Accueil > Nouvelles du monde > “Indignés” et autres mouvements “citoyens”…

“Indignés” et autres mouvements “citoyens”…

On va aller tout doucement vers une analyse de ces rassemblements spontanés dans les grandes villes européennes.  Pour le moment, tout cela parait bien citoyen, raisonnable, presque “républicain radical” …. Ca sonne plus “Changez tout” de Michel Jonaz que “a las barricadas”, avec l’insupportable adjectif “indigné” dont se repaît la presse, la “vraie démocratie”, la “politique autrement”….
On a reçu ce premier commentaire d’un témoin direct. Il ne s’agit pas d’analyse mais de description et d’interrogation. A suivre

SOUVENIRS DE SEVILLE
Les “révolutions arabes” vont-elles susciter des révoltes dans le reste du monde , c’est la réponse qu’une partie de la jeunesse d’Espagne tente de donner ?  Depuis le 15 mai on assiste en effet à un mouvement de grande ampleur, des slogans manifestent la solidarité d’abord avec le peuple tunisien et le peuple égyptien, comme avec les Grecs certains  disent vouloir être Islandais (qui refusent de rembourser leurs dettes) Ce mouvement pacifique appelle la jeunesse d’Europe à le rejoindre. On voit déjà que cet appel n’est pas vain.  

Il est trop tôt pour savoir sur quoi cette révolte va déboucher, pour l’instant le mouvement ne s’essoufle pas. Des assemblées devraient décider pendant la nuit du 29 au 30 mai de la poursuite des occupations des places publiques comme la Puerta del Sol ou la plaça de Catalunya.
Pour ma part, étant en Espagne à Séville j’essaye de comprendre ce qu’il en est. Ce n’est pas facile s’agissant d’une forme inédite bien  loin des luttes sociales habituelles . Ce mouvement est d’abord marqué par la  culture électronique, la cybernétique en étant le  premier vecteur. Les slogans “toma la calle, toma tu barrio (prends la rue, prends ton quartier) montrent à l’évidence que ce veut être un mouvement citoyen. Dans les villes comme Madrid et Barcelone, des rassemblements se font dans différents quartiers.

Pour tenter de parer aux effets de “la crise”  économique, très touchée en raison deson énorme bulle immobilière, l’Espagne ,versus le gouvernement socialiste  espagnol,  a pris comme la Grèce des mesures drastiques qui touchent d’abord et surtout les travailleurs : réduction de prestations sociales et familiales, réductions des services de santé, facilités de licenciements par les employeurs, recul de l’âge de la retraite, baisses de salaire , réduction et suppressions d’indemnités de chômage dans un pays qui compte près de 25 % de chômeurs dont plus de 40 % de jeunes de moins de 25 ans souvent diplomés .Le travail au noir de quelques heures par jour ou par semaine devient la ressource unique de nombreuses familles.

Face à cette situation le Parti Populaire (PP- droite) ne s’est pas montré empresséde prendre la relève du PSOE (Parti Socialiste Ouvrier Espagnol) laissant à celui-ci la responsabilité des mesures antisociales qu’il aurait prises s’il était au pouvoir. Il n’aura plus qu’à ramasser les fruits du mécontement aux élections générales de 2012. Déjà les électeurs espagnols ont renvoyé les socialistes  lors des élections municipales et des 13 sur 17 communautés autonomes du 22 mai dernier permettant au PP de se préparer pour la prochaine législature.

Le 30 mars dernier, le syndicat étudiant a lancé une grêve principalement contre l’augmentations des droits d’inscriptions universitaires. Plusieurs manifestations ont suivi notamment contre différents lois dites de “modernisation de l’économie” Le 15 mai dernier (15 M ) dans une cinquantaine de villes  des manifestations organisées par “la société civile” ont réclamé “una Democracia Real Ya” (une démocratie réelle maintenant) . La parution de l’appel de Stefane Essel “indignez-vous” traduit dans le monde entier converti en phénomène  médiatique a inspiré les participants à ce mouvement spontané préoccupés par la situation économique et social, marquée par la corruption, les considérables profits des banques, pour mettre fin au monopole de fait de deux partis politiques ils demandent une réforme électorale. Ils se sont donc définis comme  “los indignados”  exigeant une démocratie participative . La répression de ces manifestations a permis au mouvement de grossir et de s’étendre réclamant un véritable état de droit et unerévolution éthique
Depuis le 15 mai le mouvement n’a fait que s’amplifier dans toute l’Espagne. La Puerta del Sol au centre de Madrid est devenue le village permanent des rassemblements. De son côté la Plaça de Catalunya à Barcelone a été occupée par “los Indignados”. Les manifestations étant interdites en Espagne la veille et le jour d’élection se sont tout de même poursuivies, le gouvernement a prudemment demandé aux forces de police de ne pas intervenir. Toutefois, le 27 mai à Barcelone sous le prétexte de nettoyer la place pour des raisons d’hygiène et afin d’enlever les objets dangereux en vue des célébrations d’une éventuelle victoire du FC Barcelone en Ligue des Champions, la police a fait preuve d’une extrême brutalité laissant plusieurs blessés par flash ball et matraques. La place a aussitôt été réinvestie par les “indignados”.

