Turquie : Les femmes résistent aussi !
Témoignage de la révolte populaire massive en Turquie
Quelque chose d’incroyable s’est passé en Turquie cette nuit. Tout a commencé avec une petite manifestation dans le parc Gezi contre son projet de démolition afin de construire un centre commercial à sa place. Ce parc se trouve dans le centre du quartier historique d’Istanbul, sur la place Taksim.
Cette place est aussi un symbole du mouvement ouvrier turc et, chaque année, au Premier mai, des confrontations entre la police et les manifestants se déroulent sur cette place. C’est un endroit important que nous voulons récupérer alors que les manifestations sont interdites dans ce parc. Défendre celui-ci est un enjeu considérable car nous ne pouvons pas accepter qu’il soit transformé en centre commercial. En outre, ce parc compte de magnifiques arbres très anciens, et c’est l’un des rares lieux verts de la ville.
Occupy Gezi
Tout a commencé donc avec un petit groupe de jeunes écologistes qui défendaient ces arbres. Ce rassemblement s’est maintenu et n’a cessé de grandir depuis le lundi 27 mai. La police a attaqué le groupe et les a repoussés. Vendredi matin, la police a mené une attaque très violente. Des personnes qui n’étaient pas dans la manifestation se sont jointes aux manifestants pour les soutenir.
Pendant toute la journée, la situation s’est aggravée, la répression policière s’est faite plus brutale encore ; gaz aux poivres, lacrymogènes, tirs avec des munitions en plastique dur, jets d’eau à très haute pression et des centaines de policiers. Nous avons eu très peur pendant toute la journée qu’il y ait de nombreux morts. Et c’est arrivé. Deux personnes sont mortes.
Cela a constitué le point de non-retour pour le peuple d’Istanbul. Grâce au fait que c’était vendredi en fin de journée, beaucoup de gens ont alors rejoint la place Taksim après leur travail. D’abord 10.000, puis 20.000 personnes, et leur nombre a augmenté, encore et encore. La police, encore très sûre de ses propres forces, a continué à attaquer brutalement la foule. C’était réellement un état de guerre. Pas loin de 250.000 personnes se sont alors rassemblées à Istanbul. Mais nous continuions à avoir peur que la police frappe encore plus fort, n’utilise de véritables munitions et multiplie le nombre de morts.
Et là, quelque chose de magique s’est produit. Des gens qui étaient conscients de ce danger ont commencé à défendre le peuple qui se battait à Taksim. Pendant ce temps, des manifestants de la place Taksim ont envahi d’autres rues. Dans le voisinage, des gens ont fait clignoter les lumières, puis en parlant entre eux, puis en sortant de chez eux. Tout s’est passé en quelques heures seulement… et
maintenant, les manifestations ont gagné toute la Turquie.
Le gouvernement AKP est remis en question
On dirait que personne ne dort cette nuit. Plus d’un million de personnes sont maintenant dans les rues d’Istanbul. Tout est bondé et les manifestants marchent à nouveau sur la place Taksim. A Ankara, le peuple marche vers le Parlement et dans les autres villes ils se dirigent sur les bâtiments de l’AKP (parti au pouvoir).
La police attaque de plus en plus lourdement et il y a une escalade dans l’usage de la force. Les gens sont d’abord arrivés en colère, mais deviennent de plus en plus confiant. Ils reculent un moment devant les gaz chimiques, mais continuent ensuite à marcher.
Le gouvernement de l’AKP est maintenant directement remis en cause. C’est la première fois que quelque chose de ce genre se passe en Turquie sous ce gouvernement. Encore hier soir, cela ressemblait à une sorte de mouvement « Occupy », mais maintenant, c’est une protestation populaire massive qui manifeste contre le gouvernement pour demander sa démission.
Taksim-Tahrir
Il faudra analyser plus avant la nature de mouvement, mais pour l’instant il semble évident que c’est un soulèvement pour la démocratie… Qui sait, peut-être que Taksim sera la prochaine Tahrir dans les jours qui viennent. Les revendications vont se construire à l’intérieur de mouvement.
Il y a le risque que le mouvement soit récupéré par la gauche réformiste nationaliste. Cet enjeu dépendra aussi des villes kurdes. Si elles se joignent au mouvement, ce qu’elles semblent commencer à faire, alors nous pourrions combiner ce soulèvement pour la démocratie avec un véritable processus de paix en Turquie. Peut-être que la paix ne pouvait arriver qu’avec un soulèvement de ce genre, et cela en dépit du fait que l’ouest du pays est dominé par des tendances nationalistes pour le moment.
Si on m’avait demandé hier matin si je pensais que quelque chose de cette ampleur allait se passer, j’aurais certainement répondu non. C’était magnifique de voir ce peuple prendre de plus en plus de confiance dans son pouvoir et dans son combat pendant qu’il résistait collectivement.
