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La différence entre “le peuple” et “le prolétariat”…

Plus de 170 000 groupes de «foyers volontaires» au Royaume-Uni
Le «Neighbourhood Watch» est une institution outre-Manche, où des groupes de 20 à 30 foyers volontaires traquent les comportements antisociaux, les cambriolages ou des problèmes de trafic.[print_link]
Sur un réverbère, un panneau représentant un couple, une fillette et un policier entourés d’un cercle jaune, et estampillé «Neighbourhood Watch». C’est à cela que l’on reconnaît un quartier protégé par le voisinage. Une institution en Grande-Bretagne. Des groupes de 20 à 30 foyers volontaires ouvrent l’œil sur un secteur bien précis et traquent les comportements antisociaux, les cambriolages ou des problèmes de trafic. Comme en France, les volontaires n’interviennent pas directement, mais doivent contacter la police locale avec qui ils travaillent étroitement. Parmi eux, un coordinateur, souvent celui qui a créé le groupe, est chargé de recruter des volontaires, de les former à surveiller les plus vulnérables et d’informer ses voisins sur les techniques de protection. Un coordinateur consacre en moyenne deux journées par mois à sa mission. Depuis le premier groupe formé en 1982 par Harold Cooper dans le village de Mollington, dans l’est de l’Angleterre, la méthode «Neighbourhood Watch» a fait des émules. Le Royaume-Uni compte plus de 170 000 groupes de voisins «responsables». Des villes à réputation plus difficile comprennent plusieurs dizaines de groupes. À Manchester, 25 coordinateurs ont rassemblé des volontaires. Et à Londres, plus d’une centaine de groupes surveillent leur quartier. Mais «Neighbourhood Watch» et les caméras CCTV placées dans les rues ne suffisent pas à effacer le sentiment d’insécurité.
De notre correspondante à Londres, Rose Claverie

Des «voisins vigilants» contre les cambriolages
De notre envoyé spécial à Grasse, Christophe Cornevin

Formant des chaînes d’alerte reliées à la gendarmerie et aux polices municipales, des riverains s’organisent par centaines sur le terrain.

L’œil bleu stylisé, hérissé de cils pointus, scrute le visiteur dès l’entrée du lotissement propret, aux murs ocre et bordé de pins. Placardé sur les panneaux municipaux, accolé aux plaques des rues, scotché sur les boîtes aux lettres, ce logo évocateur fleurit à l’envi dans le paysage. Son ubiquité est obsédante. Et le texte qui l’accompagne en lettres capitales, sans ambiguïté : «Protection voisins vigilants, en liaison immédiate avec la gendarmerie et la police municipale.» Tout comme les volontaires de trois autres secteurs limitrophes, les habitants du quartier des Bosquets animent la chaîne des quelque 300 «habitants citoyens» regroupés à Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes) pour alerter la gendarmerie ou la police municipale au moindre signe suspect. Ici comme ailleurs, on se défend d’accoucher d’un «Big Brother» à la française. Tout soupçon de délation déclenche cris d’orfraies et concert de protestations effarouchées.

Depuis mars 2007, cette commune de 10 500 âmes située au sud de Grasse a juste décidé d’adhérer à un concept original en France pour lutter contre les cambriolages et la violence. L’idée, très simple et inspirée du modèle anglo-saxon, est née presque par hasard en 2005 à Saint-Paul : une honorable résidente anglaise, lasse de voir les casses de villas se multiplier dans son entourage, crée un groupe de voisins pour organiser l’autosurveillance de sa rue, puis de son quartier. Les uns après les autres, retraités, commerçants, employés municipaux du secteur se sont alors mis aux aguets pour détecter toute personne ou voiture un peu louches, tout squat ou installation sauvage à proximité. «Avec nos numéros de téléphone en commun, nous échangeons nos dates de congés, les horaires des enfants à l’école et les noms des visiteurs que l’on attend. Chacun a appris à veiller sur la maison de l’autre», témoigne Nicole de Bagneaux, retraitée de l’Éducation et voisine vigilante. Le moindre rôdeur ou vagabond tombant dans cette toile d’araignée invisible est signalé à la gendarmerie ou à la police municipale par un «référent» responsable de la chaîne de vigilance – en général le plus actif – du quartier. À elle seule la brigade de Grasse est en lien avec pas moins de 41 référents, certains faisant l’interface avec une centaine de voisins !

