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« Cyber-Marx » Entretien avec Nick Dyer-Witheford

Texte paru dans la revue « Période »

On déclare souvent en grande pompe que les technologies de l’information et de la communication annoncent la fin du travail, et par conséquent la disparition du prolétariat. C’est à cette nouvelle illusion générée par le capitalisme que s’oppose Nick Dyer Witheford en rendant compte de la formation de « populations excédentaires » à une échelle inconnue jusqu’alors. Il n’y a pas substitution du travail immatériel (capitalisme cognitif) à sa forme classique, matérielle, mais dualisation : la technologie ne conduit pas à l’anéantissement de la composition de classe, mais à sa reconfiguration. Il s’agit dès lors de penser l’articulation des formes d’exploitation et, par là même, le devenir des luttes des « cyber-prolétaires ».

On voit sortir tous les deux mois un bestseller qui annonce une nouvelle « disruption » technologique, ou avance l’idée d’une révolution du travail et de la production induite par le progrès technique : il s’agit tantôt de l’émergence de la « classe créative » de Richard Florida, tantôt de la « fin du travail » et de « l’eclipse du capitalisme » de Jeremy Rifkin, voire du « futur sans travail » de Martin Ford, ou de la « quatrième révolution industrielle » promue par Klaus Schwab et le gouvernement allemand, etc. Et pourtant, à la suite d’auteurs comme Ursula Huws1, tu as choisi de donner à ton dernier livre le titre de Cyber-prolétariat2, réaffirmant l’existence aujourd’hui d’une classe ouvrière. Pourquoi est-ce que ce serait toujours pertinent ?

Le terme « prolétariat » n’a rien perdu de sa pertinence, en ce qu’il désigne l’antagoniste contre lequel le capital projette sans cesse ces fameuses « disruptions » technologiques et autres « révolutions » du travail et de la production. L’obstacle que le capital cherche à surmonter, au fond, ce n’est pas juste les syndicats et l’État providence, ni simplement l’obligation de donner, en échange du travail, un salaire décent pour vivre, mais c’est la forme même de l’humain ; et il tente d’y parvenir au moyen de ce que Tiqqun a très justement appelé une « offensive cybernétique » continue. Cette offensive a lieu sur trois fronts : d’abord, l’élimination complète du travail humain par l’automatisation ; puis la réduction du coût de ce travail via des chaînes d’approvisionnement mondialisées et coordonnées par l’informatique ; et enfin, le fait d’éviter de recourir au travail par le biais de la financiarisation, laquelle transpose le cycle A-A’ (la transformation, par le capital, d’une somme d’argent en une somme encore plus importante) dans un domaine désormais presque entièrement déterminé par la modélisation informatique des risques et le trading algorithmique. Pour comprendre la situation, il nous faut retrouver le concept de prolétariat que Marx avait développé dans les Manuscrits économico-philosophiques de 1844, quand il décrivait cette classe dont le mode d’être oscille entre l’anéantissement dans l’exploitation au travail, et l’inexistence dans le chômage et l’exclusion, cette classe qui, sur tout le spectre de l’emploi, de la précarité, du chômage, du travail salarié ou non, fait face aux attaques successives menées par le capital et ses technologies de pointe. Or, le prolétariat ne disparaît pas, même lorsque son travail est déqualifié, et réduit aux tâches les plus ennuyeuses et abrutissantes, ou fragmenté dans le tumulte de l’économie de plateformes, pas même lorsque la laideur de son existence est délocalisée et rendue invisible aux yeux du monde développé, pour réapparaître dans des usines chinoises ou indiennes, ni même lorsqu’il est complètement contourné ou automatisé, parce que même là, il continue à exister sous la forme de « populations excédentaires », lesquelles, dans leurs migrations et leurs insurrections, sont aujourd’hui une source grandissante d’inquiétude pour les classes dirigeantes.

D’un autre côté, la théorie critique a-t-elle suffisamment prêté attention aux technologies de l’information ? Et une telle perspective, qui souligne l’importance des nouvelles technologies pour comprendre les évolutions actuelles de la composition de classe, ne serait-elle pas implicitement réductionniste ou techno-déterministe ?

