La province du Guangdong a été l’épicentre des récents mouvements sociaux en Chine
Les industriels de Hong Kong empêchent une réforme bénéfique aux travailleurs migrants
Alors qu’une réforme du droit du travail permettant notamment aux salariés de négocier leurs salaires était en préparation au Guangdong, les propriétaires Hongkongais des usines ont fait barrage. Les travailleurs migrants de la région devront attendre.
La déception est grande pour les travailleurs migrants de la province industrielle du Guangdong, dans le sud de la Chine.
Le “delta de la rivière des perles”, où se situent la plupart des usines qui font de la Chine l'”atelier du monde”, avait été l’épicentre des protestations ouvrières qui ont agité la Chine il y a quelques mois.[print_link]
Ces mouvements, particulièrement nombreux dans les usines des groupes étrangers, avaient souvent été victorieux, amenant les comités de direction à concéder des augmentations de salaires à leurs employés.
Ils avaient également été l’occasion pour la nouvelle classe ouvrière chinoise de reprendre position dans le rapport de force qui les voyait pour l’instant totalement soumis au bon vouloir des entreprises et du gouvernement.
En conséquence, les autorités avaient commencé à considérer un peu plus ces “laissés pour compte de la croissance”. De nombreuses provinces avaient augmenté leurs salaires minimum, et le discours gouvernemental s’était fait cajoleur.
Le premier ministre Wen Jiabao avait demandé aux chinois de “traiter les jeunes travailleurs migrants comme leurs propres enfants” et de “respecter la contribution des travailleurs migrants à l’enrichissement du pays et à la construction de gratte-ciel dans nos villes”.
Mais le le gouvernement chinois, conscient de ce changement dans les rapports de force, et désireux de préserver la “stabilité sociale”, ne comptait pas en rester là.
Cet été, Pékin a mis en branle une réforme de la loi sur les syndicats, pour permettre à l’unique organisation syndicale autorisée de devenir un peu plus indépendante. Les autorités ont également annoncé leur volonté de renforcer la présence des syndicats dans les usines.
Mieux : dans le Guangdong, les autorités avaient imaginé un système de “négociation collective”, censé permettre aux ouvriers d’avoir voix au chapitre.
Les organisations patronales mettent le holà
Salaires, conditions de travail et avantages sociaux, allaient enfin pouvoir être discutés lors de réunions convoquées dès lors qu’au moins un cinquième du personnel le réclamait.
Mais l’examen de cette mesure par les autorités locales, prévu ce mois-ci, a été supprimé de l’agenda politique, rapporte le South China Morning Post.
En cause, le lobbying du Conseil des Jeunes Industriels de Hong Kong. Rassemblant près de 130 personnes qui emploient en tout près d’un million de travailleurs migrants au Guangdong, l’organisation a freiné des quatre fers.
Selon M.Leung, son président, “permettre aux ouvriers de participer aux conseils et de prendre des décisions entravera le désir d’investir des investisseurs étrangers. Les employeurs veulent toujours payer moins, et les employés veulent toujours être payés plus : cela entraînerait des combats sans fin dans les réunions”, a-t-il déclaré au quotidien.
D’autres industriels craignent que la présence d’ouvriers dans les directoires entraîne des fuites de secrets industriels ou d’information sensibles. Des craintes ont également été exprimées sur le fait que les ouvriers ne veuillent pas partager les passes moroses des entreprises.
C’est le cas de Pauline Ngan Po-ling, vice-présidente d’une grande entreprise. “Si nous sommes sur le même bateau, est-ce que les ouvriers passeront les mauvaises périodes aux côtés de l’entreprise?”, s’est-elle inquiétée.
Heureusement, grâce au Conseil des Jeunes Industriels de Hong Kong, Mme Ngan Po-ling peut être rassurée : les travailleurs migrants du Guangdong ne sont pas prêts d’être “sur le même bateau” que les dirigeants des usines qui les emploient.
le 21/9/2010 à 11h54 par Benoît Guivellic (Aujourd’hui la Chine)
Les derniers commentaires