«Politique fondée sur l’humain»

Constatant des chutes brutales de plus de 60 % des cambriolages dans certaines zones estampillées «citoyennes», les gendarmes des Alpes-Maritimes ont généralisé le système dans tout un département longtemps miné par le fléau. Avec une moyenne de 95 crimes et délits pour 1 000 habitants, ce dernier pointe encore au troisième rang français notamment en raison des 11 millions de touristes de passage. «Nous veillons sur de très belles zones résidentielles où se mêlent des retraités aisés, des cadres supérieurs ou encore les familles de Berlusconi, de l’émir du Qatar ou du roi des Belges, observe le capitaine Alexandre Jeaunaux, commandant les 155 gendarmes de la compagnie de Grasse. Les demeures secondaires attirent la convoitise de petites équipes très mobiles venant de Cannes ou de Vallauris : en trois minutes et souvent sans effraction, ces récidivistes raflent en plein jour de gros butins pendant que les propriétaires sont à la piscine ou dans leur jardin…»

En moins de deux ans, telle une traînée de poudre, pas moins de 46 mairies de toutes sensibilités politiques – dont celles de Nice (UMP), Villeneuve-Loubet (PS) ou encore Gattières (PCF) – ont développé sur leur territoire des quartiers abritant aujourd’hui des milliers de «voisins vigilants». L’œil stylisé, présent sur un quart du département, dissuade les prédateurs : «Depuis le début de l’année, ce dispositif a un impact très net car la délinquance de proximité a baissé de 4,81 %, se félicite le préfet Francis Lamy. Outre les progrès de la police scientifique ou le rapprochement des forces de l’ordre, cela prouve que la sécurité est devenue l’affaire de tous.» «En retour des remontées d’informations, nous communiquons aussi des signalements de véhicules ou de suspects à nos “voisins vigilants” pour qu’ils nous alertent s’ils les voient passer», confie Daniel Tlidjane, directeur de la police municipale de Mouans-Sartoux. «Strictement encadré, le rôle des voisins se limite à l’observation et au renseignement, prévient le capitaine Jeaunaux. Ils ne peuvent organiser aucune patrouille civile, et encore moins intervenir d’initiative. Ils sont juste nos yeux par procuration.» Un drame provoquerait une fâcheuse polémique sur l’autodéfense et les milices parallèles, dont la philosophie des «voisins vigilants» se veut aux antipodes.

«Il faut promouvoir cette politique de prévention de la délinquance qui se fonde sur l’humain plus que sur la froide technologie des caméras de vidéosurveillance», lance Serge Rodrigues, directeur de cabinet (Verts) à la mairie qui a enregistré une seconde baisse record de la délinquance de 10 % l’année dernière, après un repli historique de 20 % en 2007. De quoi faire rêver les stratèges de la Place Beauvau.

«Appui essentiel des mairies»

«Loin de mettre une chape de plomb sur leur quartier, les voisins retissent du lien dans des quartiers où vivent parfois des personnes isolées, précise le colonel André Pétillot, commandant le groupement des Alpes-Maritimes. L’appui des mairies est essentiel pour mobiliser la population en réunion publique et faire vivre le projet. Nos référents, qui ont été sensibilisés pour faire preuve de discernement, atténuent aussi les conflits de voisinage et nous permettent de rester dans une dynamique de baisse de la délinquance à effectifs constants et en période de rigueur budgétaire…»

Après les Alpes-Maritimes, la Direction générale de la gendarmerie essaime le modèle à travers la France. De nouveaux «protocoles de participation citoyenne» ont été mis en place avec cinq communes du Loir-et-Cher, une quinzaine dans la Drome ou encore sept dans le Nord. Seul écueil : le modèle des «voisins vigilants» trouve ses limites dans les grandes métropoles, trop anonymes, ainsi que dans les cités toujours frappées d’omertà. Autant dire que la zone police devra se passer de ces nouveaux auxiliaires. Ce qui n’empêche pas l’entourage de Brice Hortefeux de promouvoir cette initiative, au nom d’une meilleure sécurité de proximité.

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  1. ODIMBA
    09/11/2009 à 16:00 | #1

    Je préfère les soviets et la dictature du prolétariat.

  2. Patlotch
    09/11/2009 à 17:19 | #2

    ODIMBA :” Je préfère les soviets et la dictature du prolétariat ”

    Dans le genre ‘tout le monde surveille tout le monde’, les “soviétiques” (sic) et leurs avatars avaient porté la délation au niveau d’un art de masse.

    Bonnes feuilles sans prétention théoricienne : Sheila FITZPATRICK, 2002, “Le stalinisme au quotidien. La Russie soviétique dans les années 30” > http://monderusse.revues.org/document4035.html

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