Je serais ravi de pouvoir me concentrer sur autre chose que les technologies de l’information. Cependant, c’est parce que le capital lui-même « souligne l’importance des nouvelles technologies » dans ses attaques contre le prolétariat, et même ultimement contre l’être humain générique, que la théorie militante doit sans cesse revenir à ces questions. Ainsi, par exemple, depuis la publication de Cyber-Proletariat, les machines apprenantes et autres formes d’intelligences artificielles, dans la mesure où elles ont permis une automatisation et une surveillance d’un degré encore supérieur, ont été mises au centre des programmes de recherche des multinationales de l’information : or, un tel développement requiert une analyse en termes de potentiels de décomposition et de recomposition des classes. Et non, une telle analyse n’est ni réductionniste, ni techno-déterministe, car le but n’est pas seulement de comprendre l’importance des nouvelles technologies pour la composition de classe, mais aussi en même temps de saisir l’importance de la composition de classe pour le développement des technologies de l’information. C’est-à-dire que l’objectif est de prendre conscience du fait que les ordinateurs et les réseaux sont une manifestation de l’obligation du capital à accroître sa composition organique – en gros, le ratio machines/humains dans la production –, une obligation qui découle de la recherche de survaleur, et qui conduit à faire éclater la composition de la classe prolétaire, c’est-à-dire à détruire toute trace d’organisation ouvrière et de solidarité humaine.

Aujourd’hui, l’usage populaire de « cyber » évoque surtout des mondes virtuels en ligne, mais originellement, cela faisait référence à la cybernétique du début du XXe siècle, un projet théorique totalisant qui s’était constitué autour de la notion d’information. Qu’est-ce que signifie la détermination du concept de prolétariat par ce préfixe ?

Le projet de la cybernétique du début du XXe siècle consistait en l’effacement des distinctions ontologiques entre l’humain (ou l’animal) et la machine, pas simplement sur le plan philosophique, mais aussi de manière opérationnelle. Il a affirmé la thèse de l’équivalence pratique de tous les « automates, qu’ils soient de chair ou d’acier », ainsi que les a nommés Norbert Wiener, le fondateur de ce domaine. Bien qu’éminemment matérialiste, ce projet manque cruellement de réflexivité et se voit miné par un point aveugle : du point de vue de l’espèce, il est suicidaire, dans la mesure où il conduit à l’extinction de la position bien trop humaine depuis laquelle il réalise ses observations. Wiener lui-même a fait marche arrière en réalisant ce que cela impliquait, mais d’autres pionners de la cybernétique, comme John von Neumann, ont persévéré dans cette logique, allant jusqu’à envisager des systèmes constitués uniquement de robots auto-répliquants. Parler de cyber-prolétariat, c’est donc parler d’un prolétariat qui se trouve de plus en plus impliqué dans la production de réseaux et de robots, de réseaux robotisés et de robots en réseaux, un prolétariat qui par conséquent travaille à sa propre expulsion hors du travail – une trajectoire qui pourrait certes conduire à la fin du capitalisme (comme Marx l’a suggéré dans les Grundrisse), mais qui pourrait tout aussi bien s’achever dans la liquidation de l’humain.

Ton étude d’une décennie de lutte et d’agitation sociale s’appuie beaucoup sur le concept marxien de population excédentaire. Pourtant, l’existence d’une armée industrielle de réserve a toujours fait partie de la définition du capitalisme. Dans quelle mesure penses-tu qu’il soit utile pour décrire ou expliquer la situation technologique actuelle de la classe ouvrière ?

Le concept de « population excédentaire » a été développé par EndNotes et d’autres courants de la théorie de la communisation, sur la base d’une relecture minutieuse des écrits de Marx sur le chômage, dans Le Capital. Il identifie la possibilité d’une « armée industrielle de réserve » qui ne soit jamais « appelée au front », et qui constitue un stock de prolétaires au chômage ou sous-employés, qui tend à s’accroître malgré les fluctuations de l’économie, et ce en raison de l’intensification de la composition organique du capital. On pourrait dire que les populations excédentaires sont le résultat logique d’un capitalisme qui déploie les technologies de l’information pour réduire ses besoins en travail – c’est le moment de l’automatisation –, tout en élargissant l’étendue du marché mondial du travail - c’est celui de la mondialisation –, et en se dissociant du procès de production – c’est le moment de la financiarisation. On trouve un écho de tout cela dans l’idée de « saturation du marché du travail » (« labour glut » en anglais) avancée par certains commentateurs bourgeois (comme Ryan Avant dans The Wealth of Humans3). La théorie de la « population excédentaire » a été proposée par la revue Endnotes4 au plus bas de la récession, après 2008, quand la montée en flèche des taux de chômage la rendait immédiatement crédible. Reste à voir si elle restera valide dans la période dite de « sortie de crise », et dans un contexte de changement démographique (en l’occurence de veillissement des populations) dans les régions capitalistes avancées. En Amérique du Nord, alors que le taux officiel d’emploi est revenu au niveau où il était avant la crise, il n’est pas impossible que l’existence de populations excédentaires ait été en fait refoulée et occultée par la croissance de l’économie de plate-formes et d’autres formes d’emploi précaire.

