En 1990, l’historien Mike Davis pouvait s’autoriser du film Blade Runner pour déceler l’épure des transformations très réelles affectant le tissu urbain de Los Angeles, la ligne de cauchemar dont se tramait alors la dynamique de la ville. Il inventait ainsi une manière de faire de la métaphore du « scénario », dont s’alimente l’ordinaire de la prévision journalistique, une application littérale et saisissante, en mobilisant les ressources de la fiction pour mettre en ordre les processus économiques, les affrontements sociaux, les dispositifs sécuritaires d’un univers capitaliste puisant sa violence de courir derrière sa propre fantasmagorie. Presque vingt ans après la parution de City of Quartz, ouvrage qui trouva d’autant plus d’écho que les émeutes de 1992 venaient en confirmer le diagnostic, Paradis infernaux démultiplie ce geste en étudiant, l’une après l’autre, « les villes hallucinées du néo-capitalisme » : c’est qu’entretemps l’utopie d’espaces voués à la consommation, à la propriété et au contrôle s’est elle-même diffractée en autant d’éclats de quartz, autant d’« itérations de Los Angeles (…) dans le désert d’Iran, les collines de Kaboul ou les banlieues encloses et sécurisées du Caire, de Johannesburg et de Pékin ». Lire la suite…
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