Organisée de manière spontanée par quelques centaines de personnes, ce que certainsnomment la “spanish revolution” mobilise maintenant  et pacifiquement des dizaines de milliers de personnes, jeunes de moins de trente ans pour la plupart auxquels se joignent chaque jour des moins jeunes . Sur place des commissions se sont créées: infrastructure, contenu, actions, alimentation, communication, international, certaines étant divisées en plusieurs groupes de travail, émigration,formation, logement etc. Les commissions se réunissent durant la journée et font part de leurs propositions à l’assemblée générale du soir.

Il m’est difficile de dire qui sont ces “indignados”. Personne ne fait état de sonengagement politique même si des militants de “Izquierda Unida ”, (gauche unie) mouvement comprenant le PC espagnol, des écologistes et plusieurs mouvements trotskystes semblent avoir rejoint le mouvement dès les premiers jours . A part le Syndicat Etudiant  il n’y a pas de revendication d’organisations syndicales qui restent muettes face à cette forme de contestation. Si des tracts comme ceux du syndicat étudiant est politique, d’autres se disent gens normaux et courants dont certains sont progressistes, d’autres conservateurs, certains ayant une idéeologie, d’autres apolitiques mais tous indignés. Je reste stupéfait de l’impact du petit livre de Stefane Essel mais je souhaite que ceux qui s’y réfèrent aient compris,  qu’au delà de l’indignation, Essel appelle à la résistance  active et imaginative  et qu’il convoque à une véritable insurrection pacifique notamment contre les moyens de communication qui ne proposent comme horizon que la consommation de masse , l’amnésie généralisée et la compétition, le mépris envers les plus faibles et envers la culture. On ne peut pas dire aujourd’hui ce qui va émerger de ce melting pot d’indignés. Des divergences se font jour, les uns afirment haut et fort qu’ils sont apolitiques et “apartidistas, d’autres au contraire précisent que les manifestations démontrent clairement que le mouvement a un caractère de gauche. Ils dénoncent le PP affirmant que le caractère anticapitaliste du mouvement est le moteur du changementet soulignent que le désastre électoral du PSOE est la conséquence de sa politique au service des banques et des grandes entreprises.

De grands rassemblements largement annoncées ont eu lieu dans tout le pays cedimanche 29 mai. Ici à Séville il eut lieu devant la magnifique plaza de España   pour se déplacer en une marche de deux heures jusqu’au lieu habituel du campement. Il a réuni plusieurs milliers de personnes de tous âges.

Sevilla el 29 de mayo de 2011

br

Categories: Nouvelles du monde Tags:
  1. CLN
    30/05/2011 à 18:17 | #1

    extraits de deux correspondances de cdes de l’Etat espagnol, le premier de Barcelone en date du 24 mai, le second Madrid en date du 26 mai

    Majoritairement (ça je l’ai vu personnellement place Cataluña à Barcelone) les gens veulent une vraie démocratie (sic), ils veulent une réforme de la loi électorale qui favorise les deux grands partis, et aimeraient bien sûr que les injustices soient moins grandes. Ils s’en prennent aux politiciens en les traitant de malfrats (NO HAY BASTANTE PAN PARA TANTO CHORIZO -IL N’Y A PAS ASSEZ DE PAIN POUR AUTANT DE CHORIZO (jeu de mot car chorizo veut aussi dire filou, arnaqueur , malfrat etc…). Quelques slogans vont un peu plus loin dans le genre “vuestras urnas son demasiado pequeñas para nuestros sueños -vos urnes sont trop petites pour nos rêves. Bref il y a de tout, mais ce qui prédomine c’est la citoyenneté…………………
    Enfin, comparer ce qui se passe avec juillet 36 en Espagne c’est vraiment du délire. Les usines fonctionnent normalement, le commerce fonctionne normalement, les transports fonctionnent normalement, la police est toujours là, l’armée aussi, les politiciens sont toujours là, et la dictature du capital, on la subit toujours.
    ———————
    “… Camper sur la Place du Sol (Soleil) va en principe durer jusqu’à ce week-end. L’idée c’est qu’il y ait une décentralisation et que les assemblées aient lieu dans les quartiers. Il devrait également ir une manifestaion le 19 juin qui pourrait être importante.
    La concentration est moins nombreuse et les mass media ont commencé à moins en parler en privilégiant la politique politicienne PP/PSOE.
    D’après moi l’origine du mouvement est universitaire à partir de rñeunions et d’assemblées à la Complutense de Madrid (L’université de Madrid). À partir de la première manifestation ils ont reçu l’appui de beaucoup.
    Moi je dirais que les jeunes des quartiers ouvriers n’ont pas participé au mouvement. Des jeunes ui sont sans travail, sans études, une éducation de merde et dans la rue sans un putain d’euro.
    À un autre moment, dans un autre quartier de Madrid 500 pompier avaient organisé un campement pour continuer à protester dans un conflit qui dure depuis des mois et des mois. Les deux campements sont restés séparés.

  1. Pas encore de trackbacks

%d blogueurs aiment cette page :