Les habitants des quartiers sont très solidaires avec les manifestants. Tous les commerçants essayent d’aider et de pourvoir le nécessaire pour les soins.
Il paraît qu’il y a plus de 150 policiers à Istanbul qui ont arrêté de gazer les gens et se sont joints aux manifestants et certains ont déclarés qu’ils démissionnaient de la police. Un chauffeur de bus qui était au volant d’un bus municipal a conduit son véhicule contre un blindé de la police pour le bloquer et créer une barrière entre la police et les manifestants.
Il y a tant d’espoir dans ce qui est en train de se passer !
Istanbul, 1er juin 2013
Les femmes résistent aussi !
Les femmes se rebellent ! Et vous ne nous arrêterez pas avec des gaz, des tanks et des matraques ! Les femmes résistent avec les autres groupes opprimés depuis deux jours. Travailleurs, Kurdes, LGBT, Alaouites, Musulmans, non-musulmans, athées et tous les opprimé(e)s, exploité(e)s, insulté(e)s et blâmé(e)s comme des « traîtres » sont en train de se rebeller en Turquie. La résistance qui a commencé dans le parc Gezi de la Place Taksim à Istanbul est en train de déborder sur de nombreuses autres villes.
Nous, les femmes, sommes sur le front de cette résistance. Nous rejoignons la rébellion parce que :
Le Premier ministre Tayyip Erdogan et sa clique ont cherché à promouvoir le lynchage des femmes par les hommes ; Ils ont tolérés l’assassinat de femmes par des hommes avec leur loi sur les « provocations injustifiées » ; Ils n’ont pas ouverts de lieux d’accueil pour permettre aux femmes d’échapper à la violence domestique des hommes ; Ils ont stigmatisés les femmes violées et harcelées en les traitant d’immorales et de non-chastes ; Ils ont mis la pression sur les femmes violées pour qu’elles accouchent des enfants issus de ces viols ; Ils ont qualifiés l’avortement de meurtre ; Ils n’ont pas ouvert de crèches mais ont imposés aux femmes de donner naissance à au moins trois enfants ; Ils nous ont condamnés à la pauvreté, au travail précaire, aux emplois incertains et à vivre dans des conditions proches de l’esclavage ; Ils ont définis le travail domestique comme le devoir des femmes ; Ils se sont acharnés sur les femmes et les familles qui vivaient de manière indépendante des hommes avec leurs lois.
Mais nous, femmes, nous résistons !
Parce que le Premier Ministre Tayyip Erdogan et sa clique nous ont condamnés à subir l’oppression et l’exploitation des hommes, nous appelons toutes les femmes à descendre dans la rue et à se rebeller pour notre libération !
Socialist Feminist Collective
Traduction française pour Avanti4.be : Sylvia Nerina
à partir d’une traduction automatique du grec, mais cette déclaration mérite d’être diffusée
La déclaration suivante par un participant dans les événements montre la composition complexe des participants et en particulier la force négative de l’élément nationaliste:
les choses sont assez fou ici, à Istanbul. nous avons respiré du gaz lacrymogène pendant 3 jours maintenant, la police a été coulée tonnes de gaz et d’eau avec des canons ou des pistolets à gaz tir. les gens ont été touché à la jambe, le dos, la tête. mais aussi les foules à Izmir, Ankara et dans plusieurs autres villes sont aussi des affrontements avec la police. ils ont coupé toutes les lumières de la rue à Taksim hier soir. des centaines de personnes sont traitées dans les hôpitaux. mais les gens ordinaires ouvrent leurs maisons, bureaux, restaurants pour guérir les blessés, mais les policiers sont également poursuivaient des manifestants dans les bâtiments à gaz et les ont battus. à Ankara, tweets et une chaîne de télévision très courageux disent qu’ils ont utilisé des balles en plastique. les blessures sont graves. nous devons continuer sur la communication (principalement par le biais des médias sociaux) pour savoir ce qui se passe là-bas.
à Istanbul, nous avons repris la place Taksim, aujourd’hui, après une folle journée d’être pulvérisé. la police se retira, mais il ya une accalmie tendue, depuis manifestants sont encore pulvérisés dans d’autres quartiers d’Istanbul. le Premier ministre a déclaré qu’il ne reculera pas sur ses plans pour la transformation de tout sous le soleil dans les centres commerciaux et des résidences haut de gamme. il semble y avoir une tension entre le président et le PM, puisque le premier est de la secte Gulen (= Fethullah Gülen, le groupe religieux avec une façade moderne qui contrôle une partie des médias et a des écoles partout, y compris aux États-Unis). Le président a appelé à la violence policière calme et critiqué, mais Erdogan doit se retourner vraiment psychotique, car il n’arrête pas de dire que nous sommes un groupe de “provocateurs” et en utilisant un discours démagogique nauseatingly. les manifestants, dit-il, préparent le terrain pour un nouveau coup d’Etat contre son gouvernement très «civil-démocratique»!