Les penseurs italiens et français du post-opéraïsme et de la théorie du capitalisme cognitif5 ont acquis une influence énorme dans ce champ de recherche pour avoir posé la question des rapports actuels entre le capitalisme et les technologies de l’information, en avançant la thèse selon laquelle un nouveau mode hégémonique d’accumulation serait en train d’émerger, que l’on pourrait, selon eux, caractériser par un déplacement de la théorie marxienne de l’exploitation et de la valeur : l’accumulation reposerait de plus en plus sur l’exploitation du travail immatériel – la production de connaissance, la créativité, ou même les affects –, ce qui aurait pour conséquence de partiellement découpler temps de travail et valeur. Après avoir d’abord embrassé le cadre théorique de Negri et Hardt via les notions de travail immatériel, d’empire et de multitude, tu es devenu de plus en plus sceptique vis-à-vis de celui-ci. Est-ce que leurs thèses et présupposés sont irrémédiablement biaisés, ou est-ce que l’on peut encore en tirer des intuitions précieuses ?

Oui, il y a des éléments importants dans les thèses du « travail immatériel » et du « capitalisme cognitif », malgré des problèmes, dans leur formulation d’origine, qui aujourd’hui nous paraissent évidents. Le premier problème est d’abord celui de l’extension démesurée de la catégorie de « travail immatériel », qui en vient à tout englober, de la programmation informatique à la pole-dance ; ensuite, on peut regretter leur incapacité à remonter le long de la chaîne logistique du capital cognitif et à reconnaître l’énorme quantité de travail manuel qui se trouve en amont de cette chaîne (qu’il s’agisse des travailleurs des usines de Foxconn ou des mineurs de coltan6 au Congo) ; et enfin, ils surestiment ce qu’ont pu apporter à la lutte des classes des expérimentations comme la programmation open-source7 ou les licences numériques creative commons8 – dont on peut désormais constater qu’une partie non-négligeable a été subsumée sous le capital informationnel. Néanmoins, il reste vrai que certaines formes archétypales de « travail immatériel » – notamment l’écriture de code informatique – sont en effet de plus en plus importants et répandus dans le capitalisme contemporain. Si l’on regarde les prédictions émises par le US Bureau of Labor quant aux évolutions de la structure de l’emploi dans l’économie américaine pour 2024, la conception de systèmes informatiques et autre services liés – en particulier les métiers de « développeur de logiciels et d’applications » – font partie des catégories à la croissance la plus rapide (et où les salaires sont les plus élevés). Il y a toute une couche du salariat spécialisée dans le numérique qui est en train de croître, et son savoir se diffuse de plus en plus en dehors des relations salariées, à travers le hacking9, le modding10, l’économie marginale des applications, etc. Cependant, et pour en revenir à ces statistiques, il est très important d’avoir en tête que ce secteur va être dépassé, en nombre absolu, mais aussi bien souvent en terme de taux de croissance, par des emplois bien plus terre-à-terre, et beaucoup, beaucoup moins bien payés, comme le soin médical à domicile ou en résidence, la restauration, la vente au détail, etc., autant d’activités qui ne peuvent être réunies sous le terme de travail immatériel sans quelques contorsions intellectuelles. Plutôt qu’une nouvelle unification sous la bannière du travail immatériel, ce à quoi on assiste dans la sphère du travail semble bien plus relever d’une forme de dualisation, et elle se fait selon des divisions raciales et genrées tout à fait prévisibles. La question de savoir si, comment, quand et où cette dualité peut être surmontée dans des luttes politiques constitue donc un problème central de la recomposition du prolétariat.

Depuis 2011 et les soulèvement en Tunisie, il a beaucoup été question de ce qu’on a appelé – avec un soupçon de techno-déterminisme – les « révolutions Facebook ». Tu as eu l’opportunité d’enquêter directement en Ukraine, où les manifestations massives qui se sont déroulées entre 2013 et 2014 sur la place Maïdan sont d’abord parties des réseaux sociaux. Penses-tu que les technologies de l’information ont été une condition essentielle de la réussite d’une telle contestation ? Et plus généralement, quel impact peuvent-elles avoir sur la lutte des classes et les potentiels d’émancipation ?

