Un entretien avec Sylvia Federici
Entretien avec Federici publié sur le site https://www.woz.ch/-8cd5 et traduit par les camarades des éditions Entremonde
Pour une critique de son best-seller traduit et publié par les éditions Senonevero et Entremonde, lire “Au sujet de « Caliban et la sorcière » ” http://dndf.org/?p=13748
« Ils nous prennent vraiment pour des connes »
La philosophe féministe Silvia Federici milite depuis des décennies pour que le travail domestique soit enfin rémunéré. Mais dans ce domaine, même Karl Marx avait ses angles morts.
WOZ : Silvia Federici, vous êtes une féministe marxiste. Qu’avez-vous hérité de Marx ?
Silvia Federici : Je ne me qualifie pas comme une féministe marxiste, même si d’autres le font. Je me sépare de Karl Marx sur des points fondamentaux, bien que son analyse ait fortement influencé mon travail. Nous avons besoin de Marx pour comprendre notre monde actuel et la dynamique de la perpétuation du capitalisme. Marx a apporté une contribution majeure à la théorie féministe – par exemple, avec sa thèse centrale qu’il n’y a pas de “nature humaine”, mais qu’à travers certaines luttes et en fonction des conditions historiques, les gens se font ce qu’ils sont. Cela nous a aidées à briser l’image de l’éternelle féminité et de sa conception essentialiste.
Et quelles sont vos différences fondamentales avec Marx ?
Nous, dans la campagne Un salaire pour le travail ménager, avons été extrêmement critiques à l’égard de Marx et de la tradition politique qui l’a suivi dans les années 1970, pour laquelle le travail industriel contribue le plus à l’accumulation capitaliste. Il fait de l’ouvrier industriel un sujet révolutionnaire. Que Marx analyse le capitalisme comme un système d’exploitation est central – parce que « exploitation » signifie que le travail non rémunéré est extrait et accumulé. Nous situant du point de vue de la cuisine, cependant, nous avons pu observer que Marx ignorait une immense partie du travail qui est fondamentale à la production du capital, à savoir toute la reproduction du travail : manger, dormir, la proximité physique, produire les travailleurs de la prochaine génération. Marx n’a pas vu que cet autre travail était déjà réglementé par l’État à l’époque. Lire la suite…

























Les derniers commentaires