ailleurs ce n’est pas tant un reproche, c’est plutôt prendre acte et exposer un positionnement différent et, à mon sens, autrement plus radical).
Cette spécificité ‘sociale’ en israel n’est pas celle de son inscription dans le déroulement de la crise actuelle, ça c’est de l’observation plutôt journalistique je trouve, mais à partir de quel moment, c’est-à-dire sur quelles bases (pas base programmatique, mais base concrète, sociale, matérielle, humaine), les couches moyennes en précarisation vont-elles toucher, ou non, la question de fond. Cette question de fond est la seule à partir de laquelle puisse s’opérer un début de connexion avec les arabes ghettoïsés, condition ‘sine qua non’ d’une synergie, polarisation de forces, apte à enclencher une dynamique (“communisatrice” comme vous dites). Elle est la pierre angulaire sur laquelle toute la question sociale et politique est fondée, elle est le fondement de l’État-société israélien et de son inscription au sein du phénomène mondial de la communauté capitaliste.
Voilà pourquoi je parle de “pas de solidarité” étant donné : 1° que la façon dont les récits se font autour de cet “extraordinaire” phénomène en occultent cette question de fond à savoir la spoliation et l’apartheid, et 2° que, justement, ce mouvement ne touche pas (pour l’instant) cette question. Jusqu’à quand? Mais ça c’est pour les observateurs, car les millions d’exclus, d’enfermés, de ghettoïsés, eux, elles, n’attendent pas, ils voient et font avec ce qui est là maintenant. Et j’aime mieux te dire que c’est, pour l’instant, pas avec ce genre de mouvement qu’une synergie est possible. Car il s’agit de cela non? Pour moi, communiste, c’est cela l’important : dans quelle mesure il y a des données qui permettent d’aller plus loin et avec lesquelles je puis entrer en polarisation si j’ose dire. C’est pour cela que je parle de “solidarité” (mot fourre-tout et appauvris je concède) mais aussi parce que l’observation prise pour elle-même n’étant en soi que peu intéressante, tout au plus un fait divers supplémentaire dans le système de l’information, la “solidarité” est aussi théorique (de quelle manière on observe les phénomènes, ça n’est jamais neutre, jamais une observation en tant que telle).
Bref, néanmoins cela peut inaugurer incontestablement une contestation économique peut-être jamais vue auparavant qui pourrait dans l’approfondissement irrémédiable de la crise sociale en israel déboucher sur la remise en cause des fondements économiques et politiques de cette société en particulier et de la société mondiale en général. Nous verrons. La seule façon qu’à le pouvoir israélien d’endiguer la crise mortelle qui a été diagnostiquée dès la fondation de cette société artificielle (son caractère artificiel est le premier facteur de dissolution, je maintiens, lequel sera porté par la dégradation économique et sociale irrémédiable), la seule façon d’endiguer c’est la guerre. La guerre israélienne c’est la guerre pour maintenir artificiellement l’organisme social. C’est à la prochaine opération d’envergure que nous verrons où en est le mercure du thermomètre.
Se cantonner de “comprendre comment s’inscrit ce mouvement….”, sans plus, c’est encore une fois nier la réalité sociale sous-jacente, ces fondements. On ne peut pas comprendre un phénomène si on en occulte sa racine, sa vertèbre historique. D’ailleurs, et là je maintiens, occulter c’est entériner -même si c’est à corps défendant, car quoi qu’il en soit de “l’inscription d’un mouvement dans la crise actuelle” s’en tenir à cela c’est justifier, par omission, l’apartheid. Je ne stigmatise pas, je veux juste faire sentir à quel point la façon de positionner son discours prend en compte ou pas des couches entières du réel.
A mon avis ce qui compte ce sont les lames de fond. Pas les effets, les dommages collatéraux d’une société, et d’une société mondiale, en dissolution. En fait, c’est peut-être là un point de divergence théorique de fond, je ne sais pas.
En tous cas, dans l’immédiat, c’est la question de la spoliation-apartheid, qui est la pierre angulaire sociale et politique en ce qui concerne la société israélienne, occultée chez de nombreuses personnes qui se réclament d’une observation ‘révolutionnaire’ de l’évolution sociale, qui a motivé mon intervention. Voilà. Tant pis si c’est encore confus. Salutations.
Ps. si je leur propose mes services de com croyez-vous que je puisse entrer chez ces indigènes de la république? pourrais-je m’y faire du fric?
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/monde/20110814.OBS8513/israel-la-contestation-sociale-sort-de-tel-aviv.html
Salut :
il ne s’agit pas de faire de l’observation neutre, et peut-être encore moins “révolutionnaire”.
“Et j’aime mieux te dire que c’est, pour l’instant, pas avec ce genre de mouvement qu’une synergie est possible” . Je ne vois pas très bien de quelle synergie il est question : une union de ces couches avec les ghétoïsées ? dans quel but commun ? Il s’agit d’une affaire de dégradation des conditions d’existence, une impossibilité à reproduire chaque couche à son niveau précédent et, de façon très retravaillé par le mode de production capitaliste, d’une crise des médiations ethniques( et:ou religieuse, c’est la même chose). Ces médiations elles-mêmes sont un moment dans la lutte de classe qui reformule toutes ces contradictions ethniques, religieuses, nationales, étatiques et inter-étatiques.
Israël est un état comme un autre, faut-il débattre de l’ignominie particulière, ou des qualités , d’un état en relation à un autre état? Il est en guerre, et de nombreux états, ou embryons d’états sont en guerre; il est scindé en populations aux assignations particulières, l’un arabe, l’autre juif; de nombreux états sont scindés (par exemple en Afrique, ou l’on a vu les résultats, et les crimes en cours, la famine, et le massacre, etc…mais aussi en Amérique centrale ‘au Guatémala, où la population indigène est journellement assassiné, au Chili avec la spoliation sans cesse recommencée des terres, etc…). L’état toujours état de classe, état d’exploitation, toujours tirant parti des différenciations diverses, des genres, au croyances, des cultures.
Le mouvement actuel en Israël est donc intéressant par lui-même, c’est-à-dire comme il se présente, et n’occulte pas. Occulté signifie faire rideau de fumée, mais on dit “pas de fumée sans feu”, je veux dire : pourquoi cette fumée là, pourquoi cette “occultation” maintenant, et quel est son contenu, sa composition fumeuse, quoi ? Je suis ce mouvement, je ne suis ni déçu, ni supporter, oui, mais quoi d’autre ?
Puis il y a qu’il y a des exploiteurs palestiniens, une petite-bourgeoisie, un état restreint palestinien, l’Autorité, le Hamas, il y a lutte de classes inter-palestinienne, également scindés ethniquement (chrétien/musulman)…Tout cela est très intriqué, et dynamique. les inter-actions sont difficiles à voir venir. Israël comme pointe avancée souffre de la crise globale et l’affaiblissement, relatif, des USA dans les affaires du monde est en train de porter un coup au modèle d’importation. Cette crise sociale condense l’impossibilité du maintien de l’état-providence et le déclin du modèle étatsunien comme paradigme global. Crise de paupérisation des couches moyennes, elle signe la difficulté croissante de la reproduction de la classe dans son ensemble engendrée par la dévalorisation des salaires directs ou indirects.
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