Il Lato Cattivo : “Lettre sur l’antisionisme”
lLa version intégrale traduite du texte des camarades de “Il lato cattivo”
Lettre sur l’antisionisme
R.F.
Chers camarades,
Permettez-moi de vous donner mon opinion par rapport aux événements actuels du conflit israélo-palestinien, et pardonnez-moi si je suis contraint de m’étendre sur la question. Le soi-disant antisionisme – avec l’alibi d’être «dans le concret» – transfigure de plus en plus les événements en cours dans un sens métaphysique. D’un côté, c’est normal: c’est propre à l’être de l’«anti», que d’avoir un ennemi absolu, auprès duquel les autres ennemis deviennent des ennemis relatifs. C’est au tour d’Israël d’en être la cible et, à mon avis, il est nécessaire de s’en démarquer. Ce n’est pas l’attaque de synagogues lors de la manifestation du samedi 19 juillet à Paris qui déterminer cette nécessité, même si dans une certaine mesure elle la renforce. Il ne faut pas exagérer les débordements qui se sont vérifiés; mais il est vrai qu’ils sont symptomatiques de quelque chose – d’une dérive – dont la possibilité est consubstantielle à la définition même de l’antisionisme. La confusion entre Juifs, sionisme et Israël, la fluidité avec laquelle ces différents termes deviennent interchangeables, si elle n’apparaît pas dans les discours publics et dans les slogans programmatiques, est par ailleurs assez évidente dans les bavardes informels ici et là dans les manifestations. Il ne s’agit en aucun cas d’opérer une défense de l’État d’Israël – ce qui serait simplement absurde –, mais simplement de repositionner la question israélo-palestinienne dans l’histoire, d’autant que la transformation de l’ennemi en ennemi absolu s’alimente du mythe et le reproduit. Il s’agit aussi d’échapper à deux positions également insoutenables pour un communiste: d’un côté, la «solidarité à la résistance palestinienne», de l’autre, l’internationalisme prolétarien comme principe abstrait. Sur ce dernier point, je veux dire d’abord que ce qui échappe aux antisionistes, c’est que s’il y a des marges de pression sur les mouvements du gouvernement israelien à l’heure actuelle, elle sont précisement du coté de ceux qu’en Israel y vivent. Les manifestations qui se sont déroulées en Israël contre les massacres à Gaza sont encourageantes, et forcément plus significatives que celles qui ont eu lieu ailleurs; mais elles restent de toute façon peu de choses, surtout si nous supposons qu’elles relèvent plus d’un élan d’indignation morale ou d’une une pétition de principe que d’autre chose, ainsi qu’il advient généralement pour les mouvements pacifistes actuels. Elles sont le terrain le plus fertile pour la petite bourgeoisie gauchisante et acculturée, avec tous ses bons sentiments (certains se rappellent peut-être les grandes manifestations en Italie contre la guerre en Irak et l’Afghanistan, les drapeaux de la paix pendus aux fenêtres… et comme tout ça s’est terminé). Concrètement, il faudrait une grève générale qui toucherait l’économie israélienne (ou au moins sa ménace) pour remettre le gouvernement israélien provisoirement à sa place. D’autre part, il n’est pas question de s’étonner si ça ne se vérifie pas. Il est vain de lancer appels à la lutte de classe et à la solidarité entre les exploités. La classe ouvrière israélienne et la palestinienne pourront difficilement s’unir dans une quelconque lutte commune, pour la simple raison qu’elles ne vivent pas dans les mêmes conditions. Ce n’est pas une question de «conscience de classe», mais une situation objective: on peut être les meilleurs camarades du monde, mais cela ne change rien si la situation objectivement te favorise. Je cite un passage du livre de Théorie Communiste sur le Moyen-Orient qui me semble particulièrement illustrer cette idée: Lire la suite…
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