En effet, le nombre de drapeaux turcs dans le parc gezi ce soir était épouvantablement élevé. il s’agit d’une coalition curieux. les freaks kémaliste-nationalistes d’hier occupent maintenant le même parc que les Kurdes, la gauche, les anarchistes et les groupes LGBTT. Je ne suis pas trop sûr de cela, mais je pense que les fans de football ont contribué à la victoire sur le parc gezi aujourd’hui. nous avons 3 équipes Istanbul, les supporters qui étaient hors de combat la police comme des lions. quand ils sont dans leur stade, je les appelle les hooligans, mais je dois admettre qu’ils savent se battre et n’ont pas peur. comment tout cela va se combiner en une déclaration significative contre le gouvernement est encore incertain.
Donc, les choses sont très ambiguë et, en tout cas, les combats n’ont pas cessé ailleurs que dans Taksim. ce n’est pas une manifestation pour sauver des arbres, le gouvernement est allé trop loin. parc gezi était la dernière paille, mais nous avons dû supporter plusieurs autres choses dans les derniers mois: arrestations de Kurdes et de militants sur des accusations absurdes, les changements dans les programmes scolaires imposent des cours de religion sur les enfants, les tentatives visant à interdire l’avortement, le bombardement de la langue kurde civils passage de la frontière turco-irakienne (prenant pour la guérilla), le bras-de-guerre avec la Syrie, la mystérieuse bombe qui a tué 50 à Reyhanli à la frontière syrienne, tente de limiter la consommation d’alcool, les projets géants de changer l’ensemble visage d’Istanbul, en nommant le troisième pont Bosphore après un sultan ottoman qui presque anéanti la population Alevite (la branche non-sunnite de l’islam en Turquie), et enfin le projet de parc gezi …
Pendant ce temps, les Kurdes se sont réunis 500 intellectuels turcs, journalistes, dirigeants de la société civile à Ankara week-end dernier à élaborer un plan de paix alternatif. j’ai assisté ce et j’ai été tellement impressionné par la façon dont les gens ont commencé à prendre le contrôle de leur vie, a commencé awoving leurs crimes vis-à-vis de l’autre (les Kurdes ont participé au génocide arménien, par exemple, et des groupes de LGBTT sont vilipendés par la gauche marxiste) , et a attiré des demandes concrètes pour imposer leur volonté à la vision réductrice du gouvernement de la paix.
En bref: je pense que c’est le début de la fin d’une époque! nous devons faire tomber ce gouvernement, mais ce qui va venir à sa place est la question la plus importante aujourd’hui.
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http://www.rfi.fr/europe/20130603-t…
À Istanbul, des milliers de manifestants ont à nouveau envahi l’emblématique place, ce lundi 3 juin. Dans la soirée, le climat était toujours tendu et confu, sur la place Taksim comme dans les autres quartiers d’Istanbul en proie à des violences depuis plusieurs jours.
Du gaz lacrymogène lâché depuis des hélicoptères au-dessus de la foule
Les forces de l’ordre sont intervenues vers 18h30 TU, ce lundi soir, sur la place Taksim. La police a mené une opération par la voie des airs, avec des hélicoptères qui ont lancé du gaz sur des dizaines de milliers de manifestants pacifiques rassemblés sur cette place. Les informations sur la situation dans les différents quartiers d’Istanbul sont confuses.
Une chose est sûre, à 20h TU, les manifestants étaient de retour sur la place Taksim, où la situation semblait plutôt calme. En revanche, dans des quartiers proches, la situation était très différente. À Gumussuyu, quartier situé à l’entrée de la place Taksim, les forces de l’ordre ont lancé massivement des gaz lacrymogènes sur les manifestants qui tentaient de leur barrer l’accès à la place.
Situation très tendue dans différents quartiers d’Istanbul
À Besiktas, quartier en proie à des affrontements très violents ces derniers jours, la situation était également très tendue, ce lundi soir. Les manifestants semblent en tous cas prêts à ne rien lâcher face à la répression policière.
La grève de soutien aux manifestants turcs a commencé modestement mais devrait prendre beaucoup plus d’ampleur mercredi, selon le syndicat qui l’organise. La Confédération des syndicats du secteur public (KESK) a appelé à la grève pour dénoncer la “terreur exercée par l’Etat contre des manifestations totalement pacifiques”.
“Le mouvement prend de l’ampleur, nous apprenons que des écoles ferment parce que les enseignants ont cessé le travail mais il est encore trop tôt et trop difficile de faire le point maintenant”, a déclaré le porte-parole de la KESK, Baki Cinar.
La principale centrale turque, la Confédération syndicale des ouvriers révolutionnaires (DISK), a appelé à la grève pour mercredi.
publié le 04/06/2013 à 11h13, mis à jour à 17h51
l’Express