Le syndicalisme paye, à la longue
Syndicaliste ? Pas de chocolats ! Jean-Claude Bauduret, ingénieur retraité de l’entreprise Nestlé, ex-responsable CGT, n’a pas reçu la boîte de douceurs que la multinationale envoie habituellement à ses anciens salariés. Une petite mesquinerie, sans doute, de la part de la société, qui n’a visiblement pas digéré sa condamnation record – 600 000 euros – pour discrimination syndicale.
Dans un arrêt du 13 janvier 2009, communiqué il y a peu àLibération, la Cour de cassation a ainsi confirmé la décision d’appel allouant la plus forte somme jamais obtenue par un salarié en France pour ce type de discrimination. Une décision qui «va faire réfléchir plus d’un DRH», se réjouit François Clerc, permanent à la CGT, à l’origine des premières procédures contre les discriminations syndicales en France.
Ingénieur chimiste, Jean-Claude Bauduret est entré chez Nestlé en 1967, au sein du laboratoire de Courbevoie. Trois ans plus tard, il présente une liste CGT aux élections du personnel. Le premier mandat d’une longue liste de responsabilités syndicales qu’il occupera jusqu’à sa retraite, en 2003. «A l’époque, nous avons vite compris que nous n’étions pas très appréciés. Tous les syndicalistes étaient surveillés en permanence, parfois jusqu’aux toilettes, se souvient Jean-Claude Bauduret. Il n’y a jamais eu de violation patente du droit syndical, mais la direction était toujours sur le fil du rasoir.» En 1986, changement de ton. Son responsable lui propose une promotion, à condition «d’être disponible à 100 %». Sous-entendu, en échange de l’abandon de ses mandats. L’intéressé promet d’être «plus disponible», mais sans renoncer à son engagement. Refus de la direction, en raison, explique-t-elle dans une lettre, de «défaillances essentiellement dues au peu de temps que vous avez dû consacrer à votre fonction, étant par ailleurs très pris par toutes vos activités extra-laboratoire». Jean-Claude Bauduret affirme aussi avoir été tenu à l’écart, à partir de 2002, des réunions d’encadrement. Mais ce qui va emporter la décision des juges, c’est surtout la méthode développée par le syndicaliste François Clerc pour démontrer et évaluer l’ampleur d’une discrimination syndicale. Une technique qui repose sur la comparaison de carrière entre la victime et ses collègues embauchés à la même période et dotés de qualifications identiques.
Pour Bauduret, la reconstitution est simple : il n’a pas changé d’indice pendant trente ans. «Dès 1973, sa vie professionnelle montre un “carriérogramme” plat, explique Clerc. A l’inverse, ses collègues évoluent, jusqu’à gagner 100 points d’indice de plus que lui en fin de carrière.» Pour calculer le manque à gagner, reste à constater l’écart de rémunération avec une évolution moyenne de carrière. Résultat : les prud’hommes de Meaux condamnent Nestlé, le 22 avril 2005, à lui verser 465 750 euros de dommages et intérêts. L’entreprise fait appel. Erreur car, le 27 avril 2007, la cour d’appel de Paris, confirmée par la cassation de janvier 2009, décide d’intégrer au préjudice les droits à la retraite, soit 119 280 euros en plus, auxquels s’ajoutent 23 000 d’intérêts de retard. La note totale grimpe ainsi à 608 000 euros.
Chez Nestlé, on affirme qu’«il s’agit d’un cas isolé». Mais, pour l’Union des ingénieurs et cadres CGT (Ugict), cette décision devrait surtout permettre de rendre «moins dissuasif le syndicalisme chez les cadres, dont le plafonnement de carrière constitue le principal frein».
source Libération.
Dans l’administration que je connais – je ne saurais généraliser, mais… -, le principe veut que les permanents syndicaux, rémunérés par l’administration, ont la garantie d’avancements et promotions égales à la moyenne de leurs catégories. Dans la réalité, on constate que certains, surtout les chefs syndicaux, font de meilleures carrières, y compris quand ils sont élus du personnel qu’ils sont censés défendre.
Aujourd’hui, le syndicalisme – en tant que permanent – est d’autant moins “dissuasif chez les cadres”, qu’il est d’abord un moyen d’échapper aux tracas du management quotidien, c’est-à-dire à la morale généralisée du harcèlement professionnel, dans le contexte des concentrations des services, qui ont généré une mise en concurrence effrénée chez les cadres.
Résultat : une tendance à aller se planquer au syndicat, et, pour les permanents, une préférence d’y dérouler des décennies durant toute sa carrière, de préférence à affronter soi-même la réalité des conditions de travail.
tout à fait d’accord, dans mon secteur il en est ainsi également,jusqu’a mon patron à qui je soulignais une injustice flagrante qui me conseille de me syndiquer.Ce n’était pas du cynisme mais un conseil d’ami.