On a dit tellement d’absurdités sur ces Révolutions Facebook que l’on en vient à se demander comment la prise de la Bastille ou celle du Palais d’Hiver ont pu avoir lieu sans l’aide de Mark Zuckerberg. Facebook, Twitter et YouTube n’ont certainement pas été la condition essentielle des récents soulèvements. Mais quand ils croisent la crise économique, la précarité et l’inégalité, les réseaux sociaux et les téléphones portables sont un élément de cet ensemble causal surdéterminé qui explique l’éclatement des occupations et émeutes de 2011-2014. Ces luttes montrent cependant que les technologies de l’information n’actualisent pas nécessairement le potentiel insurrectionnel de gauche que certains d’entre nous avaient anticipé : c’est une critique que je ferai aujourd’hui à mon Cyber-Marx11 de 1999. Si d’un côté l’utilisation des médias sociaux et des téléphones portables permet des mobilisations rapides et virales, l’organisation stratégique de ces révoltes très hétérogènes par les éléments anti-capitalistes a été complètement prise de vitesse. Ceci explique en partie le démarrage éclair et l’essoufflement rapide des assemblées et occupations comme Occupy Wall Street. Cela a également charrié des populismes sans contenu politique, alors hégémonisés par des forces réactionnaires qui en appelaient aux identités nationales et religieuses « par défaut » (comme les Frères Musulmans en Égypte, ou la droite ultra-nationaliste et néo-fasciste en Ukraine). Le succès des réseaux de l’alt-right dans les récentes élections américaines, et du recrutement et de la propagande djihadiste dans le monde virtuel, démontre bien la puissance des médias sociaux, et le fait qu’ils ne vont pas nécessairement dans le sens de l’émancipation. Étant donné que le capital cybernétique en a fait une partie intégrante de la vie quotidienne, ils continueront à intervenir dans l’organisation à venir de la gauche : le combat pour la maîtrise des mèmes12 est crucial. Cela dit, comme les militants ont retenu la leçon des soulèvements récents, cette ré-appropriation des technologies numériques se fera certainement de manière plus prudente et sélective qu’au cours de la décennie qui a précédé. Depuis Snowden, il y a désormais une conscience plus aiguë des dangers d’un état ubiquitaire et de la surveillance mise en œuvre par les multinationales, mais aussi de l’importance du chiffrage, de l’anonymisation et de l’organisation offline dans certains contextes, ainsi que des campagnes massives sur ce thème. Nous allons peut-être aussi inventer de nouvelles approches organisationnelles qui, de diverses façons, joueront à la fois des formes lentes et rapides, et de l’horizontalité comme de la verticalité. Si faire revivre le parti d’avant-garde ne me semble ni réaliste ni même souhaitable, en revanche, la création d’une sorte de nouvelle machine de lutte en réseau qui combine des orientations stratégiques communes avec le maximum d’autonomie pour ses composantes – appelons cela un parti distribué –, voilà qui serait envisageable.

Tu es actuellement en train d’écrire un livre sur la cyber-guerre, en réponse à l’attention particulière que les États ont récemment portée au renforcement de la sécurité numérique ainsi qu’au développement de systèmes offensifs et de la surveillance de masse. Est-ce que l’on doit s’attendre à ce que bientôt les luttes sociales soient menées sur Internet, et de manière plus significative que sous la forme du clic-activisme inoffensif ou du partage de vidéo ?

