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Avec la crise, le surendettement des ménages explose

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Le crédit à la consommation renouvelable, que ses détracteurs nomment “crédit revolver”, est-il un accélérateur du surendettement ? Tandis que la gauche et la droite s’affrontent sur la question – le gouvernement prévoyant de mieux l’encadrer, le PS réclamant sa suppression -, les chiffres pour 2009 montrent que la question ne peut plus être laissée en suspens.

La crise économique, qui sévit depuis un an, a aggravé les difficultés financières des ménages modestes. Entre janvier et septembre, 162 171 dossiers de surendettement ont été déposés à la Banque de France, ce qui représente une augmentation de 17 % par rapport aux neuf premiers mois de 2008. Cette poussée de fièvre nationale est encore plus marquée dans certaines régions, avec des pointes à 20-25 %. C’est le cas en Poitou-Charentes (20 %) et en Midi-Pyrénées (23 %). Le département du Puy-de-Dôme enregistre même un pic, avec un bond de 26 % des dossiers déposés.[print_link]

En affinant l’analyse, deux indicateurs confirment l’impact de la récession : l’endettement moyen s’est accru à 40 530 euros, au lieu de 35 719 euros en 2008. Surtout, précise un expert, dans chaque dossier, il y a en moyenne cinq à six crédits renouvelables, un chiffre évidemment très élevé. “Ce phénomène est directement lié à la crise, précise cette source. Il n’est pas lié à une expansion du crédit mais au fait que les Français ont eu recours aux crédits renouvelables pour boucler leurs fins de mois.”

Même si la perte d’emploi n’épargne aucune catégorie sociale, le profil du surendetté, toutefois, n’en serait pas modifié. Celui-ci ne fait pas naufrage en raison d’un excès de crédits, mais du fait d’une conjugaison entre accumulation de crédits et faibles revenus. Plus d’un tiers des personnes surendettées de 2009 ont déjà connu ce problème.

“Réalité brutale”

Les services de la Banque de France, chargés de préparer les dossiers avant leur passage en commissions de surendettement présidées par les préfets, parlent d’une mobilisation sans précédent. Qui pourrait s’accentuer, avec la montée de la précarité. “Avec 600 000 chômeurs de plus, il fallait s’y attendre. Personne n’est surpris. C’est la réalité brutale de la crise”, lance Denis Durand de la CGT. La récession accentue, selon lui, une tendance des dernières années : la perte d’emploi comme élément déclencheur du basculement dans le surendettement, aux côtés des autres “accidents de la vie”.

Michel Felce du syndicat SNA enfonce le clou : “La situation ne va pas s’arranger. Il nous faudra plus de personnel pour faire face à l’afflux de dossiers. La Banque de France, active sur le surendettement et la médiation du crédit, est au coeur de la crise.” Face à l’afflux de surendettés, la pression monte pour l’instauration de mesures efficaces, de nature à leur apporter des solutions de rétablissement rapides. Et ce, pour éviter qu’une “exclusion bancaire” n’entraîne une “exclusion sociale”. De l’avis général, les mesures préparées par le gouvernement dans le cadre du projet de loi sur le crédit à la consommation, qui sera examiné par l’Assemblée nationale en décembre, vont dans le bon sens. Elles vont notamment simplifier la procédure de traitement du surendettement, ce qui déchargera les tribunaux. Ainsi, les commissions de surendettement seront habilitées à gérer les procédures de rétablissement personnel – qui permettent l’effacement des dettes d’un ménage – et le passage devant le juge ne sera plus obligatoire. De plus, pour l’ensemble des dossiers, y compris pour ceux ne relevant pas de cette procédure de “faillite personnelle”, la commission pourra décider d’un plan de sortie de surendettement, sauf contestation. ” Le traitement des cas de surendettement ira plus vite. Il sera plus humain, plus social”, analyse un expert. Par ailleurs, les propriétaires de logement, aujourd’hui exclus de la procédure, pourront solliciter un allégement ou un effacement de créances.

Pour beaucoup, cependant, la future loi telle qu’elle se dessine aujourd’hui ne va pas assez loin. Ainsi, le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, se réjouit de sa “dimension sociale”. Mais il juge trop léger l’encadrement des crédits. “J’aurais aimé qu’on indique clairement quels sont les risques encourus par l’emprunteur en cas de non-remboursement, par exemple que le taux peut brutalement passer de 20 % à 25 % !, déclare M. Delevoye. J’aurais également souhaité que l’emprunteur soit averti en fin de contrat de sa reconduction tacite !”

Encadrement plus strict

Faut-il jusqu’à aller interdire le crédit à la consommation, comme le préconise François Brottes, député socialiste de l’Isère ? Pour le président de Conso-France, Christian Huard, c’est le type même de “la fausse bonne idée”. “Le crédit renouvelable peut avoir une utilité économique et sociale, notamment parce qu’il permet à des ménages modestes de financer des besoins de la vie courante. Ceux-là se feraient refuser un crédit classique. L’interdire sans réfléchir serait stupide”, estime-t-il.

M. Huard plaide pour un encadrement plus strict que ne le prévoit le gouvernement, surtout par ces temps de crise où les ménages en difficultés puisent dans les réserves de crédits “généreusement” distribués par les enseignes commerciales : “Il faut que les consommateurs aient le choix entre le paiement à crédit et au comptant et que surtout, l’Etat continue à fixer les taux de l’usure.”

Anne Michel

Article paru dans l’édition du 14.10.09

LE MONDE

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