Il n’y a rien à attendre : c’est déjà le cas. Pour ne donner qu’un seul exemple, des membres du collectif de hackers Anonymous purgent à l’heure actuelle des peines de prison – certains ont été récemment relaxés – pour leur participation à l’attaque de sites web d’entreprises qui ont collaboré avec le gouvernement américain en vue d’étouffer Wikileaks. Cependant, il reste à voir dans quelles directions et avec quelle intensité ces actions seront menées, à quel point elles seront vulnérables aux contre-mesures prises par les entreprises et les États (dont l’infiltration de ces mêmes groupes), jusqu’où elles resteront indépendantes des cyber-guerres entre états, et si elles ne seront pas entravées par les problèmes épistémologiques d’attribution inhérents aux hacks. Ce sont quelques-unes des questions que ma collègue Svitlana Matviyenko et moi nous sommes posées, dans une optique à la fois marxiste et lacanienne, en vue d’un livre à paraître, intitulé pour le moment Cyberwar and Revolution. Cela n’aurait aucun sens d’imaginer la virtualisation complète des luttes sociales – je n’affirme cela qu’en mon nom propre pour l’instant. Même dans la phase actuelle du capitalisme avec ses machines intelligentes, les armes que représentent la grève et l’occupation du lieu de travail ont certes perdu de leur force mais ne sont pas pour autant devenues obsolètes. Au même moment, comme nous l’avons vu en 2011, les prolétaires qui sont exclus ou vaincus par le capital sur le lieu de production – y compris cette classe moyenne menacée de déclassement – ont tendance à porter les luttes dans la rues et sur les places, où ils se confrontent directement à l’appareil d’État : c’est ce qu’a bien décrit Joshua Clover dans son récent Riot. Strike. Riot : The New Era of Uprisings. Par ailleurs, nous devrions aussi porter attention à l’explosion du cyber-crime, lequel coûte des milliards aux grandes entreprises. C’est vrai qu’il est surtout d’ordre criminel et non politique ; mais je me demande si à un certain point on ne va pas voir émerger une forme de hack militant, capable de neutraliser des réseaux financiers et institutionnels en soutien aux soulèvements – une sorte de version « sombre » de la thèse du « rayonnement » émancipateur du travail immatériel. Si c’était le cas, l’avenir de la lutte des cyber-prolétaires pourrait passer par l’articulation des grèves, des émeutes, et du hack dans un contexte de mouvements de masse inspiré par le mème d’un communisme renouvelé.

Entretien réalisé et traduit de l’anglais par Marc-Antoine Pencolé

  1. La sociologue est l’auteure de The making of a Cybertariat: Virtual Work in a Real world, New York, Monthly Review Press, 2003. []
  2. Nick Dyer-Witheford, Cyber-Proletariat : Global Labour in the Digital Vortex, Toronto, Pluto Press, 2015. []
  3. Ryan Avant, The Wealth of Humans :Work and its Absence in the Twenty-First Century, Penguin Books, 2017. []
  4. Accessible sur https://endnotes.org.uk []
  5. À savoir, en dépit de leurs différences : Negri et Hardt, Yann Moulier-Boutang, et le groupe de Carlo Vercellone, Andrea Fumagalli, Bernard Paulré et Patrick Dieuaide, parmi d’autres.[]
  6. Le coltan (pour colombite-tantalite) est un minerai rare essentiel à la fabrication des téléphones et ordinateurs portables, notamment, et dont l’exploitation indirecte par des multinationales allemandes, belges, américaines, est depuis 15 ans une des principales raison de l’approfondissement des conflits meurtiers dans la région africaine des Grands Lacs. []
  7. Les technologies « libres » ou «open-source », d’abord des logiciels mais potentiellement toutes sortes d’inventions matérielles, ne sont pas encloses par des régimes de propriété intellectuelle : une technologie est libre si son code ou son plan est librement accessible, exécutable, modifiable et partageable (y compris sous des formes modifiées). Le niveau atteint par le système d’exploitation Linux, exemple privilégié des promoteurs du Libre, est tel qu’il équipe aujourd’hui la majorité des serveurs du monde, tout en ayant été développé de manière ouverte et en partie bénévole. L’open-source désigne au sens strict une telle production technologique ouverte, mais réduite à un simple modèle économique débarrassé des valeurs d’horizontalité et de partage propres au mouvement du Libre. Pour simplifier, on ne distingue pas toujours les deux. []
  8. Les différentes licences Creative Commonssont des outils juridiques permettant aux producteurs d’oeuvres intellectuelles d’ancrer, selon les modalités de leur choix, leurs productions dans le domaine du Libre : par exemple en permettant les modifications de l’oeuvre mais en interdisant toute commercialisation des dérivés. []
  9. Littéralement : le bidouillage. Il s’agit de toutes les pratiques de détournement et de réappropriation de la technique. []
  10. Activité de création de mods, modifications apportées à un jeu vidéo par la communauté de ses utilisateurs. []
  11. Nick Dyer-Witheford, Cyber-Marx : Cycles and Circuits of Struggle in High Technology Capitalism, University of Illinois Press, 1999. []
  12. Le terme « mème » désigne un élément culturel massivement repris sur les réseaux. []

 

 

 

 

 

 

 

 

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